2- Des compétences appartenant à
l'État.
Le transfert de compétences en tant que devoir de
l'État central se révèle être pour les nouvelles
collectivités territoriales décentralisées
béninoises un droit, entendu comme enjeu principal de la
décentralisation. Ceci entraîne de la part de l'État la
mise à disposition des collectivités locales, des moyens
matériels et humains nécessaires. L'absence de textes en la
matière est à la base des difficultés observées
aujourd'hui entre la Mairie de Cotonou et la Présidence de la
République. Une stipulation textuelle en la matière
réduirait les conflits entre l'État et les collectivités
territoriales.
Principe juridique corollaire de la reconnaissance de
compétence, la capacité juridique est ici entendue comme
l'aptitude que leur reconnaît la loi à pouvoir mettre en oeuvre
par elles-mêmes les compétences qui leurs sont dévolues.
Sur tout un autre registre on peut constater que le processus
de décentralisation qui implique le renoncement partiel de la part de
l'État de sa souveraineté nationale laquelle se trouve restreinte
à l'extérieur, veut qu'à l'intérieur certaines
compétences de droit public soient cédées à des
acteurs régionaux ou locaux. Les collectivités territoriales, il
faut le dire ont dès lors une parcelle de souveraineté qui leur
permet un rayonnement international; mais celle-ci leur offre des
compétences très limitées en matière de
coopération internationale puisqu'elles ne sont pas des sujets de droit
au plan du droit international public. Cette qualité appartenant
exclusivement aux États et aux organisations internationales. Il
résulte de ce qui précède que si la législation
reconnaît aux collectivités la compétence d'établir
des rapports de coopération, celles-ci doivent être
limitées dans leurs champs d'action. Ainsi, la réglementation
spécifique sur la coopération décentralisée devrait
se prononcer par exemple sur le fait que:
- Tout accord de partenariat qui empièterait sur les
prérogatives étatiques et qui mettrait en danger la
souveraineté de l'État est interdite.
- La commune ne doit, sous quelque prétexte que ce
soit, signer des conventions contraires à l'ordre public et la
sécurité publique locale ou nationale.
- La commune ne doit pas intervenir dans les domaines relevant
de la compétence exclusive de l'État comme la diplomatie
d'État, la défense nationale, la justice etc.
- La commune n'est pas autorisée à conclure ou
à être partie à un accord international ni à
conclure de convention avec un Etat, etc.
b- De la forme des accords, des modes de
coopération et domaines d'intervention en matière de
coopération
Elle concerne la forme que doit revêtir tout accord de
coopération afin de ne pas être invalide. Les contrats de
partenariat bilatéraux et multilatéraux dans le cadre de la
coopération décentralisée doivent-ils être conclu
sous forme de traité de convention ou sous formes de simple accord?
C'est là tout le sens de la nature des accords de coopération
décentralisée.
Nous savons que du point de vue du droit international public
l'État entre en coopération avec ses partenaires sous forme
de traité de convention, de protocole, etc. Mais la commune qui, du
point de vue du Droit International Public ne remplit pas les conditions
nécessaires pour être reconnue comme ayant des prérogatives
étatiques doit-elle, pour entrer en partenariat de coopération
décentralisée, emprunter l'une ou l'autre forme de conclusion
d'accords internationaux (convention, accord de partenariat, protocole, charte
de jumelage, etc.)
Du point de vue de la pratique internationale la convention
est la voie privilégiée de la coopération
décentralisée pour tous les types d'intervention. En France par
exemple, une circulaire des ministères de l'Intérieur, de
l'Aménagement du Territoire et des Affaires Etrangères en date du
26 mai 1994 le confirme.
En ce qui concerne les domaines de coopération, ce sont
ceux dans lesquelles les nouvelles communes pourraient entrer en
coopération avec leurs partenaires étrangers.
Il est vrai que la loi sur la décentralisation
précise les domaines de compétence des nouvelles communes, mais
en ce qui concerne leur compétence en matière de
coopération décentralisée, elle est muette. La liste des
domaines en la matière ne doit pas être exhaustive, elle peut
concerner par exemple à titre indicatif les domaines suivants:
· Education: (enseignement primaire et maternel,
enseignement secondaire général, technique et professionnel,
alphabétisation des adultes, construction, équipement et
réparations des établissements publics).
· Equipement et réparations des centres
publics de santé et de promotion sociale, des infrastructures publiques
culturelles, de jeunesse, de sport et de loisirs; l'aide sociale aux
déshérités et sinistrés, la conservation du
patrimoine culturel local.
· Economie locale: gestion des marchés et
abattoirs, aménagement de zones artisanales et de zones industrielles.
· Infrastructures, équipements et transports:
réalisation et entretien des routes, des infrastructures de
communication ; des pistes et ouvrages d'art (signalisation
routière) réalisation et entretien des réseaux
d'éclairage public.
· Environnement, hygiène et
salubrité
· Gestion administrative et budgétaire,
· Promotion de la sauvegarde des forêts
classées et zones cynégétiques, protection de
l'environnement, aménagement du territoire.
· Promotion culturelle Jumelage entre
départements ou coopération avec des institutions nationales ou
étrangères.
B.2- De la nécessité de combler le vide
juridique en matière de coopération
décentralisée
Si l'on s'en tient aux atouts très importants que
constitue la coopération décentralisée dans le cadre de la
décentralisation, atouts que l'on peut résumer en ces deux
termes: développement et démocratie, il
est inconcevable qu'aucune disposition législative ne
légifère sur la question. Ce vide juridique peut être une
brèche ouverte aux abus et aux fausses interprétations des droits
et obligations des communes en matière de coopération.
Il ne serait pas certes, sans doute, inutile de rappeler que,
de la nécessité de combler le vide juridique en la
matière, dépend en grande partie la légitimité des
collectivités territoriales à coopérer avec d'autres
communes étrangères en matière de coopération
décentralisée.
D'autre part l'absence ou l'insuffisance de cadre légal
n'est pas de nature à faciliter les choses et peut conduire à des
montages institutionnels et financiers peu solides et même à
d'incessants contentieux. C'est pourquoi il est souhaitable que le
développement des initiatives locales soit fait dans un cadre
légal rigide et bien défini. Ceci est le gage du succès de
l'action des communes béninoises en matière de coopération
décentralisée.
De tout ce qui précède, nous pouvons nous
permettre de faire la synthèse suivante: Reconnaître que tout
processus de développement est d'abord politique et ne peut-être
remplacé par la quête et l'afflux d'importants flux financiers,
c'est accepter de reconnaître que la reformulation du cadre politique
à la suite de laquelle les réformes politiques et sociales, les
recompositions institutionnelles sont faites, sont en Afrique
inéluctables et d'une impérative nécessité pour
aboutir à un développement durable. Certes aujourd'hui, dans le
contexte de démocratie multipartisane au Bénin, on ne saurait
parler du développement de manière globale des nouvelles
entités décentralisées et par ricochet de la population
sans envisager d'aborder la question de la cession des libertés de
gestion et de direction bref, de l'autonomie des entités infra
étatiques pour une gestion autocentrée et raisonnable.
Dans cette optique décentralisation et
coopération se révèlent être, du point de vue
institutionnel, un tandem fort utile pour insuffler la nouvelle donne de
développement, celle qui veut que le développement
intègre la dynamique participative.
Pour que la coopération (qui a priori est du domaine de
compétence de l'état) et la décentralisation (qui concerne
en premier lieu les collectivités locales) puissent se coordonner, ne
faudrait-il pas que les deux notions se trouvent un champ d'interaction qui
leur soit commun et propice?
La coopération décentralisée leur offre
le creuset idéal et fertile qui promeut la dynamique participative qui
est à la fois chère à la coopération au
développement et fondement des libertés locales conquises
à travers la décentralisation.
Les réformes décentralisatrices, il faut le
dire, recueillent un intérêt et un appui considérables de
la part des bailleurs dont : L'Union européenne, les agences de
coopération bilatérale et multilatérale, les ONG et les
collectivités territoriales. Ces réformes seront amenées
à modifier fondamentalement le cadre de la coopération au
développement surtout dans le domaine de la coopération
décentralisée. Qu'en est-il réellement du cas
béninois ?
Au Bénin, depuis la mise en place du processus de
démocratisation, le gouvernement béninois a lancé une
nouvelle génération de réformes administratives et
institutionnelles visant à établir de nouveaux cadres
d'autogestion au niveau local.
Ces réformes l'ont été, nous le savons
bien, sous l'effet duel de la pression des bailleurs de fonds (qui exigeaient
entre autre de la part de l'État des réformes institutionnelles)
et les pressions sociales de la population qui voudrait prendre une plus grande
part de responsabilisation dans le processus d'autonomisation des
entités territoriales à décentraliser. Dans la
foulée des réformes entreprises, la décentralisation des
pouvoirs politiques au profit des collectivités locales a
été faite. La législation décentralisatrice qui est
issue de ce processus et qui a consacré l'émergence des pouvoirs
publics locaux n'a pas contribué pour autant à donner aux
populations les moyens légaux d'asseoir une véritable politique
de coopération décentralisée.
Cependant, force est de constater que l'émergence des
pouvoirs publics locaux issus de ces recompositions institutionnelles,
modifiera les pratiques de coopération à la base, d'autant plus
que les collectivités territoriales, investis dès lors des
missions de pouvoirs publiques n'hésiteront pas à se substituer
à l'État dans ses prérogatives de garant des politiques de
coopération. La diplomatie, expression de la souveraineté
étatique est, de ce fait, restreinte à l'extérieur. En
s'appauvrissant sur ce plan, l'État favorise les pouvoirs publics
locaux qui verront accroître leur capacité à s'engager dans
des actions de coopération au développement.
Mais tout d'abord, pour une compréhension de la suite
logique de l'interactivité et de l'interdépendance entre
coopération décentralisée et décentralisation,
tentons de donner une définition de chacun des deux concepts.
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