Les droits des agriculteurs et le marché mondial des gènes( Télécharger le fichier original )par Monia BRAHAM epse YOUSSFI Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis II - DEA en Droit de l'Environnement 2006 |
§1-L'obligation juridique de la divulgation d'origine des RG et des ST:Les DPI sur le vivant végétal ne prennent pas en compte le fait que « les innovations protégées ne sont que la dernière étape de connaissances accumulées et d'inventions réalisées au cours de millénaires par des générations d'êtres humains dans le monde entier »459(*) ; Plus précisément dans le droit des brevets seule la dernière manipulation génétique est prise en compte, « le gène est alors protégé contre l'exploitation d'un tiers, sans disposition particulière pour les utilisateurs et sélectionneurs traditionnels qui devront payer pour bénéficier de la dernière amélioration apportée alors même que l'inventeur, lui aura bénéficié gratuitement de sélections successives et préalables qui lui ont permis l'accès à cette ressource»460(*). La reconnaissance des connaissances traditionnelles des agriculteurs, qualifiée parfois de technologie traditionnelle suppose une reconnaissance juridique de « l'innovation non-officielle » au même titre que « l'innovation officielle » pour laquelle des systèmes de protection issues de l'économie du marché ont été conçus, ces connaissances traditionnelles qui échappent aux structures juridiques de l'innovation technologique moderne désignés sous le non d'innovation non-officielle doivent être intégrées aux régimes juridiques des DPI. La divulgation d'origine des ST et des RG dans les demandes de brevets constituent une manière de concevoir cette intégration à travers l'articulation entre les différents systèmes d'innovation (officielle et non officielle) 461(*)(A). Cette articulation devrait être endogène au droit des brevets, elle exige en premier lieu l'institution de cette obligation au niveau du Droit international du brevet dans sa fonction d'harmonisation des législations nationales portant sur la matière ce qui permettra de revoir les conditions matérielles et formelles de l'octroi des brevets sur la matière vivante par l'intégration des ST associés aux RG dans le système du brevet (B). A- Articulation entre innovation officielle et innovation non-officielle: De prime abord, il faut distinguer la divulgation d'origine des ressources phyto-génétiques et des ST qui y sont associés de la divulgation de l'invention462(*) dans le cadre du brevet. Celle ci résulte dans le droit des brevets de la description de l'invention463(*)qui sert de support pour les revendications de l'invention464(*) et par conséquent, à la délimitation du monopole d'exploitation du breveté dans la mesure que « ce qui est décrit mais n'est pas revendiqué n'a pas droit à la protection »465(*). La divulgation d'origine des ST et des RG dans les demandes des brevets signifie pour les ressources phyto-génétiques non seulement la divulgation de l'origine géographique du matériel végétal mais également le droit applicable pour l'accès à ce matériel : La divulgation du pays d'origine des RG ou de la communauté détentrice de ST doit s'accompagner de « l'exigence relative au contexte juridique de l'accès aux RG ou aux ST »466(*). En effet, la problématique qui se pose par rapport à la divulgation d'origine des RG et ST est la suivante : « Est il possible que la délivrance ou la validité d'un brevet dans un pays puisse dépendre de la législation d'un autre pays qui fixe les conditions d'accès aux RG et aux ST ?467(*) » En effet, la licéité de l'accès aux RPG conditionne selon « cette approche de transparence » soit la délivrance soit la validité d'un brevet. Elle pourrait être appréciée par rapport aux cadres juridiques portant sur l'accès aux RG (II), ou faire l'objet de clauses contractuelles régissant l'accès à ces ressources (I). I- Référence aux clauses contractuelles d'accès aux RPG : Les clauses contractuelles d'accès aux RPG contenues dans un accord de transfert du matériel qu'il soit éventuellement conforme au régime multilatéral de la FAO ou de l'approche bilatérale de la CDB déterminent également les conditions de la répartition des avantages. L'autorité nationale compétente qui accorde l'accès aux RPG en question est appelée conformément à la CDB à la lumière des lignes directrices de Bonn à répartir les avantages au profit des communautés locales et autochtones. Le consentement préalable et en connaissance de cause inclut le consentement des communautés locales et autochtones en tant que partie prenante pour l'élaboration des conditions relatives à l'accès et à la répartition des avantages. Il pourrait éventuellement résulter de l'application du droit coutumier lorsque la coutume est reconnue par une législation nationale en tant que source de la propriété intellectuelle traditionnelle avec une mention expresse au niveau des clauses contractuelles portant sur l'accès. Des clauses portant sur la propriété intellectuelle peuvent être inclues dans les arrangements contractuels concernant l'accès aux ressources génétiques et le partage des avantages468(*). L'OMPI a proposé au comité intergouvernemental sur la propriété intellectuelle relative aux RG, aux ST et au folklore la tenue d'une base de données en ce qui concerne les pratiques et clauses contractuelles relatives à la propriété intellectuelle, à l'accès aux RG et au partage des avantages469(*). Les activités de bio-prospection menées dans le cadre d'une approche participative avec les populations agricoles qu'elles soient locales ou autochtones peuvent déboucher également sur des arrangements contractuels, ceux ci doivent avoir l'aval de l'autorité nationale compétente afin d'assurer la légitimité de l'accès aux RPG. Avec la création d'une obligation juridique de divulgation de l'origine des RG et des ST, la présentation des arrangements relatifs à l'accès et au partage des avantages issus de la biodiversité lors de la présentation d'une demande de brevet pourrait être exigé lors de la délivrance du titre lui-même, il permet d'accroître la sécurité juridique du demandeur qui sera à l'abri de toute demande d'annulation du brevet pour le non respect d'une telle obligation. Dans les travaux de l'OMPI, c'est cette question qui s'est posée avec acuité: S'agit il d'une condition qui relève du droit matériel et sanctionnée par l'annulation ou d'une simple procédure à aménager ? Par ailleurs, un office de brevet peut interpréter et évaluer la portée des obligations contractuelles relatives aux RG ou aux ST et leur conformité aux législations du pays d'origine dans le cadre de son examen de la demande de brevet lorsque l'invention telle que revendiquée est fondée dans des proportions suffisantes sur la RG ou le ST en question et que les obligations contractuelles couvrent l'acte de dépôt de demandes de brevet470(*), l'office des brevet compétent peut être amené dans l'examen des clauses contractuelles à évaluer leur conformité aux législations portant sur l'accès aux RG et aux ST.
II- Référence aux cadres juridiques portant sur l'accès aux RG et aux ST : L'encadrement juridique de l'accès aux RG conformément à la CDB vise conformément au principe de la souveraineté sur les ressources biologiques à assurer la régulation de l'accès à un patrimoine national et à déterminer le cadre légal de la répartition des avantages qui en découlent. La légalité de l'accès condition de la validité d'un brevet portant sur une matière vivante s'apprécie à travers le rattachement de la protection juridique de l'invention brevetable à un régime légal qui encadre les clauses contractuelles relatives à l'accès et à la répartition des avantages, comme c'est le cas des pays du Pacte Andin. En effet, la décision 391 de la communauté andine intitulée « régime commun concernant l'accès aux ressources génétiques » prévoit la conclusion d'un contrat d'accès entre l'Etat, représenté par l'autorité nationale compétente et le demandeur d'accès , il est prévu que « si le contrat concerne l'accès à des ressources génétiques ou à des activités et dérivés de celle-ci portant un élément intangible, il doit inclure une annexe qui en fait partie intégrante, prévoyant le partage juste et équitable des avantages découlant de l'utilisation de cet élément». Cette exigence pour les contrats d'accès fait naître un lien avec une exigence relative à la divulgation prévue dans la décision 486 intitulée « Régime commun concernant la propriété intellectuelle », il est prévu dans cette décision que la demande de brevet doit contenir « une copie du contrat d'accès, lorsque les produits ou procédés faisant l'objet d'une demande de brevet ont été obtenus ou mis au point à partir de ressources génétiques ou de produit dérivés de celles-ci qui ont pour origine un quelconque des pays membres ; Le cas échéant, une copie du document attestant la concession de licence ou l'autorisation d'utiliser les ST des communautés autochtones afro-américaines ou locales des pays membres, lorsque les produits ou les procédés dont la protection est demandée ont été obtenus ou mis au point à partir de ces connaissances qui ont pour origine un quelconque pays membre conformément aux dispositions de la décision 391 »471(*) La lecture du Pacte Andin permet de conclure à une obligation juridique qui impose le respect du cadre juridique d'accès aux RG et aux ST ou des clauses contractuelles y afférentes. Cette obligation résulte de l'exigence de la divulgation d'origine du matériel végétal en question dans les demandes de brevet. Cette exigence devrait être inscrite comme une obligation juridique au niveau du droit des brevets. Cet exemple démontre que les exigences de la divulgation dans les systèmes de brevet visent à établir la légalité ou la légitimité de l'accès aux RG et au ST trouvent leur fondement juridique non pas au niveau de la législation portant sur le brevet dans le pays où la protection est demandée mais dans le fonctionnement d'un régime national d'accès d'un autre pays, c'est pourquoi une obligation de divulgation inscrite au niveau d'une loi nationale risque de ne pas être efficace en l'absence d'une harmonisation internationale en la matière, par conséquent « il pourrait être nécessaire de définir les principes d'une harmonisation internationale de ces critères afin qu'un acte illicite commis dans un pays soit effectivement reconnu comme tel et sanctionné aussi dans les autres pays, faute d'une telle mobilisation à l'échelon international, « la piraterie biologique » ne serait sanctionnée que dans les pays qui sont victimes de l'acte illicite mais pas dans ceux ou les produits résultant de cet acte sont exploités commercialement »472(*). L'obligation juridique de la divulgation d'origine des RG et des ST au niveau des demandes de brevet devrait être instituée au niveau de la législation nationale, une option d'harmonisation à l'échelle internationale ouvre la voie à une articulation entre innovation moderne et innovation traditionnelle au niveau du droit du brevet. B - Une articulation endogène au Droit des brevets : Les propositions relatives à l'obligation juridique de divulgation de l'origine des RG et des ST visent la consécration de cette obligation au niveau du Droit du brevet, la complexité de cette question de point de vue du droit international privé essentiellement pour les demandes internationales de brevet nécessite une impulsion à l'échelle internationale afin d'assurer l'institution de cette obligation au niveau des législations nationales de manière concordante et harmonisée. L'harmonisation des législations nationales portant sur le brevet est une condition nécessaire pour l'institution d'une obligation juridique de divulgation de l'origine des RG et des ST qui est susceptible d'habiliter les offices de brevet pour l'examen de la légalité ou de la légitimité de l'accès aux RG (I). Cette obligation, une fois reconnue à l'échelle internationale permettra de revoir les conditions formelles ou substantielles de l'octroi des brevets pour les inventions pour lesquelles l'inventeur a accédé à des RG ou à des ST pour leur développement (II). I- l'harmonisation internationale : Avant même la création du comité intergouvernemental chargé de la question des ST, des ressources génétiques et du folklore en 2001473(*) au sein de l'OMPI, la question de la divulgation d'origine des ressources génétiques et des ST dans le cadre de la propriété industrielle a figuré dans l'ordre du jour de la réunion du comité permanent du droit du brevet qui a eu lieu à Genève du 6 au 14 septembre 1999. La délégation de la Colombie a proposé d'insérer un nouvel article dans le projet du traité sur le droit de brevet 474(*): «1- toute protection de la propriété industrielle doit garantir la protection du patrimoine biologique et génétique du pays. A ce titre la délivrance de brevets ou l'octroi d'enregistrements portant sur des éléments de ce patrimoine doit reposer sur le fait que ceux-ci ont été acquis légalement.
2- tout document doit indiquer le numéro d'enregistrement du contrat d'accès à des ressources génétiques et une copie de celui-ci, lorsque les produits ou procédés dont la protection est demandée ont été obtenus ou mis au point à partir de ressources génétiques ou de produits dérivés de celles-ci, dont n'importe des pays membres est pays d'origine »475(*). La proposition colombienne traduit les soucis des pays membres de l'OMPI par rapport à la création d'un mécanisme nouveau de transparence qui articule les obligations de ces pays en matière de propriété industrielle et ceux qui relèvent de l'accès et du partage des avantages issus de la biodiversité, une position qui ne sera pas approuvée par l'OMPI dans ses travaux les plus récents portant sur la question476(*). En dépit de sa position favorable aux DPI considérés comme des outils efficaces dans le cadre d'un régime international portant sur la répartition juste et équitable des avantages issus de la diversité biologique, l'OMPI qui défend la compatibilité du dispositif international existant en matière de brevet avec les exigences de la divulgation ne semble pas favorable aux propositions formulées pour la création d'un mécanisme nouveau inscrit dans le cadre des traités portant sur le brevet. En effet, l'OMPI défend cette position en se basant sur l'accord ADPIC « qui impose une exigence ferme en matière de divulgation, comme une condition particulière des systèmes des brevets »477(*), l'article 29 de l'AADPIC prévoit à cet effet :« Les membres exigeront du déposant d'une demande de brevet qu'il divulgue l'invention d'une manière suffisamment claire et complète pour qu'une personne puisse l'exécuter, et pourront exiger de lui qu'il indique la meilleure manière d'exécuter l'invention connue de l'inventeur à la date de dépôt ou, dans le cas ou la priorité est revendiquée à la date de priorité de la demande ». L'article 29 précise que le déposant d'une demande peut être amené à fournir des renseignements sur les demandes correspondantes de brevets déposés ou délivrés à l'étranger. Par ailleurs, l'article 41 exige que les procédures de révocation, d'annulation ou même d'opposition « soient loyales et équitables » Ces dispositions peuvent être interprétées dans le sens d'une compatibilité avec une exigence générale de divulgation de l'invention mais laisse entière la question de la divulgation d'origine des ressources génétiques et des ST qui vise à articuler deux systèmes juridiques différents : Celui du brevet d'une part et celui qui se rapporte à l'accès aux RG et aux ST et la répartition des avantages qui en sont issus d'autre part. Dans cette position, l'OMPI présente un argument de plus sur la compatibilité des différents traités qu'elle administre avec cette exigence générale de divulgation qu'elle juge suffisante pour assurer la régulation escomptée : « Les traités administrés par l'OMPI n'énoncent pas de normes exhaustives ou complètes pour les systèmes nationaux de brevets, mais prévoient plutôt un éventail de normes applicables aux exigences en matière de divulgation, du point de vue du droit matériel que des conditions quant à la forme ». A titre d'illustration, l'article 27 du PCT énonce qu'aucune législation nationale ne peut exiger que la demande internationale satisfasse, quant à la forme ou son contenu, à des exigences différentes de celles qui sont prévues dans le présent traité et dans le règlement d'exécution ou à des exigences supplémentaires » mais que cela ne saurait « empêcher aucune législation nationale d'exiger une fois que le traitement de la demande internationale a commencé au sein de l'office désigné la remise de document qui n'appartiennent pas à la demande internationale mais constituent la preuve d'allégations ou de déclarations figurant dans cette demande ». L'OMPI semble défavorable à une obligation spécifique de divulgation de l'origine des RG et des ST au niveau des demandes de brevet et à toute modification des traités administrés par elle dans le sens de l'intégration d'une telle obligation dans l'optique d'une harmonisation internationale qui pourrait éventuellement rejaillir sur les législations nationales portant sur le brevet. II- l'obligation de divulgation inscrite au niveau de la loi nationale : Vu les difficultés de consacrer juridiquement l'obligation de divulgation au niveau international, l'inscription d'une telle obligation au niveau des législations nationales ne semble envisageable que d'une manière assez limitée, l'OMPI sur la base d'un questionnaire adressé aux pays membres a conclu à la compatibilité des législations actuelles portant sur le brevet avec cette exigence. On peut se demander dés lors si cette compatibilité relève du droit matériel du brevet ou du droit procédural? Autrement dit si les ST par exemple constituent un élément de la technique (a) et comment une divulgation suffisante de l'invention au niveau de la description de l'invention peut aller dans le sens d'une obligation de divulgation de l'origine des RG et des ST (b)? a- ST élément de l'état de la technique : L'état de la technique est déterminent pour l'appréciation de la nouveauté et le caractère inventif d'une invention. Il est appréhendé différemment dans le cadre de ces deux conditions de la brevetabilité. S'agissant du critère de la nouveauté, l'état de la technique est défini de manière négative478(*) dans le sens de l'antériorité; Est nouvelle tout invention qui dépasse l'état de la technique: « l'état de la technique est constitué par tout ce qui a été rendu accessible au public par une description écrite ou orale ; un usage ou tout autre moyen avant le jour de dépôt de la demande »479(*). Partant de l'hypothèse que l'obligation de divulgation est rattachée au droit matériel du brevet, on ne peut affirmer l'éventualité d'annulation des brevets pour lesquels, une divulgation de l'origine géographique et du contexte juridique de l'acquisition du matériel végétal en question n'a pas été vérifiée, en l'absence d'une telle obligation l'annulation peut être demandée sur le fondement de la nouveauté. C'est le cas par exemple du neem480(*) : Plante utilisée en Inde comme pesticide qui a été brevetée pour le même usage. Une demande d'annulation a été acceptée eu égard à l'absence de critère de nouveauté sans qu'une obligation de divulgation ne soit instituée à l'échelle internationale. Seulement, on peut affirmer que l'obligation de divulgation, une fois instituée, contribuera à accroître la sécurité juridique481(*) au profit des demandeurs du matériel végétal, elle revêt certes un caractère préventif dans la mesure où elle évitera l'insurpation des ST dans l'innovation officielle dans le sens de la bio-piraterie. Certains auteurs avancent l'idée que « les DPI ne peuvent être qu'une nouvelle forme de protectionnisme au profit des firmes du Nord ainsi qu'un instrument de bio-piraterie : Les brevets sur le vivant permettent d'usurper le savoir indigène dans les innovations occidentales aux prix de transformation mineures »482(*). L'absence d'une obligation de divulgation de l'origine géographique et du contexte juridique de l'acquisition du matériel végétal ou du ST risque de proliférer le pillage des pays originaires de ces ressources et des communautés détentrices des ST et d'empêcher toute régulation sur la base des législations nationales portant sur l'accès et la répartition des avantages. On peut en conclure à la nécessité d'instituer cette obligation pour assurer une articulation entre le système de la protection de l'innovation officielle et le système de protection de l'innovation non-officielle satisfaisante de prime abord aux demandeurs ( sécurité juridique) et aux fournisseurs du germoplasm (répartition des avantages). Cette articulation pourrait également se traduire dans les formalités à accomplir pour l'obtention des brevets. b- ST élément déterminant dans la description de l'invention : Une obligation de divulgation qui relève du droit matériel présente l'intérêt de certifier le consentement préalable, donné en connaissance de cause ou la légalité de l'accès aux RPG, et ne peut être conçue en dehors du droit formel des brevets. La description de l'invention s'étend aux ressources phyto-génétiques et aux ST qui sont à la base de l'invention. A ce titre, l'obligation juridique de divulgation poursuit deux objectifs ; la première relève de la question de la licéité de l'accès à la dite ressource, le second s'insère dans le cadre de l'exécution de l'invention par l'homme de métier pour juger de l'activité inventive. La description devrait être suffisante483(*) pour permettre à l'homme de métier d'exécuter l'invention « une invention est considérée comme impliquant une activité inventive, si pour un homme du métier, elle ne découle pas de manière évidente de l'état de la technique »484(*). L'annulation pour insuffisance de la description d'un brevet pourrait être le résultat de l'impossibilité d'exécuter l'invention par l'homme de métier pour vérifier la non évidence par rapport à l'état de la technique qui s'apprécie par rapport à tout ce qui a été rendu accessible au public avant le dépôt de la demande de brevet ou la date de priorité. Une variété de pays ou une variété traditionnelle, une fois caractérisée, documentée, évaluée ou figurée sur des registres ou des bases de données des ST est une RG qui peut être intégrée dans l'état de la technique pour vérifier sur la base de la description y compris le rapport de recherche portant sur l'amélioration variétale par transgenèse, l'activité inventive. L'annulation d'un brevet pour insuffisance de description peut être doublée théoriquement d'une annulation sur le fondement de l'absence de l'activité inventive comme condition du droit matériel de la brevetabilité. On peut en déduire que les législations nationales sont de manière générale compatibles avec une exigence de divulgation de l'origine des RPG, instituer une obligation juridique portant sur cette exigence au niveau du droit des brevets (national ou international) constitue une régulation qui ne concerne que les inventions biotechnologiques et qui ne présente pas un intérêt réel du point de vue de la répartition des avantages. A vrai dire, il ne revient pas aux offices de brevet d'assumer la responsabilité de suivi de l'exécution des obligations contractuelles découlant des arrangements contractuels s'agissant de la répartition des avantages issus de la biodiversité, mais leur intervention peut être utile pour constater la légalité ou la légitimité de l'accès aux RG et aux ST ce qui renforce la validité d'un brevet au profit de leurs demandeurs. La divulgation d'origine des RG et des ST spécialement dans les demandes de brevets concerne les inventions biotechnologiques, les réflexions portant sur cette obligation n'ont pas été étendues à la protection des variétés végétales par les COV485(*), on peut penser dés lors que cette obligation soit invoquée à l'appui de la généralisation du brevet sur la matière vivante. Cette généralisation peut être perçue comme une stratégie pour stabiliser la règle juridique par rapport aux systèmes actuels portant sur l'accès aux RG à l'exclusion de la question épineuse de la répartition des avantages afin de renforcer le monopole sur la matière vivante au prix d'une régulation mineure. * 459 Manuel de référence « L'accord sur les aspects des Droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce », document précité, P 111. * 460 Fayard Riffiod (Annick), Le patrimoine commun de l'humanité? Une notion à reformuler ou à dépasser, thèse précitée, P 88. * 461 Manuel de référence « L'accord sur les aspects des Droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce », document précité, P 33-41. * 462 Le Droit français exige une description suffisante pour la divulgation au niveau du droit du brevet : « si la suffisance de la description est souvent difficile à apprécier par l'examinateur, elle l'est également pour le demandeur qui doit trouver l'équilibre entre le trop et le trop peu de divulgation », voir à ce propos Clavier (Jean Pierre), Les catégories de la production intellectuelle à l'épreuve des créations génétiques, Edition Harmattan, Paris, 1998. P 145-147. * 463 De Chavane (Albert),Burst (Jean Jacques), Droit de la propriété industrielle,Précis Dalloz, Paris, 1999, P 127. * 464 Article 21-al4 de la loi 2000-84 du 24/8/2000 relative au brevet d'invention. * 465 Idem. * 466 Voir à ce propos le projet d'étude technique sur les exigences relatives à la divulgation d'informationen rapport avec les ressources génétiques et les savoirs traditionnels ; Document de l'assemblée générale de l'OMPI du 15 Août 2003, WIPO/GA/30/7. P 11. * 467 Idem, P 3. * 468 Voir le document de l'OMPI : OMPI/GRTKF/IC/2/3 intitulé « principes à prendre en considération pour les clauses de propriété intellectuelle des arrangements contractuels concernant l'accès aux ressources génétiques et le partage des avantages ». Ce document contient un ensemble de clauses contractuelles à insérer dans les ATM, site web : http://www.wipo.org * 469 Voir le document de l'OMPI : WIPO/GRTKF/IC/3/4 intitulé « structure de la base de données proposée en ce qui concerne les pratiques et clauses contractuelle relatives à la propriété intellectuelle, à l'accès aux ressources génétiques et au partage des avantages » , site web : http://www.wipo.org * 470 Une analogie peut être établie entre ce cas de figure et l'examen des arrangements de co-titularité, de licence ou de sûreté réelle en rapport avec un brevet en cas de conflit de lois. * 471 Article 26.h) et i) de la décision 486 de la communauté andine. * 472 Projet d'étude technique sur les exigences relatives à la divulgation d'information en rapport avec les ressources génétiques et les savoirs traditionnels ; Document précité. P 51-52. * 473 La première réunion du comité s'est tenue à Genève du 30 avril au 3 mai 2001. * 474 Voir à ce propos le document établi par le bureau international de l'OMPI intitulée « propriété intellectuelle et ressources génétiques, situation générale », Réunion sur la propriété intellectuelle et les ressources génétiques, Genève, 17 et 18 avril 2000, site web : http://www.wipo.org * 475 Malheureusement, il n'y a pas un vrai débat autour de cette proposition pendant cette réunion. * 476 Notamment le Projet d'étude technique sur les exigences relatives à la divulgation d'information en rapport avec les ressources génétiques et les savoirs traditionnels ; Document précité, P 69-79. * 477 Idem, P 75. * 478 De Chavane (Albert), Burst (Jean Jacques), op cit, P 37. * 479 Article 8 al2 de la loi française de 1968,article 4 de la loi 200-84 du 24 Août 2000 relative au droit du brevet. * 480 L'environnement dans les négociations commerciales multilatérales : un passage obligé, actes de la journée débat du 5 octobre 1999, Solagral, Octobre 2000. P56. * 481 Teixieira Nascimento (Ana Rachel), mémoire précité, P 32. * 482 Abou Abbes (Sow), les systèmes sui generis : comment concilier rémunération des innovations, innovations, conservation de la biodiversité, maintien de l'accès aux ressources génétiques et protection des savoirs traditionnels, article précité, P 150. * 483 « La description de l'invention doit être suffisamment claire et complète » pour vérifier l'activité inventive, voir à ce propos l'article 21-al 3 de la loi 200-84 du 24 Août 2000 relative au droit du brevet. * 484 Article L 613-25 b du code de la propriété intellectuelle français, article 5 de la loi 200-84 du 24 Août 2000 relative au droit du brevet. * 485 Rappelant que les premières réflexions au niveau de la CDB et des lignes directrices de Bonn ont porté sur l'obligation de divulgation au niveau des DPI et pas exclusivement les brevets. |
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