Section II : Approche empirique de la relation entre
éducation et travail des enfants
Cette section mettra en évidence la relation qui existe
entre éducation et travail des enfants à travers un
modèle économétrique. Cette section permettra de justifier
le modèle et présenter les résultats
économétriques.
A : Choix du modèle et
présentation des variables dépendantes et indépendantes
L'une des approches économétriques pour analyser
la probabilité qu'un enfant travaille est d'estimer une équation
de participation au travail grâce à un modèle logit ou un
probit univarié. L'avantage pour ces modèles est qu'ils
permettent d'estimer une seule équation. Cependant, ces modèles
présentent l'inconvénient de ne pas prendre en compte
l'interaction entre les décisions de scolarisation et de mise au travail
des enfants. Il parait donc préférable de recourir à des
modèles multivariés qui permettent d'estimer à la fois une
équation de participation au travail et une autre pour la scolarisation
des enfants. Ces modèles diffèrent quand aux hypothèses
qui sont faites sur le mode de décision des parents. Ainsi,
l'utilisation du modèle probit séquentiel implique que la
décision du temps de l'enfant est prise dans un ordre à priori
déterminé. Dans cet ordre par exemple, le fait d'aller à
l'école uniquement est meilleur que le fait de combiner école et
travail. Ce dernier quant à lui est meilleur que le fait de ne ni aller
à l'école ni travailler. Dans cette situation, le fait de
travailler est la moins bonne décision, or, il ne semble pas avoir de
consensus sur cet ordre. Même si cet ordre s'impose, il n'y a aucune
raison à priori de le croire car cela souffre de vérification
empirique (Assaad et al, 2001).
Une autre estimation est celle qui est faite par la
méthode logistique multinomial. L'utilisation de cette méthode
suppose la vérification de l'hypothèse de l'indépendance
des alternatives non pertinentes. Cette hypothèse implique que
l'élasticité croisée de la probabilité de
répondre i plutôt que j est la même pour tout i
différent de j en d'autres termes, les pourcentages de chance de faire
tel ou tel choix sont indépendants les uns des autres.
Compte tenu de toutes ces raisons, l'approche retenue dans le
cadre de notre recherche est l'estimation par le probit bivarié. La
particularité de ce modèle est qu'il permet de prendre en compte
l'interdépendance entre la scolarisation et le travail des enfants. Il
permet aussi de tester la probabilité pour un enfant de travailler et/ou
d'aller à l'école.
De façon formelle, il y a deux variables
dépendantes binaires, l'une indiquant 1 si l'enfant travaille et 0 si
non et l'autre spécifié 1 si l'enfant est scolarisé et 0
si non. Les équations réduites du modèle probit
bivarié sont représentées par [1] et
[2].
Wi = X1? + åi,
avec Wi =1 si Wi
>0, 0 si non
[1]
½i = X2â +îi,
avec Si = 1 si
Si >0, 0 si non
[2]
Wi : Gain net escompté
pour le ménage de faire travailler les enfants
Si : Gain net escompté pour le
ménage de scolariser les enfants
åi et
îi : Termes
d'erreurs qui mesurent l'ensemble des variables explicatives non prises en
compte dans notre modèle suivent une distribution bivariée avec
une moyenne nulle et des variances unitaires. De façon
simplifiée, on a :
E[åi] = E[æi] = 0
Var [åi] = Var [æi] = 1
Cov [åi,
æi] = ñ, avec
ñ le coefficient de corrélation qui mesure la corrélation
entre les termes aléatoires des équations. Ce coefficient doit
être significatif et négatif si non, l'utilisation du probit
bivarié ne serait pas possible.
Xi : Matrice des variables
explicatives
? et â : Matrices
des coefficients du modèle
Les variables dépendantes sur lesquelles portent
l'étude sont codifiées WORK pour travail des enfants et
SCHOOL pour scolarisation des enfants.
La liste des variables explicatives considérées
dans cette recherche est donnée en annexe II dans le tableau 1 A2. Il
faut noter que toutes les questions relatives aux variables sont en annexe I.
Les variables, ALPHA_E (alphabétisation de
l'enfant), ALPHA_P (alphabétisation du père), ALPHA_M
(alphabétisation de la mère), PCE_C (présence d'une
cantine) et ABON_C (abonnement à la cantine) sont des variables
qualitatives. Pour mieux interpréter ces variables, nous fixons des
modalités de référence. Par ailleurs, ces variables sont
dichotomisées c'est à dire qu'elles prennent la valeur 1 si
l'enfant, le père et la mère sont alphabétisés,
s'il y a présence d'une cantine dans l'école de l'enfant
scolarisé et s'il est abonné à cette cantine et 0 dans les
cas contraires. Les autres variables NEDUC_E (niveau d'éducation de
l'enfant) NEDUC_P (niveau d'éducation du père), NEDUC_M (niveau
d'éducation de la mère), D INS (droit d'inscription), SCOL
(scolarité), LSCOL (livre scolaire), sont rendues quantitatives
continues. Par ailleurs, les variables NEDUC_E (niveau d'éducation de
l'enfant), NEDUC_P (niveau d'éducation du père) et NEDUC_M
(niveau d'éducation de la mère) sont
préférées à la classification en trois groupes dont
le niveau primaire, le niveau collège, le niveau lycée et plus et
le niveau sans instruction qui est pris comme référence dans la
plupart des régressions. Cette classification met dans le même
groupe des individus souvent très hétérogènes, ce
qui ne permet pas de bien isoler l'impact du niveau d'éducation. Ainsi,
mettre aussi bien les garçons ou les filles ayant atteint la classe de
CM2 (6ème année du primaire) et les garçons ou
les filles ayant arrêtés l'école juste après le CP1
(1ère année du primaire) dans le même groupe est
source de biais. Les mêmes remarques s'imposent si l'on classe dans le
même groupe les individus ayant le niveau 2nde
(1ère année du 2nd cycle de collège)
et ceux ayant un niveau supérieur.
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