section ii : les difficultes rencontrees par les
entreprises dans l'uemoa
I / CONDITION D'ACCES AU FINANCEMENT
Les dirigeants des petites et moyennes entreprises dans les
pays de l'UEMOA mentionnent généralement les difficultés
d'accès au financement du secteur bancaire comme une importante
contrainte à leur bon fonctionnement. Ces difficultés sont le
plus souvent associées aux politiques monétaires en vigueur et
aux pratiques bancaires qui font qu'il est difficile pour les banques de
couvrir les coûts et les risques élevés qu'impliquent les
opérations de prêt aux petites entreprises.
S'agissant du marché financier, les conditions
d'opérer sur le marché primaire limitent d'office son
accès aux grandes entreprises, dont le capital est ouvert à plus
de 100 personnes.
Les PME et PMI à fort potentiel, dont la
géographie du capital ne respect pas ces conditions ne peuvent donc pas
avoir accès au financement pour leur croissance. Seules les grandes
entreprises peuvent intervenir sur le marché financier, alors que
environ 80% des entreprises de la zone sont dans l'impossibilité de
respecter ces critères, vu leur petite taille (capital, chiffre
d'affaire, nombre d'actionnaires).
De plus, ces grandes entreprises sont
généralement des filiales de multinationales européennes.
De ce fait leur financement se fait directement à partir de la maison
mère.
II / LA FISCALITE ET LES GARANTIES
II.1) LA FISCALITÉ
Une bonne politique d'harmonisation des législations
fiscales passe par une connaissance des régimes existants et par une
réelle perception de leur impact sur le fonctionnement du marché
financier. Le constat qui ressort de notre analyse, c'est que les
systèmes fiscaux actuels sont inadaptés et ne favorisent pas un
développement harmonieux du système financier régional.
L'inadaptation des systèmes fiscaux
apparaît globalement à travers l'imposition des revenus en
général. Les Etats membres de I'UEMOA
ont hérité leurs systèmes fiscaux de la colonisation. Ces
systèmes ont donc pour base le droit fiscal
français pour ce qui est des pays francophones, et le
système fiscal portugais pour ce qui est de la Guinée Bissau.
Mais, contrairement aux systèmes d'emprunt qui ont connu une rapide
évolution induite par le développement économique et
social, les systèmes fiscaux des pays de I'UEMOA comme ceux des autres
pays en voie de développement sont restés figés, presque
en l'état de leur réception.
L'essentiel des réformes fiscales est dicté par
des considérations budgétaires, la préoccupation
première des Pouvoirs Publics étant d'essayer de combler le gap
qui existe entre d'une part, des dépenses publiques qui ne cessent
d'augmenter, et d'autre part, des recettes fiscales dont la maîtrise
reste incertaine.
Cette situation explique la complexité et la lourdeur
de ces systèmes fiscaux qui n'ont pas connu de véritables
réformes de fond allant dans le sens de leur modernisation et de leur
simplification.
La complexité des systèmes fiscaux
apparaît d'abord à travers l'existence, encore dans certains Etats
comme la Côte d'ivoire, le Bénin, le Niger, de la vieille
méthode d'imposition cédulaire des revenus qui combine, d'une
part une imposition distincte de chaque catégorie de revenu et d'autre
part, un impôt de superposition: impôt général sur le
revenu. Dans certains Etats, comme le Sénégal, où le
système d'imposition cédulaire n'existe plus
théoriquement, la technique d'imposition des revenus des personnes
physiques en vigueur, qui allie des droits proportionnels par catégorie
de revenu et un droit progressif s'ajoutant auxdits droits, ressemble beaucoup
au système d'imposition cédulaire.
L'on note aussi l'existence de techniques complexes de
paiement de l'impôt sur le revenu avec, dans la plupart des Etats, un
système de paiement par anticipation basé sur le versement
d'acomptes provisionnels dont la méthode de calcul est très
difficile à maîtriser. Ce qui occasionne des redressements fiscaux
et l'application de pénalités préjudiciables aux
entreprises.
Quant à la lourdeur des prélèvements
fiscaux, elle s'explique par la portion congrue des contribuables qui sont
connus des administrations fiscales de ces pays et qui s'acquittent
correctement de leurs obligations fiscales.
En effet, il y a dans tous ces pays une coexistence entre,
d'une part, un secteur dit moderne avec des entreprises
régulièrement déclarées au fisc, et d'autre part,
un secteur traditionnel qualifié d'informel, officiellement inconnu du
fisc, qui occupe une bonne frange de la population. Le poids des
prélèvements fiscaux est ainsi
supporté par les entreprises du secteur dit formel et par les
salariés. Cela se traduit naturellement par la lourdeur
de la charge fiscale pour ces entreprises alors que, paradoxalement, le niveau
de la pression fiscale est relativement très
bas dans tous ces pays,
Pour ce qui concerne les revenus des valeurs
mobilières, des différences fondamentales existent entre les
Etats membres aussi bien par rapport aux taux d'imposition que par rapport aux
modalités d'imposition.
Concernant les taux d'imposition les disparités sont
frappantes. A titre d'exemple, le taux de droit commun de la retenue à
la source sur les produits d'actions est de 18% au Bénin, 25% au Burkina
Faso, 10% au Sénégal et 12% en Côte d'ivoire (pour ce qui
est des dividendes distribués par les sociétés non
cotées à la BRVM). Les revenus d'obligations connaissent
également d'importantes disparités: 6% au Burkina, 12% en
Côte d'Ivoire, 25% au Niger.
Il est certain que de tels systèmes fiscaux ne
favorisent pas le développement d'un marché financier
intégré.
Dans un contexte de marché financier régional,
comme celui de l'UEMOA, dont l'ambition est de promouvoir
l'épargne intérieure et la mobilité des capitaux, la
fiscalité applicable aux revenus de valeurs mobilières ne peut
être neutre. En effet, le choix des placements de capitaux étant
dicté, entre autres facteurs déterminants, par des
considérations fiscales, les investisseurs avertis seront plus
attirés par les Etats offrant des avantages fiscaux les plus attractifs.
Or, les disparités que nous avons relevées entre
les régimes fiscaux en vigueur dans les différents Etats de
l'UEMOA constituent des facteurs réels de distorsion parce que pouvant
considérablement influer sur la mobilité des capitaux et
même sur l'investissement en valeurs mobilières du fait de leur
complexité et de leur lourdeur. En outre, la complexité des
systèmes en vigueur dans les Etats membres de l'UEMOA et
l'imprécision de certaines dispositions fiscales dans beaucoup de
situation constitue une cause d'insécurité juridique pour les
investisseurs non locaux.
Par essence, la règle de droit fiscal doit garantir la
sécurité juridique de ses destinataires. Cette règle doit
donc permettre de déterminer avec certitude le montant des impositions
mise à la charge d'un contribuable. La sécurité fiscale
des contribuables dépend du degré de
précision avec lequel est déterminé le champ d'application
des règles de droit fiscal. Aussi, tant que cette sécurité
juridique ne sera pas assurée dans l'UEMOA par une politique
adaptée de simplification et d'harmonisation des législations
fiscales, il sera difficile d'attitrer les capitaux étrangers.
II.2) LES GARANTIES
Conformément aux dispositions réglementaires
actuellement en vigueur, l'émission d'un emprunt obligataire sur le
Marché Financier Régional (MFR) requiert la production
préalable d'une garantie à première demande
destinée à couvrir à hauteur de 100%, en principal et en
intérêts, le risque de défaillance de l'emprunteur.
Du point de vue de l'organe régulateur, cette exigence
vise la protection des investisseurs dans un contexte de marché
naissant.
Cette disposition est jugée contraignante par les
acteurs du marché, dans la mesure où elle ne permet pas un
accès aisé à tous les émetteurs.
En effet, il a été observé que le
coût élevé d'obtention des garanties renchérit le
taux de sortie des financements obtenus par le biais du marché. De
même, les formalités administratives et les délais
nécessaires à la délivrance desdites garanties
réduisent la compétitivité du marché financier. Les
émetteurs se tournent alors vers le financement bancaire qui est plus
facile d'accès.
Par ailleurs, le système actuel de garantie rend la
répartition des risques sur le marché financier très
asymétrique. En effet, il concentre l'ensemble des risques sur un petit
nombre de garants, au lieu de les diversifier au sein du pool des
émetteurs. Dès lors, l'appréciation du risque
spécifique et l'analyse par les investisseurs des informations
financières diffusées par chaque émetteur, perdent leur
importance.
Enfin, une comparaison avec les places financières de
même maturité montre que, contrairement à la pratique en
vigueur sur le Marché Financier Régional, la production de
garanties n'est pas une exigence réglementaire sur les autres
marchés émergents. Souvent, sa production est facultative et ne
sert qu'à renforcer la solvabilité de l'émetteur,
déjà indiquée par sa note délivrée par des
agences de notation de renom.
Au total, la disposition réglementaire sur les
garanties semble constituer un frein pour plusieurs émetteurs potentiels
d'emprunts obligataires de l'Union. Elle a conduit à un marché
financier où le "pricing" des titres obligataires ne reflète pas
nécessairement le risque intrinsèque de chaque émetteur.
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