SECTION II LES
REGLES ISSUES DE LA JURISPRUDENCE DES TRIBUNAUX
PENAUX INTERNATIONAUX RELATIVES A LA REPRESSION PENALE
DES
INFRACTIONS COMMISES EN SITUATION DE CONFLIT ARME
Il s'agit ici des règles du DIH telles que
développées par le TPIY et le TPIR relatives à la
répression des infractions au DIH.
En effet, longtemps avant la création de ces deux
tribunaux ad hoc, la communauté
internationale s'est toujours préoccupée au nom du
DIH90, à réprimer les violations commises en
situation conflit armé. Mais celleci
ne se limitait que dans le cadre des CAI comme l'atteste les
deux cas de répression internationale organisée au
lendemain de la première guerre mondiale par
le traité de Versailles et surtout celle menée
devant les tribunaux de Nuremberg et de Tokyo91.
Mais au lendemain des années 1990, s'est
opéré un changement de conflictualité ; les
conflits internes qui émergent de plus en plus complexes,
ambiguës et recrudescents, suivis de
l'importance des moyens de guerre, occasionnent de graves
violations et atrocités à la personne
humaine.
Aussi, l'ampleur des crises humanitaires dont nous avons
été témoins surtout
dans l'exYougoslavie
et au Rwanda ainsi
que la gravité des violations aux droits humains
fondamentaux
perpétrées à l'encontre des civils92, ont
amené le Conseil de sécurité des Nations Unies à
adopter
de nombreuses mesures parmi lesquels la création du TPIY
et du TPIR dont la fonction était de
réprimer ces conduites et punir les responsables des
atrocités commises. Ces deux tribunaux, à
travers leurs décisions, ont configuré une
jurisprudence permettant la consolidation de certains
progrès dans le corpus des normes du DIH à savoir
la répression pénale des infractions du DIH
(paragraphe 1) et la reconnaissance de la responsabilité
pénale internationale de l'individu de
toute situation de conflit armé (paragraphe 2).
90 Djiena Wembou, TPIR : Rôle de la cour dans la
réalité Africaine, RICR N° 828, 30/12/1977, p 732.
91 Le tribunal de Nuremberg avait été
créé par l'accord de Londres du 8 août 1949 et celui de
Tokyo par une
déclaration du commandant des forces Alliées le 19
janvier 1946.
92 Julio Jorge Urbina La protection des personnes civiles au
pouvoir de l'ennemi l'établissement d'une et juridiction
pénale internationale, précité
p1.
34
PARAGRAPHE 1: LA REPRESSION PENALE DES INFRACTIONS AU DIH
EN
TOUTE SITUATION DE CONFLIT ARME
Bien avant 1994, la pratique des Etats tout comme la
jurisprudence internationale
montraient que la répression des infractions du DIH
relevait de la compétence exclusive de l'Etat
qui avait le pouvoir et/ou le devoir de punir luimême
ou d'extrader les auteurs présumés desdites
infractions. La note présentée en mars 1994 par le
gouvernement Suisse en vue de la réunion
d'experts intergouvernementaux pour la protection des victimes de
guerre (Genève 2327
Janvier
1995), est explicite sur ce point93 :
"Depuis l'adoption des conventions de Genève, la
répression pénale des violations du
DIH a exclusivement dépendu de la volonté de
chaque Etat de poursuivre ou d'extrader les
personnes suspectées d'être des criminels de
guerre et arrêtées sur le territoire. Pour diverses
raisons, ce système de dissuasion et de
répression n'a pas toujours fonctionné de manière
satisfaisante".
Ainsi, la création du TPIY et du TPIR respectivement par
les résolutions 827 du 23 mai
1993 et 955 du 8 novembre 1994 du conseil de
sécurité des Nations Unies marque un tournant
dans le développement du DIH en matière de
répression des infractions commises.
Il faut souligner que le conflit en ExYougoslavie
a un double aspect : un aspect
international et l'autre interne. C'est ce qui le
différencie du conflit armé rwandais qui est
essentiellement interne .En effet, la compétence ratione
materiae des deux tribunaux englobait
respectivement tous les crimes commis en exYougoslavie
et au Rwanda. Ainsi, dans leurs statuts
figurent le génocide et les crimes contre
l'humanité. Quant aux crimes de guerre, le statut du
TPIY envisage deux catégories : les infractions graves aux
conventions de Genève de 1949
(article 2) et les violations des lois et coutumes de guerre.
En revanche, le statut du TPIR se rapporte aux violations de
l'article 3 commun aux
quatre conventions de Genève de 1949 et au protocole II de
1977. Ainsi, le conseil de sécurité a,
pour ce qui est des CANI, inclus dans la compétence du
tribunal les violations qui peuvent, soit
être commises à la fois dans le cadre des CAI et des
conflits armés internes telles le crime de
génocide et les crimes contre l'humanité (A), soit
être commises uniquement dans le cadre des
93 Droit international humanitaire: théorie
générale et réalités africaines, avant propos
M. Bedjaoui précité p 154.
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conflits internes (B) telles que les violations de l'article 3
commun aux quatre conventions de
Genève ; développé à l'article 4 du
protocole de 1977.
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