2. Cadre juridique régissant la gestion des
ressources forestières
Pour mener à bien les orientation politiques en termes
de gestion des ressources naturelles, le Sénégal a adopté
un ensemble de règles juridiques destinées au maintien ou au
rétablissement des équilibres écologiques indispensables
au développement économique et sociale du pays. Ces diverses
règles ont été prescrites par le biais d'un certain nombre
de textes. Parmi ces derniers, il y'a lieu de différencier ceux
adoptés sur le plan international et ceux définis au niveau
national pour constituer directement le soubassement de la gestion et de la
protection des ressources naturelles.
Sur le plan international, le Sénégal é
exprimé son intention de contribuer de manière significative
à l'effort mondial de conservation des ressources naturelles notamment
des ressources forestières. Cette volonté s'est
concrétisée à travers la signature et la ratification des
divers conventions et Accords internationaux multilatéraux sur
l'environnement exerçant une influence directe sur l'environnement et
les gestion des ressources. Parmi ces conventions, nous pouvons citer la
convention des Nations unies sur le diversité Biologique signée
en 1994 et ratifié en 1994), la convention des Nations unies sur la
lutte contre la désertification signée en 1994 et ratifiée
en 1995, la convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques
signée en 1992 et ratifié en 1994, la convention de Ramsar ayant
trait aux zones humides d'importance internationale signée et
ratifiée en 1977, la convention de Washington sur le commerce
international des espèces de faune et de flore sauvages menacées
d'extinction ratifiée en 1977, la convention de Paris sur la protection
du patrimoine mondial, culturel et naturel ratifiée en 1976, la
convention africaine sur la conservation de la nature et des ressources
naturelle ratifiée en 1972. Bien que le Sénégal ait
adhéré à tous ces accords internationaux
multilatéraux sur l'environnement, il faut bien admettre que la plupart
des textes internationaux ne revêtent pas un caractère
contraignant.
Au niveau national, le Sénégal jouissait avant
l'indépendance d'une politique de conservation des ressources
forestière et fauniques sous l'initiative du service forestier
colonial48 (Ribot, 1995). L'indépendance acquise en 1960, le
pays s'est engagé à mettre en place un cadre
48 Décret 1900 portant Premier code
forestier puis Décret du 04 juillet 1935 portant Nouveau Code forestier
pour l'Afrique occidentale française.
49
juridique approprié, favorable pour promouvoir une
conservation et une gestion rationnelle des ressources naturelles notamment
forestières en vue de faire face à la dégradation de
l'environnement biophysique et de gérer convenablement les
activités humaines. Ainsi, plusieurs instruments juridiques ont
été élaborés, parmi lesquels on peut citer les
principaux (CSE, 2013) : la loi 64-46 du 17 juin 1964 relative au domaine
national ; la loi 98-03 du 08 janvier 1998 portant Code forestier49
; la loi 67-28 du 23 mai 1967 relative à la faune et la gestion de la
chasse ; les lois 96-06 et 96-07 du 22 mars 1996 portant respectivement Code
des collectivités locales et transfert de compétences aux
collectivités ; la loi 2001-01 du 15 janvier portant Code de
l'environnement ; la LOASP ; la loi 2013-10 du 28 décembre 2013 portant
Code général des collectivités territoriales ; la loi
constitutionnelle 2016-10 du 05 avril 2016 portant révision de celle de
200150.
Dans le domaine relatif à la gestion des ressources
forestières, ces instruments peuvent être réparties de
manière globale en trois grandes catégories.
La première a mis essentiellement l'accent sur le
rôle prédominant de l'Etat dans la gestion des ressources
forestières avec l'ensemble les forêts placées sous son
contrôle direct par le biais du service forestier51. Alors que
les populations notamment rurales sont cantonnées à
l'exploitation des produits forestiers de faible valeur commerciale, permettant
néanmoins leurs besoins par le biais de délivrance des droits
d'usage. L'administration forestière avait exclusivement la mainmise sur
l'ensemble des ressources forestières et toute forme d'appropriation de
ces ressources était complètement écartée.
Toutefois, cette première catégorie d'instruments n'était
plus adaptée au contexte socio-économique et politique du pays
mais aussi aux différentes orientations de la conférence de
Rio.
La seconde catégorie d'instruments ambitionnait
principalement de corriger certains manquements notamment de réduire le
caractère répressif, l'affirmation de la propriété
et le droit d'exploitation des ressources plantées par des
privés52. Mieux, ces instruments s'efforçaient de
favoriser et encourager l'implication des populations dans la protection et
la
49 Loi 98-03 du 08 janvier 1998 portant code
forestier modifiant la loi 93-06 du 04 février 1993 portant Code
forestier, modifiant à son tour la loi 65-23 du 09 février 1965
portant Code forestier.
50 Article 25-1 de la nouvelle constitution :
« Les ressources naturelles appartiennent au peuple. Elles sont
utilisées pour l'amélioration de ses conditions de vie.
L'exploitation et la gestion des ressources naturelles doivent se faire dans la
transparence et de façon à générer une croissance
économique, à promouvoir le bien-être de la population en
général et à être écologiquement durables
».
51 Loi 64-46 du 17 juin 1964 relative au domaine
national et loi 65-23 du 09 février 1965 portant Code forestier.
52 Loi 93-06 du 04 février 1993 portant Code
forestier.
50
restauration des ressources forestières par l'adoption
d'une approche participative et de terroir et notamment par le biais de la
conduite d'opérations de reboisement participatif.
La dernière catégorie d'instruments s'accordait
surtout à la volonté de l'Etat de faire la promotion d'un
développement local harmonieux et répondre efficacement aux
besoins des populations par le biais de la
décentralisation53. Le transfert de compétences
notamment dans le domaine de l'environnement et la gestion des ressources s'est
traduit par une volonté manifeste de placer l'acteur local au coeur de
la problématique liée à la gestion de ressources notamment
forestières. Cette volonté s'est concrétisée d'une
part, par la modification du code forestier en vue de favoriser une meilleure
implication des populations dans les efforts engagés en faveur de la
pérennisation du domaine forestier et d'autre part, par le biais de
l'Acte III de la décentralisation54 et l'adoption en 2018
d'une nouvelle loi portant code forestier55 visant entre autres,
à renforcer le pouvoir de gestion des collectivités territoriales
sur les forêts en dehors du domaine classé, à renforcer les
prérogatives des services déconcentrés dans la gestion
forestière, à mieux répartir les recettes
forestières entre l'Etat et les collectivités...
Quant à l'Acte III, il ambitionne de peser notamment en
matière en matière de gestion des ressources naturelles et
l'environnent, en renforçant les prérogatives des
collectivités dans la création et la gestion des forêts,
d'espaces protégés et de réserves naturelles, la gestion
de zones forestières de terroirs et de sites naturels présentant
un intérêt local, la gestion des bois communaux et la
création d'aires protégées. Le nouveau code forestier
permet de prendre en considération le contexte actuel surtout
politico-écologique et de favoriser la réadaptation des
règles générales de la gestion forestière et de la
gestion des arbres hors forêts et des terres à vocation
forestière dans l'optique de promouvoir une mise en valeur
socio-économique et écologique des ressources forestières
et des terres à vocation forestière.
En dépit de son caractère assez bien fourni, le
cadre juridique régissant la gestion des ressources forestières
présente toutefois des limites : les contradictions et vides juridiques
notamment la faible prise en considération dans les textes
législatifs et réglementaire des exigences, les ambitions, les
connaissances et capacités notamment des acteurs de base ; mais aussi la
non-accessibilité de ces textes (formats non adaptés de
même que contenu, concepts, langages) aux populations locales). Ce cadre
semble avoir besoin d'être épaulé par un cadre
institutionnel à la
53 Lois 96-06 et 96-07 du 22 mars 1996 portant
respectivement Code des collectivités locales et Transfert de
compétences aux collectivités.
54 Loi 2013-10 du 28 décembre 2013 portant
Code générale des collectivités locales, document
publié par OIT (Organisation internationale du Travail)
55 Loi 2018-25 du 12 novembre 2018 portant Code
forestier.
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fois solide et stable, favorable pour mieux appliquer les
règles de base en termes de gestion des ressources naturelles.
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