Les pouvoirs du maire au Bénin: réflexion à l'aune de la récente réforme sur la décentralisationpar Ulrich Yeme Kevin ADANVOESSI Université d'Abomey-Calavi / Ecole doctorale des sciences juridiques politiques et administratives - Master recherche en droit 2023 |
B : Cas de la structure des collectivités locales aux Pays-BasIl existe des cas de formules pour lutter contre la mauvaise gestion et pallier les défaillances constatées chez les élus locaux. L'une des formules les plus intéressantes se trouve en Hollande. Les collectivités locales hollandaises sont toutes soumises sans exception aux principes de cogestion et de prise de décision collégiale (1) et le bourgmestre (l'équivalent du maire) est nommé par le gouvernement central (2). 1 : Un exécutif collégialAux Pays-Bas, c'est le conseil communal qui dirige la commune. Ce conseil est composé de membres élus au suffrage universel direct pour un mandat de quatre ans. A son tour, cette assemblée délibérante élit un exécutif collégial. On appelle cet organe le Collège du bourgmestre et des échevins188(*). L'organe exécutif de la collectivité locale aux Pays-Bas est généralement pluripartisan tenant compte de tous les courants politiques au sein du conseil municipal. Le bourgmestre est celui qui dirige le Collège et qui préside aussi le Conseil. C'est l'équivalent du maire dans le système hollandais. Il est nommé par l'administration centrale sur proposition de son représentant dans la province parmi une liste de personnalités sélectionnées par une commission communale189(*). Il est intéressant ici de remarquer que c'est un organe collégial qui exécute les décisions du conseil communal. La gestion cavalière du maire qu'on observe en France et au Bénin par exemple laisse donc place à une gestion collégiale avec une prise de décision par concertation.190(*) Ce système de gouvernance est très intéressant à bien d'égards, car il limite les risques de navigation à vue et de gestion hasardeuse. Un chef de l'exécutif qui doit prendre des décisions de manière collégiale sera beaucoup plus enclin à justifier certaines prises de décision, à convaincre et à persuader de la justesse de sa vision et de ses choix. Cela est d'autant plus prononcé dans un système comme celui hollandais. En effet, dans un tel système, l'organe exécutif collégial est pluripartisan. Il est donc représentatif de la configuration politique du conseil municipal avec plusieurs courants de pensée. Par-dessus tout, il est présidé par un chef nommé. Cela a l'avantage d'offrir plusieurs obédiences au collège du bourgmestre et des échevins. C'est également un système qui permet aux élus communaux de confier la gestion de la collectivité à des personnes en qui ils ont une certaine confiance notamment par rapport aux domaines d'expertise. D'ailleurs en ce sens, reconnaissons au conseil de supervision sa ressemblance avec un tel modèle, car il est composé des présidents des commissions permanentes qui sont censés être des sachants dans leur domaine. Mais à la différence du conseil de supervision qui n'est d'ailleurs pas l'organe exécutif de la collectivité locale au Bénin comme nous l'avons vu tout au long de cette étude, le collège du bourgmestre et des échevins est composé de personnalités qui ne siègent pas au conseil communal bien qu'issues de ce conseil. Lorsqu'un conseiller municipal est désigné pour être échevin, il démissionne de son poste de conseiller. Cette donnée est capitale pour assurer une séparation des fonctions. Enfin, les échevins sont responsables individuellement et collectivement devant le conseil municipal. C'est en effet le conseil qui fait faire. C'est lui qui détient la plus grande légitimité et en ce sens, tout organe exécutif devrait logiquement être responsable devant lui. On peut facilement reproduire un tel système dans le contexte béninois en permettant à des personnes hautement qualifiées de composer l'organe exécutif collégial de la commune. Cela aura l'avantage d'améliorer la qualité de la prise de décision au niveau de la commune. Des aménagements peuvent aussi être entrepris comme le fait de permettre au conseil communal de choisir des membres de l'organe exécutif collégial en dehors des conseillers élus après avis de non-objection du préfet. On peut rendre encore plus performant cet organe en posant des critères d'admission à ses membres. Il ne faudrait pas oublier qu'il s'agit de fonctions à la fois politiques et administratives qui requièrent un minimum de compétences. Enfin, le plus intéressant est que l'on aurait pu implémenter une telle réforme sans toucher à un seuil iota des bases constitutionnelles de la décentralisation au Bénin. Et avec un tel système, le maire aura plus de prérogatives pour conduire sa vision au niveau local. * 188 ALLAIN Jean-Pierre et all, L'organisation des collectivités territoriales dans les 15 pays de l'Union européenne, [Rapport de recherche] Centre d'études sur les réseaux, les transports, l'urbanisme et les constructions publiques (CERTU), 2004, p.75 * 189 BODIGUEL Jean-Luc, Étude sur les fonctions publiques locales en Europe : Pays-Bas, CNFPT - EUROPA, 2004, p.6 * 190 ALLAIN Jean-Pierre et all, op. cit., p.75 |
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