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Les pouvoirs du maire au Bénin: réflexion à  l'aune de la récente réforme sur la décentralisation


par Ulrich Yeme Kevin ADANVOESSI
Université d'Abomey-Calavi / Ecole doctorale des sciences juridiques politiques et administratives - Master recherche en droit 2023
  

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Introduction

« La décentralisation n'est pas la panacée ni une fin en soi ; elle est un moyen d'atteindre des impératifs nationaux »1(*). Au Bénin, à contrepied de la thèse d'Yves Mény selon laquelle la décentralisation est souvent assimilée à l'idéal démocratique en raison de ce que « les élections locales incarnent les valeurs démocratiques et républicaines »2(*), la décentralisation n'a pas attendu le renouveau démocratique de 1990 pour s'installer.

Bien avant ces impératifs nationaux de démocratie locale et participative de la fin du XXe siècle que nous connaissons et qui ont été amenés au Bénin par la Conférence Nationale des Forces Vives de la Nation, nous pouvons rapidement remonter jusqu'au Dahomey précolonial et colonial pour déceler des traces de la décentralisation3(*). Néanmoins, celle-ci a réellement commencé au lendemain des indépendances avec la loi n°64-17 du 11 août 1964 sur l'organisation municipale. Avant cette loi, la libre administration des collectivités était moins organisée et surtout moins démocratique. Pour preuve, la loi n°55-1489 du 18 novembre 1955 relative à la réorganisation municipale en Afrique occidentale française, en Afrique équatoriale française, au Togo, au Cameroun et à Madagascar. En effet, cette loi, bien qu'elle crée des communes (instituées par décret), a en réalité consacré des espaces administratifs artificiellement créés au lieu d'institutionnaliser les groupements territoriaux préexistants4(*). Mais, en raison de l'instabilité politique, des impératifs de construction du jeune Etat indépendant, des réalités de parti unique ou de régime militaire, etc., on a longtemps observé une marginalisation des règles de démocratie locale5(*). Il faut reconnaître que ce n'est qu'au lendemain de la Conférence Nationale des Forces Vives de la Nation de 1990 qu'on a assisté à une véritable constitutionnalisation de la libre administration des collectivités territoriales avec une refonte totale du système d'administration territoriale6(*).

Toutefois, au cours de sa mise en oeuvre qui a véritablement démarré en février 2003 par l'élection et l'installation des premiers conseillers communaux, le constat général qui a été fait est que notre décentralisation, calquée en grande partie sur le modèle de l'ancienne puissance coloniale, ne permettait pas d'atteindre les objectifs de développement des communes comme attendu7(*).

Des réformes successives ont ainsi été entreprises par les différents chefs d'État qui ont dirigé le Bénin8(*). C'est dans cette dynamique de réformes structurelles qu'est né le Code de l'administration territoriale dont le principe était acté depuis 2015 à l'occasion du forum des 10 ans de la décentralisation béninoise9(*). Entrée en vigueur le 1er avril 2022, cette codification des textes de l'administration territoriale au Bénin a enclenché des modifications substantielles dans son organisation. Parmi ces modifications se trouve la création du Secrétariat Exécutif au sein des collectivités territoriales. Organe technico-administratif, le Secrétariat Exécutif vient en réalité en remplacement du Secrétariat Général qui existait auparavant, mais détient désormais certaines prérogatives qui autrefois relevaient de la compétence exclusive du maire. De plus, d'autres nouveautés, telles que la création d'un Conseil de Supervision, viennent modifier significativement la manière dont les collectivités territoriales sont administrées au Bénin. Nous assistons désormais à une gestion communale compartimentée avec d'un côté les organes politique et politico-administratif et de l'autre l'organe technico-administratif qu'est le secrétaire exécutif.

Traiter des pouvoirs du maire, un organe communal qui a historiquement été fort, après la récente réforme institutionnelle appelle cependant, préalablement à toute analyse de fond, une clarification conceptuelle.

Pour Cornu, le pouvoir peut se définir de plusieurs façons. Au sens général, il est une « prérogative juridique »10(*). Cornu définit par ailleurs le pouvoir selon son sens constitutionnel, selon le droit privé, selon le droit procédural, selon le droit des sociétés et du travail et enfin selon le droit monétaire.

Selon Pierre Avril, le pouvoir désigne en droit « les actes qu'une autorité publique est juridiquement habilitée à accomplir. Ce terme est couramment employé comme synonyme de compétence »11(*).

Dans le cadre de la présente étude, les pouvoirs doivent être compris selon le sens que leur donne Pierre Avril. Le pouvoir est une prérogative juridique attribuée à une personne. C'est une compétence, un ensemble d'attributions dont dispose un sujet de droit.

Il s'agit donc de réfléchir sur les compétences du maire. Ce dernier est de façon classique, le « premier magistrat communal élu en son sein par le Conseil municipal et chargé de trois ordres de fonctions : administration de la commune spécialement par la préparation et l'exécution des délibérations du Conseil municipal ; exécution en qualité d'agent de l'Etat de certaines missions (publication et exécution des lois et règlements) et des mesures de sûreté générale, état civil, police judiciaire ; exercice de la police administrative »12(*).

Les manuels français de droit administratif et ceux spécialisés en décentralisation attribuent au maire l'exécution des décisions du conseil communal13(*). Ils considèrent habituellement que le maire est l'« autorité exécutive de la collectivité territoriale [et qu'] il est aussi le représentant de l'Etat dans cette circonscription administrative...»14(*). Si cette définition ne rattache pas à la qualité de maire la condition de l'élection parce que selon les législations le maire peut être désigné autrement15(*), elle pèche en attribuant de facto au maire la compétence exécutive de la collectivité. Cela ne saurait surprendre, car les exemples de collectivité où le maire n'est pas l'organe exécutif ne sont pas légion16(*). C'est pour cela que nous définirions le maire comme l'organe unipersonnel de la collectivité qui préside l'assemblée délibérante et qui est également le représentant de l'Etat dans cette circonscription administrative.

Cependant, c'est dans le cadre de la décentralisation que le maire exerce ses prérogatives.La Charte africaine des valeurs et des principes de la décentralisation définit la décentralisation comme étant « le transfert des pouvoirs, des responsabilités, des capacités et des ressources du niveau national à tous les niveaux sous-nationaux de gouvernement afin de renforcer la capacité des gouvernements sous-nationaux à promouvoir la participation des citoyens et la fourniture de services de qualité »17(*). Si cette définition intéresse parce qu'elle met l'accent sur la démocratie locale et la qualité des services, elle reste incomplète à bien d'égards, car ne prenant pas en compte tous les éléments indispensables à la formation de la décentralisation au regard de la doctrine18(*).

En revanche, il importe de commencer à préciser qu' « en droit administratif, on distingue deux sortes de décentralisation, la décentralisation territoriale et la décentralisation fonctionnelle »19(*).Aussi, la définition la plus aboutie est sans doute celle de Cornu. Elle englobe les précédentes précisions. Pour Cornu, la décentralisation territoriale est un « mode d'aménagement de l'administration ... qui, fondé sur la notion d'intérêt local, donne naissance à des collectivités publiques distinctes de l'État dont l'existence et la libre administration par des conseils élus prévues par la Constitution, sont garanties par la loi ; dotées de la personnalité juridique, de l'autonomie financière et d'organes délibérant et exécutif propres »20(*).

S'agissant de l'administration au sein d'un Etat, les concepts de centralisation et de déconcentration sont souvent ceux opposés au concept de la décentralisation.La centralisation est un « système d'administration s'opposant à la décentralisation et dans lequel le pouvoir de décision est concentré entre les mains d'autorités généralement ministérielles compétentes pour l'ensemble du territoire de l'État, avec répartition sur ce territoire de services liés à ces autorités par une subordination hiérarchique »21(*). En général, la centralisation est un mode d'aménagement utopique parce qu'il ne convient dans la réalité qu'à des Etats de petite taille (Malte, Monaco, etc.). Voilà pourquoi la centralisation est souvent accompagnée d'une déconcentration. Cette dernière est la « technique d'organisation qui consiste à remettre d'importants pouvoirs de décision à des agents du pouvoir central placés à la tête des diverses circonscriptions administratives ou de divers services »22(*).

Si le terme décentralisation est bien ancré dans le paysage législatif béninois, c'est bien « au principe de libre administration des collectivités territoriales que continue de se référer la jurisprudence, tant constitutionnelle qu'administrative »23(*), car « à l'origine, le principe était celui de la libre administration des collectivités territoriales, et non celui de la décentralisation »24(*). Guinchard définit le principe de libre administration comme le « principe d'administration, par des conseils élus, des collectivités territoriales décentralisées, que le Parlement doit respecter en raison de son rang constitutionnel, mais qui est mis en oeuvre dans les conditions prévues par la loi »25(*).

La libre administration représente donc une liberté constitutionnellement garantie26(*) auquel le législateur ne peut porter atteinte même si son exercice est encadré par ce même législateur. Or, en procédant à la création d'un organe nommé et doté de prérogatives propres au sein de l'administration des collectivités, la loi 2021-14 portant code de l'administration territoriale en République du Bénin a de facto minoré les pouvoirs du maire et, semble-t-il, porté atteinte au triptyque considéré comme indispensable à la qualification de la libre administration des collectivités territoriales. Comme l'a démontré Charles Roig, il faut un assemblage des intérêts infraétatiques (intérêt local), de l'autonomie des organes dirigeants caractérisée par l'élection au suffrage universel et de l'autonomie juridique et financière des collectivités consacrée par les textes législatifs, mais surtout constitutionnels pour parler de décentralisation.27(*) C'est la satisfaction de ces exigences qui représente l'expression de la libre administration selon l'auteur qui cite les travaux de Maurice Hauriou, d'Alexis de Tocqueville, mais aussi de Charles Eisenmann. Ce dernier, comme l'a aussi souligné Nanako Cossoba, a établi un lien de causalité entre l'autonomie d'une collectivité locale et l'autonomie de ses dirigeants qui ne peut être dissociée de l'indépendance vis-à-vis des autorités centrales28(*).

Réfléchir donc sur les attributions du maire telles que consacrées par la loi 2021-14 revient ainsi à susciter des questionnements sur la place de cet organe dans la libre administration des collectivités, principe à valeur constitutionnelle formalisé aux articles 98 et 151 de la Constitution de la République du Bénin : sur sa place dans l'autonomie organique de la collectivité.

« Le principe de la libre administration des collectivités territoriales n'a pas pu être fortuitement constitutionnalisé »29(*) et il importe que toute réforme puisse préserver l'essence de ce principe. Notre réflexion sur les attributions actuelles du maire part donc des organes concurrents aux prérogatives du maire, en l'occurrence le secrétaire exécutif nommé30(*) qui est le responsable de l'administration de la commune et qui à ce titre dispose d'attributions propres faisant de lui un organe important de la collectivité31(*). Elle cherche à présenter la corrélation entre les pouvoirs de l'élu communal qu'est le maire et l'état de la décentralisation au Bénin.

Le test de recrutement des Secrétaires Exécutifs de mairie portait sur un sujet unique : « Le poste de Secrétaire Exécutif signe-t-il la mort de la décentralisation au Bénin ? ».Ainsi, la préoccupation était de savoir si la minoration des pouvoirs du maire (résultat de l'arrivée des Secrétaires Exécutifs de mairie) n'affecte pas l'autonomie organique de la commune.

Cette préoccupation est actuelle et fait suite à la réforme en cours dans le secteur de la décentralisation. La réforme ambitionne d'assainir la gestion locale, d'axer cette dernière sur la voie de la recherche de la performance et d'éviter la politisation de l'administration locale caractérisée par un clientélisme et un régionalisme à outrance. Concrètement, le pouvoir en place ne veut désormais plus des maires tout-puissants qui vendront les réserves administratives du patrimoine immobilier de leur collectivité ou qui détourneront des milliards puis refuseront de faire face à la justice en s'exilant32(*). La réforme s'inscrit dans la droite ligne de l'application des principes de la Nouvelle Gestion Publique (NGP). Globalement, la NGP vise à introduire les logiques de performance, de gestion axée sur les résultats, d'efficacité et d'efficience propres aux entreprises privées dans la gestion publique. L'un des principes de la NGP est donc d'énoncer en des termes clairs les attributions de chaque acteur et la séparation des organes de conception des politiques publiques, des organes de leur mise en oeuvre33(*). Cette démarcation entre le politique et le technique, appliquée dans le cadre de la décentralisation, pose tout de même de nouvelles problématiques.

Nos travaux de recherche ne visent pas à analyser toutes les implications de la réforme en cours au niveau de l'administration territoriale béninoise. Nous focaliserons notre analyse sur les attributions du maire depuis le 1er avril 2022, date à laquelle le Code de l'administration territoriale est entré en vigueur en partant de la réforme institutionnelle. La codification intervenue au niveau de l'administration territoriale a instauré une série de réformes qu'il est illusoire de vouloir étudier en profondeur dans un travail de recherche comme le nôtre. Mieux, en ce qui concerne la libre administration des collectivités par des conseils élus, nous ne nous focaliserons que sur les liens qui existent entre les attributions du maire et la libre administration.

La réflexion sur les implications des attributions du maire sur la libre administration des collectivités béninoises présente un intérêt théorique. Elle revient à montrer l'influence de la minoration des pouvoirs du maire sur l'autonomie organique de la collectivité et donc sur l'exercice de la libre administration.

En effet, s'agissant de l'autonomie organique des collectivités territoriales, même si la doctrine n'a pu être unanime sur les conditions de son effectivité, une grande partie a établi une corrélation entre décentralisation locale et démocratie. Ainsi, à l'image de Hauriou en 1921, certains ont affirmé que la libre administration implique nécessairement l'élection de tous les organes de la collectivité34(*). Selon Hauriou, la décentralisation ne vise pas à assurer une meilleure gestion administrative, mais à promouvoir une participation plus démocratique des citoyens. En effet, «  elle tend à créer des centres d'administration publique autonomes où la nomination des agents provient du corps électoral de la circonscription [...]. Dans cette perspective, la décentralisation ne vise pas à assurer une meilleure gestion administrative, mais à promouvoir une participation plus démocratique des citoyens [car] s'il ne s'agissait que du point de vue administratif, la centralisation assurerait au pays une administration plus habile, plus impartiale, plus intègre et plus économe que la décentralisation. Mais un pays n'a pas besoin seulement d'une bonne administration, il a besoin aussi de liberté politique »35(*). A contrario, beaucoup ont tempéré cette corrélation décentralisat !ion-élection. En tête de file, le Doyen Vedel. Pour ce dernier comme pour Favoreu, si Hauriou a raison d'accorder une place privilégiée à l'élection des organes dans l'expression de la libre administration, l'élection n'est pas le critère de l'autonomie organique36(*). Ces deux auteurs se rejoignent pour dire que théoriquement, l'élection a une place privilégiée et est un moyen d'assurer une véritable décentralisation. Mais, si l'élection de chaque organe communal est indissociable de l'idée et de la réalisation de la décentralisation, elle n'est pas indispensable.

C'est ce qu'il ressort de l'analyse faite par Favoreu de l'autonomie organique des collectivités et du principe constitutionnel de la libre administration ; analyse qui se base sur les différentes constitutions que la France a eues. Favoreu remarque que l'élection des assemblées délibérantes est le minimum requis pour que la libre administration soit assurée au regard de la Constitution française de 1958, à condition cependant que l'organe exécutif soit issu de cette assemblée délibérante et responsable devant elle.

Le Conseil Constitutionnel français a d'ailleurs constamment réitéré qu'au regard de l'article 72 de la Constitution, l'élection des membres de l'organe délibérant des collectivités territoriales au suffrage universel est une obligation37(*). De même, il doit être compris que tout organe exécutif de la collectivité doit être issu de cet organe délibérant et responsable devant lui38(*).

L'enjeu de notre étude est donc de rechercher si les impératifs nationaux du moment qui ont poussé à la réforme sur la décentralisation au Bénin et qui ont contribué à la minoration des pouvoirs du maire n'ont pas affecté l'autonomie organique des collectivités béninoises.

D'un point de vue pratique ou social, l'intérêt de cette étude réside dans la vulgarisation de la nouvelle réforme de l'administration territoriale. Actuellement les pouvoirs traditionnellement dévolus à l'organe exécutif d'une commune sont partagés entre trois organes à savoir le maire, le Conseil de supervision et le Secrétariat exécutif. Il est donc intéressant de relever les pouvoirs de chaque organe, d'en faire une analyse historique et de vulgariser les nouvelles dispositions voulues par la réforme institutionnelle locale béninoise.

Tout comme Yves Mény qui s'interrogeait en 1974 : « à quoi sert-il d'affirmer que la commune est une collectivité territoriale décentralisée caractérisée par son autonomie juridique et financière ainsi que par l'élection des dirigeants si l'environnement juridique, économique, technique ne lui en laisse que les apparences ?»39(*), nous nous pencherons sur les attributions du maire et des autres organes de la collectivité territoriale au Bénin pour déterminer si l'autonomie organique des collectivités n'a pas été affectée. Cela nous amènera à nous demander si cette réforme institutionnelle garantit l'atteinte des objectifs de développement local.

Pour répondre à ces questions, nous nous baserons à la fois sur une approche méthodologique analytique et comparative. Nous présenterons les bases constitutionnelles de la décentralisation au Bénin et plus globalement les fondements juridiques de la décentralisation. Ces fondements juridiques consacrent la libre administration qui se manifeste par l'autonomie des organes locaux. Ensuite, les nombreux défis et irrégularités qui ont parsemé et fragilisé l'expérience de la décentralisation au Bénin depuis près de 20 ans seront revus. Puis, nous présenterons les nouvelles fonctions du maire et de ces organes concurrents. Ce n'est qu'après cela que nous ferons une analyse comparée, dans une logique pragmatique, de la réforme institutionnelle, fruit de la volonté d'intégrer les logiques de performance publique dans la sphère locale. Nous décortiquerons ainsi les spécificités de la réforme au Bénin comparée à d'autres réalités en Occident et en Afrique.

Dans le cadre de notre étude, nous recourrons également à la documentation disponible dans les bibliothèques et en ligne. Nous nous appuierons sur la jurisprudence et sur les textes législatifs béninois et d'ailleurs. Nous aurons enfin recours aux livres et revues juridiques qui traitent de la décentralisation et de la nouvelle gestion publique locale.

En réponse à la problématique posée qui est de savoir si les pouvoirs actuels du maire sont en adéquation avec les bases constitutionnelles de la décentralisation au Bénin et si elles permettent d'atteindre les objectifs de la décentralisation, nous étudierons d'abord les fondements juridiques de la décentralisation (Partie 1). Ensuite, nous étudierons les implications de l'intégration des logiques de nouvelle gestion publique locale sur la place du maire dans la commune béninoise (Partie 2).

Partie 1 : Les fondements juridiques de la décentralisation au Bénin

* 1 OCDE, Réussir la décentralisation : Manuel à l'intention des décideurs, Editions OCDE, Paris, 2019, p.5 - la citation complète est « La décentralisation ne saurait être considérée comme une solution universelle à tous les types de problèmes qu'un pays peut rencontrer, ni comme une finalité en soi ; il s'agit plutôt d'un moyen d'atteindre certains objectifs ».

* 2 MENY Yves, Centralisation et décentralisation dans le débat politique français, LGDJ, Paris, 1974, p.25.

* 3 AKEREKORO Hilaire, Droit et finance des collectivités territoriales décentralisées, Abomey-Calavi, Les éditions de la miséricorde, 2020, pp. 20-32. Il s'agissait beaucoup plus d'une application du principe de subsidiarité par laquelle les territoires étaient morcelés pour favoriser une administration de proximité.

* 4 NANAKO Cossoba, La libre administration des collectivités territoriales au Bénin et au Niger, Doctorat, Droit public, Université d'Abomey-Calavi (Bénin), 2016, pp.48-49 ; AKEREKORO Hilaire, op.cit., pp.20-21

* 5 ADAMOU Karimou, Les déterminants de la qualité de la gestion des communes béninoises, Gestion et management, Doctorat, Université de Lorraine, France, 2021, p.140 ; CRAWFORD Gordon et HARTMANN Christof, Decentralisation in Africa : A pathway out of poverty and conflict ? Amsterdam University Press, Amsterdam, 2008, p.8

* 6 CISSÉ Falilou Mbacké & VAN EYNDE Karla, Evaluation du thème « Appui à la décentralisation et gouvernance locale » Etape 2 : Etudes de terrain : Le Bénin, IIED, Paris, avril 2006, p.117

* 7 Document de synthèse du séminaire DeLog sur l'efficacité de l'aide, la décentralisation et la gouvernance locale au Bénin, décembre 2012, Grand-Popo - Bénin, pp.50-51

* 8 Création du Ministère en charge de la Décentralisation en 2007, création par décret n°2008-274 du 19 mai 2008 de la CONAFIL (Commission Nationale des Finances Locales) chargée d'administrer le FADeC (Fonds d'Appui au Développement des Communes), adoption en décembre 2009 de la PONADEC (Politique Nationale de Décentralisation et de Déconcentration), mise en place en 2012 d'un Comité Interministériel de pilotage de la PONADEC.

* 9 « L'élaboration d'un code général de l'administration territoriale assez innovant et couvrant les enjeux de la décentralisation de la déconcentration, de l'aménagement du territoire, de la régionalisation du développement et des spécificités des espaces frontaliers ». 13ème recommandation du Rapport général du Forum 10 ans de décentralisation, 2015.

* 10 CORNU Gérard (Dir.), Vocabulaire juridique, Paris, PUF, 12e édition, col «Quadrige», 2018

* 11 AVRIL Pierre & GICQUEL Jean, Lexique de droit constitutionnel, Que sais-je ?, 4e Edition, PUF, 2013, 164p

* 12 CORNU Gérard (Dir.), op. cit.

* 13 GONOD Pascale et coll. (Dir.), Traité de droit administratif, Tome 1, Paris, Dalloz, 2011, p.326 ; FRIER Pierre-Laurent et PETIT Jacques, Droit administratif, 12e édition, Précis DOMAT Droit public, Paris, 2018-2019, p.189, ss254 ; DUPUIS Georges et coll., Droit administratif, 10e édition, Dalloz, Paris, 2007, p.266 ; WALINE Jean, Droit administratif, 27e Edition, Paris, Dalloz, 2018, ss175 ; VERPEAUX Michel et coll., Les collectivités territoriales et la décentralisation, 9e édition, Paris, Découverte de la vie publique, 2016, p.20

* 14 VAN LANG Agathe et coll., Dictionnaire de droit administratif, Paris, Dalloz, 7e édition, col Sirey, 2015

* 15 Au Rwanda, en Belgique, au Pays-Bas et aujourd'hui encore dans certains landërs en Allemagne - pour ne citer que ces cas - le chef de l'exécutif local n'est pas élu.

* 16 Le Rwanda est l'un des rares cas, avec désormais le Bénin.

* 17 Charte africaine des valeurs et des principes de la décentralisation, de la gouvernance locale et du développement local, article 1.

* 18 Il faut en effet la rencontre de l'autonomie juridique et financière (personnalité juridique distincte de celle de l'Etat), de l'autonomie organique (liberté d'administration) et de l'autonomie fonctionnelle (notion d'affaires locales) pour commencer à parler de décentralisation.

* 19 VAN LANG Agathe et coll., op. cit.

* 20 CORNU Gérard (Dir.), op. cit.

* 21 CORNU Gérard (Dir.), op. cit.

* 22 VEDEL Georges et DELVOLVE Pierre, Droit administratif, Paris, Themis droit public, t. II, p. 388 cité par LALEYE Oladé, La décentralisation et le développement des territoires au Bénin, Paris, Ed. L'Harmattan, 2003, p. 42

* 23 BORNER-KAYDEL Emmanuelle, « Le principe de libre administration des collectivités territoriales dans la jurisprudence du Conseil d'État », Les Annales de droit, octobre 2016, p10

* 24 BORNER-KAYDEL Emmanuelle, Ibid., p10

* 25 GUINCHARD Serge (Dir.), Lexique des termes juridiques, Paris, 25e Edition, Dalloz, 2017,

* 26 FAVOREU Louis et coll., Droit constitutionnel, Paris, Dalloz, 21e Edition, 2019, p. 524.

* 27 ROIG Charles, « Théorie et réalité de la décentralisation », In Revue française de science politique, 16? année, n°3, 1966. pp. 446-449

* 28 NANAKO Cossoba, Approfondir les processus de décentralisation en Afrique de l'Ouest francophone, les Éditions du CeDAT, Cotonou, 2018, p. 29

* 29 NANAKO Cossoba, La libre administration des collectivités territoriales au Bénin et au Niger, Doctorat, Droit public, Université d'Abomey-Calavi (Bénin), 2016, p. 353.

* 30 Loi 2021-14, art. 130.

* 31 Loi 2021-14, art. 127 et art. 132.

* 32 ADANDE Ginette Fleure, « Les maires béninois ne contrôleront plus leurs budgets », VOA Afrique, 09 octobre 2021, https://www.voaafrique.com/a/d%C3%A9centralisation-au-b%C3%A9nin-retrait-de-la-gestion-financi%C3%A8re-aux-maires-des-communes/6256382.html (consulté le 20 février 2023)

* 33 DE VISSCHER Christian, Autorités politiques et haute administration : une dichotomie repensée par la NGP ? In : Revue internationale de politique comparée, 2004/2 (Vol. 11), pages 205 à 224 (consultable en ligne)

* 34 HAURIOU Maurice, précis de droit administratif, Paris, 1921, p. 109

* 35 HAURIOU Maurice, op. cit., p. 109 - Beaucoup ont soutenus cette position. D'abord le Président français Paul Deschanel en 1895 pendant qu'il était député l'a affirmé avant Hauriou. Il soutenait que « la décentralisation faisait passer les affaires de la main des fonctionnaires à celle des citoyens et constituait le gouvernement du pays par le pays ». DESCHANEL Paul, La décentralisation, Paris, 1895, p. 44-45. Pour la littérature et dans cette logique, voir ROIG Charles, op. cit., p. 449 ; Auby et Ducos-Ader, Institutions administratives, Paris, 1971, Dalloz, p. 85

* 36 FAVOREU Louis et coll., Droit constitutionnel, op. cit., p. 524 ; VEDEL Georges, droit administratif, Thémis, Paris, 1973, p. 641

* 37 Voir dans ce sens : Décision n° 92-308 DC du 9 avril 1992 et Décision n° 92-312 DC du 2 septembre 1992 relatives au Traité sur l'Union européenne

* 38 Voir Décision n° 91-290 DC du 9 mai 1991 relative à la loi portant statut de la collectivité territoriale de Corse

* 39 MENY Yves, op. cit., p. 38

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