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L'introduction du modèle coopératif sur un marché concurrentiel: l'exemple de Railcoop sur le marché ferroviaire


par Boris Chiron
Université de Nantes - Master Science Politique de l'Europe 2022
  

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Conclusion

Attention, l'arrivée en gare est imminente. Railcoop semble lancée sur de bons rails, devenant un exemple d'entreprise coopérative à avoir réussi à s'insérer sur un marché concurrentiel, et se projette déjà vers un horizon fait de progression, d'expansion, à un niveau national. Mais pour en arriver là, ses créateurs du Lot et l'ensemble hétérogène des sociétaires qui les ont rejoints au cours du voyage ont dû passer plusieurs étapes, jouant des atouts que le modèle de la Société Coopérative d'Intérêt Collectif apporte, dans le but de contourner les faiblesses que cela peut engendrer. Un processus que l'on peut généraliser puisqu'on le retrouve chez d'autres coopératives, Enercoop en premier lieu, mais aussi les autres composantes du réseau des Licoornes sur lequel Railcoop a pu s'appuyer.

Dans un contexte historique fortement marqué par le modèle monopolistique apparu dans les années 1930 et structuré autour de la SNCF, la coopérative de Cambes a dû se frayer un chemin dans les remous que la libéralisation du marché et de l'arrivée de multiples concurrents au cours des dernières années. En deux ans, Railcoop a su profiter des mutations des cadres institutionnels engendrés par l'européanisation (libéralisation du marché ferroviaire) et les changements de stratégies de la SNCF (désertification ferroviaire), tout en développant un modèle devenu de plus en plus légitime et crédible en étant rigoureux techniquement et financièrement, tout en bénéficiant des encouragements de nombreux acteurs politiques et économiques du marché. Mais il ne faut pas négliger la partie que Railcoop ne maîtrisait pas: le contexte très favorable à l'émergence de ce type d'initiatives. En effet, même si on peut leur reconnaître la réussite de l'exploitation de la fenêtre d'opportunité qui s'est présentée à eux, les créateurs de la SCIC ont bénéficié d'un moment carrefour fait de crise Covid et de poussée des questions écologiques au sein de l'opinion, favorisant ainsi les initiatives citoyennes, locales, basées sur le développement durable, ce qui a provoqué un engouement médiatique qui leur fut très favorable.

La réussite d'un tel mode de fonctionnement face à des entreprises beaucoup plus classiques tient donc à un jeu de jongles constant entre innovation et imitation, entre critique du marché et participation à celui-ci. Tout cela n'est permis que par une implantation dans des espaces peu convoités, une faible incertitude des coûts avec des dépenses plus faibles que les concurrents, et un flux de revenu garanti et suffisant par l'afflux continu de sociétaires.

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Pour reprendre les mots de Pierre Wokuri, les projets coopératifs agissent en subversif (tend à renverser l'ordre établi) mais également en symbiotes (vit en symbiose avec des acteurs différents).

Mais des nuages se présentent aussi à l'horizon à l'heure où la première ligne en projet, Bordeaux-Lyon, a déjà connu deux retards de lancement de six mois et attend toujours le premier coup de sifflet du chef de gare. L'action de Railcoop peut en effet être freinée par le fait qu'elle est une SCIC, avec un collectif qui engendre une prise de décision beaucoup plus longue, et un flux de revenus qui n'est toujours pas garanti tant que les premières lignes ne sont pas lancées. Par ailleurs, la SNCF, qui ne voit pas toujours cette idée d'un très bon oeil, est encore très présente dans l'ensemble des rouages du secteur ferroviaire et Railcoop reste assez vulnérable face à cela malgré l'engouement citoyen qu'elle peut susciter. Mais sans la SNCF et ses choix de délaisser certaines lignes, Railcoop pourrait-elle exister?

Pour la suite, Frédéric Laporte affirme que tous les éléments sont réunis en résumant la situation : «Je suis très confiant pour la suite. [...] Si il y a autant de monde autour de la table, c'est bien parce que c'est concret. On a affaire à des gens sérieux, spécialistes du transport, intelligents, déterminés, mobilisateurs, qui ont su fédérer, desfois même des intérêts divergents. Le seul qui résiste c'est la SNCF.». L'optimisme est également de mise chez les dirigeants de Railcoop qui voient ce Bordeaux-Lyon comme un vecteur de réussite, Dominique Guerrée confiant qu'il voit cela «d'un très bon oeil. Il faut vraiment qu'on réussisse la performance du Lyon-Bordeaux, si ça démarre bien, c'est tout gagné pour le reste. Mais je ne vois pas pourquoi ça ne fonctionnerait pas». Reste donc maintenant à savoir comment Railcoop peut subsister et continuer de progresser sans devenir pour autant une entreprise basée sur la recherche de la plus grande rentabilité et la compétitivité, comment le modèle coopératif peut-il devenir un acteur fixe d'un marché concurrentiel après s'y être inséré, pour ne jamais connaître de terminus.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault