C/ Le processus de création de la SN SOSUCO
La création d'un complexe sucrier d'envergure nationale
nécessite un long processus de travail passant par des études de
terrain, des notes de réflexion, la recherche de financement, le
démarrage des activités industrielles et enfin la mise sur le
marché du produit fini.
48Archives nationales de France, Direction du
développement économique du Ministère chargé de la
coopération, Fond 201 MC, 19860346/20, Projet sucrier de Banfora,
1972.
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1. La phase d'études avec la SESUHV
Cette première phase a été importante
pour le complexe sucrier de la Haute-Volta car elle a déterminé
la fiabilité et la durabilité du projet sucrier. Le 17 août
1965, le gouvernement de la Haute-Volta et la Société
Industrielle et Agricole de Niari (SIAN)49 signent un Protocole
d'accord. Cet accord a conduit à la création, le 27 novembre
1965, de la Société d'Etudes Sucrières de
Haute-Volta (SESUHV) avec le statut de société anonyme.
Cette société a été créée pour une
durée de 99 ans et « a pour objet toutes études agronomiques
et industrielles pour tous les problèmes de production de canne, de
fabrication et de raffinage de sucre et tous problèmes s'y rattachant
jusqu'à la commercialisation sur le territoire de la République
de la Haute-Volta »50. Le gouvernement voltaïque confie
à la SESUHV le soin de réaliser pour son compte un programme
d'essais et d'expérimentations agronomiques en vue de promouvoir la
culture industrielle de la canne à sucre et la création d'une
industrie sucrière. Ce programme devrait avoir une durée de
quatre ans, de 1965 à 196951. Outre le gouvernement
voltaïque, la SESUHV rendait compte à deux autres associés
du projet sucrier : la Société Multinationale pour le
Développement des Industries Alimentaires et Agricoles (SOMDIAA) et le
gouvernement ivoirien. Le 23 décembre 1965, la première
pépinière est plantée à Bérégadougou
et les essais se poursuivent jusqu'en 197452 avec une augmentation
progressive du nombre de parcelles de canne à sucre.
Pour atteindre ces objectifs, la SESUHV a collaboré
avec d'autres structures existantes. Il s'agit
de :
- La Société Grenobloise d'Etudes et
d'Applications Hydrauliques (SOGREAH) : elle a réalisé des essais
sur les variétés de canne à sucre à cultiver
à Bérégadougou et des études sur les
possibilités hydrauliques53 ;
49 La Société Industrielle et Agricole de Niari
(SIAN) a été créée au Congo-Brazzaville en 1929 et
s'est spécialisée dans la culture et la transformation de la
canne à sucre. En 1949 la SIAN est devenue une filiale du groupe
français SOMDIAA au Congo sous le nom de SIAN-Congo. Après la
privatisation de la SIAN en 1991, la SARIS Congo a été
créée pour la remplacer.
50 Centre National des Archives du Burkina Faso,
Présidence du Faso, sous-série 7V, 7V408, Correspondance relative
au projet de création d'industrie, 1965-1994.
51 Archives nationales de France, Direction du
développement économique du Ministère chargé de la
coopération, Fond 201 MC, 19860346/20, Complexe Agro Industriel de
Banfora, 1972.
52 La toute première campagne de récolte de
canne à sucre du complexe sucrier de la Haute-Volta a eu lieu au cours
de la saison 1974-1975.
53 Cissé O., « Une approche historique de
l'agro-industrie au Burkina Faso », op. cit., p. 15.
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- La Société Générale des
Techniques Hydro-Agricoles (SOGETHA) : elle étudie la mobilisation des
réserves d'eau ;
- L'Institut de Recherches Agronomiques Tropicales (IRAT) pour
la recherche du financement du projet : pionnier dans les études sur la
possibilité de cultiver la canne à sucre en Haute-Volta depuis
1960, mais aussi assistant technique à SOMDIAA dans la
réalisation du complexe ;
- Le Secrétariat français des Missions
d'Urbanisme et d'Habitat (SMUH) : chargé des opérations
d'urbanisme de la ville de Banfora dans le cadre de la réalisation du
complexe sucrier.
En mai 1968, les études de prospection de la SESUHV
sont bien avancées. Elle décide alors de passer à
l'étape suivante du projet : la création d'une
"agglomérerie de sucre"54 à
Bérégadougou, dans le cercle de Banfora55.
2. La création d'une usine d'agglomération
sucrière
En Juillet 1968, la Société
Sucrière de Haute-Volta (SOSUHV) est créée pour
exploiter une "agglomérerie du sucre" à
Bérégadougou, dans le cercle de Banfora56. Le
début de l'exploitation est prévu pour septembre 1969. L'usine
d'agglomération devait avoir une capacité de production de 15 000
tonnes de sucre en morceaux par an. La phase expérimentale des
plantations de cannes n'étant pas achevée, la SESUHV a
décidé d'approvisionner l'usine d'agglomération en sucre
en vrac provenant des territoires membres de l'OCAM. Ces échanges se
feront conformément aux Accords Sucriers en vigueur. Cette
usine d'agglomération du sucre a été créée
pour être intégrée dans la future sucrerie. Le coût
du financement de l'usine d'agglomération du sucre a été
estimé à 300 millions de francs CFA avec un apport de
crédit de 200 millions. Les 100 millions de francs CFA
restants57 constituaient le capital social de l'agglomérerie
et se répartissaient comme suit : 33 millions pour le gouvernement
voltaïque, 33 millions pour la SIAN et 34 millions pour les
54 Le terme "agglomérerie du sucre" apparaît
ainsi dans les archives. Mais nous pensons que ce terme est désuet et
qu'il faudrait plutôt parler de « usine d'agglomération
sucrière ». Cependant, par souci de conformité avec les
sources écrites, nous conserverons l'appellation officielle du terme.
55 Pour rappel, le site de Bérégadougou n'a pas
été la seule zone étudiée. D'autres sites ont
été étudiés, comme la vallée du Sourou (au
nord-ouest du Burkina Faso) et les sites derrière les barrages. De nos
jours, des sites non retenus pour la culture de la canne à sucre ont
été aménagés pour la culture du riz.
56 Centre National des Archives du Burkina Faso,
Ministère du Plan, Commerce, Industrie et Mines, sous-série 17V,
17V93, Société Sucrière de la Comoé : études
diverses, 1986, p. 2.
57 Ce capital social a été finalement
porté à 110 millions de francs CFA.
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souscripteurs privés58. L'usine
d'agglomération a fonctionné jusqu'à la création du
complexe sucrier en 1972.
3. Le processus de mise en place du complexe
sucrier
En 1972, compte tenu des résultats encourageants de
"l'agglomérerie du sucre" de Bérégadougou, le gouvernement
voltaïque décide de réaliser un complexe sucrier
qui engloutira l'usine d'agglomération du sucre. La SESUHV a
donc été absorbée par ce complexe sucrier. Un premier
contrat est signé le 20 octobre 1972 entre la République de la
Haute-Volta et la SOMDIAA pour la réalisation du complexe sucrier :
c'est le Contrat d'établissement. Il portait sur la culture de
4 000 hectares de canne à sucre sur un total de 10 000 hectares en deux
étapes : l'une de 2 250 ha et l'autre de 1 700 ha. Ce contrat devrait
également permettre la construction d'une usine de transformation de la
canne à sucre de 30 000 tonnes par an59, soit le double de
l'usine d'agglomération. Le capital social est porté à 1
832 500 francs CFA.
L'année suivante, en 1973, le capital est porté
à 1 965 500 francs CFA après la signature du contrat
d'établissement entre le gouvernement voltaïque et la SOMDIAA.
Cette convention fixe les conditions d'exercice de la multinationale
française et définit les avantages fiscaux et douaniers pour le
transport du matériel du complexe.
De 1972 à 1974, la SOMDIAA et ses partenaires
techniques procèdent à la construction des bâtiments,
à la fourniture du matériel agricole et à l'installation
des machines de la raffinerie. Les dernières expérimentations sur
les variétés de canne à sucre sont achevées et la
récolte peut avoir lieu en décembre 1974. Dès 1972, des
opérations d'urbanisme sont prévues à Banfora dans le
cadre de la construction du complexe agro-industriel. Dirigées par le
Secrétariat français des Missions d'Urbanisme et d'Habitat
(SMUH), ces opérations devaient déboucher sur un plan
d'aménagement de la ville de Banfora60.
Le 28 janvier 1975, le gouvernement de la Haute-Volta
procédait à l'inauguration du complexe sucrier.
La SOSUHV venait de mettre sur le marché son sucre granulé issu
de ses plantations de canne à sucre. Le
1er juillet 1975, le gouvernement
de la République de la Haute-Volta signe
58 Centre National des Archives du Burkina Faso,
Ministère du Commerce, du Développement industriel et des Mines,
sous-série 31V, 31V145, Création d'une agglomérie de sucre
à Bérégadougou (cercle de Banfora) -
Procès-verbal de réunion, 1968.
59 Cissé O., « Une approche historique de
l'agro-industrie au Burkina Faso », op. cit., p. 26.
60 Centre National des Archives du Burkina Faso,
Ministère des Travaux Publics et de l'Urbanisme, sous-série 40V,
40V28, Société Sucrière de la Haute-Volta : études
d'urbanisme de Banfora, levers topographiques, correspondance - Compte
rendu de réunion, 1972, p. 2.
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officiellement un nouveau contrat avec la SOMDIAA. Ce contrat
permet à la multinationale française d'assurer l'assistance
technique de gestion et la responsabilité de l'exploitation. Il a
été signé pour une période de 10 ans à
compter de la date de signature du contrat61.
La SOSUHV a connu de nombreuses mutations au cours de son
évolution. Ces changements sont caractérisés par des
périodes de forte croissance économique, des crises de
mévente ou des périodes de stabilité économique. La
gestion du complexe a été confiée dès le
départ à une entreprise privée, puis nationalisée
dans les années 80 avant d'être privatisée à la fin
du XXe siècle.
II. L'exploitation du complexe sucrier sous la direction
du Groupe SOMDIAA
Outre l'État de la Haute-Volta, un autre partenaire est
fortement impliqué dans le projet sucrier de la Haute-Volta depuis 1965.
Il s'agit de la Société Industrielle et Agricole de Niari (SIAN)
au Congo-Brazzaville, créée en 1947, dont une partie a servi de
base à la création de la SOMDIAA en 1970. Sa forte implication et
son expertise dans l'industrie sucrière ont certainement conduit
l'État voltaïque à confier à la SOMDIAA la gestion de
la nouvelle société sucrière en 1975.
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