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La société sucrière du Burkina Faso (SN SOSUCO : de l'aménagement du territoire à  la construction de la mémoire (1965-2020)


par Thomas Frank Bancé
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne - Master de recherche 2023
  

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C/ Le processus de création de la SN SOSUCO

La création d'un complexe sucrier d'envergure nationale nécessite un long processus de travail passant par des études de terrain, des notes de réflexion, la recherche de financement, le démarrage des activités industrielles et enfin la mise sur le marché du produit fini.

48Archives nationales de France, Direction du développement économique du Ministère chargé de la coopération, Fond 201 MC, 19860346/20, Projet sucrier de Banfora, 1972.

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1. La phase d'études avec la SESUHV

Cette première phase a été importante pour le complexe sucrier de la Haute-Volta car elle a déterminé la fiabilité et la durabilité du projet sucrier. Le 17 août 1965, le gouvernement de la Haute-Volta et la Société Industrielle et Agricole de Niari (SIAN)49 signent un Protocole d'accord. Cet accord a conduit à la création, le 27 novembre 1965, de la Société d'Etudes Sucrières de Haute-Volta (SESUHV) avec le statut de société anonyme. Cette société a été créée pour une durée de 99 ans et « a pour objet toutes études agronomiques et industrielles pour tous les problèmes de production de canne, de fabrication et de raffinage de sucre et tous problèmes s'y rattachant jusqu'à la commercialisation sur le territoire de la République de la Haute-Volta »50. Le gouvernement voltaïque confie à la SESUHV le soin de réaliser pour son compte un programme d'essais et d'expérimentations agronomiques en vue de promouvoir la culture industrielle de la canne à sucre et la création d'une industrie sucrière. Ce programme devrait avoir une durée de quatre ans, de 1965 à 196951. Outre le gouvernement voltaïque, la SESUHV rendait compte à deux autres associés du projet sucrier : la Société Multinationale pour le Développement des Industries Alimentaires et Agricoles (SOMDIAA) et le gouvernement ivoirien. Le 23 décembre 1965, la première pépinière est plantée à Bérégadougou et les essais se poursuivent jusqu'en 197452 avec une augmentation progressive du nombre de parcelles de canne à sucre.

Pour atteindre ces objectifs, la SESUHV a collaboré avec d'autres structures existantes. Il s'agit

de :

- La Société Grenobloise d'Etudes et d'Applications Hydrauliques (SOGREAH) : elle a réalisé des essais sur les variétés de canne à sucre à cultiver à Bérégadougou et des études sur les possibilités hydrauliques53 ;

49 La Société Industrielle et Agricole de Niari (SIAN) a été créée au Congo-Brazzaville en 1929 et s'est spécialisée dans la culture et la transformation de la canne à sucre. En 1949 la SIAN est devenue une filiale du groupe français SOMDIAA au Congo sous le nom de SIAN-Congo. Après la privatisation de la SIAN en 1991, la SARIS Congo a été créée pour la remplacer.

50 Centre National des Archives du Burkina Faso, Présidence du Faso, sous-série 7V, 7V408, Correspondance relative au projet de création d'industrie, 1965-1994.

51 Archives nationales de France, Direction du développement économique du Ministère chargé de la coopération, Fond 201 MC, 19860346/20, Complexe Agro Industriel de Banfora, 1972.

52 La toute première campagne de récolte de canne à sucre du complexe sucrier de la Haute-Volta a eu lieu au cours de la saison 1974-1975.

53 Cissé O., « Une approche historique de l'agro-industrie au Burkina Faso », op. cit., p. 15.

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- La Société Générale des Techniques Hydro-Agricoles (SOGETHA) : elle étudie la mobilisation des réserves d'eau ;

- L'Institut de Recherches Agronomiques Tropicales (IRAT) pour la recherche du financement du projet : pionnier dans les études sur la possibilité de cultiver la canne à sucre en Haute-Volta depuis 1960, mais aussi assistant technique à SOMDIAA dans la réalisation du complexe ;

- Le Secrétariat français des Missions d'Urbanisme et d'Habitat (SMUH) : chargé des opérations d'urbanisme de la ville de Banfora dans le cadre de la réalisation du complexe sucrier.

En mai 1968, les études de prospection de la SESUHV sont bien avancées. Elle décide alors de passer à l'étape suivante du projet : la création d'une "agglomérerie de sucre"54 à Bérégadougou, dans le cercle de Banfora55.

2. La création d'une usine d'agglomération sucrière

En Juillet 1968, la Société Sucrière de Haute-Volta (SOSUHV) est créée pour exploiter une "agglomérerie du sucre" à Bérégadougou, dans le cercle de Banfora56. Le début de l'exploitation est prévu pour septembre 1969. L'usine d'agglomération devait avoir une capacité de production de 15 000 tonnes de sucre en morceaux par an. La phase expérimentale des plantations de cannes n'étant pas achevée, la SESUHV a décidé d'approvisionner l'usine d'agglomération en sucre en vrac provenant des territoires membres de l'OCAM. Ces échanges se feront conformément aux Accords Sucriers en vigueur. Cette usine d'agglomération du sucre a été créée pour être intégrée dans la future sucrerie. Le coût du financement de l'usine d'agglomération du sucre a été estimé à 300 millions de francs CFA avec un apport de crédit de 200 millions. Les 100 millions de francs CFA restants57 constituaient le capital social de l'agglomérerie et se répartissaient comme suit : 33 millions pour le gouvernement voltaïque, 33 millions pour la SIAN et 34 millions pour les

54 Le terme "agglomérerie du sucre" apparaît ainsi dans les archives. Mais nous pensons que ce terme est désuet et qu'il faudrait plutôt parler de « usine d'agglomération sucrière ». Cependant, par souci de conformité avec les sources écrites, nous conserverons l'appellation officielle du terme.

55 Pour rappel, le site de Bérégadougou n'a pas été la seule zone étudiée. D'autres sites ont été étudiés, comme la vallée du Sourou (au nord-ouest du Burkina Faso) et les sites derrière les barrages. De nos jours, des sites non retenus pour la culture de la canne à sucre ont été aménagés pour la culture du riz.

56 Centre National des Archives du Burkina Faso, Ministère du Plan, Commerce, Industrie et Mines, sous-série 17V, 17V93, Société Sucrière de la Comoé : études diverses, 1986, p. 2.

57 Ce capital social a été finalement porté à 110 millions de francs CFA.

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souscripteurs privés58. L'usine d'agglomération a fonctionné jusqu'à la création du complexe sucrier en 1972.

3. Le processus de mise en place du complexe sucrier

En 1972, compte tenu des résultats encourageants de "l'agglomérerie du sucre" de Bérégadougou, le gouvernement voltaïque décide de réaliser un complexe sucrier qui engloutira l'usine d'agglomération du sucre. La SESUHV a donc été absorbée par ce complexe sucrier. Un premier contrat est signé le 20 octobre 1972 entre la République de la Haute-Volta et la SOMDIAA pour la réalisation du complexe sucrier : c'est le Contrat d'établissement. Il portait sur la culture de 4 000 hectares de canne à sucre sur un total de 10 000 hectares en deux étapes : l'une de 2 250 ha et l'autre de 1 700 ha. Ce contrat devrait également permettre la construction d'une usine de transformation de la canne à sucre de 30 000 tonnes par an59, soit le double de l'usine d'agglomération. Le capital social est porté à 1 832 500 francs CFA.

L'année suivante, en 1973, le capital est porté à 1 965 500 francs CFA après la signature du contrat d'établissement entre le gouvernement voltaïque et la SOMDIAA. Cette convention fixe les conditions d'exercice de la multinationale française et définit les avantages fiscaux et douaniers pour le transport du matériel du complexe.

De 1972 à 1974, la SOMDIAA et ses partenaires techniques procèdent à la construction des bâtiments, à la fourniture du matériel agricole et à l'installation des machines de la raffinerie. Les dernières expérimentations sur les variétés de canne à sucre sont achevées et la récolte peut avoir lieu en décembre 1974. Dès 1972, des opérations d'urbanisme sont prévues à Banfora dans le cadre de la construction du complexe agro-industriel. Dirigées par le Secrétariat français des Missions d'Urbanisme et d'Habitat (SMUH), ces opérations devaient déboucher sur un plan d'aménagement de la ville de Banfora60.

Le 28 janvier 1975, le gouvernement de la Haute-Volta procédait à l'inauguration du complexe sucrier. La SOSUHV venait de mettre sur le marché son sucre granulé issu de ses plantations de canne à sucre. Le 1er juillet 1975, le gouvernement de la République de la Haute-Volta signe

58 Centre National des Archives du Burkina Faso, Ministère du Commerce, du Développement industriel et des Mines, sous-série 31V, 31V145, Création d'une agglomérie de sucre à Bérégadougou (cercle de Banfora) - Procès-verbal de réunion, 1968.

59 Cissé O., « Une approche historique de l'agro-industrie au Burkina Faso », op. cit., p. 26.

60 Centre National des Archives du Burkina Faso, Ministère des Travaux Publics et de l'Urbanisme, sous-série 40V, 40V28, Société Sucrière de la Haute-Volta : études d'urbanisme de Banfora, levers topographiques, correspondance - Compte rendu de réunion, 1972, p. 2.

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officiellement un nouveau contrat avec la SOMDIAA. Ce contrat permet à la multinationale française d'assurer l'assistance technique de gestion et la responsabilité de l'exploitation. Il a été signé pour une période de 10 ans à compter de la date de signature du contrat61.

La SOSUHV a connu de nombreuses mutations au cours de son évolution. Ces changements sont caractérisés par des périodes de forte croissance économique, des crises de mévente ou des périodes de stabilité économique. La gestion du complexe a été confiée dès le départ à une entreprise privée, puis nationalisée dans les années 80 avant d'être privatisée à la fin du XXe siècle.

II. L'exploitation du complexe sucrier sous la direction du Groupe SOMDIAA

Outre l'État de la Haute-Volta, un autre partenaire est fortement impliqué dans le projet sucrier de la Haute-Volta depuis 1965. Il s'agit de la Société Industrielle et Agricole de Niari (SIAN) au Congo-Brazzaville, créée en 1947, dont une partie a servi de base à la création de la SOMDIAA en 1970. Sa forte implication et son expertise dans l'industrie sucrière ont certainement conduit l'État voltaïque à confier à la SOMDIAA la gestion de la nouvelle société sucrière en 1975.

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