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La société sucrière du Burkina Faso (SN SOSUCO : de l'aménagement du territoire à  la construction de la mémoire (1965-2020)


par Thomas Frank Bancé
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne - Master de recherche 2023
  

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Conclusion

L'analyse du complexe sucrier du Burkina Faso a permis de comprendre le processus d'aménagement du territoire pour la réalisation d'une zone de culture de la canne à sucre, des installations industrielles et des zones d'habitation pour les employés de la société. La culture de la canne à sucre dans un pays soudano-sahélien nécessite un aménagement spécifique du territoire. Du système d'irrigation à la récolte de la canne, en passant par la phase d'entretien et de croissance, la zone de culture offre un rendement annuel assez satisfaisant pour la production du sucre. La mécanisation d'une grande partie des opérations culturales a facilité les activités et amélioré les rendements qui s'élèvent en moyenne à 300 000 tonnes de canne à sucre. La canne obtenue dans la zone de culture est broyée, raffinée et agglomérée dans les installations industrielles de la SN SOSUCO. Le sucre granulé et en morceaux ainsi obtenu est ensuite commercialisé sur le marché national par l'intermédiaire de grossistes. Les sous-produits de la canne à sucre (bagasse, mélasse et vinasse) sont valorisés de plusieurs manières. La mélasse est utilisée pour produire de l'alcool éthylique 96° GL, la bagasse pour la production d'énergie et d'engrais, et la vinasse comme fertilisant pour les sols. Le travail est organisé et hiérarchisé à la SN SOSUCO. Le personnel exerce dans trois activités principales : la gestion, la production et le soutien. Les directeurs et les chefs de services sont chargés de veiller à ce que cette organisation du travail soit respectée au quotidien, afin d'atteindre les objectifs de l'entreprise. Aujourd'hui, la compagnie sucrière est une source de fierté nationale pour ses nombreuses contributions au développement social et économique de la région des Cascades. Avec ses 3 000 employés, elle est le deuxième employeur du Burkina Faso après l'État. Toutefois, la culture de la canne à sucre s'est révélée être une culture qui épuise les sols et la nappe phréatique. Les installations industrielles polluent l'environnement en rejetant des produits chimiques et des eaux usées. Ces impacts négatifs de l'industrie sucrière sur l'homme et la nature doivent être au centre de l'attention des autorités publiques burkinabè.

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Chapitre III : L'HISTOIRE ET LE PATRIMOINE COMME MOYENS DE PROMOTION

DES ENTREPRISES INDUSTRIELLES

Abstract

In the first two chapters, we presented the history of the evolution of the Burkinabè sugar company, including the process of sugar land development. In this final chapter, we highlight the heritage value of Burkina Faso's sugar industry. To do this, we begin by presenting Burkina Faso's sugar heritage. This heritage is made up of the sugarcane landscape, the assets of the production site, the workers' housing estates, the abandoned railroad line and the documentation produced by the sugar company. The sugar heritage that has not been protected since 1965, we will attempt to demonstrate its heritage value with a view to its inclusion on the national cultural heritage list. The second project concerns the creation of a Centre d'Interprétation du Sucre dans les Cascades (CISC). The aim of this center is to promote sugar heritage through museographic and scenographic trails. The last project, storytelling, is a communication technique designed to promote the sugar industry through the production of moving stories about SN SOSUCO, the two brands of sugar marketed in Burkina Faso, and about sugar products and their by-products. All these objectives are part of a strategy to discover and promote Burkina Faso's sugar heritage.

Champ de canne à sucre

Arbres de rôniers

Source : ACE Développement Synergie, extrait vidéo consulté le 20 mai 2022, URL : https://youtu.be/Vul95akdGuA.

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I. Le patrimoine sucrier du Burkina Faso

L'introduction générale de cette étude précise déjà le concept de patrimoine industriel dans sa globalité. Sur cette base, nous avons considéré le patrimoine sucrier du Burkina Faso comme l'ensemble des biens historiques, culturels et économiques liés à la culture, à la transformation et à la commercialisation de la canne à sucre.

A/ La description du patrimoine sucrier burkinabè

Les sites et biens liés à l'industrie sucrière que nous allons décrire sont actuellement en activité, ce qui en fait un patrimoine industriel "vivant". Ce patrimoine est essentiellement matériel, compte tenu de la mécanisation d'une grande partie de la culture de la canne à sucre et de la transformation industrielle de la canne à sucre en produits sucriers. Il comprend les champs de canne, les sites de production de sucre et les habitations.

1. Le paysage de la canne à sucre

La zone de culture de la canne à sucre de la SN SOSUCO (voir Figure 6) est sans aucun doute le premier patrimoine matériel sucrier du Burkina Faso de par son ampleur. Ces champs offrent un paysage agricole sans précédent, unique dans tout le pays. La vue agréable attire le regard des populations locales et des usagers de la route nationale, faisant de la région une destination touristique privilégiée pour les nationaux comme pour les étrangers.

Figure 22 : Photographie panoramique du paysage de canne à sucre

Figure 23 : Photographie du paysage de la canne à sucre

Source : Bancé Thomas Frank, Visite de terrain de la SN SOSUCO, Bérégadougou, novembre 2021.

La canne à sucre est une monoculture étendue sur une superficie d'environ 4 210 ha, à l'aide de machines agricoles, d'outils de culture manuels et de matériel d'irrigation des plantes. La SN SOSUCO utilise des machines agricoles telles que des tracteurs agricoles de 175 chevaux, des tracteurs de génie civil, d'équipements d'épandage d'engrais et d'herbicides, des ramasseurs de canne, des camions et des remorques pour transporter les tiges de cannes coupées vers les zones industrielles (Figure 24). Le parc automobile de l'entreprise est complété par des charriots élévateurs, des véhicules de service et des camions pour la livraison du sucre aux clients (voir annexe 9). Les outils manuels utilisés dans les champs sont principalement des machettes et des couteaux. Ces outils manuels, utilisés pour effeuiller et couper les tiges de canne à sucre, ont leur propre histoire et ont évolué en même temps que les techniques de forge.

Figure 24 : Photographies de machines agricoles utilisées à la SN SOSUCO

Tracteur de génie civil

Appareil d'épandage d'engrais et de herbicides

Source : Site web officiel de la SN SOSUCO, consulté le 13 juillet 2023, URL : https://snsosuco.com/nos-equipements.

Le matériel d'irrigation est le dernier élément du patrimoine matériel de la canne à sucre.

L'irrigation par pivot et par rampe frontale des champs de canne à sucre permet à l'eau de s'écouler

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des réservoirs vers les cannes, leur apportant l'eau supplémentaire dont elles ont besoin pour croître. Dans certaines zones de culture, l'irrigation par couverture intégrale et les arroseurs motorisés sont utilisés pour irriguer les champs de canne à sucre.

Figure 25 : Photographies de l'équipement hydraulique de la SN SOSUCO

Rampes mobiles pivotantes

Source : Magazine Jeune Afrique, « Comment l'Aga Khan a redressé le Burkinabè Sosuco ? », art. cit., p. 1.

Tour de la rampe

Porte-à-faux de la rampe

Source : Bancé Thomas Frank, Visite de terrain à la SN SOSUCO, Bérégadougou, novembre 2021.

2. Le site de production du sucre

Couramment appelé "usine", le site de production est le lieu où la canne à sucre est transformée en différents types de sucre et de sous-produits. Le site de production de sucre est composé de plusieurs bâtiments de style architecturaux différents207. Ces bâtiments sont les suivants :

207 Faute d'accès aux données, nous ne sommes pas en mesure de fournir plus d'informations sur l'architecture de chaque bâtiment de l'usine : fiche technique, dimensions, matériaux, etc. Nous nous sommes contentés d'une observation visuelle de ces bâtiments lors de notre visite de terrain.

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- Le bâtiment de la sucrerie-raffinerie : le plus grand bâtiment par sa dimension, il abrite les installations industrielles de la sucrerie de canne et de la raffinerie de sucre (Annexe 8). A l'intérieur de ce bâtiment se trouvent des machines chargées de transformer la canne à sucre en sucre granulé et en sucre en morceaux (Annexe 8). Il s'agit des moulins, des générateurs, des clarificateurs, des chaudières, des appareils à cuire, des filtres, des sécheurs, des lignes de moulage et une ensacheuse208. Bien qu'une grande partie du travail soit mécanique, les ouvriers de l'usine effectuent également des opérations mineures à la main.

- La distillerie d'alcool : cette zone est consacrée à la production d'alcool éthylique à 96° GL à partir de la mélasse de canne à sucre. Elle comprend des cuves, un bac en PVC, une batterie de 6 fermentateurs, une chaudière et des tanks de stockage d'alcool209.

- Les bâtiments administratifs : pour gérer et contrôler les activités industrielles, des bureaux administratifs ont été installés à l'intérieur du site de production.

- Les bâtiments annexes : autour de ces bâtiments principaux se trouvent le laboratoire d'analyse et de test des échantillons de la société sucrière, des ateliers mécaniques et des entrepôts de stockage. Un garage a été construit derrière l'usine, du côté ouest, pour permettre le stationnement des véhicules de la société. L'usine est alimentée par trois turbo-alternateurs à vapeur situés à l'intérieur de l'usine, fournissant 1 700 kw210.

Les machines obsolètes et les pièces de rechange sont stockées dans une zone réservée à cet effet, près de l'atelier de mécanique.

3. Les autres patrimoines sucriers

Outre le paysage de la canne à sucre et le site de production, les cités ouvrières, les rails abandonnés et la documentation constituent des témoins matériels de l'industrie sucrière burkinabè.

a) Les cités ouvrières

L'habitat des employés fait partie du patrimoine sucrier du Burkina Faso. La construction de logements à partir de 1972 a permis d'offrir un cadre de vie aux employés de la société sucrière. Comme déjà mentionné dans le chapitre précédent, la société sucrière a construit trois types de logements : une cité des cadres et quatre cités ouvrières dans le périmètre sucrier, suivies d'une cité ouvrière en dehors du périmètre, dans la commune de Bérégadougou. Chaque cité se distingue des

208 Site web officiel de la SN SOSUCO, consulté le 13 juillet 2023, URL : https://snsosuco.com/nos-equipements.

209

Ibid.

210 ACE Développement Synergie, op. cit., extrait vidéo consulté le 20 mai 2022, URL : https://youtu.be/Vul95akdGuA.

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autres par son emplacement, sa superficie, son nombre de logements et son style architectural211. Des milliers de travailleurs sont passés par ces habitations depuis leur construction, ce qui en fait un héritage social et culturel de première importance.

Tableau 5 : Les caractéristiques du logement des employés de la société sucrière

Désignation

Emplacement

Superficie

Nombre de
logements

Style architectural

La cité des cadres

Dans le périmètre sucrier, à moins de 100 m des installations industriels

160 m2/ villa

28 villas de type F3 avec jardins privatifs

Maisons à un seul niveau aux murs de ciment ou de granit et aux toits de tôle.

La cité ouvrière

Dans la commune de

Bérégadougou, à quelques km au nord du périmètre sucrier

239 ha

326 villas de type F1 à F5

Maisons à un seul niveau aux murs de ciment et aux toits de tôle.

Les quatre cités ouvrières

Disséminés en 4 endroits du périmètre sucrier, à proximité des zones de culture

Non obtenue

Des logements de type F2 à F3

Maisons à un seul niveau aux murs de ciment et aux toits de tôle.

Source : Bancé Thomas Frank, d'après les données sur les cités ouvrières et des cadres de la SN SOSUCO, juin 2023.

b) Les rails abandonnés

L'usine était reliée au chemin de fer de la Régie Abidjan-Niger (RAN) avant même l'inauguration de la société sucrière en 1975. Mais avec le développement des moyens de transport et le bitumage de la RN7, l'utilisation de la voie ferrée a été abandonnée au profit des routes pour le transport des matières premières et des produits commercialisés par la société sucrière. Ces rails, aujourd'hui abandonnés, sont un témoin tangible de l'histoire sucrière de la région. La Figure 26 montre la voie ferrée abandonnée par la SN SOSUCO.

Figure 26 : Photographies des rails abandonnés dans le périmètre sucrier de la SN SOSUCO

Source : Bancé Thomas Frank, Visite de terrain de la SN SOSUCO, Bérégadougou, novembre 2021.

211 Pour plus d'informations sur les caractéristiques des cités, voir : Chapitre 2, I. C/ Les zones de logements.

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c) La documentation interne de la société sucrière

La documentation est une autre composante du patrimoine sucrier immatériel. Par documentation, nous entendons les photographies, les documents écrits, oraux ou gravés relatifs au fonctionnement de la société sucrière et à ses relations avec le monde extérieur. Il s'agit par exemple des documents administratifs, de la correspondance, des cartes d'identification des travailleurs, des fiches de paie, des données médicales des employés, etc. Cette documentation primaire, produite tout au long de l'existence de l'entreprise, serait conservée au centre de documentation de la SN SOSUCO à Ouagadougou, la capitale du pays212.

Bien qu'il soit difficile de parler d'un patrimoine sucrier immatériel au Burkina Faso en raison de la forte mécanisation de la culture et de la transformation industrielle de la canne à sucre213, nous pensons qu'un certain nombre de savoir-faire et de techniques ont été développés au fil des années. Ces connaissances sont spécifiques à l'industrie sucrière burkinabè et concernent les techniques manuelles d'effeuillage, de coupe et de ramassage des tiges de canne à sucre. Ce savoir-faire est détenu par une minorité de la population de la région et s'acquiert après une période d'apprentissage. Nous envisageons approfondir ce sujet dans nos prochaines études, en menant des enquêtes auprès des ouvriers agricoles de l'industrie sucrière burkinabè.

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