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La société sucrière du Burkina Faso (SN SOSUCO : de l'aménagement du territoire à  la construction de la mémoire (1965-2020)


par Thomas Frank Bancé
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne - Master de recherche 2023
  

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Conclusion

La Nouvelle Société Sucrière de la Comoé, ou SN SOSUCO en abrégé, est l'unique société sucrière du Burkina Faso. Créée en 1965 avec pour objectif la production et la commercialisation du sucre et de ses dérivés sur le territoire national et dans la sous-région, la SN SOSUCO a eu du mal à prendre son envol. En 58 années d'existence, son statut juridique a évolué d'une Société d'économie mixte (1972-1985) à une Société d'État (1985-1998) avant de revenir à une Société d'économie mixte (1998 à ce jour). A l'instar de son statut juridique, la situation économique et sociale de la société sucrière fait preuve de grandes instabilités. Sur le plan économique, la SN SOSUCO a pu atteindre une production record de 37 600 tonnes de sucre (2007-2008) et des ventes de 55 938 tonnes (2001-2002). Durant certaines années, elle a eu de la peine à produire 20 000 tonnes de sucre et à les commercialiser (32 000 tonnes de méventes en mars 2015). De 1998 à 2010, la société sucrière a bénéficié d'investissements d'environ 20 milliards de francs CFA pour dynamiser la production et rendre le sucre local compétitif sur le marché national. Malheureusement, les résultats tardent à venir, compte tenu de la série de méventes qu'elle a connue entre 2007 et 2019. En ce qui concerne le climat social, il est plus détendu de nos jours qu'en 1991 et 1999. Les travailleurs étant la force productive de l'entreprise, leurs conditions de travail et de vie doivent être régulièrement améliorées pour espérer des rendements à la hauteur des attentes. Aujourd'hui, la SN SOSUCO, filiale de la holding Industrial Promotion Services - West Africa (IPS-WA), doit consolider sa position de première entreprise privée pourvoyeuse d'emplois au Burkina Faso. Son sucre doit également être une source de fierté nationale en s'imposant sur le marché, sachant que sa production sucrière ne représente que 25% de la consommation nationale en 2020. Pour ce faire, un diagnostic approfondi de l'industrie sucrière est nécessaire afin d'identifier les problèmes majeurs auxquels des solutions durables et efficaces seront apportées.

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Chapitre II : L'ANALYSE DU COMPLEXE SUCRIER DU BURKINA FASO

Abstract

In this chapter, we analyze three aspects of the Burkinabè sugar company. The first aspect analyzed concerns the company's spatial distribution in the Cascades region. The sugar complex was established on a perimeter of 10,000 ha. On this sugar perimeter, three different developments were built to ensure sugar production from locally grown sugar cane. To this end, over 40% of the complex is currently devoted to sugarcane cultivation. Part of the remaining perimeter has been developed for industrial facilities and employee housing. The second part of this chapter is devoted to the process of transforming sugar cane into sugar. This process begins with 12 to 14 months of sugarcane cultivation to obtain an average yield of 300,000 tonnes of cane per year. From November to April each year, the cut cane is processed in a cane sugar factory and a sugar refinery. After processing, SN SOSUCO obtains an average of 30,000 tonnes of granulated and lump sugar, which it markets within the country. Since this production represents only 25% of sugar consumption in Burkina Faso, the sugar company imports the remainder to satisfy its consumers. The final part of the chapter looks at the positive and negative impacts of the establishment of the sugar complex in the Cascades region. Here, we first highlight the complex's major contribution to the economic and social development of Burkina Faso in general, and the Cascades region in particular. SN SOSUCO, the leading private enterprise with over 3,000 employees, has helped to open up the region's economy. However, the agricultural activities and industrial installations of the sugar industry have a negative impact on the environment and the social and cultural organization of the populations concerned.

I. L'occupation spatiale de la SN SOSUCO dans la région des Cascades

La réussite du projet sucrier burkinabè était intrinsèquement liée à la qualité de l'organisation et la gestion du périmètre sucrier. Le 18 juillet 1972, le gouvernement burkinabè décide de confier l'aménagement du complexe sucrier à la SOSUHV avec l'entreprise française SOMDIAA comme maitre d'ouvrage142. La SOMDIAA est assistée par d'autres entreprises techniques telles que l'Institut de Recherches Agronomiques Tropicales (IRAT) et le Secrétariat français des Missions d'Urbanisme et d'Habitat (SMUH). L'objectif de cet aménagement était de répartir les zones de culture, les infrastructures hydrauliques, les installations industrielles, les logements sociaux et les voiries. D'une superficie de 10 000 ha, le projet d'aménagement a coûté 5,445 milliards de francs CFA. Le financement a été assuré par le capital social de la SOSUHV (1 965 500 000 francs CFA) et par des institutions financières143 (3 480 000 000 francs CFA) . La Figure 5 montre la

144

répartition spatiale du complexe sucrier de Banfora145.

Figure 5 : Plan du périmètre sucrier de la SN SOSUCO

Source : SN SOSUCO/ Direction culture, carte redessinée par Samuel Paré, dans « Risk of workers exposure to pesticides during mixing/loading and supervision of the application in sugarcane cultivation in Burkina Faso », mis en ligne en juillet 2014, consulté le 25 mars 2023, URL : Pesticides_risk_assessment.

142 Archives nationales de France, Direction du développement économique du Ministère chargé de la coopération, Fond 201 MC, 19860346/20, Contrat d'ingénierie et d'assistance technique pour la création du complexe sucrier de Banfora, 1972, p. 2.

143 Plusieurs institutions financières ont participé au financement de l'aménagement de la SOSUHV. Il s'agit du Fonds Européen de Développement (FED) avec 1,400 milliard de F.CFA ; de la Banque Nationale de Développement (BND) avec 1,300 milliard de F.CFA ; de la Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO) avec 500 millions de F.CFA ; du Fonds d'Aide et de Coopération (FAC) avec 280 millions de F.CFA.

144 Hartog T., « Le périmètre sucrier de Banfora », art. cit., p. 123.

145 Nous rappelons encore une fois que sur certaines archives du complexe sucrier, il était situé à Banfora. Mais avec les nouvelles répartitions administratives, une grande partie du complexe se trouverait dans la commune de Bérégadougou.

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A/ L'aménagement des zones de culture de la SN SOSUCO

Sur les 10 000 ha que représente le périmètre sucrier de Bérégadougou, 4 000 ha devaient être consacrés à la culture de la canne à sucre avec des possibilités d'extension. En 2017, environ 4 210 ha de terre sont exploitées par la SN SOSUCO146. L'obtention du périmètre sucrier a nécessité une opération de délocalisation des populations installées sur ces terres.

1. La répartition des plantations de canne à sucre

La zone de culture de la SN SOSUCO est située dans la plaine de Bérégadougou, dans la région des Cascades au sud-ouest du Burkina Faso. Elle est située entre 10°41' et 10°47' de latitude Nord et 4°38' et 4°39' de longitude Ouest. Le périmètre de la SN SOSUCO est subdivisé en 111 parcelles de culture comme le montre la Figure 6 ci-dessous. Les zones de culture de la canne à sucre ont été déterminées en fonction de la teneur élevée en matière organique et en eau des sols. Un système de codification est utilisé pour désigner chaque parcelle. La codification prend en compte le système d'irrigation (pivot, latéral, aspersion), le nom du village dans lequel elle est localisée, le numéro de série et la planche sur laquelle la parcelle est située (planche A, B, C et D)147. En choisissant d'attribuer les noms des villages délocalisés aux parcelles, la SN SOSUCO manifeste sa reconnaissance envers ces villages. La mémoire de ces villages est ainsi préservée des années plus tard malgré le fait qu'ils ne soient plus habités. La majorité des parcelles exploitées aujourd'hui sont situées à l'est et au nord de l'usine.

Pour faciliter la circulation des personnes et du matériel agricole dans le périmètre sucrier, des pistes rurales, des routes et des ponts ont été construits. Ces voies de communication serviront également au transport de la canne coupée vers les ateliers de transformation. La Route Nationale n°7 (RN7), qui traverse le périmètre sucrier en son centre, permet à la SN SOSUCO de se connecter avec les villes de l'intérieur du pays mais aussi au sud, avec la capitale économique de la Côte d'Ivoire, Abidjan. Le tronçon du chemin de fer de la Régie Abidjan-Niger (RAN) qui traverse le périmètre vers le sud était autrefois utilisé pour le transport des matières premières et des produits de la société sucrière. La Figure 6 ci-dessus montre les voies de communication du périmètre sucrier.

146 Biaou O. D., « Améliorer la disponibilité des coupeurs de canne à sucre sur un périmètre industriel », op. cit., p. 15.

147

Ibid.

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Figure 6 : Plan parcellaire de la SN SOSUCO

Source : SN SOSUCO/ Direction culture, plan cité par Biaou O. D., « Améliorer la disponibilité des coupeurs de canne à sucre sur un périmètre industriel », op. cit., p. 16.

2. La mise en place du système d'irrigation

Il est bien connu que la canne à sucre est l'une des cultures agricoles les plus gourmandes en eau. C'est pourquoi la disponibilité des ressources en eau sur le périmètre de Bérégadougou a été un facteur essentiel de l'aménagement de la zone. Pour rappel, la région connaît annuellement une saison sèche de novembre à mars. L'irrigation de la canne, en plus de la pluviométrie annuelle comprise entre 843 mm et 1 254 mm, était plus que nécessaire. À la SN SOSUCO, deux principaux systèmes d'irrigation sont utilisés : le goutte-à-goutte sous-terrain (4% des surfaces irriguées) et l'aspersion (96% de la surface irriguée).

Dans le cas de l'irrigation goutte-à-goutte, l'eau est dirigée vers les cultures par de petits goutteurs placés sur des tuyaux flexibles le long des rangées de cultures148. Ce système, en plus d'être économe en eau, fournit aux racines des tiges de canne la quantité d'eau dont elles ont besoin pour se développer. En observant le schéma ci-dessous (Figure 7), on peut voir comment l'eau est acheminée depuis les sources d'eau (la rivière Yannon et Béréga), puis régulée par des vannes motorisées ou manuelles avant d'atteindre les cultures qui sont organisées en secteurs.

148 Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), Les techniques d'irrigation pour les agriculteurs à petite échelle : Pratiques clés pour les praticiens de la RRC, FAO, [version numérique], 2014, consulté le 27 mars 2023, p. 29, URL: http://www.fao.org/3/a-i3765f.pdf.

Figure 7 : Schéma d'irrigation goutte-à-goutte de la SN SOSUCO

 

Légende

Vanne manuelle ouverte

Zones de culture

Vanne motorisée d'isolement de circuits

Superviseur

Détenteur d'eau en besoin

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Source : Archives nationales de France, Direction du développement économique du Ministère chargé de la coopération, Fond 201 MC, 19860346/19, Études d'urbanisme du périmètre de Banfora, 1972, p. 46.

Pour les zones éloignées des sources d'eau du périmètre, la SN SOSUCO utilise l'irrigation par aspersion. Cette méthode est une technique d'irrigation de surface dans laquelle l'eau est appliquée à la canne à sucre par des jets d'eau qui tombent comme une pluie artificielle. Les deux dispositifs d'irrigation par aspersion utilisés sur le périmètre sucrier de Bérégadougou sont la couverture intégrale et l'irrigation par rampe pivotante et frontale. L'irrigation par couverture intégrale est actuellement peu répandue dans les zones de culture (10% de la surface totale). Cette méthode consiste à mailler les parcelles en 18mx18m à l'aide d'un dispositif fixe. L'eau est ensuite distribuée par aspersion à l'aide de rampes, de supports de rampes, de vannes, et d'asperseurs (Figure 8)149.

149 Konan, Kouamé, Ouattara, Péné et Dick (dir.), « Caractérisation des surfaces récoltées selon le statut hydrique et efficience des systèmes d'irrigation dans le périmètre sucrier de Ferké 2 en Côte d'Ivoire », Afrique Science, 14(5), mis en ligne en septembre 2018, consulté le 27 mars 2023, p. 110, URL : https://www.researchgate.net/publication/ 328026993_Caracterisation_des_surfaces_recoltees_selon_le_statut_hydrique_et_efficience_des_systemes_d%27irrigat ion_dans_le_perimetre_sucrier_de_Ferke_2_en_Cote_d%27Ivoire..

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Cette méthode permet aux plantes d'obtenir la pluviométrie souhaitée à partir d'une même

distribution d'eau.

Figure 8 : Schéma illustratif du système d'irrigation à couverture intégrale

Source : Konan, Kouamé, Ouattara, Péné et Dick (dir.), « Caractérisation des surfaces récoltées selon le statut hydrique et efficience des systèmes d'irrigation », art. cit., p. 110.

Le deuxième système d'irrigation par aspersion utilisé dans les zones de culture de la SN SOSUCO est l'irrigation par rampe pivotante et frontale. Cette méthode d'irrigation utilise des machines mobiles automotrices qui se déplacent en translation pour irriguer des parcelles circulaires (rampe pivot) et rectangulaires (rampe frontale). Sur ces machines, il n'y a pas de point d'ancrage fixe au sol, la rampe doit donc résister à la contrainte mécanique des charges en mouvement. Chaque machine est équipée de travées porte-arroseurs, de tours montées sur roues supportant les travées à une extrémité, d'un axe central ou pivot autour duquel les travées tournent, qui fournissent toute la puissance à la rampe. Un porte-à-faux avec un canon de pulvérisation est situé après la dernière travée (Figure 9)150. L'avantage de la rampe pivotante et de la rampe frontale est qu'elles permettent d'irriguer de très grandes surfaces. C'est pourquoi l'irrigation par pivot est le système le plus utilisé dans les zones de culture de la SN SOSUCO. Elle s'étend sur 3 440 ha, soit 86% des surfaces irriguées151.

150 Konan, Kouamé, Ouattara, Péné et Dick (dir.), « Caractérisation des surfaces récoltées selon le statut hydrique et efficience des systèmes d'irrigation », art. cit., p. 109.

151 Site web officiel de la SN SOSUCO, consulté le 28 mars 2023, URL : https://snsosuco.com/expertise/culture-irriguee-de-la-canne.

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Figure 9 : Schéma illustratif de la rampe frontale et de la rampe pivotante

Rampe frontale Porte-à-faux

Travée

Canon

Axe central Tour

Porte-à-faux

Rampe pivotante

Travée

Canon

Pivot central Tour

Source : OTECH leading irrigation, Les rampes frontales et les pivots, [site web] reconstitué par Bancé Thomas Frank, 10 mai 2023, URL : https://www.otech.fr/fr/nos-produits/rampe-frontale.html.

Figure 10 : Photographies aériennes des zones de culture de la SN SOSUCO

Parcelle irriguée par rampe frontale Parcelle irriguée par rampe pivotante

Source : CNES/Airbus Landsat, SN SOSUCO de Bérégadougou, images datées du 07/11/2022, consultées le 12 mai 2023, URL : https://earth.google.com/web/search/SN+sosuco,+Bérégadougou,+Burkina+Faso/.

Ces deux grands systèmes d'irrigation sont alimentés en eau par gravité à partir de trois barrages : le barrage de la Comoé (40 millions de m2), le barrage de la Lobi (6 millions de m2) et le barrage de Toussiana (6 millions de m2). Les infrastructures hydrauliques de la SN SOSUCO

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attirent de nombreux regards des populations et contribuent ainsi à offrir un beau paysage au périmètre sucrier.

3. L'expropriation des terres des populations locales

L'expulsion des populations locales de leurs habitations et de leurs terres agricoles

Dans la Convention d'établissement de 1972, l'article 27 stipule que : « L'Etat s'engage à apporter à la Société, un terrain de 10 000 ha appelé périmètre sucrier au prix de 13 300 F l'hectare, l'État recevant en contrepartie des actions de type B ». C'est en application de ce contrat que les terres sur lesquelles vivaient plus de 11 villages ont été expropriées pour constituer le fameux périmètre sucrier de la SN SOSUCO. Ce mouvement de déguerpissement, qui s'est déroulé entre 1970 et 1973, a touché 549 familles, soit environ 5 000 personnes152. La SN SOSUCO a exercé deux formes d'expropriation sur les populations autochtones : la récupération totale de leurs terres (habitats et champs de culture) ou leur récupération partielle. S'ensuit la destruction des arbres, des vergers, des lieux de culte sacrés, des zones de pâturage, etc. L'héritage historique, culturel et économique des populations expulsées est affecté.

Le 31 octobre 1972, une commission interministérielle ad hoc est créée pour résoudre les problèmes sociaux et d'accueil des populations dans le cadre de l'implantation du complexe sucrier de Banfora153. Le seul mérite de cette commission est d'avoir porté de 10 à 12 ans la période d'exonération d'impôts et de taxes locales des familles déplacées. Selon Thierry Hartog, cette mesure n'était pas suffisante : « Hormis le préjudice moral subi par ces populations, aucun système sérieux d'indemnisation à long terme ne régla le problème : la faiblesse du dédommagement contrasta avec l'importance des préjudices subis »154. Pire, aucun plan de réhabilitation des populations n'avait été établi avant le processus d'aménagement du territoire. C'est le cas des habitants de Takalédougou, Séréfédougou et Niankadougou, qui ont été expulsés de force par des bulldozers155. Ils ont dû se résigner à vivre dans les villages environnants avec toutes les conséquences que cela pouvait engendrer : surpopulation, baisse du pouvoir d'achat, réduction des terres agricoles, conflits sociaux.

152 La liste des villages déplacés avec toutes les caractéristiques figure à l'annexe 4.

153 Centre National des Archives du Burkina Faso, Ministère du Plan, des Mines et de l'Industrie, sous-série 41V, 41V234, Société Sucrière de Haute-Volta : études diverses - Procès verbal de la réunion de la commission ad hoc, 1973, p. 4.

154 Hartog T., « Le périmètre sucrier de Banfora », art. cit., p. 130.

155

Ibid.

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Les mutations résultant de l'installation du complexe sucrier

Face à l'absence de réelles compensations et à l'incapacité des autorités étatiques à leur trouver un plan de réinsertion sociale, les populations des villages expropriés ont dû réajuster leur mode de vie. Sur le plan agricole, on constate une nette réduction des cultures de rente (sésame, riz, arachide) au détriment des cultures vivrières (mil, maïs, sorgho)156. D'autre part, l'aménagement du périmètre sucrier a bouleversé le mode de vie des populations locales. L'économie vivrière disparaît au profit d'un environnement où la recherche du profit et l'acquisition de matériels deviennent une fin en soi. L'économie capitaliste est introduite sans transition à Banfora.

Sur le plan socioculturel, une communauté multiculturelle d'origines diverses voit le jour. La ville entame son processus de modernisation avec tous les changements qui s'ensuivent : logement, habillement, alimentation, moyens de transport, activités culturelles et sportives. Les pratiques religieuses et linguistiques se diversifient. La langue dioula, qui était parlée avant l'installation du complexe, est désormais concurrencée par une autre langue, le moore. Cette nouvelle langue, parlée par la majorité des habitants du Burkina Faso, n'était pas présente auparavant dans le Sud-ouest. À la lumière de toutes ces divergences entre le monde traditionnel marginalisé et le monde moderne, il est regrettable que la politique d'aménagement du périmètre sucrier de Bérégadougou n'ait pas impliqué davantage les populations locales.

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