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Impact de la consommation abusive d'alcool sur le psychisme et sa portée sociale dans la vie des jeunes àągés de 15 à  34 ans du quartier Palar II


par Fabien WADOUKA
Institut de formation en santé du Sahel de Mokolo (IFOSSA/Mokolo) - Infirmier principal 2022
  

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7. Troubles neuro-psycho-développemental chez le nouveau-né associé à l'exposition à l'alcool : syndrome d'alcoolisme foetal

L'alcool est un tératogène puissant. La conséquence la plus grave d'un alcoolisme pendant la grossesse est le syndrome d'alcoolisme foetal, un trouble du développement caractérisé par des anomalies cranio-faciales, un retard de croissance et des lésions du système nerveux pouvant entraîner un handicap mental. (OMS, 2007, p. 9)

« Des problèmes de santé mentale ont été identifiés chez plus de 90% des individus présentant des antécédents d'exposition prénatale à l'alcool significative. Le diagnostic comorbide le plus courant est le déficit de l'attention/hyperactivité (O'Connor et Paley 2009) mais des recherches ont montré que les individus avec un TN-EPA se distinguent par leurs caractéristiques neuropsychologiques et leur sensibilité aux interventions pharmacologiques (Mattson et al. 2011). L'antécédent d'exposition prénatale à l'alcool est associé à un risque accru de développer des troubles liés à l'usage du tabac, de l'alcool et d'autres substances (Barr et al. 2006). » (DSM-5, version fr. 2015, p. 1032)

L'exposition prénatale à l'alcool peut avoir des effets dramatiques et permanents. L'éthanol franchit facilement la barrière placentaire et les concentrations retrouvées chez le foetus son supérieures à celles mesurées chez la mère car le système foetal d'élimination de l'alcool est peu développé. Il n'a jamais été mis en évidence de seuil en dessous duquel les risques sont nuls, d'où la recommandation « 0 alcool pendant la grossesse ». Pourtant, en 2017, 12 % des mères d'enfants de cinq ans ou moins déclaraient avoir consommé de l'alcool au cours de leur dernière grossesse, après avoir appris être enceinte (11 % uniquement pour les grandes occasions, et moins de 1% une fois par semaine ou plus) (INSERM, 2021, 25 octobre).

V- Résultantes caractéristiques ou retentissements sociaux des troubles associés à l'alcool

1. L'agressivité et l'impulsivité

L'alcool ne fait pas qu'enivrer, il désinhibe aussi. C'est pourquoi, lorsqu'on est saoul, on prend beaucoup plus facilement des décisions irréfléchies et on agit plus rapidement que d'habitude. On évoque d'ailleurs souvent l'alcool comme agent déclencheur dans des conflits particulièrement violents : méfait avec violence, dispute de bar, violence conjugale, agression routière, vandalisme et violence gratuite (Aide alcool, 2021). L'alcool peut notamment altérer la partie frontale du cerveau (cortex frontal), potentiellement de manière irréversible. Or, cette partie commande la maîtrise de soi et le comportement en société, ainsi que les actions ciblées, le raisonnement et la résolution de problèmes. Enfin, l'agressivité peut se manifester en cas de dépendance à l'alcool, lorsque la personne ressent un besoin intense de boire qu'elle ne peut pas assouvir. Elle sera alors très irritable et cela augmente les risques d'avoir un comportement violent (Doctissimo, 2019, 09 mai).

2. L'agression sexuelle et/ou rapport sexuel non protégé

Educ'alcool (2017b) souligne le penchant agressif sexuel de l'alcool et ses risques. En effet, l'alcool donne des envies, crée des pulsions ; mais favorise le rapport sexuel non protégé, expose les jeunes aux IST et aux grossesses non désirées (Educ'alcool, 2019). Par ailleurs, l'emploi de la force pour obtenir ou tenter d'obtenir des rapports sexuels sans consentement - tout comme la violence sexuelle dans le couple - vont hélas souvent de pair avec la consommation d'alcool. Le risque de violence augmente avec la consommation, aussi bien dans les agressions commises par des hommes que par des femmes. Lorsqu'on analyse les comportements et les traits antisociaux des agresseurs, quels qu'ils soient, on réalise que la violence et la consommation excessive d'alcool ont de fortes similarités, tels des traits génétiques ou des tempéraments semblables ou encore, un trouble de personnalité quelconque.

Lorsqu'une personne consomme de l'alcool de manière excessive, elle risque de souffrir d'une certaine « myopie » qui réduit ses capacités tant à reconnaître les signes de danger, qu'à identifier les situations qui ont un risque potentiel d'agression sexuelle. Parfois, faire boire la victime de manière excessive aura été la tactique de l'agresseur pour obtenir une relation sexuelle (Educ'alcool, 2017c).

3. Les accidents

De nos jours la plupart des accidents sont dues aux fait de conduire avec des facultés affaiblies. Effet, l'alcool a aussi un effet narcotique (Aide alcool, 2021, 18 août). Ce qui lui permet de provoque le sommeil chez un individu ayant bu plus que la quantité recommandée. Ce qui augmente dans tous les sens des comportements à risques (Taylor, 2015) pouvant se produire au travail, au volent, à l'école ou à la maison et causant des accidents au passage. Les accidents où qu'ils se produisent, peuvent générer de conséquences énormes et voire affecter d'autre personnes de l'entourage du buveur comme mettre le feu à la maison, percuter des passants en route en étant au volent d'une voiture, produire des résultats médiocres au travail peut impacter sur les profils de l'entreprise, etc.

4. Les suicides

Les différents effets de l'alcool signalés ci-haut tels que l'inhibition, les agissements en état de facultés affaiblies, l'agressivité, la violence et les actes à risques et même ceux liés aux maladies et grossesses non désirées perturbent la personnalité (Educ'alcool, 2019) et affectent les jugements de la personne (Babor et collab., 2003). En effet, le suicide est la complication majeure dela dépression (Clinicum, 2007). Le risque suicidaire est particulièrement élevé chez un sujet traversant un épisode de raptus anxieux (névrose d'angoisse, maladie maniaco-dépressive) ou un sujet psychotique.

5. Le déséquilibre familial

Lors des disputes entre les parents, les enfants (jeunes) sont très souvent tentés d'intervenir, car comment pourraient-ils rester indifférent alors qu'on bat sur la maman par exemple ? Cependant, les enfants n'écoutent plus les parents, ne suivent plus les conseils, et se lancent également dans l'alcool dans le but de "soulager" leurs soucis de famille. Les enfants résidant avec deux parents peuvent être les victimes directes ou indirectes de violences exercées par l'un ou l'autre parent (Condon et Al., 2019). De plus, Se soûler a pris une importance culturelle démesurée chez les jeunes et leur santé et leur bien-être sont sérieusement menacés par l'usage d'alcool. Les gros buveurs occasionnels d'alcool sont de plus en plus nombreux, surtout parmi les garçons, ce qui augmente considérablement les risques de perdre le contrôle et tomber dans l'alcoolisme chronique. L'altération du jugement produit par l'alcool (Babor et collab., 2003), l'impulsivité et le manque de contrôle (Aide alcool, 2021) poussent les jeunes à prendre des décisions irréfléchies comme quitter la maison, ou aux parents d'expulser les enfants. Toutes les situations ne sont cependant pas identiques : la sévérité de la problématique va influencer grandement la possibilité de réaction des proches. Dans les meilleurs cas, l'importance de la consommation constitue juste une source d'inquiétude pour la famille qui constate des moments d'excès, parfois seulement épisodiques, des fluctuations d'humeur, une altération de la qualité du contact et des échanges sociaux dans des moments spécifiques d'alcoolisation ou de récupération.

Dans les cas les plus graves, les répercussions sur l'entourage de l'alcoolique sont d'un autre ordre : violences sur le conjoint ou les enfants, engagements régulièrement bafoués parce que la consommation est devenue le principe directeur de son existence, isolement de la famille de toute vie sociale extérieure, en tous cas au sein du domicile, car la personne qui a dérapé dans la consommation n'est en quelque sorte plus « montrable », vécu de honte de la part de l'ensemble de la famille qui dissimule souvent très longtemps ce qui se passe en son sein, « parentification » des enfants qui tentent vaille que vaille de compenser les défaillances du parent qui boit et parfois même de le protéger contre lui-même en allant le rechercher au café, en planquant les bouteilles, en protégeant les plus jeunes... (Philippe de Timary, 2016).

Dans d'autres cas, les troubles addictifs se traduisent d'emblée par des symptômes au sein de la famille (OMS, 2011): violence conjugale, parentale, voire d'un ou plusieurs enfants vis-à-vis de leurs parents. Mais souvent, le comportement toxicomaniaque d'un jeune n'est pas immédiatement perçu par ses proches. Il arrive assez fréquemment qu'un frère ou une soeur soit alerté bien avant la prise de conscience des parents. Face aux troubles, les membres de la famille se sentent particulièrement démunis pour trouver des réponses adéquates souligne Jacques Miermont (2016). Les liens se délitent, le contact avec l'adolescent se réduit, voire devient inexistant, même si celui-ci reste en fait toujours à la maison et dépendant de ses parents. Les parents ont du mal à identifier ce qui ne va pas et ne savent pas à qui s'adresser (Philippe de Timary, 2016). Les troubles relationnels interrogent non seulement les effets spécifiques du toxique, de la personnalité du consommateur et de son âge, des pathologies mentales et comportementales éventuellement associées, mais aussi les singularités de son système familial, de son réseau social, de ses communautés d'appartenance, ainsi que les modes de tolérance, d'incitation et/ou de répression de la société (Miermont, 2016).

6. La violence conjugale

L'impulsivité et l'agression favorise l'acte de violence conjugale. En effet, sous l'emprise de l'alcool, le contrôle de soi est réduit sinon supprimé et le jugement altéré (DSM-5). La consommation d'alcool abusive de l'un des conjoints favorise l'éclatement de conflits pouvant aller jusqu'à la violence physique. Le risque de violence conjugale augmente avec la fréquence d'intoxication. Un lien a été établi entre la consommation d'alcool et la gravité de l'acte de violence commis entre conjoints. Lorsque le conjoint est sous les effets de l'alcool au moment de l'agression, la victime court effectivement un plus grand risque d'être blessée physiquement et d'être dans l'obligation d'avoir recours à une assistance médicale (Educ'alcool, 2019, p12).

La violence signale l'incapacité à communiquer, elle est perpétrée de façon univoque et destructrice (Jaspard et al., 2003). Les résultats montrent que prévalence de la violence conjugale augmente avec la consommation d'alcool du conjoint : 30 % des femmes dont le mari/partenaire ne boit pas ont déclaré avoir subi des actes de violence conjugale contre 64 % quand ce dernier est parfois soûl et 68 % quand il est souvent soûl. Chez les hommes, 22 % ont déclaré avoir subi des actes de violence conjugale quand leur épouse/partenaire ne boit pas contre 58 % quand elle est parfois soûle.

Figure 4 : graphique sur la violence conjugale selon la consommation d'alcool du conjoint.

Source : Institut National de la Statistique (INS) et ICF. (2020). Enquête Démographique et de Santé du Cameroun 2018. pp398.

7. Les absences à l'école / Les absences au travail

Les effets narcotiques ou la gueule de bois favorisent les absences et sont facteurs de production de mauvais résultats. Mais encore la dépendance et/ou la dépression augmentent considérablement les risque d'absence au travail ou à l'école car ils sont caractérisés principalement la baisse des facultés intellectuelle par la démotivation. Les mauvaises compagnies ou les paires encouragent à sécher les cours pour se retrouver ailleurs qu'à l'école dans le but de boire de l'alcool, fumer, et ou vandaliser les biens publics. Les collègues de travail peuvent devoir remplacer et couvrir l'absence d'un agent qui a « la gueule de bois » (OMS, 2007).

8. Déséquilibre économique

Le buveur risque de perdre son travail ou d'être exclu d'un cours de formation (OMS, 2007). Dans l'environnement du travail, l'alcool peut conduire à des absences, des accidents de travail et à une baisse de la productivité pouvant entraîner une perte d'emploi. Cela représente un coût pour l'employé, l'employeur et le système de sécurité sociale (Greenfacts, 2006). Avec l'addiction il devient plus difficile de faire des économies. Les parents (=45ans) seront confrontés à des factures impayées, la pension alimentaire non réglée, etc. Les jeunes qui trouvent des idées pour escroquer les parents pour se payer de l'alcool, et généralement l'accompagner avec d'autres substances psychoactives (Addiction suisse, 2013).

9. Les crimes-délits-infractions-incivilité

Le mode de consommation d'alcool d'un individu peut avoir des effets indésirables sur sa propre vie, perturbant ses relations conjugales et sa vie de famille, provoquant la perte d'emploi et le chômage, déclenchant l'accomplissement d'un délit entraînant l'arrestation, ou précipitant l'individu dans la rue ou dans toute autre forme de marginalisation ou de stigmatisation.

10. Le trouble du sommeil

Certains individus ont parfois de la difficulté à trouver le sommeil lorsqu'ils éprouvent du stress. Pour combattre ce problème, ils peuvent avoir tendance à consommer de l'alcool, pensant ainsi faciliter leur sommeil. Bien entendu, l'alcool peut aider un individu à s'endormir à cause de son effet, narcotique (Aide alcool, 2021). Cependant, l'alcool risque aussi de causer de l'insomnie et des éveils à répétition (Educ'alcool, 2011), augmentant ainsi les troubles du sommeil. L'alcool modifie le cycle de sommeil. Le lendemain d'une forte absorption d'alcool, une personne peut se sentir mal et fatiguée, même si elle a suffisamment dormi.

VI- Prise en charge de l'intoxication aigue ou d'abus chronique d'alcool

Notons qu'il est difficile d'établir un moyen de prise en charge standard de l'alcoolisme aigu ou chronique. Cependant, aux urgences, il est important de différencier un sujet alcoolo-dépendant et celui non alcoolo-dépendant. On pourra se baser sur signes physiques et psychiques définis par DSM-IV ou la CIM-10. Le questionnaire AUDIT permet de poser une orientation distinctive entre la dépendance probable (score 12 chez l'homme et 11 chez la femme) et l'usage nocive (score entre 8 et 12 homme et 7 et 11 femme).

Dans la synthèse des Orientations diagnostiques et prise en charge, au décours d'une intoxication éthylique aiguë, des patients admis aux urgences des établissements de soins de l'ANAES, 2001 aux pages 1 à 4, nous pouvons trouver un ensemble des recommandations relatives à la prise en charge des cas d'alcoolisme sous ses différentes formes aigues ou chroniques.

Ces types de cas peuvent être classés en trois types à l'arrivée du sujet aux urgences : la crise de manque (delirium tremens), la crise d'intoxication récente, et l'alcoolo-dépendance.

Dans le delirium tremens, l'administration des sédatifs (médicaments psychoactifs), est acceptable. Mais lorsqu'il s'agit d'une crise liée à une ingestion récente, les médicaments utilisés (Lorazepam par exemple) peuvent potentialiser les effets de l'alcool.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand