Section 2. Impact de l'incendie de la forêt
Amazonienne
3.2.1. Emissions de CO2 dans l'atmosphère
La première des conséquences est
évidemment la libération dans l'air d'une très grande
quantité de dioxyde de carbone (CO2), principal gaz à effet de
serre contribuant au réchauffement du climat terrestre. Il en est de
même de la combustion de la biomasse qui émet naturellement du
CO2, mais aussi la mort des arbres qui libère tout le carbone qui y est
séquestré depuis des décennies.
Il est encore beaucoup trop tôt pour savoir combien de
CO2 sera émis par les événements en cours dans le bassin
amazonien, mais les quantités relâchées par des incendies
géants ne sont pas négligeables. Une étude publiée
en 2002 dans la revue Nature montrait que les incendies géants
de Bornéo, en Indonésie, en 1997 (les plus grands connus, 79 000
km2 détruits) ont dégagé entre 810 millions et
2,57 milliards de tonnes (Gt) de carbone, ce qui a contribué à la
plus grande augmentation de la concentration atmosphérique en CO2 depuis
l'enregistrement des données, en 1957.
Emissions mondiales de CO2Feux de Bornéo24 Gt0, 81
-2,57 Gt En 1997, les incendies de forêt de Bornéo ont
représenté jusqu'à 10 % des émissions
mondiales45. Pour avoir un ordre de grandeur, le Brésil a
émis 476 millions de tonnes de CO2 en 2017, et les émissions
mondiales de CO2 ont atteint en 2018 37,1 milliards de tonnes.
3.2.2. Destruction de puits de carbone
La destruction de forêts, d'autant plus de forêts
primaires comme celle de l'Amazonie, la plus vaste et la plus riche de la
planète, la prive de ce qu'on appelle un « puits de carbone »,
c'est-à-dire de la capacité des végétaux à
absorber le
45 Nature & Global Carbon Project
35
carbone. En limitant la concentration du CO2 dans
l'atmosphère, ces puits de carbone sont cruciaux pour lutter contre le
réchauffement climatique.
Des publications récentes dans Science et
Nature ont montré qu'à l'exception des forêts
primaires - c'est-à-dire des forêts non façonnées
par l'homme, qui reculent d'année en année (en baisse de 10 %
dans les zones tropicales entre 1990 et 2015) -, les forêts, usées
par les sécheresses et la déforestation, jouaient de moins en
moins ce rôle d'absorption, voire pouvaient devenir des émetteurs
nets de CO246.
3.2.3. Destruction de la biodiversité
La destruction de la forêt amazonienne menace
directement l'exceptionnelle biodiversité qu'elle héberge. Cet
écosystème, qui représente seulement 1 % de la surface
émergée du globe, abrite 10 % des espèces connues et,
selon des estimations, jusqu'à 25 % de la biodiversité.
Selon le WWF (Fonds mondial pour la nature), on y a
dénombré 40 000 variétés de plantes, 2,5 millions
d'espèces d'insectes, 427 espèces de mammifères, 1 293
espèces d'oiseaux, 378 espèces de reptiles, 427 espèces
d'amphibiens et 3 000 espèces de poissons, dont beaucoup sont
endémiques, c'est-à-dire spécifiques à cette
région. Mais au vu des connaissances très partielles de la
richesse de la vie dans le bassin amazonien, ces chiffres sont très
probablement en dessous du décompte réel.
En plus du danger inhérent aux incendies de
forêt, les espèces endémiques sont menacées
d'extinction en raison de la richesse de cette forêt primaire, ce qui la
rend irremplaçable par des forêts secondaires qui auraient
repoussé ultérieurement (même si les recherches
menées en ce sens montrent que les forêts secondaires
recréées parviennent à un haut degré de
biodiversité).
Cette biodiversité constitue aussi la richesse de
centaines d'ethnies indigènes qui habitent depuis longtemps dans le
bassin amazonien, dont la culture et même la survie sont
étroitement liées à la forêt et à ses
ressources.
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