3.2.4. Assèchement du climat
Les forêts tropicales comme la forêt amazonienne
ne se contentent pas d'abriter une biodiversité extraordinaire et de
séquestrer de grandes quantités de
46 GARY DAGORN, Les feux en cours dans la forêt
amazonienne sont plus importants et plus fréquents cette année et
continuent de fragiliser un des plus riches écosystèmes
terrestres, Publié le 27 août 2019 à 17h36 - Mis
à jour le 29 août 2019 à 16h12, consulté le
05/11/2020 à 16h33.
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carbone, elles régulent aussi en partie le climat,
localement et mondialement. A tel point que l'Amazonie est parfois
appelée l'« océan vert ». L'humidité de la
forêt génère ce que l'on appelle
l'évapotranspiration : de grandes quantités d'eau
s'évaporent et forment les nuages, qui à leur tour
entraînent des précipitations permettant d'irriguer les sols. Cela
participe au cycle hydrologique du bassin amazonien, c'est-à-dire au
cycle de l'eau. Or, cet équilibre est considéré comme
fragile.
La déforestation, par l'exploitation des ressources
forestières ou par les feux de forêt, réduit la
quantité d'eau qui s'évapore et rend le climat plus sec dans une
région dont les températures devraient augmenter d'environ 3,3
°C d'ici la fin du siècle. Moins de vapeur d'eau signifie moins de
précipitations, des sols plus arides, des sécheresses plus
régulières et plus importantes, qui entraîneront à
leur tour des feux de forêts plus ravageurs et des difficultés
croissantes à cultiver les terres autrefois déforestées,
désormais plus sensibles à l'érosion.
Ces enjeux dépassent largement le bassin amazonien. Le
climat de l'Amérique du Sud, et même du monde entier seraient
affectés tant le rôle de régulateur de la forêt
amazonienne est critique. La multiplication des grandes sécheresses
(2005, 2010, 2015-2016) fait penser à certains scientifiques qu'il
existe peut-être un point de bascule qui, s'il était franchi,
perturberait graduellement ce cycle hydrologique indispensable au climat.
« Si nous détruisons suffisamment de forêt, nous
pourrions faire basculer l'Amazonie dans un climat bien plus sec, qui peut
devenir une savane. Ce serait une grosse perte pour notre planète et un
quasi «game over» pour la lutte contre le changement climatique
», selon Roel Brienen, professeur à l'université de
Leeds, au Royaume-Uni, interrogé par NBC News le 23 août
2019.
Deux chercheurs américain et brésilien, Thomas
Lovejoy et Carlos Nobre, ont estimé dans un éditorial
publié dans Science en 2018 qu'une déforestation de 20
à 25 % de l'Amazonie pourrait faire s'effondrer ce cycle. On estime
aujourd'hui qu'un peu plus de 19 % de la forêt a été
détruite, depuis 1970.
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