INTRODUCTION GENERALE
Dans le champ de la géographie actuelle des transports,
l'approche spatiale est privilégiée. Il existe un rapport
dialectique entre transports et aménagement des territoires avec des
interactions réelles entre réseaux de transports et espaces
(KAUFMANN et al., 2003). Le transport, l'un des secteurs clés du
développement d'un territoire, facilite non seulement les
échanges entre agents économiques, mais également
améliore la circulation des personnes et des biens, des idées et
des services, ainsi que le raffermissement des liens d'amitié et de
fraternité entre les peuples (MVUEZOLO, 2005). Aussi, faut-il comprendre
que l'économie et la qualité de vie dans une ville
dépendent essentiellement des systèmes de transport de celle-ci
(OCDE, 2003).
Les systèmes de transports, tous modes confondus,
constituent des facteurs d'intégration physique et économique
d'un pays. C'est l'un des vecteurs du développement de la promotion des
échanges et de la cohésion sociale. De ce fait, tous les pays
cherchent à établir des systèmes de transport
adéquats, efficaces et forts variés dans leurs espaces physiques.
La dynamique urbaine d'un pays repose en grande partie sur des systèmes
de transport mis en place par ce pays (ZORO, 2007).
En fait, le phénomène urbain introduit en
Afrique par la colonisation avait plusieurs objectifs, entre autres : le
quadrillage de l'espace colonial, la création des centres de
contrôle politique et d'encadrement administratif des populations, la
création des marchés pour développer une économie
de traite et enfin la création d'un cadre sain de vie, favorable
à une installation de longue durée. Ce faisant, le milieu urbain
apparait ainsi aux yeux des indigènes (populations africaines) comme un
espace à conquérir, à connaître et à s'y
intégrer forcement. Ainsi, après les indépendances, ce
phénomène va continuer à progresser et prendre une allure
fulgurante à cause de l'exode rural et de l'augmentation rapide de la
population totale de ces pays. D'où la situation critique des citadins,
dues au fait que cette croissance urbaine se produit depuis un certain temps
dans un contexte de manque de véritables politiques de transport
collectif urbain.
La Côte d'Ivoire, à l'instar des autres Etats
subsahariens ne sera pas en marge de ce nouveau mode de vie (urbanisation). En
fait, l'urbanisation de ce pays a démarré timidement avec la
colonisation, par la création de quelques villes (Grand-Bassam, Abidjan,
Bingerville, Bouaké) pour ne citer que celles-là. Elle va
véritablement s'accélérer à partir de
l'Indépendance
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(1960), et grâce au miracle économique des
années 1960 (le boom de l'économie de plantation) qui entraine
plusieurs mouvements migratoires (l'exode rural et l'immigration
étrangère). Dès lors, la Côte d'Ivoire connaît
à la fois une croissance démographique galopante (4,48%), et une
croissance urbaine extrêmement rapide. De 4,6% entre 1921 et 1932, le
taux moyen de croissance urbaine ivoirienne est aujourd'hui autour de 7,5% par
an pour toutes les villes de l'intérieur (KOFFI, 2002). Ce qui fait de
la Côte d'Ivoire, l'un des pays à fort taux de croissance urbaine
au monde.
Les villes ivoiriennes se caractérisent comme toutes
autres villes de l'Afrique subsaharienne par une urbanisation horizontale,
dispendieuse en espace et de flux de déplacements spatialement diffus.
Bouaké, seconde ville de la Côte d'Ivoire du point de vue
démographique est l'un des exemples de cette croissance urbaine rapide.
En effet depuis sa création en 1900, cette ville n'a cessé de
croître pour devenir en moins d'un demi-siècle, l'une des plus
importantes agglomérations urbaines d'Afrique de l'Ouest du point de vue
de sa population et des services qu'elle offre. De seulement 3 500 habitants en
1900, la ville de Bouaké comptait à l'Indépendance en
1960, 55 000 habitants et 461 618 habitants en 1998 (INS ,1998). D'après
l'enquête réalisée par le service des infrastructures de la
mairie de février 2013 à mars 2014, Bouaké compte
actuellement 39 quartiers (carte n°2). Cet accroissement
rapide et peu planifié de Bouaké, comme toutes les villes
ivoiriennes, entraine des difficultés de transport à
l'intérieur des villes ivoiriennes d'une part et d'autre part des
déficits de liaisons routières entre elles par le manque de
matériels et d'infrastructures de transport collectif et individuel.
Cette réalité des difficultés de
transport dans toutes les villes, va amener l'Etat ivoirien à oeuvrer
pour un système de transport capable d'accompagner sa dynamique urbaine
et par ricochet celle de son économie. Ainsi, comme tous les autres pays
africains sortis fraîchement de la colonisation, la Côte d'Ivoire
va mettre l'accent sur le développement et la modernisation des
transports, tant en ce qui concerne le déplacement des personnes que le
transit des marchandises. C'est ainsi que, d'importantes infrastructures sont
réalisées dans tous les différents secteurs du transport
(Transport routier, Transport ferroviaire, Transport maritime et Transport
aérien). Un accent particulier a été mis sur le transport
routier urbain par la création d'une société de transport
commun « la SOTRA » à Abidjan, mais aussi l'adoption d'une
législation approfondie dans ledit secteur pour toutes les villes.
Etant donné qu'on soit en milieu urbain ou en milieu
rural en Afrique, c'est le transport routier qui demeure le premier mode de
transport et de déplacement (SOUMANA, 2010).
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Dans cette étude, nous avons décidé
d'analyser l'organisation de cette activité dans la ville de
Bouaké. Aussi, vu que ce type de transport renferme plusieurs pans, de
façon particulière, nous avons décidé de nous
limiter seulement qu'au transport collectif, à savoir : les munis-cars
(gbakas), les taxis-moto, les taxis-villes et les sociétés de
transport de Bouaké comme STUB et SOTUB.
Carte n°1 : La région de
Gbêkê
Carte n°2 : Les quartiers de la ville de
Bouaké
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1 JUSTIFICATION DU SUJET ET REFLEXION SUR QUELQUES
CONCEPTS
1-1 La justification du sujet
Notre sujet, apparaît d'actualité, car à
l'aube de la mondialisation et des politiques d'intégrations
régionales et sous régionales, les transports constituent l'un
des leviers fondamentaux de l'aménagement et la structuration spatiale
des villes à travers le drainage des flux et les connexions entre les
différentes réalités sociales (FAYE, 2013). Aussi,
constituent-ils des vecteurs de rapprochement et l'un des secteurs pourvoyeurs
d'emplois (KASSI, 2007). À cela, il faut noter que le transport se
présente aujourd'hui comme l'une des données primordiales du
développement des sociétés modernes avec
l'évolution des déplacements des marchandises et des personnes
(LENORMAND, 2002). Ainsi les transports tous modes confondus, de par leurs
dynamismes améliorent les conditions de vie de l'homme, qu'il soit un
acteur direct ou indirect. C'est pourquoi nous avons jugé bon de nous
intéresser à ce secteur d'activité.
? Mais, pourquoi le transport collectif ?
Le transport collectif, à la différence des
voitures personnelles, assure simultanément, le déplacement
public des voyageurs : ce sont les taxis communaux, les minicars « gbakas
», les sociétés d'autobus et aujourd'hui à
Bouaké les taxis-motos (ALOKO, 2001). Les difficultés
économiques que connait la Côte d'Ivoire depuis les années
1980 (crises économiques), tout comme les multiples crises
politico-militaires qu'elle a traversées (de 1999 à 2010), ont
affecté durablement tous les secteurs d'activités. La politique
de privatisation, ou de désengagement de l'Etat dans bien de secteurs
d'activités comme celui du transport routier, initiée dès
les années 1990 ont occasionné une désorganisation dudit
secteur, car le privé veut maximiser le profit.
Aujourd'hui, se déplacer dans les grandes villes
ivoiriennes est synonyme de casse-tête, bien que le cas de Bouaké
soit acceptable par rapport à celui d'Abidjan. Avec, l'évolution
de la situation du transport collectif dans ces villes, chacun se doit de
s'interroger sur son organisation, pour comprendre son fonctionnement et
proposer quelques pistes de solutions aux problèmes de ce type de
transport. Aussi, nous avons choisi le transport collectif, parce que tout
habitant d'une ville ou toute autre personne désireuse d'y passer un
temps est
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directement ou indirectement influencé par les
infrastructures et équipements de transport, mais aussi par
l'organisation du transport collectif de cette localité. Dans le cas la
ville de Bouaké, elle est frappée par une évidence
implacable. L'expansion rapide de la ville et l'absence de l'administration
pendant la crise ont fait du secteur de transport collectif, le lit de nombreux
problèmes liés à l'occupation spatiale
désordonnée du territoire communal, impactant les
déplacements des personnes et des biens. Selon le maire DJIBO (2013),
Bouaké porte aujourd'hui le visage d'une ville défigurée
par l'occupation anarchique de ses espaces verts, de ses réserves
administratives, de ses aires de jeux. Ainsi, nous voulons analyser le
fonctionnement de cette activité dans la ville de Bouaké, et
aussi connaître son importance économique.
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