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La guerre en Syrie et le jeu de pouvoir de la Russie.


par Pape Ousmane THIAW
Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD) - Master 2 en sciences politiques 2018
  

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SECTION 2 : L'INTERVENTION RUSSE EN SYRIE : ENTRE RÉACTIONS ET PLANNIFICATION

L'intervention russe dans le conflit syrien a surpris plus d'un. Jusque-là, le pays affichait son soutien au pouvoir de Bachar Al Assad et n'hésitait pas à apporter son aide logistique aux forces du régime45(*). Cependant, ce quise présentait seulement comme une rumeur devint jusqu'au mois d'aout, devient, au mois de septembre, une véritable intervention militaire avec une violence qui nous rappelle les affrontements de la période de la Guerre Froide. Au même moment, la diplomatie russe semblait défendre ce qu'elle qualifiait de « plan de lutte contre le terrorisme » avec un discours du Président Poutine à la tribune de l'Assemblée Générale des Nations Unies. Grâce à cette intervention sur le terrain, la Russie a non seulement permis aux forces loyales à Assad de reprendre les territoires perdus, mais de devenir aussi l'interlocuteur incontournable dans le conflit en Syrie.

Dans cette section, nous allons analyser les intérêts russes en Syrie (Paragraphe 1) pour ensuite mettre en perspective de cette intervention dans le conflit syrien (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : les intérêts russes en Syrie

On ne saurait se tromper en affirmant que l'intervention russe en Syrie était, avant tout, guidée par les intérêts stratégiques russes dans le pays, et au-delà, dans la zone. Au vu de la situation géopolitique du Moyen-Orient, cette intervention est justifiée. En effet, la Syrie était un allié historique avec lequel l'URSS avait tissé des relations très fortes. D'ailleurs, le premier contrat d'armement entre les deux pays a été signé en 1956. Ensuite, on a le parti « Baath », promoteur du « socialisme arabe » qui a été au pouvoir entre 1963 et 1970. De plus, Hafez Al Assad, le père de Bachar Al Assad avait signé un traité d'amitié avec l'URSS en 1980 et ceci représentait des liens politiques et économiques spéciaux, d'autant plus que des considérations géopolitiques sont venues se greffer à ces rapports46(*).

Aussi, durant la Guerre Froide, la Syrie constituait, avec l'Algérie, la Libye et l'Irak « le front du refus » et était surtout favorable aux idéaux de l'URSS. Avec la quasi-disparition de l'Irak et de la Libye associés, la position ambiguë de l'Algérie, la Syrie se positionne comme le seul allié encore fidèle dans le monde Arabe. Dès lors, la disparition du régime de Bachar Al Assad pourrait signifier une rupture du croissant chiite, une des principales forces de l'Iran. Or, tous les analystes géopolitiques s'entendent sur le fait que l'Iran agit comme un tampon entre les zones d'influence russe et américain. Du coup, en défendant le régime syrien, la Russie défend en réalité l'Iran qui se trouve très exactement au sud de leur zone d'influence.

De plus, il faut noter le fait que la Syrie représente un peu un pied de terre dont dispose la Russie face à la Turquie qui, elle, est membre de l'OTAN. Un désengagement russe dans le conflit syrien signifierait tout simplement que la Turquie et l'OTAN auront feu vert pour faire de la Syrie une sorte de joint-venture géographique. Ce qui aurait pour conséquence de réduire considérablement l'influence de la Russie dans la zone.

Cependant, la principale interrogation de la plupart des observateurs, c'est celle de savoir comment la Russie est passée du statut de champion dans l'utilisation du droit de véto à un État intervenant directement sur le terrain. En dehors des raisons évoquées plus haut, plusieurs éléments peuvent expliquer cette attitude. D'abord, dans le dossier syrien, la Russie semble regretter son laxisme sur le dossier de la Libye sur lequel elle s'était abstenue47(*). Ensuite, nous avons l'apparition de groupes armés affiliés à Al Qaeda et à l'État islamique, qui est une raison évidente et légitime. Elle fut d'ailleurs souvent mise en avant comme justificatif pour convaincre l'opinion publique internationale. On a aussi, et surtout, la position hésitante des Occidentaux par rapport au régime syrien, même lorsque la fameuse « ligne rouge » a été franchie. Cette position est toutefois justifiée par la prise démocratique du pouvoir en Tunisie et en Égypte par des courants islamistes. La Russie s'est alors convaincue que le soutien à Bachar Al Assad restait la meilleure option pour préserver ses intérêts.

À travers cette intervention, Poutine tente non seulement de combler le vide laissé par l'URSS, mais envoie un message fort à la communauté internationale. Désormais, il faudra composer avec une Russie prête à « défendre ses intérêts », peu importe, là où ils se trouvent. D'ailleurs, c'est ce que l'on a pu sentir dans les différents discours de Poutine.

Pour cette intervention, le premier message était sans doute adressé au monde arabe qui fut secoué par les vagues de révoltes en 2011. Voyant que les dirigeants des pays arabes ont littéralement été abandonnés par leurs alliés, la Russie espère se positionner comme un allié fort, sur et loyal. Une stratégie très efficace qui devrait lui permettre, sur le long terme, de sortir de l'isolement diplomatique.

Le second message est adressé à l'Occident et la Russie tente de lui rappeler qu'elle est aussi une puissance diplomatique et militaire. Par conséquent, elle ne saurait être confinée dans ses limites géographiques et leur laisser le champ libre. D'ailleurs, la force et l'intensité avec laquelle elle a commencé son intervention en Syrie représentaient un message clair destiné aux Occidentaux.

Pour le troisième message, il était adressé à l'Iran qui, à travers cette intervention, saura sans doute qu'elle ne pourra jouer un rôle prépondérant dans la région sans s'allier avec la Russie.

À travers cette partie, on se rend compte que la Russie a tenu à revenir avec force sur la scène internationale, un peu comme pour signifier qu'elle est prête à mettre tousles moyens militaires nécessaires pour défendre ses intérêts. Ce qui nous interroge alors sur les gains réels et les perspectives d'évolution de cette intervention en Syrie.

* 45DORMAN Veronika, « Syrie : un conflit plein d'intérêts pour Poutine », Libération, 2015, p.3.

* 46BELHADJI Souhail, Op.cit. p.108.

* 47Pol-Henry Dasseleer et Nicolas Gosset, Chercheurs au Centre d'études de sécurité et défense (CESD) de l'Institut royal supérieur de défense, ont tenté de commenter l'attitude russe au Conseil de Sécurité en écrivant que : « C'est la première fois qu'une divergence de vues aussi évidente est exposée entre Medvedev et Poutine, et ce, en amont des élections présidentielles de 2012 ». L'abstention russe lors du vote de la résolution 1973 avait été très critiquée par Poutine.

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway