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Croissance économique et pauvreté dans les pays de l’UEMOA.


par Soudjay MAOULIDA
Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD) - Master 2 méthodes statistiques et économétriques 2016
  

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1.2 Développement théoriques récents

Au début des années cinquante, la littérature économique considérait que la croissance n'était favorable qu'aux riches Kakwani et al. (2000). En effet, ne disposant pas de capital humain ni

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financier, les pauvres ne pouvaient recevoir qu'une faible partie des bénéfices de la croissance (grâce à la redistribution) : c'est la théorie du « Trickle down ».

En dépit des taux de croissance économique élevés sans précédent, la pauvreté et les inégalités sont restées néanmoins fortes dans la plupart des pays sous-développés. Le Bureau international du travail (BIT), « il était devenu de plus en plus évident, particulièrement à partir de l'expérience des pays en voie de développement, que la croissance rapide au niveau national ne réduit pas automatiquement la pauvreté ou l'inégalité ou n'assure pas un emploi productif suffisant » (BIT, 1976).

Egalement, l'approche de la Banque mondiale en matière de lutte contre la pauvreté a connu des changements radicaux qui reflétaient, d'une part, les progrès croissants, accomplis par le milieu académique dans l'analyse très complexe des interactions entre la croissance économique, l'inégalité des revenus et des richesses et la pauvreté et, d'autre part, le niveau d'intérêt, manifesté par le monde politique à l'égard du thème de la réduction de la pauvreté.

Pour mieux appréhender cette nouvelle vision, les économistes de développement mettent en évidence des stratégies visant à réduire la pauvreté. Selon Bourguignon (2004), dès lors qu'elle vise à réduire la pauvreté absolue sous toutes ses formes (monétaires et non monétaires), une stratégie de développement est entièrement déterminée par ses considérations en matière de croissance et de répartition. Par conséquent, le véritable défi à relever consiste à identifier la nature des liens entre croissance et répartition, le poids variable alloué respectivement aux objectifs de croissance et de redistribution.

D'autre part, selon Bourguignon (2004), l'«inégalité» (ou la «distribution») fait référence aux écarts de revenu relatif dans l'ensemble de la population, c'est-à-dire aux différences de revenu obtenues après normalisation des données observées par rapport à la moyenne de la population de façon à les rendre indépendantes de l'échelle des revenus. Et la «croissance» comme le changement exprimé en pourcentage, du niveau de bien-être moyen (par exemple, le revenu) qui apparaît dans l'enquête auprès des ménages.

Cette dernière passe par des stratégies de croissance4 et des politiques distributives dont la combinaison pourrait être propre à chaque pays. Par exemple, une croissance moyenne de 1% du revenu par habitant peut entraîner une réduction de la proportion des gens vivant dans une

4 Volontairement orientées vers les pauvres

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pauvreté extrême allant jusqu' à 4%, mais pouvant aussi être inférieure à 1%, selon le pays et la période (Ravallion, 2004).

Ainsi, ces différentes stratégies de réduction de la pauvreté ont mis l'accent, à des degrés divers, sur les mesures destinées à stimuler la croissance d'une part, et sur les politiques de redistribution d'autre part.

Figure 2: Décomposition des variables affectant la distribution et la pauvreté en effet distributif et de croissance

Partant dans ce sens, une variation de la pauvreté est donc une fonction de la croissance, de la distribution et de la variation de la distribution. Ce principe est illustré par la figure (1), où l'indice numérique de pauvreté correspond à la zone située sous la courbe de densité à gauche du seuil de pauvreté (fixé ici à 1 USD par jour).

Cette figure fait apparaître la densité de la distribution du revenu, à savoir le nombre d'individus à chaque niveau de revenu (représenté sur l'échelle logarithmique en abscisse). Le passage de la distribution initiale à la nouvelle distribution s'effectue via une étape intermédiaire qui est la translation horizontale de la courbe de densité initiale vers la courbe (I).

L'échelle logarithmique figurant en abscisse, cette variation correspond à la même augmentation proportionnelle de tous les revenus de la population et tient lieu d'«effet de croissance» pur, sans que la distribution des revenus relatifs ne soit modifiée. Ensuite, le déplacement de la courbe (I) vers la nouvelle courbe de distribution se produit à revenu moyen

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constant et correspond à la variation du revenu «relatif» dans la distribution ou à l'«effet distributif».

De ce fait, il est possible de décomposer la réduction de la pauvreté en un effet dû à la croissance et un effet dû à la réduction des inégalités. Des travaux récents (Bourguignon 2004, Cling et al 2004, Lopez (2004) montrent que l'élasticité de la réduction de la pauvreté à la croissance dépend à la fois de l'inégalité de départ des revenus et de l'écart entre revenu moyen et ligne de pauvreté. Ainsi, pour les pays les plus pauvres, la réduction de la pauvreté est bridée par une distribution inégalitaire des revenus5 et des défaillances de marché qui handicapent la situation des plus pauvres (Dercon, 2004).

Cependant, au cours des années 90, la lutte contre la pauvreté a fait l'objet d'évolutions profondes, sensibles à travers les mesures adoptées par les institutions de Bretton Woods. Ce n'est qu'en 1999 que l'élaboration d'un document stratégique de réduction de la pauvreté (DSRP) est devenue obligatoire pour les pays qui bénéficient des mesures d'annulation de leur dette (initiative "pays pauvres très endettés") ou de prêts du FMI. Les DSRP ont cherché à promouvoir une approche de plus en plus globale de la réduction de la pauvreté. La thématique de la croissance pro-pauvre s'inscrit dans cette perspective.

En outre, la croissance pro-pauvre est apparue comme une alternative aux modèles de redistribution qui conduisent à une très faible réduction de la pauvreté. L'idée ici, contrairement à la théorie du « Trickle down », est de faire émerger la croissance à partir de la base (les pauvres), c'est-à-dire de mettre les pauvres au coeur du processus de création de richesse. En effet, comme le souligne Dollar et Kraay (2002), la croissance à elle seule est insuffisante pour engendrer une réduction significative de la pauvreté.

Ceci nous amène à soulever la question selon laquelle, pourquoi la croissance ne profite toujours pas aux plus pauvres ? Par conséquent, la prise en compte du lien entre la distribution des revenus et la croissance est cruciale pour toute politique tendant à assurer une croissance pro-pauvre. Toutefois, comme le souligne Lopez (2004), la question la plus importante et sans nul doute la plus difficile est celle de savoir de combien les pauvres doivent bénéficier de la croissance pour qu'elle soit qualifiée de pro-pauvre.

5 D'après les enquêtes, l'inégalité mesurée par le coefficient de Gini serait presque aussi forte en Afrique de l'Ouest que dans les pays les plus inégalitaires d'Amérique latine - ce qui est loin d'être intuitif.

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Cette question s'intéresse donc à la mesure de la croissance pro-pauvre. Heureusement, les chercheurs ont proposé une multitude de mesures pour déterminer empiriquement l'impact de la croissance sur les plus démunis : la courbe d'incidence de la croissance (CIC) de Ravallion et Chen (2003) ; le taux de croissance pro-pauvre de Ravallion et Chen (2003) ; la courbe de croissance de la pauvreté de (Son, 2004) ; le biais de pauvreté de croissance de McCulloch et Baulch (1999) ; l'indice de la croissance pro-pauvre de Kakwani et al. (2000) ; etc.

Selon l'OCDE, la croissance est qualifiée de pro-pauvre lorsqu'elle s'accompagne d'une réduction significative de la pauvreté. Cette définition est vaste et nous fournit peu d'informations.

Certains proposent une approche relative pour définir la croissance pro-pauvre, en considérant que la croissance est pro-pauvre lorsqu'elle s'accompagne d'une réduction des inégalités de revenu (White et al., 2001; Klasen, 2004). D'autres préfèrent l'approche absolue qui définit la croissance pro-pauvre comme étant une croissance qui réduit le taux de pauvreté (Kakwani et al., 2000, 2002).

A l'évidence, l'efficacité de la croissance comme vecteur de réduction de la pauvreté dépend en partie des inégalités de revenu. Selon l'approche relative la croissance est dite pro-pauvre lorsque le taux de croissance du revenu des individus pauvres est plus important que celui des individus non pauvres (White and Anderson, 2001; Klasen, 2004). Ainsi, dans le cadre d'une politique économique pro-pauvre, la réduction de la pauvreté sera plus forte comparée à une politique de croissance pour laquelle les inégalités de revenu restent inchangées pour tous, (McCulloch and Baulch, 1999; Kakwani and Son, 2002).

Autrement dit, elle s'intéresse à la réduction des inégalités de revenu en faveur des pauvres suite à une période de croissance économique. C'est principalement pour cette raison qu'on parle de définition relative de la croissance pro-pauvre. Ces deux approches posent problème.

La première approche conduit à un paradoxe : préférer une plus faible croissance (au motif de la priorité accordée à la réduction des inégalités) à une croissance plus forte, certes plus inégalitaire, mais où le revenu des pauvres augmenterait plus rapidement.

La seconde approche amène quant à elle à considérer une croissance très inégalitaire comme pro-pauvres : La plupart des pays, hormis la Roumanie, voient croissance et réduction de l'incidence de la pauvreté aller de pair. Une telle définition de la croissance pro-pauvre tend

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donc à annuler toute spécificité par rapport à la croissance. De plus, l'utilisation de l'incidence de la pauvreté tend à focaliser l'attention sur les personnes se situant juste en dessous du seuil de pauvreté. Un indicateur comme le taux de croissance du revenu des pauvres (Ravallion & Chen, 2003) peut paraître préférable.

Cette approche permet de se concentrer essentiellement sur le lien entre pauvreté et croissance et non sur la distribution du revenu. Cette approche est cohérente avec le premier des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) adoptés en 2000 (objectif 1, cible 1 : réduire de moitié en 2015 la proportion de la population dont le revenu est inférieur à un dollar par jour). Cette seconde approche est beaucoup moins contraignante que celle de l'approche relative la croissance dans la mesure où elle se focalise sur les variations de l'indice de mesure de la pauvreté suite à un épisode de croissance.

Osmani et al. (2005) proposent une version particulière en agrégeant les deux approches précédentes. Ainsi, selon lui, la croissance sera pro-pauvre lorsqu'elle réduit à la fois la pauvreté et les inégalités. Cette approche a le mérite d'insister sur les interactions possibles entre croissance, inégalité et pauvreté.

Le véritable enjeu de l'élaboration d'une stratégie de développement visant à réduire la pauvreté réside davantage dans les interactions entre distribution et croissance que dans les relations entre, d'une part, pauvreté et croissance et, d'autre part, pauvreté et inégalités, qui restent essentiellement arithmétiques.

Les économistes conviennent en général que la croissance est essentielle pour réduire la pauvreté (-revenu), à condition que la répartition du revenu reste plus ou moins constante. La réalité tend d'ailleurs à le confirmer (Deininger et Squire, 1996 ; Dollar et Kraay, 2001 ; Ravallion, 2001 et 2003). Cependant, le vrai problème de l'élaboration d'une stratégie de développement est de savoir si la croissance et la distribution sont indépendantes ou si, au contraire, elles sont étroitement liées (Bourguignon, 2004).

Au-delà de la question de la distribution des revenus, on remarque aussi que les niveaux de développement humain sont très variables entre pays à revenus pourtant comparables (l'Afrique étant généralement en retard par rapport à l'Asie). Les liens entre croissance économique et réduction de la pauvreté sont affectés par les choix politiques et des facteurs structurels propres à chaque pays. D'autre part la pauvreté est un phénomène global, les contraintes imposées par

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le manque de revenus sur les individus s'accompagnant de leur incapacité à prendre en main leur destin, que l'augmentation du PIB par tête ne suffit pas à éradiquer (Delleur, 2005)

La croissance est donc indispensable pour réduction de la pauvreté mais il est aussi nécessaire que cette croissance s'accompagne d'une politique économique axée spécifiquement sur les plus pauvres et d'une maitrise des inégalités des revenus.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille