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L'efficacité des mécanismes juridiques internationaux de protection des droits de l'homme.


par Saintchrist Phylo Eboungou Ondombo
Université Marien Ngouabi, Congo Brazzaville - Master 2 en droit public 2020
  

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B-La motion de « non-action » : une procédure au service de l'impunité

Comme son nom l'indique, la motion de « non action » est un artifice de procédures visant à éviter un vote sur une résolution et à couper court à tout débat sur une question gênante. Autrement dit, suffit à toute délégation désireuse d'empêcher la discussion sur un thème précis de présenter cette motion d'ordre qui, aussitôt mise aux voix, bloque n'importe quelle proposition325. Utilisée systématiquement par Pékin depuis le massacre de Tienanmen en

322 DIEZ DE VELASCO VALLEJO (Manuel), Les organisations internationales, Paris, Economica, 2002, p.147.

323 Allocution de Felipé PEREZ ROQUE, Ancien, ministre des relations internationales cubain, devant l'Assemblée générale des Nations Unies sur la guerre en Irak le 26 septembre 2002, In Solidary Project, « Histoire d'une tentative de crime humanitaire » ( http://volcadoj.club.fr/Cuba/npa roque 030926. Html)

324 DORMENVAL (Agnès), Op.Cit., pp 136-158. 325BUHRER (Jean Claude), Op.Cit., p.12.

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1989, cette manoeuvre dilatoire a permis à la Chine d'échapper à toute enquête attentive ou à toute condamnation pour des atteintes graves et généralisées des droits humains. Et parmi les comparses de Pékin, l'Algérie, l'Arabie Saoudite, la Lybie, le Qatar, la Syrie, le Cuba, la Russie, l'Indonésie, le Pakistan et plusieurs autres pays africains se sont, depuis engouffrés dans l'usage immodéré de la motion de « non-action », illustrant ainsi les dysfonctionnements et le blocage de tout système. En définitive, la Commission des droits de l'homme chargées de défendre les droits de celui-ci se trouve menacée aux quatre coins de la planète.

Conséquence, le système onusien avec ses normes et mécanismes de contrôle piétinent et sont vidés de leur contenu. Peter SPLINTER déclare : « les conséquences négatives de ces perceptions largement partagées sont symptomatiques d'un malaise sous-jacent qu'il importe de traiter si les Nations Unies veulent pouvoir traiter de façon effective des violations des droits humains dans un certain nombre de pays spécifiques... »326.

L'autre dimension du talon d'Achille des mécanismes de protection du système universels réside dans les faiblesses inhérentes à la nature de l'organe conventionnel de ce contrôle des droits civils et politiques, à savoir, l'absence de garantie juridictionnelle eue égard justement à son caractère non-juridictionnel.

Paragraphe II : Un Comité des droits de l'homme officiellement non-juridictionnel

Organe de supervision des droits civils et politiques, le Comité des droits de l'homme, tel qu'il existe aujourd'hui n'est pas une juridiction, c'est-à-dire un tribunal ou une Cour constituée de juges dont la mission est d'assurer le respect du droit dans l'interprétation et l'application des conventions ou des traités internationaux relatifs aux droits de l'homme327. En effet, le Pacte n'a pas défini sa nature et il ne s'agit pas, sans nul doute, d'un organe juridictionnel tel que les Cours européenne et africaine des droits de l'homme328.

Le Comité des droits de l'homme, comme tous les autres organes conventionnels de contrôle, n'a pas reçu le mandat de juger les Etats. En effet, même ses membres estimaient, de l'avis du professeur Alfred DE ZAYAS, que « cet organe de traité n'était qu'un organe consultatif, sans aucun pouvoir judiciaire et que l'application de ses constatations était laissée à la bonne

326 SPLINTER (Peter) In Amnesty International, « les avancées positives de la 61ème Session sont loin de suffire à corriger le « déficit de crédibilité » de la Commission », communiqué de presse, Genève, EFAI, Index Al :IOR41/047/2005 ? 22 avril 2005 ( www.amnesty.asso.fr)

327 GUINCHARD (Serge) et MONTAGNIER (Gabriel), Op.Cit., pp 341 et 577.

328 DHOMMEAUX (Jean), « Le Comité des droits de l'homme... », Op.Cit., p.657.

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volonté des Etats concernés »329.Ceci joint l'idée du professeur Gérard COHEN-JONATHAN qui affirmait : « Formellement, les constatations du Comité des droits de l'homme n'ont pas une force obligatoire »330.Et, au demeurant, le mutisme du Protocole facultatif ne fait que conforter les positions des gouvernements répressifs qui estiment que « la surveillance de l'application des constatations en l'absence de mandat légal bien défini à cet effet, pourrait être contraire au paragraphe 7 de la l'article 2 de la Charte des Nations Unies »331. Néanmoins, bien que le Comité soit présenté comme un organe purement technique, indépendant et non-juridictionnel, ses fonctions peuvent être qualifiées de quasi-juridictionnelles. Il parvient dans son comportement à dépasser le cadre purement textuel.

Sa démarche est, en effet, souvent proche de celle d'un organe judiciaire. Dans ce sens, même si formellement les constatations qu'il émet sur le fond n'ont pas de force obligatoire, leur autorité ne doit pas être négligée par le simple fait de sa volonté de leur imprimer une nature « quasi-juridictionnelle » par leur rédaction et de les rendre ainsi juridiquement obligatoires à l'image de la communication « N°884/1999 du 31 juillet 2001 »332.

Un des caractère permettant de cerner cette nature a trait à la question de la signification et du contenu des articles 5 (2) (a) du protocole facultatif du Pacte, 35 (2) (b) de la Convention européenne des droits de l'homme et 45 de la Convention américaine des droits de l'homme, qui toutes se déclarent incompétentes si la requêtes est déjà soumise (has already been submitted) à un autre instance d'enquête et de règlement pour dire que le Comité est aussi considéré comme une instance d'enquête et de règlement333.

Certes, si les rédacteurs du Pacte n'ont pas explicitement baptisé le Comité de juridiction par prudence ou sagesse pour ne pas effaroucher les Etats, ils lui ont entendu lui conférer les compétences d'une juridiction internationale car ils lui ont donné un large pouvoir d'interprétation qui fait de lui un législateur secondaire en matière des droits de l'homme sur

329 DE ZAYAS (Alfred), « Le droit constitutionnel et l'internationalisation des droits de l'homme » ( http://www.alfreddezayas.com/lecture/tunis3 fr.html)

330 COHEN-JONATHAN (Gérard), « Quelques observations sur le Comité des droits de l'homme des Nations Unies »,Op.Cit., p.95.

331 DEZAYAS (Alfred), « Op.Cit., p.95.

332 Conformément à l'alinéa (a) du paragraphe 3 de l'article 2 du Pacte, l'Etat partie à l'obligation d'assurer à Madame Ignatane une réparation utile. Il est également tenu de veiller à ce que des violations analogues ne se produisent pas à l'avenir. Etant donné qu'en adhérant au protocole facultatif l'Etat partie a reconnu que le Comité avait la Compétence pour déterminer s'il y avait ou non violation du Pacte et que, conformément à l'article 2 du Pacte, il s'est engagé à tous les individus se trouvant sur son territoire... » Selon un dispositif de ladite constatation.

333 DHOMMEAUX (Jean), « Le Comité des droits de l'homme... », Op.Cit., p.657.

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le plan international334. Le caractère quasi-judiciaire des constatations du Comité se marque par deux traits d'importance inégale. D'une part, on remarque que le Comité a progressivement étoffé la motivation de ses décisions et surtout celles des constatations sur le fond. Cet effort est sensible même s'il ne peut être comparé aux arguments développés dans les rapports et les arrêts de la Cour de Strasbourg. C'est pourquoi certaines constatations sont éclairées par des opinions individuelles des membres du Comité qui savent très bien utiliser cette technique, y compris à l'égard des questions de recevabilité.

D'autre part, en statuant sur une communication, le Comité peut toujours se référer à une observation générale. Cette dernière technique lui permet alors d'attirer l'attention des Etats sur les insuffisances et les ambiguïtés que font apparaitre un grand nombre de rapports voire de communications. Il s'agit d'une explication des droits énoncés dans le Pacte qui est conçu comme un instrument vivant, qui devrait permettre une conformité du droit interne par rapport aux obligations internationales dûment souscrites.

Toutes ces observations, générales et individualisées, contribuent à une bonne observance du Pacte et au renforcement, par ce fait même, du Pacte et au renforcement, par ce fait même, du caractère judiciaire du contrôle sans officiellement le dire335. A ce titre, le Comité estime qu'il ne fait que rappeler les obligations primaires en s'appuyant précisément sur l'article 2 du Pacte.

Dans une telle situation, bien que les Etats pensent demeurer formellement libres de donner suite aux constatations et observations général des Etats du Comité à cause du mutisme Pacte à ce sujet, il semble que ceux-ci doivent prendre les mesures d'adaptation de leurs droits internes pour éviter des violations comparables.

En effet, le maintien d'une réglementation jugée lacunaire ou incompatible avec le Pacte pour quelque raison que ce soit est non seulement contraire au devoir général des Etats contractants d'assurer de bonne foi la protection effective des droits garantis, mais tout à fait illogique dans la mesure où, restant inchangée, ladite réglementation est susceptible de servir de fondement à d'autres communications qui aboutiraient à la même condamnation336. Cependant, malgré cet effort prétorien du Comité des droits de l'homme de rendre contraignantes ses constatations en faveur de la protection effective de ces droits, celui-ci se

334 GLELE-AHANHANZO (Maurice), Op.Cit., pp 61 et 69.

335 COHEN-JONATHAN (Gérard), « Quelques observations sur le Comité des droits de l'homme des Nations Unies », Op.Cit., pp 86-87 et 91-92.

336 COHEN-JONATHAN (Gérard), « Considération sur l'autorité des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme » In Liber Amicorum Marc-André Eissen,Op.Cit., pp 49 et 51.

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heurte à une manifestement claire de la volonté des Etats parties à ne pas se plier aux décisions de cet organe de garantie. Les Etats semblent, en effet, se méfier de la compétence générale de développement et d'interprétation que le Comité exerce car la pratique montre que les constatations faite à l'issue de l'analyse des communications ne reçoivent pas de suite favorable de leur part et, ce nonobstant la désignation d'un rapporteur spécial chargé de vérifier les suites réservées par les Etats avec la possibilité de signaler les éventuelles défaillances à l'Assemblée Générale des Nations Unies dans les rapports annuels. De ce fait, les rapports annuels du Comité contiennent un inventaire des réponses reçues ou attendus qui sont ventilées par les pays.

Ainsi, dans son rapport couvrant la période allant du 1er aout 2003 au 22 juillet 2004, tout en se félicitant des réponses qui lui sont parvenue et accueillant avec satisfaction toute les mesures prises par 17 gouvernements pour près de 23 constatations, le Comité a exprimé son inquiétude en ce qui concerne l'application de ces dernières et l'effectivité du suivi.

Il s'est, en effet, dit être préoccupé par le nombre croissant de cas où les Etats parties ne donnent pas de suite à ses constatations ou même ne l'informent pas des mesures prises dans le délai prescrit de 90 jours. Dans ce rapport, le Comité a inventorié près de 190 constatations n'ayant pas reçu de réponses attendues au 30 juin 2003 de la part de 54 Etats concernés.

La mise à jour de cette liste lors de sa 81e session a montré que la situation est demeurée quasi identique, c'est-à-dire inchangée337. Cet état des choses démontre que l'exécution des décisions du Comité des droits de l'homme est fonction de l'attitude des Etats, de l'acceptation du rôle qu'ils jouent au sein de l'organe et de l'ambiance qui y prévaut, le dialogue qui s'y établit avec les Etats incriminés ainsi que de la bonne foi de leurs gouvernements.

A ce titre les mécanismes demeurent dans le domaine mal défini des préceptes moraux avec pour effet la difficulté de l'emporter sur les principes reconnus en droit international338.Il est donc clair que ces mécanismes du Comité des droits de l'homme ne sont pas particulièrement efficaces. Les développements qui précèdent ont révélé le rôle sans cesse croissant réservé aux droits de l'homme dans l'action des Nations Unies. Le bilan est incontestablement positif en ce qui concerne l'élaboration des normes universelles protectrices des droits de l'homme dont le corpus conventionnel est abondamment riche.

337 Nations Unies, Rapport du Comité des droits de l'homme, Op.Cit., pp 145-172.

338 HUARAKA (Tunguru), Op.Cit., p.1144.

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Les déclarations ou résolutions relatives aux droits fondamentaux ont une valeur hautement symbolique mais qu'ils n'expriment pas moins l'attachement croissant de la communauté internationale à la cause des droits de l'homme. En fait les Nations Unies sont loin du schéma idéal de protection reposant sur une Cour mondiale des droits de l'homme à juridiction obligatoire.

A cet égard, l'idée de la réforme est toujours d'actualité car tous les jours les droits sont violés en Afrique, en Amérique Latine, dans certains Etats européens et même dans de véritables démocraties pluralistes. Et les systèmes régionaux, loin d'être interprétés comme la reconnaissance d'un relativisme des droits de l'homme, sont plutôt les mécanismes plus intégrés que ne le sont ceux universels dans la mise en oeuvre des droits fondamentaux. A ce titre, ils peuvent bien servir de référence et de modèle dans la reinstitutionnalisation des mécanismes onusiens pour une garantie efficace et effective des droits humains.

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"Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots"   Martin Luther King