C. Le Droit international des droits de l'homme et le
droit International humanitaire, quel lien ?
Le DIH étant déjà défini,
le Droit international des droits de l'homme (DIDH) reste à
définir également.
En effet, il est «un système de normes
internationales destinées à défendre et promouvoir les
droits de l'homme de chacun.»75 Ces normes sont
inhérentes, indissociables de la personne humaine sans aucune
distinction qui pourrait être de nationalité, de race, d'origine
nationale ou ethnique, de couleur, de religion, de langue ou même de
toutes autres situations similaires. Les droits de l'homme sont
interdépendants, ils sont garantis du principe
d'indivisibilité.
Ces différents droits sont proclamés dans divers
instruments juridiques internationaux (Déclaration universelle des
droits de l'homme, Charte des Nations Unies, Charte africaine des droits de
l'homme et des peuples,...), ils reposent sur les principes
généraux de droit international, sur le droit international
coutumier, la conscience universelle, ...
Précisons que «le droit international des droits
de l'homme énonce les obligations qu'ont les États d'agir de
certaines manières ou de
74 VITE S., Op.cit., p.12.
75 Nations Unies, Op.cit., p.5.
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s'abstenir de certains actes afin de promouvoir et
protéger les droits de l'homme et les libertés fondamentales des
personnes ou de groupes.»76
Toutefois, le DIH et le DIDH relèvent de la
branche du droit international, et sont des domaines distincts l'un de l'autre,
mais qui se complètent aussi.
Leur différence n'est pas à démontrer
car, «elles ont été constituées au fil du temps,
indépendamment l'une de l'autre, et reposent sur des sources
différentes»77 mais néanmoins, leurs domaines
d'intervention parfois se rencontrent, étant entendu que tous visent
à protéger la vie humaine, et ce, selon les périodes
données.
Parlant ainsi de périodes, «le DIH ne
s'applique qu'en période de conflit armé, international ou non,
et vise, pour des raisons humanitaires, à limiter les effets de la
guerre sur les individus et les biens. Le DIDH, lui, s'applique en tout temps,
en situation de conflit armé comme en temps de paix»78,
un postulat qui n'était pas évident au départ, pour la
raison que l'on liait l'application du DIDH au temps de paix.
Mais au fil du temps, cette position fut rejetée, pour
considérer que le DIDH doit s'appliquer en tout temps, c'est un droit
qui protège les droits fondamentaux de la personne humaine qui peuvent
connaitre des violations en tout temps, de paix ou de guerre. D'ailleurs,
aucune disposition au monde, de n'importe quel instrument juridique relatif aux
droits de l'homme n'interdit au DIDH de s'appliquer en temps de
conflits.
Est-il en outre impérieux de rappeler que le DIH
lie toutes les parties à un conflit armé, y compris les
forces armées des États et les groupes armés non
étatiques alors que, le DIDH ne lie que les États, dans leurs
rapports avec les individus.
Le DIH et le DIDH ont chacun ses propres sources
distinctes de celles de l'autre.
Le DIDH tire sa source de la Déclaration universelle
des droits de l'homme, de différents traités internationaux et du
droit international coutumier. Les instruments universels fondamentaux relatifs
aux droits de l'homme sont :
76 Nations Unies, Op.cit., p.5.
77 CICR, Op.cit., p.39.
78 Ibidem, p.40.
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Le Pacte international relatif aux droits économiques,
sociaux et culturels, et son Protocole facultatif ;
Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques
et ses deux Protocoles facultatifs ;
La Convention internationale sur l'élimination de
toutes les formes de discrimination raciale ;
La Convention sur l'élimination de toutes les formes de
discrimination à l'égard des femmes et son Protocole facultatif
;
La Convention contre la torture et autres peines ou
traitements cruels, inhumains ou dégradants et son Protocole facultatif
;
La Convention relative aux droits de l'enfant et ses deux
Protocoles facultatifs ; La Convention internationale sur la protection des
droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille ;
La Convention internationale pour la protection de toutes les
personnes contre les disparitions forcées ;
La Convention relative aux droits des personnes
handicapées et son Protocole facultatif.79
Au plan régional, il existe plusieurs traités et
protocoles relatifs
aux DIDH, on y ajoute aussi «les résolutions
adoptées par l'Assemblée générale, le Conseil de
sécurité et le Conseil des droits de l'homme, la jurisprudence
des organes conventionnels et les rapports issus des procédures
spéciales relatives aux droits de l'homme, les déclarations, les
principes directeurs et autres instruments du droit souple qui contribuent
à clarifier les normes relatives aux droits de l'homme, à leur
donner corps et à fournir à leur sujet des orientations
dûment fondées, même s'ils ne comportent pas d'obligations
juridiquement contraignantes en tant que telles.»80
Le DIDH ne se borne pas seulement aux droits
énumérés dans ses instruments juridiques ; il va
jusqu'à prendre en compte le droit international coutumier, qui
s'imposent à tous les États, y compris ceux qui ne sont pas
parties à telle ou telle convention relative aux droits de l'homme. Le
cas par exemple de plusieurs droits énoncés dans la
Déclaration universelle des droits de l'homme qui sont pour une large
part considérés comme faisant partie du droit international
coutumier.
En fait, certains droits sont reconnus comme ayant le statut
particulier de règles impératives du droit international
coutumier (jus cogens), ce qui exclut toute dérogation à
ces droits malgré les circonstances et leur donne une force
supérieure à tout autre devoir des Etats. Nous pouvons citer pour
ce
79 Nations Unies, Op.cit., p.14.
80 Ibidem, p.15.
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faire l'interdiction de la torture, de l'esclavage, du
génocide, de la discrimination raciale et des crimes contre
l'humanité ainsi que le droit à l'autodétermination qui
sont reconnus internationalement comme étant des règles
impératives du jus cogens.
Le DIH tire aussi ses sources des instruments
juridiques et du droit coutumier. Ses principaux instruments juridiques
à l'heure actuelle sont :
Le Règlement de La Haye concernant les lois et coutumes
de la guerre sur terre
;
La Convention de Genève pour l'amélioration du
sort des blessés et malades dans les armées en campagne
(première Convention de Genève) ;
La Convention de Genève pour l'amélioration du
sort des blessés, des malades et des naufragés des forces
armées sur mer (deuxième Convention de Genève); La
Convention de Genève relative au traitement des prisonniers de guerre
(troisième Convention de Genève) ;
La Convention de Genève relative à la protection
des personnes civiles en temps de guerre (quatrième Convention de
Genève) ;
Le Protocole additionnel aux Conventions de Genève
relatif à la protection des victimes des conflits armés
internationaux (Protocole I) ;
Le Protocole additionnel aux Conventions de Genève
relatif à la protection des victimes des conflits armés non
internationaux (Protocole II).
S'agissant de la place du droit coutumier en DIH,
«Le Règlement
de La Haye est généralement
considéré comme correspondant au droit international coutumier et
s'imposant à tous les États, qu'ils y aient adhéré
ou non. Les Conventions de Genève ont été universellement
ratifiées. Bon nombre des dispositions qui figurent dans ces instruments
ainsi que dans les Protocoles qui s'y rapportent sont tenues pour faire partie
intégrante du droit international coutumier et être applicables
lors de tout conflit armé.»81
Il existe également plusieurs autres instruments
juridiques en DIH qui ont pour vocation de régenter la conduite
des hostilités, ils sont à placer dans l'arsenal juridique du
DIH.
Terminons ce chapitre par démontrer que «le CICR
joue un rôle tout particulier dans le cadre du droit international
humanitaire. Les Conventions de Genève le chargent de rendre visite aux
prisonniers, d'organiser des opérations de secours, de contribuer
à la réunion des familles et de mener toute une série
d'activités humanitaires pendant les conflits armés
81CICR, Droit international humanitaire
coutumier, par Jean-Marie Henckaerts et Louise Doswald-Beck, Les
éditions juridiques Bruylant, 2006, p.20.
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internationaux. Elles l'autorisent aussi à offrir ces
mêmes services lors des conflits armés non internationaux. Le CICR
joue un rôle reconnu dans l'interprétation du droit international
humanitaire, et a pour mission de travailler à son application
fidèle dans les conflits armés, de recevoir les plaintes pour
violations alléguées de ce droit, et de contribuer à sa
connaissance, sa diffusion et son développement»82 et
même de contribuer à sa mise en oeuvre effective sur le plan
international.
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