I.2 : SOURCE DE DÉVELOPPEMENT
ÉCONOMIQUE
« Il y a 30 ans, cela aurait été
difficile de faire une conférence sur les retombées
économiques des festivals ». Cette phrase de Jean-Paul Roland,
directeur des Eurockéennes de Belfort, résume parfaitement
l'évolution économique des festivals. Car il y a 30 ans, le
secteur de la culture et de l'économie ne se mélangeait pas.
L'économie était surtout liée aux subventions publiques
pour permettre l'organisation de ces festivals. Mais aujourd'hui, le monde des
festivals le confirme, le soutien des collectivités territorialesest
moindre, conséquence de l'aug-mentation de 5 % par an des charges selon
le Centre national des variétés (CNV)6.
5 Séverine Morin, Patricia Sadaoui et Mary
Vercauteren, Les festivals de musiques actuelles en France
6 L'économie des festivals, un enjeu
grandissant
25
Les festivals naissent en général de la
volonté d'un petit groupe de personne, souvent des
bénévoles déjà investis. En s'implantant dans les
territoires, ils les font vivre avec ou sans l'appui des aides publiques. Ils
représentent donc des acteurs importants de la vie culturelle locale. Le
monde des festivals est avant tout celui des associations qui
représentent 71 % des manifestations. Bien qu'ils soient de nature
saisonnière, les festivals engendrent une augmentation et un surplus
d'activité en termes de revenue et d'emplois.
Permettant pour quelques jours, de dynamiser un territoire par
l'arrivée de plusieurs milliers de personnes il est assez simple de se
rendre compte de l'impact sur l'économie touristique qu'apporte un tel
évènement. Par exemple, le festival Interceltique de Lorient dans
le Morbihan a accueilli près de 700 000 festivaliers en 2016. La
fête de l'humanité de La Courneuve en Seine-Saint-Denis
près de 450 000 festivaliers. Il est facile de se douter pour de tels
évènements que le budget pour accueillir cette population est
conséquent. Les vieilles charrues, créées par un groupe
d'amis, ont dépensé près de 16 millions d'euros pour
l'édition 2017 sans avoir recours aux aides publiques. Près de 80
% du budget est financé par les festivaliers via leur consommation sur
place et la billetterie. Le reste provient à 20 % du
mécénat privé7.
Une forte croissance des régions accueillant ces
évènements est visible. Les Eurockéennes par exemple
mobilisent plus de 335 emplois saisonniers, auxquels s'ajoutent les 11
salariés à l'année. Selon Jean-Paul Rolland, dirigeant du
festival « nous sommes l'un des premiers pour-voyeurs d'emplois
temporaires de la région. Certains jeunes que nous avions
embauchés ont même fait carrière par la suite dans le
secteur de la musique8 ».
Les festivals s'entourent de nombreux bénévoles
afin d'assurer la continuité et le bon déroulement du festival
lors de l'événement, et ce jusqu'à son terme. Le budget
qui est alloué aux sociétés privées
d'événementielles est relativement moins important que le budget
réservé aux artistes. Le centre d'étude de formation et de
ressources pour l'art et la culture donne une fourchette de 11 à 31 %
pour l'emploi administratif technique contre 12 à 47 % pour les
artistes9.
Les festivals ne constituent donc que très rarement une
activité à temps plein, mais peuvent apporter un
complément d'activité aux intermittents du spectacle à un
moment de l'année ou la demande est supérieure à l'offre.
L'offre des festivals propose aux professionnels du milieu artistique des
débouchés dans l'emploi, mais aussi dans la rentabilité
des productions en faisant la promotion devant le grand public. Il n'est en
effet pas rare de voir de nombreux artistes faire la tournée des
festivals sur la même période estivale.
Cependant, les retombés franchissement souvent la
frontière du festival en apportant une réelle économie
à tout un village, une ville ou une région, profitant en premier
aux commerçants locaux et au secteur de l'hôtellerie.
7 Quand les festivals d'été donnent un
coup de pouce à l'économie
8 Le figaro - Quand les festivals d'été
donnent un coup de pouce à l'économie
9 Centre d'information et de ressources pour les
musiques actuelles
26
À Carhaix, les commerçants sont très
sollicités selon Jérôme Trehorel, président du
festival des vieilles charrues. La ville de 7000 habitants voit sa population
passer à plus de 270 000 personnes durant quelques jours.
L'événement a permis de donner une image à la marque
commune « les habitants sont fiers aujourd'hui de dire qu'ils viennent
de Carhaix grâce aux Charrues ». Un constat similaire pour les
Eurockéennes de Belfort « nous faisons partie du paysage
culturel, économique et même social de la région. En dehors
du festival, nous organisons d'autres événements tout au long de
l'année », indique Jean-Paul Roland. Le festival a
estimé en 2014 ses retombées indirectes à près de 7
millions d'euros en quelques jours pour l'économie locale. Ses
festivaliers dépensent chaque jour près de 60 euros en moyenne
chacun10.
Selon l'institut de sondages GECE, on compte 58 % d'hommes sur
l'ensemble des festivaliers. Mais la surreprésentation masculine est
particulièrement vraie pour les événements aux styles
musicaux spécialisés se déroulant en plein air que sont le
Hellfest (metal) et le Dub Camp (dub) qui comptent respectivement 77 %
d'hommes. Or, si l'on exclut ces deux festivals, on s'aperçoit que les
publics des autres festivals sont composés de 59,7 % de femmes. Cette
légère surreprésentation des femmes se retrouve sur
l'ensemble des festivals en France (cinéma, musiques, livre,
théâtre, danse, arts de la rue...) où elles
représentent 54 % des publics.
La moyenne d'âge des festivaliers varie de 23 ans
à près de 28 ans en fonction des évènements. Au
niveau de la situation socioprofessionnelle, 73 % des publics des festivals
sont actifs, on compte 27 % d'inactifs parmi lesquels on retrouvera 23 %
d'étudiants. Les professions et catégories socioprofessionnelles
supérieures (CSP+) composées des cadres/pro-fessions
intellectuelles et des professions intermédiaires représentent 48
% des festivaliers.
La présence des CSP+ varie selon les
évènements : elles représentent de 27 % à 61 % des
publics. Ce sont principalement les Escales (61 %) et le Hellfest (55 %) qui
attirent les CSP+. La particularité du Hellfest festival est qu'il fait
partie des seuls festivals qui amène une variété de
festivaliers d'âge et de milieu socioprofessionnel différent. Il
est donc un lieu propice aux expériences sociales11.
10 Le figaro - Quand les festivals d'été
donnent un coup de pouce à l'économie
11 Les festivals de musique actuelle en pays de loire
- GECE
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