4.2.1.2 La gestion de la marge
bénéficiaire.
Généralement les IMF s'alignent sur les taux
d'intérêt pratiqués par les grandes institutions de la
place19 (2% mensuel par exemple), sans tenir compte de leur propre
structure de coût, ce qui ne leur permet pas de dégager un
différentiel suffisant «presque toujours supérieur à
15% même dans une organisation efficace» (DOLIGEZ et GENTIL,
2000).
Pour fixer leur taux d'intérêt (R), les IMF
devraient tenir compte de cinq variables (ROSENBERG, 1997)20. Il
s'agit des frais généraux (FG), des créances
irrécouvrables (CI), du coût des ressources (CR), du taux de
capitalisation souhaité (K) et du produit des placements (PP). A
défaut de pouvoir le faire évoluer à la hausse, la
nécessité reste de s'aligner sur la concurrence car « le
taux d'intérêt est un paramètre que l'on ne peut manipuler
au risque de perdre sa clientèle ou de compromettre la viabilité
de l'institution » (BCEAO, 2001). Il faut alors chercher à
réduire les agrégats qui influencent à la baisse le
différentiel, à savoir : le coût des ressources, les frais
généraux et le coût des créances
irrécupérables.
La législation sur l'usure, en fixant actuellement
à 27% le TEG21 à ne pas dépasser, constitue une
limite pour les IMF : elle réduit leur marge de manoeuvre pour
l'atteinte de la viabilité financière22. Or, le
contenu de l'intérêt en microfinance n'est pas le même que
celui des banques commerciales. Le taux d'intérêt facturé
par les IMF n'est pas seulement la rémunération due par
l'emprunteur au prêteur en contrepartie de la mise à disposition
d'un capital pendant une durée déterminée (Planet Finance,
2004),
19 PADME, PAPME et FECECAM.
20 Le taux d'intérêt effectif
annualisé (R) est fonction de 5 éléments exprimés
chacun en pourcentage du portefeuille de prêts suivant la formule : R=
(FG + CI+ CR + K - PP) / (1-CI)
21 TEG : Taux Effectif Global (l'usure dans l'UMOA est
définie par l'art. 1er de la loi-cadre modificative du 27
mars 1997).
22 Toutefois dans la pratique le taux d'usure au
Bénin actuellement est de 29,10% en application du décret cadre
de 1992 confirmé par l'arrêté n° 1910 du 12
décembre 1992 du ministre béninois des finances, le parlement
n'ayant pas encore inclus dans le droit positif béninois, les
dispositions de la loi-cadre modificative de 1997
57
La viabilité financière des IMF au
Bénin
il inclut aussi le prix d'autres services non financiers
offerts par les IMF à leur clientèle. Il s'agit de :
? la mise du fonds de crédit à la disposition du
client pour une période donnée ; ? la formation à la
gestion et à la tenue de document comptable ;
? le suivi-conseil de l'activité génératrice
de revenus exercée par le client ;
? la collecte de remboursements par des agents
opérationnels chez le client (BCEAO, 2001).
Savoir astucieusement combiner de façon optimale les
autres éléments de prix du service au taux d'intérêt
nominal pour accroître les produits tirés de l'exploitation est
donc un objectif important à poursuivre.
Certaines institutions, montrent un taux de rendement des
actifs très faible ou négatif (33% des institutions
étudiées)23. Or, un bon niveau de rendement des actifs
est indispensable pour profiter pleinement du levier financier lorsque l'IMF
recourt au marché financier. Le taux de rendement des actifs est en
effet un facteur d'attraction pour les investisseurs. Ces institutions qui
présentent actuellement un faible rendement de leurs actifs doivent donc
faire un effort sur les prochaines années pour renverser cette
tendance.
Une analyse plus approfondie fait ressortir que l'observation
d'un faible taux de rendement des actifs correspond à une faiblesse du
résultat de l'exploitation. L'augmentation du taux de rendement des
actifs nécessite donc une amélioration des résultats de
l'exploitation. Pour ce faire, les institutions doivent augmenter les produits
par rapport aux charges afin d'obtenir une meilleure marge
bénéficiaire. Ceci nécessite un accroissement du montant
moyen de prêts au détriment du nombre de prêts tout en
maintenant l'expansion de la clientèle ; la gestion d'un grand nombre de
petits prêts coûtant plus cher que celle d'un seul prêt de
grand montant (NTEZIYAREMYE et al. , 1996).
Or, la faiblesse des fonds de crédit oblige les
institutions à distribuer des produits de tailles plus petites en vue de
la division des risques, et de la réduction du risque porté sur
un seul client24 et, afin d'essayer d'atteindre le plus grand nombre
possible de
23 Convergence 2000, FECECAM, et ID.
24 Ratio prudentiel de « limitation des risques
pris sur un seul membre » qui ne doit pas excéder 10% des
dépôts ; article 53 du décret d'application de la loi
portant réglementation des institutions mutualistes ou
coopératives d'épargne et de crédit (BCEAO
1998).
58
La viabilité financière des IMF au
Bénin
clients ; ce dernier objectif étant en
général celui des bailleurs desquels elles dépendent pour
la mise à disposition du fonds de crédit indispensable à
leur activité.
En outre, les charges et les risques sont très
élevés pour la gestion d'un grand nombre d'opérations de
faible montant très dispersées géographiquement. La
gestion de telles opérations demande plus de professionnalisme de la
part d'un personnel de base qui, en général, est formé sur
le tas et ne bénéficie pas ou peu de formations
spécifiques au domaine. Les institutions font alors recours à une
assistance technique étrangère pour la mise en place de
procédures et d'outils visant à atteindre des niveaux de
performances techniques et financières élevés.
Les IMF concernées devront s'investir dans le dialogue
avec les bailleurs en vue d'obtenir l'autorisation d'effectuer des
positionnements sur des segments plus productifs du marché.
Après cette première observation des
performances financières voyons à présent si
l'évolution notée au sein des IMF étudiées est
liée aux paramètres suivants :
· l'âge de l'IMF ;
· la nature de l'IMF (crédit direct,
épargne-crédit, tontine, etc.) ;
· la taille du portefeuille de l'IMF.
En prenant l'aspect essentiel de la pérennité
que nous apprécions principalement avec le ratio d'autosuffisance
opérationnelle, nous retrouvons au sein des institutions
étudiées, trois (3) groupes distincts en nous basant sur la norme
d'un minimum de 130% préconisée par la BCEAO, à savoir
:
· le groupe des « bons » c'est-à-dire
celui des institutions respectant la norme BCEAO ;
· le groupe des « proches du minimum requis »,
comprenant les institutions présentant une autonomie comprise entre 100%
et 130% ;
· et enfin, le groupe des « insuffisants » qui
rassemble les institutions qui n'atteignent pas les 100% pour le ratio
d'autosuffisance opérationnelle.
Les douze (12) institutions de l'échantillon
étudié se répartissent dans les groupes
précédemment énumérés comme le montre le
tableau 10.
59
La viabilité financière des IMF au
Bénin
Tableau 10: Répartition des IMF en 3
catégories suivant leur ratio d'autonomie
Catégories
|
|
Institutions
|
|
|
|
|
Pourcentage
|
(( Bons »
|
PADME, PAPME, CPEC, Vital Finance
|
33%
|
(( Proches du minimum requis »
|
AssEF, CBDIBA, Caisse CODES, FINADEV, MDB
|
42%
|
(( Insuffisants »
|
Convergence 2000, FECECAM, ID
|
25%
|
TOTAL
|
-
|
100%
|
Parmi les « Bons » (33% de l'échantillon)
nous retrouvons la plupart des grandes institutions faisant le crédit
direct, mais aussi une petite institution d'épargne-crédit. Et,
au sein des structures présentant une autonomie opérationnelle
"insuffisante" on retrouve la plus grande des institutions
étudiées, la FECECAM (épargne-crédit) aux
côtés de petites institutions telles que Convergence 2000 et
ID.
Ceci permet de conclure que la grande taille du portefeuille
ne suffit pas pour que l'IMF soit autonome, l'âge non plus ; puisqu'il a
été constaté que les IMF les plus âgées ne
sont pas systématiquement celles qui sont autonomes (cas de la
FECECAM).
Les hypothèses suivant lesquelles il existerait une
relation positive entre l'âge des IMF ou entre la taille de leur
portefeuille et leur degré d'autonomie sont donc à
relativiser.
Quant à la nature de l'institution, nous notons
qu'à l'exception du CPEC, seules les institutions de crédit
direct sont autonomes (25% de l'échantillon). Ainsi, la FECECAM qui est
la plus âgée et qui a la plus grande taille de portefeuille n'est
pas encore autonome, cette particularité tient du fait qu'elle est une
institution d'épargne-crédit.
Les institutions d'épargne-crédit et de tontine,
de par leur objectif institutionnel de collecte préalable de
l'épargne et de couverture géographique ont des coûts par
franc de crédit plus importants, ce qui constitue un frein à leur
autonomie.
Il ressort donc de cette analyse que l'âge et la taille
du portefeuille ne sont pas déterminants pour l'autonomie.
En outre, d'après l'échantillon
étudié, c'est la nature de l'IMF qui influence le plus son
autonomie.
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La viabilité financière des IMF au
Bénin
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