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Les déterminants géopolitiques des difficultés de la gestion communautaire des conflits en Afrique de l'Ouest. La CEDEAO face au règlement de la crise post-électorale de 2010-2011 en Côte-d'Ivoire.


par Christophe C. H DAVAKAN
Institut de Relations Internationales et Stratégiques - Paris - Master 2 en stratégie internationale 2018
  

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2.2 Le cas du Liberia ou le souci de protéger une situation intérieure encore très précaire

Tout comme le Ghana, le Liberia, voisin de l'ouest ivoirien partage avec la Côte d'Ivoire une assez longue frontière ( 716 kilomètres) qui passe pour être l'une des plus poreuses en Afrique

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A l'origine de ses relations caractérisées comme telles, se trouve l `opposition de deux visons du développement de l'Afrique post-colonisation du début des années 1960. Kwame Nkrumah, panafricaniste qui a conduit son pays à l'indépendance en 1957 s'opposa à l'approche de Félix Houphouët Boigny plutôt partisan du maintien d'un lien fort avec l'ancienne puissance coloniale. En 1959 le président ivoirien accuse son voisin d'héberger les indépendantistes du Sanwi provoquant ainsi une nouvelle discorde qui va perdurer jusqu'à la mort de Nkrumah en 1966. Plus tard, la Côte d'Ivoire, par souci de sécurité interne s'est inquiétée de la multiplication des coup d'Etat au Ghana et en particulier de la prise di pouvoir par le lieutenant J.J Rawlings considéré par Abidjan comme un révolutionnaire communiste. Les accusations de volonté de déstabilisation s'inverse et s'est le président ghanéen qui indexe la Côte d'Ivoire d'héberger des opposants à son régime.

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NDC: National Democratic Congress (Congrès Démocratique National ) parti politique

fondé par J.J. Rawlings et membre de plein droit de l'International Socialiste.

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de l'Ouest. Après deux longues guerres civiles78 souvent marquées par des intrigues politiques entre dirigeants ivoiriens et libériens sur fond d'antagonismes et de complicités, le Liberia commençait juste à retrouver l'espoir d'une situation intérieure normale suite à l'élection de la présidente Ellen Sirleaf en janvier 2006. L'avènement au pouvoir à Monrovia de madame Sirleaf a constitué un véritable tournant dans les relations entre la Côte d'Ivoire et le Liberia où les passes d'armes entre combattants de factions rebelles des deux pays étaient légions et créant par voie de conséquence une grande zone d'insécurité qui échappe au contrôle des deux gouvernements. Les rapports entre groupes armés ivoiriens et libériens étaient étroits et complexes, de telle sorte que des combattants libériens venaient se combattre pour différentes forces sur le territoire ivoirien au début des années 2000. Ainsi par exemple, la crise ivoirienne offrait également de nouvelles possibilités aux forces opposées à Charles Taylor de repartir à l'offensive ( contre les factions qui le combattent au Liberia). Nombre des supplétifs libériens figurant dans l'armée gouvernementale ivoirienne appartiennent en fait au LURD (faction rebelle opposée au président Taylor). Mais il y a aussi d'autres libériens, en particulier des réfugiés, qui ont été souvent recrutés de force ou ont délibérément choisi de combattre. Le LURD en Côte d'Ivoire regroupe pour l'essentiel des dirigeants politiques en exil et d'anciens combattants des différentes factions qui ont essaimé l'opposition à Taylor lors de la guerre civile libérienne. 79 Cette intense activité militaire transversale aux deux pays et menée au plus haut sommet entre Gbagbo et Taylor, longtemps pointée du doigt par les Etats de la sous-région comme une menace pour leur sécurité intérieure commençait juste à être quelque peu endiguée par le nouveau pouvoir en place à Monrovia quand survient la crise électorale en Côte d'Ivoire. On comprend donc toute la difficulté pour le Liberia de souscrire à une intervention militaire en Côte d'Ivoire à cette étape de la crise. Tant les efforts

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Au début des années 1990 le Liberia a sombré dans une guerre civile qui a opposé les partisans du président Samuel Doe aux rebelles de Charles Taylor qui finit par prendre le pouvoir à la suite d'un long et laborieux processus de paix mis en oeuvre par la CEDEAO. L'effondrement total du système sécuritaire du pays a favorisé une multiplication de factions rebelles utilisant comme bases arrières la Côte d'Ivoire et la Sierra Leone. La seconde guerre civile a commencé en 1999 avec l'apparition au nord du pays, du mouvement LURD ( Libériens Unis Pour la Réconciliation et la Démocratie) dirigé par Sekou Conneh. Au début de l'année 2003, le MODEL ( Mouvement pour la Démocratie au Liberia), un autre groupe armé apparaît et le président Charles Taylor ne contrôlait plus qu'un tiers du territoire du pays.

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Ero, (Confort), Marshall, (Anne) et Marchal, (Roland), L'Ouest de la Côte d'Ivoire: Un

conflit libérien? , Politique Africaine, Editions Karthala, N° 89, 2003, p 96.

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déployés et le travail qui reste à accomplir pour parvenir à une sécurité intérieure appréciable sont immenses. Cette crainte ajoutée aux risques de déplacements massifs de populations ivoiriennes sur le territoire libérien peut provoquer des drames sociaux que le pays qui peine encore à se remettre de son douloureux passé récent n'a pas les moyens de maîtriser.

A ce groupe de pays opposés à une intervention militaire, on peut ajouter les Etats qui n'ont pas à craindre comme le Ghana, le Liberia, la Guinée Conakry, ou le Mali une invasion de réfugiés ivoiriens, mais pour des raisons liées à leur situation politique propre sont hostiles à l'usage de la force en Côte d'Ivoire. Dans ce registre on peut citer notamment la Gambie et le Togo qui, sous le couvert du principe de non ingérence dans les affaires intérieures d'un pays de la CEDEAO se sont désolidariser de la position nigériane. On peut comprend le souci majeur de ces deux Etats caractérisés par un déficit chronique de démocratie, et habitués à organiser des élections tronquées, qui est d'éviter de créé en Côte d'Ivoire un précédent qui pourrait s'appliquer très rapidement à eux-mêmes.

Face à un clivage aussi marqué des positions entre partisans et opposants à une intervention militaire de la CEDEAO en Côte d'Ivoire, le Nigeria semble perdre son leadership sur le règlement de la crise ivoirienne. Même la confirmation de l'UA du rapport de certification des résultats du scrutin du 28 novembre, qui équivaut à une ratification de la position de l'organisation ouest-africaine depuis le début de la crise n'a pas suffit à relancer le processus de médiation. Pendant ce temps, Le président Gbagbo qui n'avait d'ailleurs jamais pris au sérieux la menace d'usage de la force, comptant sûrement sur ses affinités avec de nombreux Chefs d'Etat de la sous-région, s'organise pour anéantir la résistance opposée par le camp Ouattara, retranché depuis le début de la crise à l'hôtel du Golfe et protégé par une ceinture sécuritaire de l'ONUCI. C'est dans ce contexte où le spectre d'une nouvelle guerre civile dans le pays est plus que perceptible, que les manoeuvres de la diplomatie française ont pris une nouvelle dynamique.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld