Le juge et le contrat de bail à usage professionnel en droit OHADA.par Giovanni Thiam Omontayo HOUNKPONOU Faculté de Droit et de Sciences Politiques de l'Université d'Abomey-calavi (BENIN) - Master 2 en Droit et Institutions Judiciaires 2015 |
Paragraphe 2L'irrespect de la formalité de notification aux créanciers inscritsDans la pratique, il n'est pas rare de voir les tribunaux sanctionner la violation de la formalité précitée par l'irrecevabilité de l'action en résiliation. Or, cette solution ne nous semble pas pertinente.
A. L'inopposabilité de la résiliation du bailEn raison de l'irrévocabilité de l'inopposabilité de la résiliation, cette sanction jouera même si les créanciers ont eu connaissance des défaillances du débiteur et n'avaient rien fait pour y remédier92(*). L'obligation de notification prévue par l'article 133 de l'Acte uniforme sur le droit commercial général semble être érigée à la dignité d'une formalité impérative93(*). La sanction rigoureuse de l'inopposabilité offre au créancier inscrit non informé un triple recours qui constitue des substitutifs au nantissement du fonds. D'abord, le créancier non informé peut poursuivre la réalisation de son gage incluant le droit au bail, alors même que ce bail est résilié dans les rapports entre le bailleur et le locataire94(*).Ensuite, il peut former tierce opposition à la décision prononçant ou constatant la résiliation du bail. Aussi, le jugement rendu sur tierce opposition et reconnaissant aux créanciers inscrits le droit au maintien du bail pour sauvegarder leur gage, a-t-il pour conséquence la rétractation de la décision de résiliation à l'égard de toutes les parties, y compris à l'égard du le locataire95(*).La notification est une obligation qui ne bénéficie qu'au créancier inscrit. C'est pourquoi, à défaut d'avoir reçu cette notification, la résiliation du bail leur est inopposable. C'est également pour cette raison que les créanciers inscrits sont seuls à pouvoir se prévaloir du défaut de notification.En l'absence de notification, les créanciers inscrits peuvent faire tierce opposition à la décision prononçant la résiliation et exiger le maintien du bail. Le délai pour faire cette tierce opposition est de 5 ans, ce qui fait peser un risque sur le nouveau bail qu'aurait consenti le bailleur. En effet, si la juridiction déclare la résiliation inopposable aux créanciers du preneur, cette décision entraînera rétractation automatique de la décision relative à la résiliation à l'égard de toutes les parties à l'instance initiale. En effet, les deux décisions sont inconciliables et seule l'une des deux peut être exécutée.Par conséquent, le bail résilié sera à nouveau applicable et le locataire pourra réintégrer les lieux. Les créanciers inscrits peuvent également poursuivre la vente forcée du fonds de commerce à titre de réalisation de leur privilège. Enfin, ils peuvent demander des dommages-intérêts au bailleur qui ne les a pas informés de la résiliation. Il faut toutefois que ce défaut d'information résulte d'une faute et non d'une erreur invincible. * 92Cass. 4 juin 1986, TRD Com. 1987, p. 194. * 93 Marie-Pierre Dumont-Lefrand, « Résiliation du bail : la nécessaire information des créanciers inscrits », AJDA, 2007, p. 450. * 94 Pierre Garbit, « Baux commerciaux » in Lamy droit commercial, édition 2005, n° 1223. * 95Cass. Civ, 15 décembre 1976, Bull civ, n° 466, p. 354. |
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