La responsabilité pénale du fait de l’empoisonnement et de ses problèmes en droit positif congolais.par André-JoàƒÂ«l MAKWA KANDUNGI Université de Lubumbashi - Licence en Droit 2015 |
e. L'élément légal de l'empoisonnementLa base légale de l'infraction sous examen est l'article 49 du décret du 30 janvier 1940 portant Code pénal congolais tel que modifié par la loi n°06/018 du 20 juillet 2006. D'après cette loi : Est qualifié empoisonnement, le meurtre commis par le moyen de substances qui peuvent donner la mort plus ou moins promptement, de quelque manière que ces substances aient été employées ou administrées. Il sera puni de mort. De ce fait, tout acte se rapprochant clairement à cette définition, une fois porté devant le juge ou le magistrat instructeur, pourra être qualifié d'infraction d'empoisonnement dès que ces derniers auront distinctement dégagé cet élément légal. Dans cet élément légal se trouve clairement la sanction à infliger à l'agent dont la responsabilité pénale sera établie. Nous sommes en présence de la règle parfaite car elle contient le texte incriminateur de l'infraction d'empoisonnement. 2. Elément matériel« L'élément matériel est un acte ou ensemble d'actes générateurs d'une infraction caractérisé dans l'incrimination ou dans le texte répressif.53(*) » Il est la manifestation expresse et externe de l'infraction : L'élément matériel, c'est le fait extérieur par lequel l'infraction se révèle et, pour ainsi dire, prend corps54(*). L'élément matériel particularise l'acte, le comportement, l'abstention contraires à la loi. L'existence de cet élément prouve à suffisance qu'un acte est infractionnel s'il se manifeste expressément par omission, commission, habitude... en violant clairement le prescrit pénal. L'intérêt que présente cet élément se situe dans le fait qu'il écarte toute législation qui se mettrait à sonder les pensées des agents afin de scruter réellement ce qu'ils mijotent dans leurs têtes. C'est sur base de l'élément matériel que nombre d'auteurs classifient les infractions en diverses catégories55(*), tel qu'il a été expliqué au chapitre précédent. Il convient aussi de souligner que « l'élément matériel consiste dans un fait ou un acte mais il ne consiste pas dans le résultat de cet acte.56(*) » a. L'élément matériel d'empoisonnementL'empoisonnement est une infraction de commission car il nécessite un acte positif, elle est aussi matérielle par le fait qu'elle est caractérisée par son résultat, la mort de la victime. « L'infraction matérielle est celle que la loi caractérise par son résultat. Elle n'est effectivement consommée que lorsque s'est produit le résultat défini par la loi comme faisant partie des éléments constitutifs de la conduite incriminée.57(*) » L'élément matériel pour l'empoisonnement consiste dans l'administration ou l'emploi des substances de nature à donner la mort. Nous partageons l'avis de l'arrêt de la Cour d'appel de Kisangani du 20 juillet 1974, qui précise que « Par emploi ou administration, il faut entendre notamment le fait de faire absorber, faire manger, injecter, faire consommer ou faire boire des substances mortelles.58(*) » La manière d'utilisation de ces substances et la quantité des produits utilisés importent peu, ce qui compte, c'est le fait de les utiliser. CIZUNGU note qu'il y a empoisonnement chaque fois qu'il y a réunion des faits ci-dessous : Primo, nous avons l'administration à une autre personne d'une substance mortelle. Ce fait exclut toute administration du poison à soi-même. Secundo, la présence de la substance mortelle. Elle doit être reconnue comme poison et capable de donner la mort.59(*) L'intérêt de la connaissance du caractère mortel de ces substances réside par le fait qu'en cas d'impossibilité matérielle d'établir l'existence du caractère toxique d'une substance supposée administrée, cela mènera le juge à acquitter le prévenu, telle est la position de la jurisprudence congolaise60(*). Par ailleurs, la non-consommation du poison, pour toute autre raison loin de la volonté de l'agent alors que ce dernier avait pourtant mis du poison à sa portée, constitue la tentative d'empoisonnement. De même que « le fait de verser du poison dans les aliments, de présenter ou de mettre à la disposition de la victime des aliments ou boissons empoisonnés... 61(*)» Toutefois, note CIZUNGU, l'administration du poison par erreur, par maladresse imprudence, négligence, inattention ou distraction ou dans l'intention de guérir ou encore par inobservation des règlements ne constitue pas l'infraction d'empoisonnement. Ainsi, « il a été jugé qu'à défaut d'apprécier et d'identifier la nature du produit consommé ainsi que l'absence d'un examen médical et d'un rapport d'expertise, l'infraction d'empoisonnement ne sera pas établie.62(*) » * 53 TSHIBASU PANDAMADI, Cours de Droit pénal général destiné aux étudiants de deuxième graduat, Unilu, Lubumbashi, inédit, 2011-2012, p. 58. * 54 NYABIRUNGU MWENE NGABO, op. cit., p. 201. * 55 NYABIRUNGU parle des infractions de commission et d'omission, in fractions matérielles et formelles, infractions instantanées, continues et d'habitude, des infractions consommées et tentées. * 56 STAFANI, G., LEVASSEUR, G. et BOULOC, B., op. cit., p. 205. * 57 NYABIRUNGU MWANE SONGA, op. cit., p. 204. * 58 Cour d'appel de Kisangani, 20 juillet 1974, in RJZ, 1977, p. 74 cité par LIKULIA BOLONGO, op. cit., p. 80. * 59 CIZUNGU B., op. cit., p. 357. * 60 Kisangani, 26 octobre 1972, in RJZ, 1974, n° s 1, 2, p. 45 cité par CIZUNGU B., op. cit., p. 357. * 61 LIKULIA BOLONGO, op. cit., p. 80. * 62 Tribunal de grande instance d'Uvira, siège secondaire de Kavumu, RP 1818/Flag, 23 juillet 2004, inédit, cité par CIZUNGU B., op. cit., p. 358. |
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