La responsabilité pénale du fait de l’empoisonnement et de ses problèmes en droit positif congolais.par André-JoàƒÂ«l MAKWA KANDUNGI Université de Lubumbashi - Licence en Droit 2015 |
a. NotionL'élément légal est de prime un texte qui incrimine un comportement ou un acte, à cet acte une peine est alors prévue en termes de sanction. L'élément légal est la base sans laquelle l'acte ne peut être qualifié d'infraction. Ainsi, « La démarche des autorités judiciaires, devant les faits qui leur sont apportés ou qu'elles ont elles-mêmes constatés, consistera à les affronter avec la définition que la loi fait de telle infraction. En d'autres termes, elles doivent qualifier le cas d'espèce qui leur est soumis.46(*) » En plus de cette qualification, cette autorité doit aussi qualifier l'infraction pour faire d'une part la distinction entre le crime, le délit et la contravention (là cette différence existe) et d'autre part, pour préciser devant quel type d'infraction que l'on se trouve : infraction de droit commun, infraction politique, militaires, etc. Le principe de légalité des délits et des peines dont il a été question supra montre à suffisance la pertinence ou la raison d'être de l'élément légal de l'infraction. Il sied de préciser qu'en l'absence de cet élément, il n'y a donc pas d'infraction. La recherche de l'élément légal est une tâche incombée systématiquement au magistrat instructeur ou au juge. C'est à partir de la définition donnée à l'infraction par la loi que le praticien du droit, le juriste ou encore le juge saura comment confronter les faits relatés à l'infraction dans l'entendement du texte. Pour la qualification des faits, dit le feu professeur AKELE ADAU, le juge doit tenir compte des incriminations et des sanctions prévues par la loi. b. La qualification des faits d'empoisonnementL'autorité judiciaire doit être en mesure de pouvoir qualifier les faits présents devant elle. La qualification des faits ne peut se faire que sur base de la loi préalablement édictée. C'est la raison d'être de l'élément légal en droit pénal. La qualification des faits est la confrontation de ceux-ci avec le texte incriminateur afin d'établir si ces faits contiennent des éléments constitutifs d'une infraction. Pour AKELE ADAU, deux qualifications sont à distinguer, à savoir la qualification légale et la qualification judiciaire : « La qualification légale est celle qui est définie d'une manière abstraite par la loi ou mieux celle qui se cristallise en un texte de la loi et qui constitue ce que l'on appelle classiquement l'élément légal de l'infraction. La qualification judiciaire, elle, est une opération par laquelle l'autorité judiciaire fait correspondre les faits qui paraissent antisociaux à la qualification légale de telle sorte que l'intervention de la sanction pénale suppose l'existence préalable d'un texte de loi.47(*) » L'élément légal est une référence d'une utilité importante pour la qualification d'un acte infractionnel. NYABIRUNGU, quant à lui, étale toute une théorie sur la notion de qualification. Dans le cadre du présent travail, nous ne prenons que les éléments essentiels de sa théorie. En effet, NYABIRUNGU commence par des principes généraux dont la confrontation rigoureuse de faits poursuivis avec divers types de faits incriminés par la loi pénale, l'adoption provisoire d'une qualification par l'autorité judiciaire et que celle-ci peut l'abandonner pour une autre qualification, les juridictions de jugement ne sont nullement liées par la qualification retenue par le ministère public, etc. De là, nous inférons avec cet auteur que « le juge d'appel et le juge de cassation ne sont pas liés par la qualification retenue par le premier juge48(*) ». C'est à la juridiction répressive d'établir la qualification de faits présentés devant elle, cela, dans le respect du droit de la défense. A la suite de NYABIRUNGU, il y a lieu de noter que toute requalification de faits qui aggrave le sort du prévenu, ce dernier doit, en vertu de la loi, bénéficier d'un délai légal pour répondre de la nouvelle qualification. Toutefois, en cas de disqualification favorable, celle-ci doit être retenue car les droits de la défense ne sont pas ici mis en cause. Ce qui sous-entend la non opportunité d'accorder un délai nouveau à la défense pour faire face à la nouvelle qualification. Qu'en est-il de l'empoisonnement ? Quels genres de faits liés à cette infraction qui peuvent être présentés devant le magistrat ? Des divers faits que peuvent être poursuivis l'auteur de ce crime, nous pensons retenir ces accusations suivantes : avoir été surpris de mettre une substance nocive dans la nourriture de la victime et peu après la victime a succombé; avoir forcé la victime à avaler les substances nocives et cela l'a achevée; avoir été avec la victime dans un débit de boisson et avoir mis des substances toxiques ou donnant la mort, dans son verre de bière, etc. Face à ces faits, c'est au magistrat de faire cet exercice de sortir les faits qualifiés, de les disséquer des autres faits qui ne relèvent que de purs soupçons. Disons à ce niveau que le juge peut être saisi par tout justiciable, autorité publique ou simple particulier intéressé. Il est, dans ce cas, chargé de faire appliquer la loi par celui qui l'a enfreinte.49(*) Cet exerce n'en est pas moins difficile parce qu'il faut des enquêtes profondes, recouper les faits, essayer de reconstituer les faits dans leur histoire propre pour tenter de comprendre le scenario, faire recours à l'expertise s'il le faut pour tenter d'établir des liens de causalités, etc. Le travail du magistrat reste difficile d'autant plus que dans bien des cas, la victime a déjà succombé mais il faut parvenir à attester que sa mort est due à telle ou telle autre cause ou qu'elle a été provoquée par l'empoisonnement. Il y a lieu de retenir que peu importe la qualification retenue, le droit de la défense ne peut être méconnu * 46 NYABIRUNGU MWENE SONGA, Traité de Droit pénal général, 2e édition, Kinshasa, Editions universitaires africaines, 2007, p. 148. * 47 AKELE ADAU, P. et SITA-AKELE MUILA, A., Cours de Droit pénal spécial destiné aux étudiants de Troisième Graduat Droit, Kinshasa, Université Protestante du Congo, inédit, 2003-2004, p. 22. * 48 Lubumbashi, 3 avril 1969 cité par NYABIRUNGU MWENE SONGA, op. cit., p. 149. * 49 NIMY MAYIDIKA-NGIMBI, Essai critique de jurisprudence. Analyse d'arrêts de la Cour Suprême de Justice 1969-1972, Kinshasa, 1973, p. 22. |
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