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Dynamique migratoire et processus d'acquisition des terres pour l'installation des refugiespar Chatelain AVORE Institut des relations internationales - Master 2023 |
B. Élaboration de la problématiqueDans ce volet qui constitue l'enjeu de notre étude, nous allons présenter la revue de la littérature (1), le cadre théorique de notre étude (2), les questions de recherche (3) et la construction des hypothèses de recherche (4). 1. La revue de la littérature Olivier Laurence et al, définissent la revue de littérature comme ce phénomène consistant notamment à "identifier les acteurs, les travaux, les articles scientifiques qui ont façonné la connaissance d'une certaine discipline dans un domaine plus précisément20. De nombreuses études ont porté sur l'arrivée et la présence des réfugiés dans les pays d'accueil. Les travaux analysés dans le cadre de cette étude portent sur l'acquisition de terres pour l'installation des réfugiés et l'acquisition de terres en dehors des camps des réfugiés eux-mêmes. Ainsi, dans le 20Olivier Laurence et al, l'élaboration d'une problématique de recherché, Paris, Le Harmattan, 2005, P.24 11 but de contribuer davantage à l'avancement de la science, les ouvrages référencés seront classés en deux catégories : l'accueil et les besoins urgents des réfugiés dans le monde et en Afrique, le niveau de protection accordé aux droits fonciers des réfugiés eux-mêmes. En effet, selon Cambrezy (2006), l'Ethiopie, le Kenya, l'Ouganda et dans une moindre mesure le Congo et le Tchad, ont réussi, avec l'aide de la communauté internationale, à prendre en charge des centaines de milliers de réfugiés du Sud Soudan. Il prend pour exemple l'Ouganda, qui comme la plupart des pays dans le monde, est lié par la convention de Genève 1951.21 L'accord stipule que les pays signataires doivent assurer la protection et l'assistance des étrangers fuyant la guerre ou les persécutions et cherchant refuge à l'étranger. Selon cette convention, est considérée comme réfugiée « toute personne qui a une crainte fondée d'être persécutée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, en dehors de son pays dont elle est une nation et qui ne peuvent ou, à cause de cette peur, ne veulent pas réclamer la protection du pays ». Il a poursuivi son analyse en expliquant les difficultés de gestion de ces réfugiés dans les pays d'accueil, en substance, il note que, dans les pays les plus pauvres et en particulier en Afrique, il est rare que des pays soient en mesure de supporter eux-mêmes le fardeau d'accueillir des dizaines, voire des centaines de milliers de réfugiés. Dans ces cas, les pays d'accueil feraient alors appel aux Nations Unies par l'intermédiaire du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), non seulement pour assurer et contrôler la protection des réfugiés, mais aussi pour mobiliser les ressources financières, humaines et logistiques nécessaires au jour le jour. L'assistance actuelle de ces populations. Généralement, au plus haut niveau du Pays, des conditions d'admission spécifiques sont négociées avec le HCR. Dans la plupart des cas, les réfugiés sont regroupés et hébergés dans des camps et le HCR coordonne, sous contrat avec des ONG locales ou internationales, diverses activités liées à l'assistance à cette aide humanitaire (logistique, eau, nourriture, santé, éducation...). La concentration des réfugiés conduit alors à une concurrence accrue pour l'accès et l'utilisation des ressources locales. Cela conduit à la déforestation et à la dégradation de l'environnement. Pour résoudre ce problème, le HCR, comme toutes les agences des Nations Unies, s'est engagé à intégrer l'aspect environnemental dans ses activités statutaires d'assistance aux 21 Cambrezy Luc, territoire et dimension géopolitique de l'accueil des réfugiés : les colonies agricoles des exilés du Soudan en Ouganda. Nature Sciences sociétés, 2006, p.365-375. 12 réfugiés. Pour ce qui est du degré de protection réservé aux droits fonciers l'on note que « Le but visé est de placer à nouveau les réfugiés dans des conditions identiques ou équivalentes à celles d'avant les événements dont ils ont été victimes »22. En d'autres termes, dans ce cas, c'était une situation où les réfugiés pouvaient définitivement jouir de leurs droits fonciers. Il s'agit de rendre aux réfugiés l'état des terres auxquelles ils avaient droit avant leur évacuation. Un auteur souligne qu'à l'autre bout du spectre concernant la garantie des droits fonciers des réfugiés : « La protection et la défense des droits fonciers des déplacés (...). La protection consiste à agir a priori pour prévenir la violation des droits fonciers contre toute atteinte provenant de tierces personnes. La défense, quant à elle, consiste à réagir a posteriori contre les atteintes à ces mêmes droits depuis leur survenance jusqu'à leur cessation volontaire ou forcée »23. En fait, l'enjeu principal de cette enquête est de protéger les droits fonciers des réfugiés contre des tiers qui pourraient enfreindre ces droits, en particulier les locaux. En effet, à l'Extrême-Nord du Cameroun, « Les conflits fonciers sont des oppositions ouvertes et parfois violentes qui ont pour cause un espace, une parcelle de terre. Les espaces disputés sont destinés à l'agriculture ou à l'élevage, à l'habitation ou considérés par une communauté comme faisant partie de son patrimoine historique. Les conflits surviennent lorsque les parties en présence revendiquent la possession de la terre disputée »24. Ainsi, la question de la nécessité de renforcer la protection des droits fonciers des réfugiés dans l'extrême nord du Cameroun semble être ancrée dans les droits de propriété, facteur de conflit entre les peuples autochtones et les réfugiés. Au coeur de la problématique des conflits fonciers avec les réfugiés de l'extrême nord du Cameroun se trouvent clairement deux enjeux majeurs, notamment l'adéquation du cadre juridique de la protection des réfugiés par rapport à la réalité de l'intégration sociale des réfugiés. Il y a aussi la question de la protection des droits de propriété des réfugiés. Par conséquent, notre étude montre comment les réfugiés sont accueillis et protégés dans le pays d'accueil et le processus d'acquisition des terres pour la construction de camps pour installer les réfugiés. 22Odelag, « La protection et la défense des droits fonciers des déplacés et réfugiés », in Observatoire de l'Action Gouvernementale, 2006, p.7 23Idem. 24 OCHA «Conflits et mécanismes de résolution de crises à l'Extrême-Nord du Cameroun », disponible sur https://www.humanitarianresponse.info/ru/operation/cameroun/ , consulté le 17 Décembre 2021, p.22 13 2. Le cadre théorique de l'étude Le cadre théorique est la présentation d'un cadre d'analyse et de généralisation des relations théoriques déjà prouvées dans d'autres contextes afin de les appliquer au problème. Il amène également une justification scientifique aux recherches : il démontre que celles-ci ne « sortent pas de nulle part » et qu'au contraire, elles possèdent de solides fondations scientifiques. Pour répondre à notre question de recherche, nous allons nous placer dans la perspective de la théorie du transnationalisme et du l'institutionnalisme.
25 Sindjoun Luc, Sociologie des Relations Internationales Africaines, Paris, Karthala, 2002, P.99 26Dans son étude sur la sociologie des Relations Internationales africaines, Luc SINDJOUN souligne que les réfugiés exportent l'insécurité dans la région des lacs. Précisément en RDC, les réfugiés Rwandais ont exporté leurs conflits ethniques dans le camp. Les camps des réfugiés précisément dans la région de Bukavu étaient des lieux de contrôle et d'organisation pour la reconquête du pouvoir. 14 Depuis une quinzaine d'années, on assiste à un regain d'intérêt pour les théories des institutions. Dans le monde anglo-saxon notamment, la publication de plusieurs ouvrages soulignant l'importance des institutions a contribué à susciter un débat dans les revues scientifiques sur le rôle des institutions dans la gestion des crises et la consolidation de la paix. Ainsi, John Mearsheimer, dans son article intitulé « La fausse promesse des institutions internationales » affirme que les institutions internationales ne sont pas liées à la stabilité politique et n'ont pas une grande influence sur les affaires internationales de guerre et de paix. Il définit les institutions comme«un ensemble de règles qui dictent la manière dont les États doivent coopérer et se concurrencer»27.Il se réfère aux théories de l'institutionnalisme pour montrer son manque de confiance dans l'efficacité des institutions internationales, en particulier l'institutionnalisme libéral qui met l'accent sur la coopération économique et environnementale comme moyen d'éviter la guerre, puis, la sécurité collective se réfère à la prévention de la guerre en refusant d'utiliser la force en éteindre toute menace de guerre, en interdisant aux États d'agir dans leur propre intérêt. Il a parlé de la théorie critique selon laquelle une approche révolutionnaire et des efforts pour changer la structure politique sont nécessaires pour rendre la coopération inévitable et faciliter une paix durable. 3. Questions de recherche La question des droits des refugié et de gouvernance foncière dans la région de l'Est du Cameroun est une préoccupation constante aux vues de l'évolution de la crise sécuritaire en RCA. Pour cela, notre sujet nous permettra de nous interroger dur le processus d'acquisition des terres pour l'installation des réfugiés dans les camps l'ors de leur arrivé dans le pays d'accueil. a. Question principale La question principale que nous nous posons pour cette étude est celle de savoir :
b. Questions secondaires 27 Mearsheimer John, sécurité internationale vol.19, n°3, 1994-1995, P.5-49. 15 Deux (3) questions secondaires découlent de notre question de recherche principale, à savoir : y' Quelles sont les logiques d'installation des réfugiés à Gado-Badzéré et les normes édictées par l'Etat du Cameroun dans l'encadrement des réfugiés réglementant les questions foncières ? y' Comment s'opère le choix des lieux devant servir de camps de réfugiés et les mécanismes d'accès aux terres par les réfugiés au-delà des camps ? y' Quelles sont les mesures que l'Etat et le HCR doivent prendre pour que les réfugiés au même titre que les communautés hôtes jouissent de leurs droits fonciers ? 4. Construction des hypothèses de recherche L'hypothèse est une explication provisoire de la nature des relations entre deux ou plusieurs phénomènes. Au regard de la question de recherche précédemment soulevé, nous présenterons l'hypothèse principale (a) et celles secondaires (b). a. Hypothèse principale Nous pouvons émettre l'hypothèse centrale suivante : les mouvements migratoires favorisent la création des nouveaux Camps afin d'installer les nouveaux réfugiés venus massivement de la RCA. Hypothèses secondaires y' Il existe des instruments juridiques nationaux et internationaux relatifs à la protection des réfugiés une fois arrivée dans une zone d'accueil pour des raisons sécuritaires et les normes édictées par l'Etat du Cameroun réglementant les questions foncières. y' Le processus d'attribution des terres pour l'installation des réfugiés dans et en dehors des camps s'opère selon des procédures et critères destinés à garantir leur sécurité, leur accessibilité et les droits fonciers attachés aux sites d'installation. y' L'Etat et le HCR doivent prendre des mesures en faveur des communautés hôtes et des réfugiés pour qu'ils jouissent chacun de leur droit foncier II. CONSIDERATIONS METHODOLOGIQUES SUR L'OBJET DE L'ETUDE 16 Par méthodologie de la recherche, il faut entendre les méthodes utilisées et les techniques de recherche dont il sera fait usage dans notre étude. Il s'agit ici de présenter la méthode de recherche (A), les techniques de collecte de données (B), et l'organisation de la démonstration (C). A. Le choix de l'approche hypothético-déductive comme trame méthodologique de l'étude Reprenant GRAWITZ, la « méthode est constituée de l'ensemble des opérations intellectuelles par lesquelles une discipline cherche à atteindre les vérités qu'elle poursuit, les démontre, les vérifie »28. Autrement dit, la méthode est importante dans une recherche. René Descartes corrobore cette pensée en disant que : « Cette aptitude universelle : le bon sens, ne sert pas à grand-chose lorsqu'elle est dépourvue de toutes méthodes ». Toutefois, il ne suffit pas d'avoir une méthode, il faut également savoir l'utiliser. C'est à ce niveau qu'intervient la Méthodologie, qui est comprise selon Omar AKTOUF comme : « l'étude du bon usage des méthodes et des techniques »29. Autrement dit, les méthodes et techniques retenues dans une recherche donnée doivent être les plus aptes à rendre compte du sujet étudié et à mener le chercheur vers les buts qu'il s'est fixés en termes d'aboutissement de son travail30 Comme méthode, nous utiliserons dans le cadre de notre étude, l'approche hypothético-déductive. La méthode déductive, aussi appelée «déduction logique» ou «approche hypothético-déductive», est une méthode de travail scientifique. Elle a pour but d'expliquer un phénomène en partant d'un sujet ou d'une hypothèse sur un phénomène. On ne part donc pas de faits observables. Les recherches entamées pour répondre à cette hypothèse permettent aussi au chercheur de développer d'autres hypothèses. La confirmation ou la non confirmation des hypothèses de travail doit permettre de trouver une explication au sujet ou au phénomène sur lequel se porte la recherche31. Autrement dit, elle se base sur des hypothèses de travail à valider ou invalider. Elle nous permettra dans le cadre de notre recherche, de développer notre sens critique et notre esprit scientifique, les observations et l'enquête sur le terrain permettront de faire émerger de nouveaux éléments susceptibles d'approfondir le sujet et les hypothèses, 28Grawitz (Madeleine), op.cit., p.351 29 Aktouf, Méthodologie des sciences sociales et approche qualitative des organisations. Une introduction à la démarche classique et une critique, Montréal, les Presses de l'Université du Québec, 1987, p.27. 30 Idem. 31Accessible sur https://www.scribbr.fr/methodologie/methode-deductive/. Consulté le 5 décembre 2021 17 validées ou invalidées, permettront d'expliquer scientifiquement le sujet ou le phénomène étudié. |
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