Paragraphe 2 : Une action politique à
redynamiser.
La rénovation institutionnelle de la Francophonie
constitue un événement marquant de l'histoire de l'institution
qui fait suite à son engagement politique en faveur de la
démocratie. Dans toute la panoplie d'organes appelés à
jouer un rôle politique pour l'approfondissement démocratique, le
Secrétariat Général occupe une place importante pour avoir
été consacré par la Charte comme « clé de
voûte du système institutionnel de la Francophonie ». Mais
cet organe ne pourra jouer efficacement sa fonction s'il agit de façon
solitaire dans une totale indifférence des Etats. Par ailleurs, L'OIF
étant surtout un acteur subsidiaire 316 en matière
d'accompagnement démocratique, elle doit pouvoir compter sur une
synergie d'actions entre ses institutions et les acteurs externes et internes
engagés dans le combat pour la démocratie.
Ainsi, la redynamisation de l'action de la Francophonie en
faveur de la démocratie passe par un appui renforcé aux actions
du Secrétaire Général (A) et l'intensification de la
collaboration multidimensionnelle (B).
A- Un appui renforcé aux initiatives du
Secrétaire Général
L'importance, l'immensité et la sensibilité de
la tâche confiée au Secrétaire général de la
Francophonie sur le plan politique nécessite qu'elle soit appuyée
non seulement par les instances de l'organisation mais qu'elle reçoive
aussi l'apport bénéfique des Etats. En effet, leur enthousiasme
et leur collaboration sont primordiaux pour la réussite des missions
politiques mises en oeuvre dans leur ordre interne.
Dans l'état actuel des choses, les Etats restent encore
peu collaborateurs s'agissant de leur accompagnement au Secrétaire
Général pour l'éclosion des valeurs démocratiques
dans leur ordre interne. La tendance générale est de se
soustraire des actions multilatérales
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316 MASSART-PIERARD Françoise, « La Francophonie,
un nouvel intervenant sur la scène internationale », article
précité, p.26. A cet effet, soulignons que l'ONU reste la
première organisation qui déploie ses actions dans le domaine de
la démocratie sur le plan international. Les organisations
régionales et sous régionales s'efforcent à leur tour de
mettre en place des actions destinées à assurer l'éclosion
des valeurs démocratiques au profit de leurs membres. L'OIF ne met en
oeuvre ses actions que lorsque ces dernières ne le font pas ou lorsque
son expertise est sollicitée. Ceci justifie l'opinion de Abdou Diouf
selon qui : «l'humilité et le réalisme nous obligent
à admettre que la Francophonie ne peut pas être sur tous les
fronts, et qu'elle est d'abord là pour faire ce que d'autres ne feront
jamais à sa place». Voir MASSART-PIERARD Françoise,
« La Francophonie, un nouvel intervenant sur la scène
internationale », article précité., p.26.
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de l'organisation en mettant en avant l'autonomie
constitutionnelle. En prenant le seul cas des missions d'observation
électorale dépêchées par le Secrétaire
Général lors des scrutins électoraux, on remarque que les
autorités politiques ont tendance à complexifier la mission des
observateurs en dissimulant par exemple des informations importantes qui
pourraient entamer la transparence ou la crédibilité de
l'élection.
Par ailleurs, la remarque est également la même
dans le domaine de la médiation dans les périodes de crises
politiques quand les Etats n'affichent pas leur croyance en les atouts dont
dispose l'organisation pour la résolution pacifique des tensions
politiques. L'apport des Etats membres à la réussite de la
mission du médiateur envoyé par le secrétaire
Général est primordial pour le dénouement de la crise.
Ainsi, « la médiation francophone ne sera consolidée que
dans un contexte d'adhésion des Etats membres bien plus qu'aujourd'hui
à l'idée que la Francophonie peut occuper une place de choix dans
ce secteur. Cela passe d'abord par la conviction des Etats membres que l'OIF
dispose pour ce faire d'atouts crédibles. Ces Etats doivent se sentir
impliqués ou être amenés à se sentir
impliqués. Le secrétaire Général verrait son action
considérablement renforcée s'il pouvait s'appuyer sur
eux»317.
En effet, compte tenu de la subtilité que requiert le
processus de médiation, il faut reconnaitre que le médiateur
envoyé par le Secrétaire Général ne peut à
lui seul faire la paix. Il a forcément besoin de la bonne foi non
seulement des protagonistes au conflit mais aussi de l'apport des acteurs
internes (les démembrements de la société civile) et la
confiance de l'ensemble de la communauté francophone pour la
réussite des différentes étapes de la médiation.
«La question de l'appropriation des solutions par les parties à
l'échelle nationale est déterminante en médiation et le
travail du médiateur sur l'inclusion des acteurs est
décisif»318 car, «le médiateur seul
ne construit pas la paix. Les parties au conflit et la société
dans son ensemble doivent adhérer au processus de paix et s'employer
à mettre en oeuvre les accords qui en
découlent»319.
317 CHABI Basile, L'OIF et la résolution des conflits
en Afrique noire francophone, article précité,
p.78.
318 OIF, 2é Retraite sur la médiation
de la Francophonie, 2012, Centre de politique de sécurité de
Genève, 21-22 novembre 2012, p.47.
319 Ibidem.
Pour mettre en exergue l'importance du soutien de la
communauté francophone aux initiatives du Secrétaire
Général, l'ambassadeur Jean Pierre Vettovaglia pense qu'une
façon d'obtenir cet engagement « serait le recours bien plus
fréquent à l'adoption de résolutions politiques sur les
situations de conflit par le Conseil Permanent de la Francophonie
(CPF)». Les résolutions, selon lui « sont
essentielles pour l'affirmation de l'OIF en tant qu'acteur dans le
règlement des conflits parce qu'elles conféreront à
l'action du SG la légitimité d'un mandat confié par les
Représentants des Etats membres... Elles sont un instrument central de
dialogue entre les SG et les Représentants étatiques. Et la
Francophonie sera d'autant plus forte que son action se fonde sur une
résolution des instances et donc sur un mandat confié par
l'ensemble de ses Etats membres»320. Sur le plan pratique,
une telle solution peut paraitre complexe mais ne doit pas conduire à
accepter une fatalité quant au comportement ambivalent des Etats les
conduisant à adopter des positions à l'antipode des obligations
auxquelles ils ont souscrit.
Enfin, pour la réussite et la facilitation de ses
missions politiques, le Secrétaire Général doit pouvoir
compter sur la franche collaboration des instances de la Francophonie en vue de
la prise de solutions adéquates pour la prévention et la gestion
des crises politiques.
Toutefois, pour une meilleure promotion de la
démocratie dans l'espace noir francophone, l'OIF doit intensifier et
perfectionner sa collaboration avec les organisations internationales et
régionales africaines puis engager une synergie d'actions avec les
dynamiques internes à l'échelle nationale.
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