3.2 Discussion
La recherche effectuée sur les pratiques agricoles et
la dégradation des sols dans la commune de Nikki a permis de conclure
que les pratiques culturales ne sont pas sans incidence sur les sols. Il
ressort que la dégradation des sols est caractérisée par
la modification de la morphologie structurale des sols, la mort des
microorganismes des sols et la mobilité des éléments
chimiques des sols causée par les pratiques agricoles. Elle se
résume aux facteurs responsables comme : l'utilisation excessive des
intrants chimiques dans la production agricole, les activités humaines
liées à la production agricole (abattage et incinération
des arbres, labours parallèles à la pente), les pratiques
fantaisistes de la jachère. Les causes liées aux activités
humaines, sont techniques, sociales, économiques et politiques (P.
Brabant (2012, p.39). Toutes ces pratiques ont des conséquences tant sur
les éléments nutritifs des sols que sur la texture des sols.
Parmi autres, on peut citer : la pollution de l'eau et de l'air,
l'érosion sous diverses formes, la baisse du rendement agricole et
l'appauvrissement des sols. La diminution des rendements des récoltes
peut être indicative de la dégradation des terres, mais ce n'est
pas la seule explication possible des rendements décroissants.
Même si les rendements augmentent, la dégradation des terres peut
également se produire, mais ses effets peuvent être masqués
par les pratiques de gestion adoptées par l'exploitant agricole, telles
que l'utilisation de plus grandes quantités d'engrais. En effet, ce
masquage de la dégradation des terres par l'utilisation de plus en plus
grande quantité d'engrais est considéré par certains
auteurs comme étant la conséquence la plus grave de la
dégradation des terres indiquant que les futurs rendements
s'effondreront quand les exploitants agricoles ne seront plus en mesure
d'acheter les engrais (E. D. Akpinfa & al. (2017, p.363).
Signalons également que les causes de la baisse des rendements agricoles
sont celles qui émanent des activités de l'élevage, de
l'agriculture, de la chasse et de la déforestation à travers les
sous-activités qui se développent autour d'elles et qui
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constituent des sources d'impacts qui influencent le
fonctionnement du sol. L'identification des sources d'impacts effectuée
à partir de la liste de contrôle de BISSET (1987) a permis de
déterminer qu'en dehors de l'agriculture, les activités comme
l'élevage, la chasse et la déforestation participent aussi
à la dégradation des sols dans la commune de Nikki. Ces sources
d'impacts touchent négativement les indicateurs de l'état des
sols tandis que ceux du milieu humain son moins touchés en dehors de la
santé des agriculteurs. L'analyse et l'évaluation des
caractéristiques de croissance d'une culture de la LADA-L (2007) a
permis de déterminer que les facteurs de récoltes à savoir
(variété de la culture, la manière d'ensemencer les
plantes, la présence des signes d'infestation, la distance entre les
rangs des cultures, le comportement des animaux face aux cultures, et le
traitement du champ) et les facteurs de dégradation (exposition ou non
des parties des champs au vent, présences des parties des champs en
pente, existence de différences dans la profondeur du sol ou des
accumulations derrières des murets ou haies) participent non seulement
à la baisse des rendements agricoles mais aussi à la
dégradation des sols cultivables.
L'analyses des paramètres physico-chimiques du sol dont
le nombre du Potentiel hydrogène (pH), la Capacité
d'Échange des Cationique (CEC), le stock du Carbone Organique (CO), la
quantité du Nitrogène (N) et le niveau de fertilité des
sols a permis de déterminer le niveau de dégradation des sols
dans la commune de Nikki. Les résultats révèlent que tous
les différents types de sols de la commune de Nikki sont acides car leur
teneur en pH est inférieur à 7. Le taux d'acidité de ces
sols varie de légèrement acides à fortement acides. Cette
acidité se traduit par la concentration de l'eau en ions H+ dans le sol.
Ceci entrave la séquestration du CO et l'activité des
microorganismes. Cette acidité traduit également la faible CEC
dans les sols. Ceci signifie que les sols de la zone d'étude sont acides
et peu favorables à la production agricole. L'acidité de ces sols
constitue un handicap pour les éléments nutritifs des sols et
ralentir l'évolution des plantes qui prennent leurs substances sous le
sol pour leur développement. Pour une bonne production agricole dans ce
cas, il faut corriger ce taux en utilisant les amendements et le compost qui
peut permettre l'accroissement de la Capacité d'Echange Cationique des
sols et des organismes vivants du sol de se développer. Mais comme le
révèlent les résultats de cette étude ; 28,16 % des
sols de la commune de
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Nikki ont une faible Capacité d'Echange Cationique
(CEC) ; 35,27 % ont un taux moyen de CEC ; 26,37 % ont une forte CEC et enfin
10,20 % ont une très forte CEC. Les taux élevé du CEC
variant entre faible et moyen signifie que les sols de Nikki ont une
capacité moyenne de rétention ou d'emmagasinement des
éléments nutritifs dans les sols.
Concernant le taux du Nitrogène (N), il ressort que
11,85 % des sols ont un très faible taux du Nitrogène ; 20,96 %
ont un faible taux du Nitrogène ; 58,38 % ont un taux moyen du
Nitrogène et 8,80 % ont un fort taux du Nitrogène. La faible
proportion du fort taux du Nitrogène dans la commune traduit la
disponibilité d'une quantité moyenne des éléments
nutritifs et minéraux pouvant participer à la croissance des
plantes, à l'amélioration des rendements et à la
qualité de production agricole. Concernant le stock du Carbone Organique
dans les sols, les résultats révèlent que 6,17 % des sols
de Nikki stockent un très faible taux du CO ; 10,06 % stockent un faible
taux du CO ; 8,08 % stockent un taux moyen du CO et 75, 70 % stockent un fort
taux du CO. La forte proportion des sols au niveau du fort taux de stock du CO
enregistré détermine l'équilibre existant entre la
minéralisation et l'apport des amendes des végétaux, des
débris et les résidus issus des activités agricoles dans
les sols. Ce processus permet de maximiser un stock important de
matières organiques qui améliorent la fertilité des sols
pour la production agricole. On peut alors conclure que le faible taux du CO
des sols est dû à l'absence des activités agricoles sur ces
sols. Quant au fort taux de séquestration enregistré, il traduit
la fréquence de la production agricole sur ces sols. Ces sols
bénéficient de la décomposition des résidus des
récoltes, des débris des végétaux qui accroissent
le stock de matière organique. Allant dans la même logique, FAO
(2017, p. 7) affirme que, la séquestration du COS est un
mécanisme par lequel le carbone atmosphérique est fixé et
stocké dans le sol grâce aux plantes ou aux résidus
organiques. A partir du CO2, la séquestration du COS comporte trois
étapes: 1) prélèvement de CO2 dans l'atmosphère via
la photosynthèse des végétaux, 2) transfert de carbone du
CO2 en biomasse végétale et 3) transfert du carbone de la
biomasse végétale vers le sol dans lequel il est stocké
sous forme de COS dans le réservoir le plus instable. Ce
réservoir est caractérisé par le plus fort taux de
renouvellement (de quelques jours à quelques années) et est
composé de résidus de plantes récemment incorporés
et est rapidement
décomposable par la faune du sol, ce qui
génère souvent des émissions de CO2 en retour dans
l'atmosphère. Mais, Il faut qu'on comprenne comme l'explique Nature
Québec (2009, p.12) que, l'accumulation de carbone se fait
principalement : lors de la photosynthèse des plantes, des arbustes et
des arbres. En effet, lors de leur croissance, ils captent le CO2 et accumulent
le carbone dans leur biomasse; lors de la restitution au sol de la
matière organique. Cette restitution s'effectue lorsque les
résidus de culture et les racines retournent au sol après la
récolte, sous forme de matière organique. Cette dernière
contribue ainsi à l'accumulation du carbone dans le sol; lors de
l'application des fumiers. Ceux-ci augmentent la quantité de carbone
dans les sols. Les variables écologiques ainsi que les
propriétés physiques et chimiques des sols peuvent avoir une
influence sur les accumulations de carbone organique (CO) dans les sols. La
grande variabilité spatiale des stocks de C peut être attribuable
à ces variables (J. L. Banville, 2009, p.84). Donc il faut retenir comme
le démontre la FAO (2017, P.12), que d'une part, la biodiversité
du sol contribue grandement à la formation de MOS à partir de la
litière organique, contribuant ainsi à l'augmentation du contenu
en COS. D'autre part, la quantité et la qualité de MOS (par
conséquent de la COS) détermine le nombre et l'activité du
biotope du sol qui interagit avec les racines des végétaux.
L'absence de labour augmenterait le stockage de C par une
moindre minéralisation des matières organiques due à leur
meilleure protection physique dans les agrégats du sol (qui ne sont plus
détruits par le labour, ni exposés à la pluie lorsque le
sol est nu), et à des conditions plus froides et humides dans la couche
de surface du sol (C. Chenu & aI., 2014, p.26). Néanmoins,
l'apport du fumier réduit l'érosion, probablement à cause
de la création du complexe organominéral qui stabilise les
agrégats et protège le sol contre la battance. Mais cette
technique n'a pas pu être adoptée par les paysans qui,
n'étant pas dans une zone d'élevage, l'ont trouvée trop
contraignante malgré tous les efforts de la vulgarisation (A. Azontonde,
1993, p. 223). Selon (I. Amonmidé, 2019 p. 1857), les très bas
taux de matière organique peuvent être corrigés à
travers la bonne valorisation des résidus de récolte et la
production locale de la matière organique qui est le socle de
l'amélioration et du maintien du niveau de la fertilité des sols,
et par conséquent de l'amélioration des rendements des cultures
qui est le gage d'une sécurité alimentaire sûre. C'est
pourquoi D. Arrouays & al, (2003, p.349) argumentait en disant
qu'il n'existe pas à l'heure actuelle de mesure
indirecte fiable des stocks de C des sols. Toute estimation doit reposer sur
des mesures ponctuelles, réalisées sur des
prélèvements de sol. Les changements de stocks de matière
organique dans les sols sont difficiles à mesurer à cause de leur
forte variabilité de répartition dans les trois directions du
volume «sol», ainsi qu'à cause de l'ordre de grandeur des
stocks, qui est en règle générale nettement
supérieur à celui des variations mesurables sur un pas de temps
court. Il faut également noter que concernant le niveau de
fertilité des sols dans la commune de Nikki, 5,22 % des sols ont un
faible niveau de fertilité ; 57,50 % ont un niveau de fertilité
moyenne et 37,28 % ont un fort niveau de fertilité. Les fortes
proportions du fort et moyen niveau de fertilité des sols traduisent la
densité des activités agricoles dans le milieu avec les pratiques
culturales basées sur la polyculture car le niveau de fertilité
des sols varie d'une spéculation à une autre. Cependant, de
nombreuses caractéristiques physico-chimiques des sols (teneurs en C, N,
argile, bases échangeables, niveau de CEC, pH) peuvent servir
d'indicateur de fertilité des sols. Mais tous ne renseignent pas sur les
processus en cause dans l'évolution de la fertilité des sols (H.
Guibert, 1999, p.114). Mais Schnitzer & Skinner (1969) cité par O.
Samake (2017 p.22) affirment que, la capacité élevée
d'échange cationique de la matière organique implique une plus
grande capacité de rétention des sols pour le calcium, ce qui
entraîne une dissolution supérieure du phosphate naturel. Les
fractions humiques de la matière organique forment des complexes avec le
calcium, qui peuvent également réduire la concentration de
calcium en solution, entraînant ainsi une solubilisation accrue des
phosphates naturels.
L'analyse des paramètres physico-chimiques du sol a
permis de déterminer le niveau de fertilité des sols de la zone
d'étude. Du coup, on peut retenir que les différentes
dégradations des sols observées dans la commune de Nikki
dépendent de l'activité biologique de paramètres
physico-chimiques des sols, des systèmes de production adoptées
et de la dominance des champs de cultures dans le milieu. Pour K. Traore &
A. M. Toe (2008, p. 59) par exemple, le système de production de
l'igname tel qu'il est pratiqué aujourd'hui, est hérité
des pratiques ancestrales: le défrichement précoce (entre
novembre et janvier de l'année précédente) consiste
à sarcler les hautes herbes et à couper les arbustes que l'on
entasse autour des grands arbres; les herbes qui restent sur
place couvrent le sol jusqu'à la période de
buttage qui intervient entre décembre et avril. Il faut alors
réorienter les techniques de cultures vers une agriculture de
conservation et de bonne pratique durables. Cependant il est intéressant
d'indiquer que ces techniques, surtout le semis direct, se distinguent par une
compacité plus élevée que le travail conventionnel.
L'augmentation de la compacité en semis direct est due au fait que le
non travail du sol permet de stabiliser le sol contrairement au travail
conventionnel qui le perturbe continuellement (R. Boudiar, 2013, p.76).
Pour prévenir ou réduire les dégradations
des sols dans la commune de Nikki, il est essentiel d'orienter les pratiques
agricoles vers une agriculture traditionnelle peu mécanisée baser
sur l'utilisation de la bourse animale, de l'humus et de fumure, l'utilisation
des résidus des récoltes, la rotation des cultures, la sauvegarde
de l'environnement par la protection des arbres et la variation des cultures
annuellement ou vers une agriculture biologique qui adopte les systèmes
agroforestiers, qui utilise moins d'engrais, diversifie les cultures et
spécifie les cultures selon le milieu.
Les pratiques agricoles dans la commune de Nikki pour sa
durabilité nécessitent l'application des pratiques et mesures de
conservation et de gestion durable des sols agricoles.
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