2.2.2-La culture comme une donnée
universelle
La culture est universelle dans la mesure où on la
retrouve dans toutes les sociétés humaines. L'adjectif universel
que nous avons utilisé ici ne veut pas dire qu'il existe sur la
planète terre une culture unique qu'on devrait importer comme des
prêts à porter pour obliger les autres peuples à agir en
fonction de cette culture. Mais, le caractère universel de la culture
veut tout simplement dire que celle-ci est en dernier ressort, une «
acquisition sociale, car l'homme est un animal créateur de culture.
C'est dire que chaque peuple possède une culture qu'il cherche à
transmettre, par voie de communication à la postérité
».142 Elle est d'autant plus universelle dans la mesure
où, d'après Denys CUCHE, « l'Homme est essentiellement
un être de culture »143ce qui nous amène
dès lors à comprendre qu'il n'existe pas de peuple inculte dans
le monde comme l'avait prétendue la mission coloniale.
L'universalité de la culture ne signifie pas uniformisation des
façons de penser, d'agir et de sentir mais plutôt le fait qu'il
existe une mosaïque de culture dans le monde. Chaque culture a sa
spécificité, sa singularité et sa typicité au point
d'être un levier de changement social.
L'économiste camerounais Daniel ETOUNGA MANGUELLE
considère la culture issue du programme d'ajustement culturel comme un
élément fondamental du changement social qui culminera avec le
processus d'amélioration des conditions de vie de la population. Il
définit l'ajustement culturel comme étant « l'ardente
nécessité de changer les mentalités pour favoriser le
développement intégral et l'épanouissement de l'homme dans
son milieu naturel ».144Pour lui, la culture africaine
telle qu'elle est présentement, c'est-à dire une culture
où les mentalités sont les plus rétrogrades, constitue la
cause fondamentale de l'échec des projets et programmes de
développement car, pense-t-il, « les traits dominants de la
culture camerounaise, tels que décrits à la fin du règne
du Président Ahidjo, sont aujourd'hui, à la fois
141Guy ROCHER, Introduction
à la sociologie générale, (l'action sociale),
Montréal, édition HMH, 1968, p.113.
142Ferdinand CHINDJI-KOULEU, Op.cit. p.375
143Denys CUCHE, Op. Cit, p.5
144Daniel ETOUNGA MANGUELE,
Cameroun : une exception africaine ?, Yaoundé SHERPA, p.53.
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plus renforcés et hélas, plus
rétrogrades ».145Concernant ce programme
d'ajustement culturel,
il opère une précision terminologique lorsqu'il
soutient :
Il ne s'agit à présent d'importer des
phraséologies toutes faites et de servir à la
sauce gombo, au rythme de cris et danses des groupes
d'animation. Mais il faut
au contraire aller au coeur de nos moeurs et coutumes, pour
extirper la gangue qui
empêche nos sociétés de se mouvoir vers
la modernité.146
Théodore MAYI-MATIP, dans le même sillage que Daniel
ETOUNGA MANGUELE,
pense que la tradition (culture) est le socle granitique du
développement. Pour que ce développement soit effectif,
pense-t-il, il doit intégrer trois éléments fondamentaux
à savoir l'enseignement et le recours aux langues (langues maternelles),
la collaboration entre l'élite gouvernante et les hommes issus des
cercles initiatiques et enfin les planificateurs du développement
doivent faire de la culture l'épicentre même du
développement. Se faisant plus clair, Théodore MAYI-MATIP nous
fait comprendre que le développement des sociétés
africaines s'articule autour de deux projets de société :
L'un propose le développement de l'Afrique par la
destruction plus ou moins subtile des traditions africaines, en favorisant la
disparition des langues africaines, l'importation des modèles culturels
de développement étrangers et la consommation exclusive par les
africains des produits culturels provenant d'autres civilisations [...]L'autre
projet, opposé au premier, assigne deux impératifs au
développement de l'Afrique moderne, à savoir, d'une part,
l'intégration du développement à l'environnement de
l'Afrique.147
A travers ces propos, Théodore MAYI-MATIP pense qu'un
développement qui n'est pas
soutenu par les réalités locales (culture) d'une
société donnée produit des individus
consommateurs et non des individus créatif voire
productif. Cependant, plusieurs approches ont
été développées autour de la
notion de culture.
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