La régionalisation du maintien de la paix et de la sécurité internationales. étude appliquée au conflit en république Centrafricaine.par Chrisogone Ignace MENEHOUL KOBALE Université de Yaoundé II (Cameroun) - Master recherche en Droit public 2016 |
PARAGRAPHE II : L'initiative africaine pour la paix et la réconciliation en RCA ou une intervention finalement indirecte et en industrieDepuis le retour à la légalité constitutionnelle, le 30 mars 2016, avec l'élection du Président de la république430(*), la RCA s'est résolument engagée sur la voie du retour à la paix, de la restauration de l'autorité de l'Etat, de la réconciliation et de la justice, du relèvement économique et de la reconstruction de l'Etat. La présence de la Mission de maintien de la paix des NU, la MINUSCA, qui a pris la relève de celle de l'UA, la MISCA, a certes joué un rôle important dans la stabilisation du pays, la défense des institutions démocratiques et la protection des civils. Cependant, les groupes armés continuent à se déployer sur de vastes régions et parfois même à se renforcer, menaçant ainsi l'ensemble du territoire national et l'amorce d'un véritable processus de réconciliation nationale dans le pays. En dépit de la volatilité de la situation sécuritaire sur une bonne partie du territoire national, le Président TOUADERA a formulé une politique de « main tendue » à tous les Centrafricains et a appelé ses « Frères africains » et les « Amis de la RCA » à soutenir le peuple centrafricain dans cette démarche431(*). « C'est en réponse à cet appel et dans l'optique de traduire dans les faits la solidarité africaine avec le gouvernement et le peuple centrafricain qu'est née l'initiative africaine432(*) ». Cette initiative africaine, signée par différents chefs de délégation433(*), et qui vise notamment le gouvernement centrafricain et les groupes armés affiliés au processus DDRR434(*) établit, d'un côté, des objectifs et principes directeurs qui façonnent le cadre opérationnel orienté vers une gestion consensuelle et structurée du conflit (A), et de l'autre, des thématiques qui constituent une initiative tendant manifestement à une éducation à l'entrepreneuriat et à la citoyenneté (B). B. Les objectifs et principes établis dans l'initiative africaine : façonnage d'un cadre opérationnel orienté vers une gestion consensuelle et structurée du conflitIl faut démarquer les objectifs (re) fixés à atteindre et qui sont ambitieuxdans cette initiative (1) de ses principes directeurs (re) pris et qui, eux, sont relativement convenus dans la pratique du RPD (2). 1- Une (re)fixation ambitieuse des objectifs à atteindre L'initiative de l'UA en RCA a pour objectif général de promouvoir le dialogue entre le gouvernement centrafricain et les groupes armés qui ont intégré le Comité Consultatif et de Suivi du DDRR en vue de parvenir à un Accord de paix et de réconciliation. Elle vise aussi àcréer les conditions favorables à un désarmement complet, au renforcement de l'ordre constitutionnel et démocratique incarné par le Président de la République et l'Assemblée nationale issus des élections populaires de 2015 et 2016, à l'implication volontaire des groupes armés dans la dynamique inclusive de construction nationale435(*). Toutefois, les résultats ou objectifs spécifiques attendus dans le cadre des efforts de paix contenus dans la Feuille de route de l'UA permettent d'inclure les éléments suivants436(*) : (a) l'accord sur les modalités pratiques de mise en oeuvre des conclusions pertinentes du Forum de Bangui de 2015, autant en matière de la reconnaissance et de traitement égal de toutes les composantes de la Nation centrafricaine qu'en ce qui concerne le développement socio-économique équitable afin de réduire les disparités entre les différentes régions du pays ; (b) la mise en oeuvre du processus DDRR dans le cadre des travaux de la Coordination du DDRR/RSS, des Comités Techniques et du CCS dans lequel siègent les 14 groupes armés. Ces actions qui vont se baser sur les principes de fraternité, de justice, de l'inclusion et de cohésion nationale, s'articuleront autour de la démobilisation volontaire et de l'intégration des membres éligibles des éléments des groupes armés dans les structures sécuritaires et socio-économiques appropriées de l'Etat et de la société centrafricaine ; (c) le développement des conditions politiques et de sécurité propices au renforcement de l'autorité de l'Etat et au déploiement des structures administratives sur l'ensemble du territoire national ; (d) l'établissement d'un mécanisme de mise en oeuvre de l'accord et du suivi des actions sur le terrain en cohérence avec les structures étatiques établies et l'accompagnement technique et logistique nécessaire de la communauté africaine et international et la mise en oeuvre des mécanismes de justice transitionnelle pour renforcer le processus de réconciliation nationale, en prenant en compte les victimes et en valorisant les outils endogènes de réactivation du vivre-ensemble dans les communautés locales.A côté de ces objectifs ambitieux, des principes directeurs relativement convenus dans la pratique du RPD ont été (re)pris. 2- Une (re)prise des principes directeurs437(*) relativement convenus dans la pratique du RPD En vue de favoriser un climat apaisé nécessaire pour la conduite réussie du processus de dialogue, les parties prenantes de la crise centrafricaine s'engagent à se conformer aux principes directeurs suivants : (a) le respect de la Constitution de la RCA du 30 mars 2016 et la légitimité des institutions démocratiques du pays ; (b) l'engagement à promouvoir le dialogue constructif, de bonne foi et dans un esprit de compromis en mettant en exergue l'intérêt national au-dessus de toute autre considération, le respect de l'unité nationale et de l'intégrité du territoire de la RCA ; (c) l'engagement de garantir le succès d'un dialogue structuré avec les groupes armés, à travers la mise en oeuvre des conclusions pertinentes du Forum de Bangui ; (d) la reconnaissance que la violence, la force et l'usage des armes ne constituent pas la solution aux nombreux défis auxquels fait face la RCA et, par conséquent, l'engagement à privilégier une solution pacifique des revendications de quelque nature que ce soit ; (e) la prise en compte de la présomption d'innocence de tout individu soupçonné de commettre des crimes graves tant qu'il n'aura pas été jugé coupable par une juridiction compétente en la matière ; (f) l'engagement de l'Etat à assurer la protection de tout individu dument mandaté par l'une des parties pour participer au processus de paix dans les différentes structures mises en place afin de faciliter la sérénité des travaux et (g) la reconnaissance que l'impunité n'a jamais constitué une solution durable aux crises récurrentes en RCA et l'engagement à respecter la lutte contre les violations des droits humains et du droit international humanitaire et à l'examen de toutes les options pertinentes à cet égard, notamment celles tirées du complexe conceptuel de la justice transitionnelle. Pour une appropriation nécessaire de ces objectifs et principes directeurs, des thématiques ont été inscrites. * 430 Au cours de cette échéance électorale qui a connu la participation de plus d'une vingtaine de candidats, c'est le professeur Faustin-Archange TOUADERA qui a été déclaré définitivement vainqueur, après un second tour qui l'a opposé avec monsieur Anicet-George DOLOGUELE. * 431 Lire sur ce point, Discours du Président TOUADERA à l'occasion de son investiture, Bangui, 30 mars 2016. * 432Feuille de route pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine, Libreville, 17 juillet 2017, 12p., 1.3, p.2. * 433 Le SG de la CEEAC, le Commissaire Paix et Sécurité de l'UA, les ministres des affaires étrangères de la RCA, Angola, du Congo, du Gabon, le ministre de la sécurité publique du Tchad et le SG de la Conférence Internationale pour la Région des Grands Lacs (CIRGL). * 434Ibid, 4.2, p.7. * 435Ibid, 2.1, p. 5. * 436Ibid, 2.2, p. 5. * 437Ibid, 3, pp. 6 et 7. |
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