La régionalisation du maintien de la paix et de la sécurité internationales. étude appliquée au conflit en république Centrafricaine.par Chrisogone Ignace MENEHOUL KOBALE Université de Yaoundé II (Cameroun) - Master recherche en Droit public 2016 |
CHAPITRE I :LES EXPRESSIONS THEORIQUES DU PARTENARIATCEEAC/UA - ONU DANS LE CADRE DU CONFLIT EN RCALa conclusion de la deuxième guerre mondiale s'accompagna d'un sentiment général de fin des troubles et des conflits qui annonçait un âge d'or de paix. Ce fut peut-être une des raisons pour lesquelles on ne trouve dans la Charte de l'ONU nouvellement créée aucune mention de « maintien de la paix264(*) ». L'ONU ne prévoyait alors pas qu'elle devrait un jour intervenir dans un endroit quelconque pour rétablir une situation. Cette euphorie ne dura toutefois pas longtemps car, à la suite de la décolonisation, l'ONU se vit assaillir de demandes d'aide dans des points chauds du monde entier. Le fait que les ressources dont disposait l'ONU n'étaient jamais suffisantes pour satisfaire la demande donna naissance à de nombreuses initiatives régionales265(*). Ces initiatives entreprirent de résoudre des problèmes épineux locaux par elles-mêmes ou sous l'égide de l'ONU. Cette logique traduit à bien des égards l'interaction ou mieux le partenariat qui se noue entre l'ONU et ses organismes régionaux en matière de maintien de la paix mondiale. S'il s'avère qu'il existe une relation partenariale entre l'ONU et les organisations régionales en général et la CEEAC et l'UA en particulier dans le cadre du processus de résolution de la crise centrafricaine considérée, il sied de présenter les expressions de celui-ci par chacune de ces organisations ; d'abord au niveau de l'ONU (Section I), et ensuite au niveau de la CEEAC et de l'UA (Section II). Il faut noter qu'il s'agit, parlant de ces expressions, des instruments juridiques impersonnels (leur caractère) et dons applicables par déduction au cas centrafricain SECTION I : LES EXPRESSIONS ONUSIENNES DU PARTENARIAT ONU-CEEAC/UA, DES INSTRUMENTS JURIDIQUES IMPERSONNELS, APPLICABLES PAR DEDUCTION AU CAS CENTRAFRICAINPar expressions onusiennes (du partenariat), l'on entend (la mise en avant de) différents textes élaborés à l'initiative de l'ONU en générale et quelques-uns de ces organes en particulier pour traiter de la question du partenariat. Certes, ces textes n'ont pas un lien direct ou strict avec la question du conflit centrafricain (du fait de leur portée générale) mais deux raisons principales permettent de les mettre en avant dans le cadre de cette étude. D'abord, l'exclusivité de ces textes concerne les organismes (sous) régionaux et donc la CEEAC puis l'UA. Et ensuite en raison de l'appartenance de la RCA à ces organisations, il s'avère que, par déduction, ils peuvent (ces textes) lui être (indirectement) applicables (également à tous les autres Etats membres de ces organisations). Le système des NU est constitué de six organes principaux266(*) auxquels ont été ajoutés au fil du temps divers organismes, institutions et programmes267(*) ayant une vocation plus spécifique. Il y a l'Assemblée générale, le Conseil de sécurité, le Conseil économique et social, le Conseil de tutelle, la Cour internationale de justice et le Secrétariat. Le Conseil de sécurité (Paragraphe I), le Secrétariat et l'Assemblée générale (Paragraphe II) paraissent davantage importants pour la présentation de ces expressions. PARAGRAPHE I : Le Conseil de sécurité et les expressions du partenariatComposé de quinze membres dont cinq permanents268(*) pourvus du droit de véto269(*) et dix élus à titre de membres non permanents pour une durée de deux ans270(*) (renouvelés par moitié tous les ans), le Conseil de sécurité peut faire des recommandations ou prendre des mesures appelées résolutions qu'il juge nécessaires et qui engagent l'ONU pour l'accomplissement de sa responsabilité principale de maintien de la paix et de la sécurité internationales. C'est en vertu de ce pouvoir qu'il a adopté les résolutions 1631 (2005) et 2033 (2012) sur le partenariat, respectivement entre lui et les organisations régionales (A) et les organisations régionales et sousrégionales (B) dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité internationales ; lesquelles résolutions sont respectivement assimilables à un « édit » sur un partenariat moins solide et structuré, et au produit d'un satisfecit et d'une volonté de consolidation du partenariat ONU-organismes régionaux. A. Résolution 1631 (2005), « édit » sur un partenariat moins solide et structuréLes résolutions des Nations Unies sont l'expression formelle de l'opinion ou de la volonté des organes qui les adoptent.Adoptée par le Conseil de sécurité à sa 5282ème séance,le 17 octobre 2005 à New York, la résolution 1631 a un cadre formel et un cadre substantiel. Si le premier peut être considéré comme le reflet à demi-teinte de la thèse sus-évoquée (1), le second, lui, n'est pas moins le reflet explicite de cette même thèse (2). 1- Le cadre formel de la résolution 1631(2005), reflet à demi-teinte de la thèse du partenariat moins solide et structuré ONU-organisations régionales Une décision prise dans leDocument final du Sommet mondial271(*)de 2005, une invitation lancée alors en 1993 et un constat par rapport au rôle des organisations régionales dans le cadre du maintien de la paix et de la sécurité internationales constituent, principalement, les considérations sur la base desquelles la résolution 1631 (2005) a été adoptée. Le Conseil s'est dit satisfait de la décision prise dans le Document final du Sommet mondial de créer une commission de consolidation de la paix, et ditattendreavec intérêtsa mise en place comme un moyen important de coopération et de contact entre le Conseil de sécurité et les organisations régionales pour la consolidation de la paix et le redressement après les conflits272(*). Le Conseil a rappelél'invitation qu'il a lancée en janvier 1993 aux organisations régionales afin qu'elles améliorent la coordination avec l'ONU et en outre la Déclaration de décembre 1994 de l'Assemblée générale sur le renforcement de la coopération entre l'ONU et les accords ou organismes régionaux (A/RES/49/57), la séance qu'il a consacrée au thème « Le Conseil de sécurité et les organisations régionales face aux nouveaux défis à la paix et à la sécurité internationales », tenue le 11 avril 2003 sous la présidence mexicaine du Conseil, et le débat qu'il a tenu le 20 juillet 2004, sous la présidence roumaine du Conseil, sur la coopération entre l'ONU et les organisations régionales dans les processus de stabilisation273(*). Le Conseil a souligné la contribution croissante qu'apportent les organisations régionales en coopération avec l'ONUqui peut utilement compléter l'action menée par l'Organisation en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales274(*). Il faut se référer au cadre substantiel de cette résolution pour la comprendre davantage. 2- Le cadre substantiel de la résolution 1631(2005), reflet explicite de la thèse du partenariat moins solide et structuré ONU-organisations régionales Dans le cadre de la résolution 1631 (2005) portant sur le partenariat entre l'ONU et les organismes régionaux en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales, le Conseil de sécurité a fait deux importantes déclarations. La première concerne son attachement au renforcement de ce partenariat. Pour cela, il « Se déclare résolu à prendre les mesures appropriées pour renforcer la coopération entre l'ONU et les organisations régionales (...) en vue de maintenir la paix et la sécurité internationales, (...)275(*) ». Et la seconde concerne son désir pour une institutionnalisation des rencontres. A cet effet, il « Se déclare disposé à tenir des réunions régulières avec les chefs des organisations régionales ( ...) afin de renforcer l'interaction et la coopération avec ces organisations dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité internationales, en faisant en sorte que ces réunions coïncident, autant que possible, avec les réunions de haut niveau que l'ONU tient avec les organisations régionales et autres organisations intergouvernementales afin d'améliorer l'efficacité de la participation et d'assurer la complémentarité des ordres du jour quant aux questions de fond276(*); ». Par ailleurs, le Conseil de sécurité tient vraisemblablement à cette relation de partenariat au point de recommanderune meilleure communication entre l'ONU et les organisations régionales, notamment par l'intermédiaire d'attachés de liaison et la tenue de consultations à tous les niveaux pertinents.277(*) Une autre résolution plus inclusive vient compléter les expressions théoriques de ce partenariat. * 264 VIJAY KUMAR (Jetley), art. cit., p. 24. * 265Idem. * 266 Article 7 (1) de la Charte. La Charte prévoit, dans le second paragraphe du même article, la possibilité de création des organes subsidiaires qui se relèveraient nécessaires. C'est ainsi que l'on a, par exemple, comme organes subsidiaires du Conseil de sécurité le Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR), le Tribunal Pénal International pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) ; et comme organes subsidiaires de l'Assemblée générale le Conseil des droits de l'homme des Nations Unies ou la Commission du Droit International (CDI). * 267 L'UNICEF, l'OMS, le FMI, le PNUD en sont des illustrations. * 268 Il s'agit des principales puissances alliées dans l'entre deux guerres mondiales dont la Chine, les Etats-Unis d'Amérique, la France, le Royaume-Uni et la Russie. * 269 Il s'agit d'un droit accordé uniquement aux cinq membres permanents de ce Conseil, qui leur permet de bloquer toute résolution ou décision, quelle que soit l'opinion majoritaire du Conseil. Les cinq membres permanents exercent ce droit quand ils votent négativement, mais une abstention ou une absence n'est pas considérée comme un veto. Pour les votes concernant les questions de procédure, le droit de veto ne peut être exercé, ce qui permet ainsi au Conseil de pouvoir débattre d'un projet de résolution même s'il est fort probable qu'un des cinq y mette son veto. * 270 Article 23 (2) de la Charte. * 271 Le Sommet mondial de 2005 qui s'est tenu du 14 au 16 septembre 2005 au siège de l'ONU à New York était un sommet de suivi du Sommet du Millénaire des Nations Unies qui a abouti à la Déclaration du Millénaire sur les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD). Des représentants, y compris de nombreux dirigeants, des 193 Etats membres de l'Organisation se sont réunis pour ce que les Nations Unies ont décrit comme « une occasion unique de prendre des décisions audacieuses dans les domaines du développement, de la sécurité, des droits de l'homme et réforme des Nations Unies ». C'est alors à la fin dudit sommet de 2005 que le contenu d'un document, connu sous le nom de Document final du Sommet mondial a été approuvé par les délégations présentes. Pour plus d'informations, consulter A/RES/60/1. * 272S/RES/1631 (2005), paragraphe 10 du préambule. * 273Ibid, paragraphe 4. * 274Ibid, paragraphe 7. * 275S/RES/1631 (2005), paragraphe 1 du dispositif. * 276Ibid, paragraphe 7. * 277Ibid, paragraphe 8. |
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