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La régionalisation du maintien de la paix et de la sécurité internationales. étude appliquée au conflit en république Centrafricaine.


par Chrisogone Ignace MENEHOUL KOBALE
Université de Yaoundé II (Cameroun) - Master recherche en Droit public 2016
  

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A. Les figures de la sous-traitance dans le Chapitre VIII

L'article 52 enjoint les organismes régionaux et donc la CEEAC et l'UA de régler pacifiquement les différends (1) tandis que l'article 53 lui, confère un pouvoir d'utilisation et/ou d'autorisation au CS sur ces organismes régionaux en matière de coercition (2).

1- L'article 52ou injonction donnée aux organismes régionaux en vue d'un Règlement Pacifique des Différends (RPD)

La notion de règlement pacifique des différends couvre les moyens diplomatiques, institutionnels et juridictionnels, bilatéraux ou multilatéraux, qui facilitent la résolution des différends entre Etats102(*).Le paragraphe 2 de l'article 52 prévoit le devoir des Etats de régler de manière pacifique au niveau régional leurs différends d'ordre local « avant de les soumettre au Conseil de sécurité ». Dans la même logique, le Conseil de sécurité est invité à encourager le règlement pacifique régional, pouvant renvoyer ces différends auxdites organisations (par. 3) sous la condition du respect des articles 34 et 35 de la Charte portant sur le droit du Conseil d'enquêter et le droit des Etats de saisir le Conseil de ces différends (par. 4). Les différents paragraphes de l'article 52 mentionnent à plusieurs reprises les compétences du Conseil de sécurité qui, généralement, a le pouvoir de traiter les différends « dont la prolongation est susceptible de menacer le maintien de la paix et de la sécurité internationales » (Chapitre VI).

La CIJ a aussi souligné la possibilité d'un certain chevauchement entre les négociations au niveau régional et le droit des organes onusiens d'exercer leurs fonctions respectives dans le domaine de la paix et de la sécurité internationales103(*). L'idée est qu'il n'y a pas deux compétences concurrentes, mais plutôt une situation de coopération fondée sur l'aide mutuelle et la complémentarité, avec en arrière fond une idée d'efficacité104(*).

Quoi qu'il en soit, le Secrétaire général, dans son Supplément à l'Agenda pour la paix repousse, quant à lui, l'idée d'un partage à parité des tâches entre l'ONU et les organismes régionaux en soulignant le principe de la primauté des NU105(*). Ce qui confirme et renforce la thèse de la sous-traitance évoquée plus haut ; laquelle donne d'ailleurs doit au Conseil de sécurité d'utiliser et/ou d'autoriser les organismes régionaux à des fins précises.

2- L'article 53ou consécration du pouvoir d'utilisation et/ou d'autorisation des organismes régionaux par le Conseil de sécurité

Alors que l'article 52 est une disposition de texture « régionaliste », l'article 53 revêt plutôt une texture « universaliste106(*) », (...). Au-delà de la clause contre les Etats ex-ennemis (article 53, paragraphe 1 (dernière phrase) et paragraphe 2, de la Charte), l'article 53 prévoit deux types d'engagement des accords et organismes régionaux en matière d'action coercitive : celles-ci sont soit utilisées par le Conseil de sécurité pour la mise en oeuvre des mesures coercitives prises par ce dernier (art. 53, par. 1, premier alinéa), soit autorisées par le Conseil à entreprendre une action coercitive (art. 53, par. 1, deuxième alinéa). Dans le premier cas, c'est le Conseil qui décide de l'utilisation de la force et délègue le pouvoir d'exécution à un organisme régional. Selon certains auteurs, celui-ci devient alors, de manière informelle, un organe subsidiaire du Conseil107(*). Dans la deuxième situation, le Conseil de sécurité donne une autorisation aux organisations régionales, celles-ci décidant ensuite de manière discrétionnaire de recourir ou non à la force108(*). Dans ce cas, les forces régionales autorisées n'utilisent pas les emblèmes de l'ONU et elles sont financées de manière autonome, et non par le budget de l'ONU109(*).

Cette double modalité d'activation de l'article 53 et de mise en oeuvre des mesures coercitives consacre clairement la subordination des organisations régionales au Conseil de sécurité ; et les critères de validité ne sont pas du reste.

* 102EIDE (Asbjorn), « Peace-Keeping and Enforcement by regional organizations », Journal of Peace Research, vol. 3, 1966, pp. 125-144, passim.

* 103Affaire des Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua, op. cit., p. 440, par. 106 (« la cour considère que l'existence même de négociationsactives auxquelles les deux Parties pourraient participer ne doit empêcher ni le Conseil de sécurité ni la cour d'exercer les fonctions distinctes qui leur sont conférées par la Charte et par le Statut ») (l'italique est de nous).

* 104Rapport annuel du Secrétaire général sur l'activité de l'Organisation, doc. A/46/1, 13 septembre 1991, p. 4, où le secrétaire général de l'ONU observe qu'on ne peut pas déduire de l'article 52 une hiérarchie d'instances ou une graduation de celles-ci. Dans la même logique, l'Assemblée générale souligne le rôle complémentaire des organismes régionaux en matière de règlement pacifique des différends, doc. A/RES/49/57, 9 décembre 1994, par. 2.

* 105Supplément à l'Agenda pour la paix, op. cit., par. 88, al. b).

* 106BOISSON DE CHAZOURNES (Laurence),art. cit., p. 264.

* 107RESS (Georg) et BRÖHMER (Jürgen), « Article 53 », dans SIMMA, et al. (dir.), The Charter of the United Nations : A Commentary, 2e éd., oxford, oxford university Press, 2002, p. 860 (par. 1) ; le terme « informel » est utilisé pour clarifier qu'il ne s'agit pas ici d'organes établis par les organes principaux de l'ONU ; voir KELSEN (Hans), The Law of the United Nations. A Critical Analysis of Its Fundamental Problems, Londres, Stevens, 1964, p. 326, où il observe que« [r]egional organisations may act as organs of the united nations ».

* 108Sur la marge discrétionnaire, voir les observations de GAJA (Giorgio),« use of Force... », « responsabilité des Etats et/ou des organisations internationales en cas de violations des droits de l'homme : la question de l'attribution », dans SFDI, La soumission des organisations internationales aux normes internationalesrelatives aux droits de l'homme, Paris, Pedone, 2009, p. 42.

* 109Voir la distinction similaire faite par SICILIANOS (Linos-Alexandre), « L'autorisation par le Conseil de sécurité de recourir à la force : une tentative d'évaluation », RGDIP, tome 106, 2002, p. 19, dans le cadre de l'évolution de la pratique concernant le Chapitre VII de la Charte.

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