CHAPITRE 1 - GENERALITES SUR LE BUDGET
PROGRAMME ET LE CONTROLE INTERNE
Ce chapitre a pour objet de présenter quelques notions
théoriques sur le budget programme et le contrôle interne. Il est
organisé en deux (02) sections qui traiteront des fondements du budget
programme, les principales innovations puis du dispositif de performance dans
le budget programme d'une part et du contrôle interne dans ses
composantes et principes d'autre part.
Section I- Généralités sur le
budget programme
Raymond Guillien et Jean Vincent, dans le « Lexique des
termes juridiques », 14ème édition, Toulouse, Dalloz, p 80)
considèrent le budget programme comme « un mode de
présentation des crédits budgétaires consistant à
regrouper les actions d'un même ministère par programme en
rapprochant pour chacun d'eux les crédits de toutes natures et les
résultats physiques ou financiers attendus, le tout étant
complété par une projection indicative portant sur plusieurs
années ».
Les fondements du budget programme et les principales innovations
Fondements et cadre juridique
Fondements
Le budget programme est un outil de programmation, de
budgétisation et d'évaluation des programmes d'une organisation.
Il présente deux (02) particularités :
? Il met l'accent sur la relation entre les crédits
alloués et les résultats attendus et l'introduction de la notion
de performance ;
? Il diffuse la culture de résultat dans
l'administration en transformant le budget de moyens en un budget axé
sur les résultats.
Dans cette partie, il sera fait un bref rappel historique de
la notion avant de traiter de ses fondements.
Deux types de raison justifient l'élaboration et
l'exécution en mode programme, du budget de l'Etat. Etant d'ordre
technique et de pression, ces raisons justifient le choix du budget programme
comme outil de mise en oeuvre des politiques publiques.
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? Les raisons techniques
Ces raisons se résument en un consensus technique mettant
en exergue les caractéristiques du
budget classique. En effet il est reproché à cette
approche ancienne les insuffisances ci-après:
? une absence de lien apparent entre le budget classique et les
politiques publiques ;
? une absence d'indication sur les objectifs poursuivis, ni les
résultats attendus ;
? une absence de visibilité de l'action publique ;
? une absence de transparence dans l'action publique ;
? une absence d'efficience dans la dépense publique ;
? une absence de culture de reddition des comptes ;
? une absence de définition de responsabilités ;
? des dotations budgétaires basées sur l'historique
des dépenses.
? Les raisons de pression
Ces raisons sont de deux ordres. Les unes sont internes et les
autres externes. Les premières sont caractérisées d'une
part par des ressources limitées face à des besoins de plus en
plus grands, ce qui nécessite qu'une attention particulière soit
accordée à la quête des résultats et par des
populations qui exigent de plus en plus des comptes sur l'utilisation des
ressources publiques, d'autre part.
Quant aux raisons externes, nous notons principalement
l'appropriation et l'application de l'approche de gestion axée sur les
résultats suite aux conclusions de la déclaration de Paris.
La gestion axée sur les résultats (GAR) rime
parfaitement avec la budgétisation axée sur les résultats
(BAR) du fait que ces deux (02) approches intimement liées visent
à mieux évaluer les performances. Dans ce contexte, la BAR permet
de rendre plus cohérents les objectifs et les réalisations
escomptées avec les ressources budgétaires. Elle entraîne
une responsabilisation accrue des acteurs car elle met l'accent sur le lien
entre les crédits budgétaires et les résultats
attendus.
La budgétisation axée sur les résultats
renforce les règles et procédures budgétaires
régissant le processus de planification des programmes, de
budgétisation, de contrôle et d'évaluation. Les
modifications proposées quant au mode de formulation du budget-programme
permettraient de tirer pleinement parti du budget en tant qu'instrument de
politique et base d'évaluation de la mesure dans laquelle les programmes
permettent d'obtenir les changements et avantages recherchés.
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Le cadre juridique
Le cadre juridique relatif au budget programme est
essentiellement constitué des directives
communautaires et des textes législatifs et
règlementaires à l'échelle nationale.
Les directives de l'UEMOA au nombre de huit (08) ont
été adoptées entre 2009 et 2012. Il
s'agit de :
V' la Directive n°01/2009/CM/UEMOA portant code de
transparence dans la gestion des
finances publiques ;
V' la Directive n°06/2009/CM/UEMOA portant lois de
finances
V' la directive n°07/2009/CM/UEMOA portant
Règlement général sur la comptabilité
publique (RGCP) ;
V' la directive n°08/2009/CM/UEMOA portant
Nomenclature budgétaire de
l'Etat (NBE);
V' la directive n°09/2009/CM/UEMOA portant Plan
comptable de l'Etat (PCE) ;
V' la directive n°10/2009/CM/UEMOA portant Tableau
des opérations financières de
l'Etat (TOFE) ;
V' la directive n°02/2011/CM/UEMOA portant
Régime financier des collectivités
territoriales ;
V' la directive n°03/2012/CM/UEMOA portant
Comptabilité des matières.
Ces directives ont été internalisées par
des textes à l'échelle nationale à travers l'adoption de
lois et de décrets. Il s'agit notamment de :
V' la loi n°008-2013 /AN du 23 avril 2013
portant code de transparence dans la gestion des finances publiques;
V' la loi Organique N°73-2015/CNT relative aux
lois de finances ;
V' le décret n°2016-598/PRES/PM/MINEFID
du 08 juillet 2016 portant Règlement général sur la
comptabilité publique (RGCP);
V' le décret n°2016-599/PRES/PM/MINEFID
du 08 juillet 2016 portant régime juridique applicable aux comptables
;
V' Le décret n°2016-600/PRES/PM/MINEFID
du 08 juillet 2016 portant Nomenclature budgétaire de l'Etat (NBE);
V' le décret n°2016-601/PRES/PM/MINEFID
du 08 juillet 2016 portant cadre conceptuel de la comptabilité de
l'Etat;
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V' le décret n°2016-602/PRES/PM/MINEFID
du 08 juillet 2016 portant Tableau des opérations financières de
l'Etat (TOFE) ;
V' le décret-2016- 603/PRES/PM/MINEFID du 08
juillet 2016 portant comptabilité des matières de l'Etat et des
autres organismes publics ;
V' le décret 2017- 0106/PRES/PM/MINEFID du 13
mars 2017 portant régime juridique des Ordonnateurs de l'Etat et des
autres organismes publics ;
V' le décret 2017- 0182/PRES/PM/MINEFID du 10
avril 2017 portant modalités de contrôle des opérations
financières de l'Etat et des autres organismes publics ;
V' le décret-2019-0782 MINEFID portant
régime financier et comptable des Etablissements Publics de l'Etat au
Burkina Faso ;
V' le décret-2019-0621 MINEFID-MATDC du 14
juin 2019 portant nomenclature budgétaire des collectivités
territoriales du Burkina Faso.
Les innovations apportées par le budget
programment
Le nouveau Cadre Harmonisé de gestion des Finances
Publiques (CHFP) de l'UEMOA apporte des innovations tant au niveau de la
préparation du budget de l'Etat, qu'au niveau de son exécution et
de son contrôle.
1. les innovations en matière de
préparation
Les innovations en matière de préparation du budget
portent sur l'introduction de nouveaux outils d'une part et l'adoption de
nouvelles pratiques de l'autre. Elles portent essentiellement sur :
+ Le Document de Programmation Budgétaire et
Économique Pluriannuelle (DPBEP) Le DPBEP est annoncé à
l'article 54 de la LOLF qui dispose en son
alinéa 1 « le projet de loi de finances de l'année est
élaboré par référence à un DPBEP
couvrant une période minimale de trois ans ».
Le DPBEP :
V' évalue le niveau global des recettes
attendues de l'Etat, décomposées par grande catégorie
d'impôts et de taxes ;
V' évalue les dépenses budgétaires
décomposées par grande catégorie de dépenses ;
V' prend en compte l'évolution de l'ensemble
des ressources, des charges et de la dette du secteur public,
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y' prend en compte la situation financière des entreprises
publiques et enfin fixe les objectifs d'équilibre budgétaire et
financier sur le Moyen terme.
+ Le Document de Programmation Pluriannuelle des Dépenses
(DPPD)
L'article 55 de la LOLF énonce les Documents de
Programmation Pluriannuelle des Dépenses
comme suit: « Les DPPD prévoient, pour une
période minimale de trois ans, à titre indicatif,
l'évolution des crédits et des résultats attendus sur
chaque programme en fonction des objectifs poursuivis ».
+ La prise en compte de la dimension performance
Selon les dispositions de l'article 14 de la LOLF : «
....aux programmes sont associés des objectifs précis,
arrêtés en fonction de finalités d'intérêt
général et de résultats attendus. Les résultats,
sont mesurés par des indicateurs de performance. Les résultats
font l'objet d'évaluations régulières et donnent lieu
à un rapport de performance élaboré en fin de gestion par
les Ministères et Institutions constitutionnelles concernés...
»
Cette disposition implique la définition d'outils de
pilotage de la performance : y' l'élaboration d'un projet annuel de
performance (PAP)
y' l'élaboration d'un rapport annuel de performance
(RAP).
+ La présentation du budget de l'Etat par politiques
publiques et dotation
La politique publique s'entend comme un ensemble d'actions,
d'activités coordonnées, mises en oeuvre dont la finalité
est, l'évolution positive d'une situation donnée dans un domaine
spécifique . La LOLF met en relation étroite « politique
publique » et « programmes »2 Selon l'article 14 de la LOLF,
« les lois de finances répartissent les crédits
budgétaires qu'elles ouvrent entre les Ministères et Institutions
constitutionnelles. A l'intérieur des ministères, ces
crédits sont décomposés en programmes... ».
+ Les plafonds d'autorisation d'emplois
Selon l'article 14 de la LOLF, « .... Les crédits
de personnel sont assortis, par ministère, de plafonds d'autorisation
d'emplois rémunérés par l'Etat ». Que renferme cette
notion?
2 LOLF, article 14, al 3 « ...Un programme
regroupe les crédits destinés à mettre en oeuvre une
action ou un ensemble cohérent d'actions représentatif d'une
politique publique clairement définie dans une perspective de moyen
terme.... ».
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y' le plafond d'emplois fait référence à
un nombre maximum d'emplois (personnel) que le ministère ne saurait
dépasser au cours d'un exercice budgétaire
y' les gestionnaires pourront désormais procéder
à des recrutements et à des transformations d'emplois pour
satisfaire aux besoins en ressources humaines des programmes à condition
de respecter le nombre d'emplois ministériels fixé, le montant
correspondant en dépenses de personnel et les règles de la
fonction publique en vigueur.
En matière d'exécution et de contrôle
du budget
Ces innovations portent essentiellement sur :
+ Le principe d'Ordonnateurs principaux multiples
Selon les dispositions de l'article 70 de la LOLF « les
ministres sont Ordonnateurs principaux des crédits, des programmes et
des budgets annexes de leur ministère. Les présidents
d'institutions constitutionnelles sont Ordonnateurs principaux des
crédits, des programmes et des budgets annexes de leur institution
». L'article 68 de la LOLF précise : « Le ministre
chargé des finances est ordonnateur principal unique des recettes du
budget général ... et de l'ensemble des opérations de
trésorerie ».
+ L'institution d'une comptabilité à trois (03)
dimensions
La réforme introduit une vision comptable élargie
avec le passage d'une comptabilité de
caisse à une comptabilité d'exercice fondée
sur la constatation des droits et obligations. On
note une harmonisation entre la nomenclature budgétaire
économique et le plan comptable.
Suivant la stipulation de l'article 130 du RGCP, on distingue
:
y' la comptabilité budgétaire tenue par les
Ordonnateurs ;
y' la comptabilité générale tenue par les
comptables publics;
y' la comptabilité des matières tenue par les
comptables publics ;
y' la comptabilité analytique tenue par les comptables
publics.
+ La fongibilité des crédits
La fongibilité des crédits signifie que dans les
programmes :
y' l'affectation des crédits par nature n'est que
indicative et les responsables de
programmes peuvent les redéployer par nature dans le
respect de certaines limites ; y' les crédits de personnel peuvent
abonder les crédits de biens et services, de transferts
et d'investissement ;
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y' les crédits de biens et services et de transferts
peuvent abonder les crédits d'investissement.
On dit que la fongibilité des crédits est
asymétrique parce que :
y' les crédits d'investissements ne peuvent abonder
aucune des autres natures de dépenses
y' les crédits de personnel ne peuvent être
abondés par aucune des autres natures de dépenses
FIGURE 1: FONGIBILITÉ ASYMETRIQUE
Crédits d p rsonn l
transf rts
Crédits d bi ns t s rvic s t
d
Source : guide didactique de la
directive n° 06/2009/CM/UEMOA du 26 juin 2009 portant lois de finances au
sein de l'UEMOA
Crédits d'inv stiss m nt
? La rénovation du contrôle a priori
exercé par le Contrôle financier
Le rôle du contrôle financier a été
rénové pour tenir compte des exigences de résultats et de
la performance. C'est ainsi que le contrôleur financier émet avis
sur la qualité de la gestion des Ordonnateurs et sur la performance des
programmes (art 72 de la LOLF) d'une part et contrôle par
échantillonnage a posteriori sur les actes dispensés du
contrôle a priori, d'autre part.
On assiste désormais à une adaptation du
contrôle a priori en fonction de la qualité et de
l'efficacité du contrôle interne ainsi que du contrôle de
gestion mis en oeuvre par l'ordonnateur (article 185 RGCP).
? Le renforcement du contrôle juridictionnel
exercé par la Cour des Comptes
L'article 97 de la LOLF en ses alinéas 1 et 2, stipule
que: « La Cour des comptes juge les comptes des comptables publics...,
assiste le Parlement dans le contrôle de l'exécution des lois de
finances... »
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Cette disposition n'implique que la Cour des comptes :
y' exerce un contrôle sur la gestion des administrations en
charge de l'exécution des
programmes et dotations ;
y' assure la vérification des comptes et la gestion des
entreprises publiques ;
y' émet un avis sur les rapports annuels de performance
;
y' certifie les comptes de l'État.
+ Le renforcement du pouvoir de contrôle de
l'Assemblée
L'Assemblée Nationale a un rôle plus accru dans
les finances publiques. Son intervention s'est renforcé à travers
une documentation plus riche, un contrôle permanent
matérialisé par la communication régulière
d'informations par le Gouvernement sur l'exécution du budget et
l'assistance de la Cour des comptes au Parlement.
Le dispositif de performance dans le budget
programme
Avant de traiter du dispositif de performance dans le cadre du
budget programme, il s'avère nécessaire pour nous de faire un
aperçu sur les acteurs.
A. Les acteurs
Les nouveaux acteurs dans le cadre du budget programme sont
régis par la LOLF et ses textes d'application.
1. Les acteurs de la chaine managériale des
programmes budgétaires
Selon la charte de gestion du budget programme, les composantes
de la chaine managériale
sont identifiées par trois (03) grands groupes d'acteurs.
Il s'agit:
y' des acteurs intervenant directement dans le programme
y' des acteurs de soutien à la mise en oeuvre des
programmes
y' des acteurs partenaires dans la mise en oeuvre des
programmes
Ces groupes d'acteurs sont listés dans les articles 1
à 3 de la charte de gestion.
Article 1 : Les acteurs intervenant directement
dans le programme sont :
- le Ministre ou le Président d'institution ;
- le Responsable du programme ;
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- le Responsable du budget opérationnel de programme ; -
le Responsable d'unité opérationnelle de programme ; - le
Contrôleur interne ;
- le Contrôleur de gestion ;
- le Directeur des ressources humaines ;
- les Opérateurs de l'Etat.
Article 2 : Les acteurs de soutien à la
mise en oeuvre des programmes
Ce sont des structures à caractère transversal
dont les activités concourent à la mise en oeuvre de tous les
programmes opérationnels du Ministère ou de l'Institution. Ils
relèvent hiérarchiquement du Ministre ou du Président
d'Institution.
Article 3 : Les acteurs partenaires dans la mise
en oeuvre des programmes
Il s'agit des structures transversales dont les
activités concourent à la mise en oeuvre de tous les programmes
du ministère ou de l'Institution. Elles relèvent
hiérarchiquement du Ministre en charge des finances.
Article 11 : les Opérateurs de
l'Etat
- Les opérateurs sont des structures dont les
activités contribuent à l'atteinte des objectifs du programme. Un
contrat de performance est établi entre eux et le RP. Ils interviennent
à toutes les étapes du processus d'élaboration,
d'exécution du budget et du suivi-évaluation des actions du
programme.
- Les opérateurs sont constitués des
Etablissements Publics de l'Etat, des sociétés d'Etat (SE) et des
collectivités territoriales.
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