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Socio-histoire d'une offre alternative de transport urbain: etude du cas des «woro-woro» de yopougon (abidjan, cote-d'ivoire)


par Yerehonon Jean Zirihi
Université Alassane Ouattara (Ex Université de Bouaké) - Doctorat  2015
  

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3.3 «Vocabulaire» de la création des gares

La compréhension de la dynamique du réseau des woro-woro nous a amené à identifier une diversité de logiques et de principes organisateurs qui sont articulés les uns aux autres par des individus «autoproclamés» qui en sont les acteurs communs. En fait, l'univers des entrepreneurs du secteur des transports alternatifs se caractérise par une diversité de logiques de sens: logiques qu'on ne peut pas nécessairement hiérarchiser et dont on ne peut non plus affirmer que l'une est centrale par rapport aux autres. Plusieurs dimensions permettent de cerner une logique de sens: sa finalité, ses principaux référents et symboles identitaires, la représentation de soi et des autres, la définition des besoins, les normes et valeurs. En quelque sorte, ce que (Roulleau-Berger 1999) nomme culture de l'aléatoire pourrait s'appliquer aux représentations de ces groupes d'acteurs. Trois parmi les logiques observées semblent familières et correspondent à des modèles connus et largement répandus dans l'univers de la création des petites gares des sous quartiers de la commune de Yopougon.

3.3.1 «Aider les gens à partir»

«Puisque le pont est coupé, on était assis ici, on causait et on a constaté que les gens avaient des difficultés pour rentrer au village, vers les 17 heures, 17 heures 30. Beaucoup d'hommes arrêtaient les voitures pour aller au village. L'idée nous est venue de voir si on ne pouvait pas créer une gare pour aider les gens à partir. C'est comme ça entre nous jeunes, on a monté le groupe en août 2010. Chaque 17 heures on venait à l'heure de pointe comme les gens descendaient du boulot, on les chargeait. Au fur et à mesure comme les gens venaient, c'est comme ça, on a commencé à travailler ici (à créer la ligne)» Gbané, chargeur, 03.07.2012.

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Toute création de gare ou de station de woro-woro est d'abord une initiative individuelle ou d'un groupe restreint d'individus. Tout part d'un acte spontané, d'un simple coup d'essai, après une brève inspection d'un lieu jugé stratégique94. Ces espaces s'inscrivent tous dans une trajectoire de relations entre usagers et chauffeurs où les syndicats jouent le rôle d'intermédiaire. Au fil du temps, ces lieux créés spontanément se transforment en gares disposant d'un lieu reconnu et d'une gestion collective. Selon (Steck 2003), les grandes gares dans les villes africaines ont été ouvertes par des opérateurs privés, dans un lieu libre d'occupation, et sont devenues par la suite officielles, gérées en accord avec les collectivités locales. L'ensemble des sites de transport évolue ainsi avant d'ouvrir la voie à une reconnaissance générale. Le plus souvent, l'initiative de la création de la ligne vient d'individus résidant dans l'espace géographique desservi et qui veulent trouver une solution ponctuelle aux problèmes de déplacement d'une population dont ils se sentent solidaires. La toute première liaison interne à Yopougon a été celle qui relie Yopougon gare, Andokoua95 et le village Kouté en 1972. Sané Joseph, un Ebrié du village de Kouté a été l'un des tous premiers transporteurs à avoir introduit un service de taxi collectif interne à Yopougon en vue d'aider les siens à éviter les longues marches comme le témoignent les propos contenus dans cet extrait.

«Là, derrière l'école là (il parle du lycée technique de Yopougon), où l'autoroute qui va Abidjan là passe, c'était notre première gare. En 1972 on a commencé là-bas. Notre chef, c'était Anon Joseph un Ebrié du village de Yopougon Kouté. En ce temps-là c'était poto-poto partout. Maintenant les gens marchaient beaucoup puisque la route-là n'était pas bonne. Comme les gens marchaient beaucoup et ça fatiguait, alors Sané Joseph a mis sa voiture pour commencer transporter un peu un peu, jusqu'à à à! On a venu lui trouver dans çà. 1973, 1974, 1978 nous a trouvé là-bas. 1976- 1977 ils ont commencé l'autoroute. C'est en ce temps-là on est parti voir le sous-préfet de Bingerville pour venir ici (il parle du lieu actuel qu'on appelle communément Yopougon gare) en 1978 pour demander son avis. Ça nous trouvé là-bas. Les tous premiers quartiers c'était Andokoua et Yopougon Kouté. C'est dans ça on vivait à Yopougon ici. En ce temps-là, le woro-woro quand ça commencé à Yopougon, c'était 25 f,

94 Une gare est avant tout un lieu structurant de l'urbanité. Elle se localise autour des marchés, des pôles d'activités et d'emplois. Les mouvements de ces pôles sont recherchés par les chauffeurs, provoquant des encombrements sur les trottoirs et les chaussées environnants.

95 Andokoua et Kouté sont les premiers quartiers d'habitation de Yopougon. Seul lieu de marché situé à l'emplacement actuel du lycée technique et le point de passage de l'autoroute du Nord)

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au cours de la même année on a mis 5f et après on est passé à 30f». (Vieux S. 14-01-2012).

Profitant d'une demande assez forte liée à l'attraction progressive du marché de Yopougon gare, ce type de transport a continué d'évoluer pour glisser subtilement dans l'intercommunal, vers la fin des années 1980. Cette situation a été renforcée et officialisée de fait vers le début des années 1990 avec les difficultés de la SOTRA. Ces véhicules (des R4 trois vitesses) sont devenus des références et leur nom (woro-woro) désigne dorénavant ce nouveau mode de transport collectif à Yopougon et, plus largement, à Abidjan.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci