III. OBJET
Notre étude repose sur l'analyse du dispositif de
communication mis en place par la Commune de Soa, visant la participation des
populations au développement local. Concrètement, il s'agit d'une
étude analytiquedes stratégies de communication et d'information,
de leurs aspects structurel, organisationnel et fonctionnel, afin de voir s'ils
sont de nature à mobiliser les populations de Soa à contribuer au
processus de développement de leur localité.
IV. PROBLEMATIQUE
Depuis son indépendance, le Cameroun a connu une forte
prédisposition à la centralisation des pouvoirs entre les mains
de l'Etat. Ce n'est que depuis son accession à la souveraineté
nationale dans les années 1960, qu'on a vu naître progressivement
un système décentralisé. En réalité,
l'évincement du système de centralisation est parti du fait qu'il
se présentait d'une part tel un frein au développement de la
démocratie durable et de proximité, et d'autre part, tel un
handicap majeur à la responsabilisation des populations locales, et
à l'intégration des énergies internes dans la mise en
oeuvre d'un développement concerté. De ce fait, il y a eu
l'urgence d'un rapprochement entre l'Administration et les administrés.
C'est ce qui fait naître dans le dispositif de la loi constitutionnelle
du 18 janvier 1996, la nécessité de création des
collectivités territoriales réellement
décentralisées au Cameroun. On assiste ainsi dès lors
à la réforme de l'administration territoriale qu'il faut voir
sous deux principaux angles à savoir la déconcentration et la
décentralisation.
La déconcentration consiste en une
représentation du pouvoir central auprès des populations par le
biais de circonscriptions administratives. Celles-ci sont chargées au
niveau local de mettre en oeuvre et de suivre les politiques nationales
conçues par l'administration centrale en termes de fonctions
régaliennes de l'Etat d'une part, et d'assurer la tutelle des CTD
d'autre part. Elles sont donc l'émanation du pouvoir central sur un plan
rapproché, comme le relève la célèbre citation
d'Odilon BARROT, « c'est le même marteau qui frappe ;
seulement on en a raccourci le manche ».
Pour ce qui est de la décentralisation, elle est
fondée sur deux éléments qui sont le transfert des
compétences et des moyens appropriés par l'Etat central aux
collectivités locales, et l'abandon au profit de ces dernières
d'une autonomie financière certaine. Au Cameroun, les CTD sont
constituées par 10 régions, 360communes et 14 villes. Elles sont
dotées d'une personnalité juridique, d'une autonomie
financière, et sont gérées par des organes élus que
sont les conseils régionaux et municipaux. C'est le mode de gouvernance
sur lequel reposent les enjeux de démocratie participative, de bonne
gouvernance et de développement local au Cameroun.
Cependant, en dépit de la volonté de consolider
ce système de gestion sur le plan normatif, notamment de par la
création d'un code général propre aux CTD, on s'avise
à observer que la décentralisation n'aurait pas totalement
comblé les espoirs placés en elle quant à ses enjeux. Il
en est ainsi du cas particulier du développement local qui,
rappelons-le, se veut participatif et concerté.
Selon le Ministère de l'Economie, de la Planification
et de l'Aménagement du Territoire (MINEPAT), «Le
développement local peut être défini comme une action de
développement concertée, réalisée par des
personnes physiques ou morales vivant dans unmême espace
géographique». De cette définition, il se dégage
que le processus de développement des CTD au Cameroun fait appel
à un certain nombre d'acteurs, qui se concertent nécessairement
pour ressortir les problèmes de leur milieu de vie, rechercher et
prioriser des solutions acceptées par tous, et engager des moyens pour
résoudre lesdits problèmes. Parmi ces acteurs, l'on retrouve
essentiellement les populations, qui, tout étant le premier
bénéficiaire dudit processus de développement, en sont
également le protagoniste principal. En effet, il leur est garanti par
le législateur de 2019, la possibilité d'influencer et de
contrôler les initiatives, les décisions et les ressources
affectées à leur propre développement. De même,
elles peuvent à leur guise, initier, concevoir, mettre en oeuvre et
suivre les actions de développement y afférent.
Seulement, pour que de telles actions se concrétisent,
elles nécessitent à la base, un mécanisme de participation
essentiellement basé sur une information de qualité, d'où
l'urgence d'une communication locale efficace. Ceci étant, du moment
où se révèle défaillant le binôme
« communication et participation », l'on aboutit à
la survenance d'un certain nombre d'obstacles au développement des CTD.
Dans la Commune de Soa particulièrement, une telle situation
problématique se manifeste de façon générale
par :
- l'ignorance par la population de sa responsabilité
d'acteur principal du développement local ;
- l'absence d'un cadre de concertation entre les
différents acteurs au développement local ;
- le vide decollaboration ;
- la faible gestation des initiatives locales de
développement ;
- l'éloignement des administrés de l'institution
communale;
- la réticence populaire ;
- la considération péjorative de l'institution
communale ;
- les dissensions occasionnelles entre élus locaux et
populations.
Abordée sous l'angle des Sciences Humaines et Sociales
appliquées à l'Education Permanente, et particulièrement
sous celui de laSociologie des organisations, une telle préoccupation
s'avère problématique dès lors qu'elle permet de remettre
en question l'atteinte efficace des objectifs de performance visés par
le développement des communes en tant qu'organisations. Elle est
davantage pertinente en ceci qu'elle permet d'évaluer l'expression et
l'épanouissement optimal des populations dans leur milieu de vie. En
tout état de cause, il s'agit là d'un questionnement qui pourrait
laisser entrevoir dans la participation défaillante des populations aux
initiatives de développement local, un frein au décollage
socio-économique des CTD camerounaises. Ce qui donne l'impression que la
décentralisation au Cameroun se trouve « entre risques et
espoirs » quant aux enjeux placés en elle.
Pour ce faire, notre étude entend aborder la question
de participation en rapport avec la communication. Pour autant, il ne s'agit
pas de considérer cette dernière sous l'angle professionnel
institutionnel, mais plutôt sous le prisme d'un outil de management au
service du développement des CTD. En d'autres termes, il s'agit d'en
dépasser le sens classique, et de laisser entrevoir ses dimensions
participatives notamment en termes de sensibilisation, de mobilisation
participative, de création d'un cadre local de concertation et de
développement des initiatives locales.
En effet, l'on est admis à croire que telle qu'elle est
pratiquée en l'état actuel dans la Commune de Soa, la
communication communale fait défaut à l'exploitation optimale des
opportunités offertes par la décentralisation d'une part,et des
potentialités humaines de cette localité en vue d'un
développement certaind'autre part. Il apparait dès lors
évidente la nécessité de s'interroger sur ses moyens, son
objet et l'enjeu de ses mécanismes institutionnels.
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