Si nous remontons dans l'histoire de l'Afrique nous allons
constater que le système Coopératif a existé depuis la
négritude. La solidarité africaine qui a existée bien
avant la colonisation, qui était caractérisée par la mise
ensemble des richesses et la conjugaison des efforts des peuples travaillant
ensemble, cultivant ensemble, pêchant ensemble, récoltant en
groupe ; donc chacun travail pour tous et tous travail pour chacun.
En Afrique, chacun travaillait pour tous et tous
travaillaient pour chacun. Un tel travail réalisé dans des telles
conditions causait un véritable plaisir à ses exécutants.
Dans le domaine agricole par exemple, on avait des champs communautaires que
tous et chacun cultivaient uniquement pour l'intérêt de toute la
communauté et des champs privés que, à tour de rôle,
tous ensemble labouraient pour l'intérêt d'une famille
déterminée à laquelle revenaient simplement les travaux de
finissage et de semage mais aussi la moisson15. Le système
coopératif actuel qui vise la mise ensemble des épargnes pour
distribuer des petits crédits (microfinance) tire ses origines, de cet
esprit communautaire.
En République Démocratique du Congo un groupe
des mamans s'organisaient pour labourer toute ensemble le champ de chaque
membre à tour de rôle.
Si pendant l'époque coloniale les coopératives
d'épargne et de crédit avait été favorablement
accueillie dans les colonies anglaises, au Congo par contre leur naissance
à l'époque coloniale avait été tardive. Que
signifie un tel oubli ? Exposant le problème de Coopec en RDC Moeller
constata dans les années 1940 l'inexistence d'endettement et de l'usure
au près de la population congolaise de la colonie belge.
Aussi ne croit- il guère d'avoir justifié la
nécessité de la création de ce type d'organisation
coopérative, car selon lui, la Coopec n'est envisagée et
conçue qu'en fonction d'un état d'endettement et d'usure au lieu
de servir ou à fournir aux organisations indigènes les
premières mises de fonds nécessaires à la formation de
leur capital à l'installation et à l'achat des
matériels.
[21]
L'appréhension d'un échec l'écarta de
cette voie afin qu'un désastre éventuel, estime-t-il
détruise dans l'esprit de l'indigène tout les avantages de
l'épargne. Cette position fut enfin, celle du conseil colonial lorsqu'il
fut question des associations coopératives indigènes
écartant ainsi la création des coopératives au Congo.
Quand l'opportunité d'une politique des crédits
fut reconnue, elle fut préconisée que celle-ci sera
réalisée par deux voies : Un fonds spécial des
crédits indigènes qui permettrait de distribuer les
crédits aux agriculteurs ; et des caisses administratives qui pourraient
aussi dans certains cas leur fournir des avantages.
Malgré les limites connues et imposées à
ces deux institutions qui n'ont pas parvenues à êtres populaires
et la convention de la création des coopératives d'épargne
et de crédit telle que préconisée et
réalisée en faveur des colonies Anglaises constitueraient une
excellente mesure, Mr Willaert écartant cette dernière solution,
pour très simple raison mais significative : « On pourrait arriver
plus facilement aux mêmes résultats en créant au Congo une
caisse d'épargne sur le modèle de caisse d'épargne et de
retrait de la Belgique » ( Mémoire on line).
Manifestement, les problèmes des coopératives
et des crédits étaient à la fois en rapport avec la
politique des crédits et de financement des coopératives
indigènes16.
L'histoire des Coopératives d'Epargne et de
Crédit (COOPEC) est souvent rattachée à celle des IMF par
certain chercheurs pour ce qui concerne le République
Démocratique du Congo. Cette situation se justifie par le faite qu'en
RDC c'est l'esprit coopératif qui a vu le jour avant les IMF avec
l'idée du Professeur Muhammad Yunus. Pendant la période
coloniale, et même avant, les ménages étaient nourrit par
les produits des champs, la richesse se mesurait donc en terme de la production
agricole, d'où le système de travaux communautaires qui fait
barrière aux financements par l'argent. C'est ce qui fait que les IMF
ont eu du mal à se développer en RDC.
16 SHERBROOK, Développement international
des banques et Coopératives, 2002, Mémoire on line.
17 P.O. Edgard MAKUNZA KEKE : Les fondamentaux
de la Microfinance, notes de cours ed. 2018 ; L1 ISC-Gombe. P41
[22]
Ø Evolution des Coopératives d'Epargne et
de Crédit en RDC.
L'histoire de l'évolution des COOPEC en RDC se
subdivise en trois périodes, à savoir17 :
- De la période coloniale à 1970 ; - De 1970
à 1990 ;
- De 1990 à nos jours.
Ø De la période coloniale à
1970
Par le décret du 24 mars 1956, le législateur a
organisé la création et le fonctionnement des «
sociétés coopératives indigènes » dont l`objet
social était de promouvoir, par la mise en oeuvre des principes de la
coopération, les intérêts économiques et sociaux de
leurs membres exclusivement.
Toutes les sociétés de type coopératif,
y compris les coopératives d`épargne et de crédit ou
COOPEC, étaient assujetties à cette loi et placées sous la
tutelle du Gouverneur de province.
De cette période, aucune structure financière
de proximité formelle d`initiative privée n`a été
agréée. Par contre, le pouvoir colonial a créé la
Caisse d`Epargne du Congo (CADECO), Institution de droit public, afin de
collecter les petites épargnes.
Après l`indépendance, en 1969
précisément, la première COOPEC congolaise, « la
Caisse Populaire Coopérative » fut créée à
Mbuji-Mayi (Province du Kassaï Oriental) mais son expérience ne
fût pas concluante faute de cadres compétents.
Ø De 1970 à 1990
Cette période est caractérisée par
l`émergence des coopératives d`épargne et de crédit
(COOPEC), en raison notamment de l`accessibilité des services offerts
aux membres et de leur implantation dans les milieux les plus reculés du
pays dépourvus de banques. Toutefois, faute d`un cadre légal
spécifique, ces dernières
[23]
continueront à se conformer aux dispositions du
décret de 1956 et de ce fait seront désormais placées sous
la tutelle du Ministère du Développement Rural.
Le mouvement coopératif congolais se développa
donc autour de trois foyers principaux notamment Basankusu (Equateur) en 1970,
Bukavu (Kivu) et Kinshasa en 1971 avec la création du réseau
« Fédération des Caisses Populaires de Crédit
LUYMAS/CBCO ». Dès ce moment, le mouvement s`est répandu sur
tout le territoire national et plus sensiblement à Kinshasa, dans les
provinces du Bas-Congo, du Bandundu et du Kivu.
La structure des COOPEC congolaises est
caractérisée par une organisation à trois niveaux, le
niveau primaire (COOPEC), le niveau secondaire (Centrale) et le niveau
tertiaire (Union ou Fédération).
Les COOPEC se chargent de la mobilisation et de l`octroi des
crédits aux membres. Les centrales regroupent plusieurs COOPEC dont
elles assurent entre autres la cohésion. L`Union a plusieurs missions
dont celle de représentation et de coordination des activités du
réseau.
En 1987, les coopératives détenaient
l`équivalent de 7% de l`épargne du secteur bancaire. Elles
étaient pour la plupart affiliées à des centrales
provinciales regroupées à leur tour au niveau national en une
Union des Coopératives Centrales d`Epargne et de Crédit «
UCCEC ». En 1989, l`UCCEC supervisait cinq réseaux provinciaux
totalisant 145 coopératives primaires, 274.389 membres et 4,9 millions
de dollars américains d`épargne (Lebughe M. et al, 2003).
Ø De 1990 à nos jours
Depuis 1991, le contexte socio-économique et politique
difficile caractérisé notamment par les pillages,
l`hyperinflation, la prise des mesures monétaires incohérentes et
l`instabilité politique, a contribué à fragiliser le
système financier en RDC et particulièrement les COOPEC.
Ainsi, les coopératives ont perdu, entre 1991 et 1993,
près de 80 % de leur clientèle et 66 % des fonds placés
dans les banques de dépôt, justifiant ainsi le climat de
méfiance des membres envers ce mouvement (Lebughe M. et al, 2003).
[24]
Aujourd`hui, la plupart des COOPEC se sont regroupées
en 15 centrales et ont adhéré à des structures
faîtières de 3ème niveau, à savoir l`Union des
Coopératives Centrales d`Epargne et de Crédit (UCCEC) et la
Confédération Nationale des Coopératives d`Epargne et de
Crédit (CONACEC).