II.3. Couverture des attentes du contrat
psychologique idéologique et socialisation organisationnelle des
salariés
Prenant en compte le volet aussi bien théorique
qu'empirique, de nombreux travaux sur la gestion des ressources humaines ont
démontrer que la considération psychologique des salariés
dans leurs réactions au travail et aussi à l'ensemble des motifs
organisationnels agit positivement sur le désir qu'ont les managers
à mettre en place des pratiques visant la socialisation
organisationnelle des salariés. Il ne suffit pas seulement de dire au
salarié qu'il est recruté pour tel ou tel emploi, encore faut-il
que cet emploi réponde nécessairement à ses
prédispositions et ses attentes idéologiques relatives au contrat
psychologique dans cet emploi (Hall, 1996 ; Rousseau, 1996 ; Hallier
et James, 1997 ; Parker et al., 2009). Avant de mettre en
évidence le contenu de ces recherches en rapport avec la socialisation
organisationnelle des salariés, prenons d'abord le soin d'expliciter les
notions au centre de la compréhension même du contrat
psychologique idéologique à savoir : l'employabilité
et l'évolution de carrière, la sécurité de l'emploi
et le sens qu'accorde le salarié au travail.
II.3.1. Les attentes du contrat psychologique
idéologique dans la relation d'emploi
Coffman et Gonzales-Molina (2003) signalent dans leurs
recherches en rapport avec la réflexion sur les actions à mettre
en oeuvre dans le processus de développement des compétences que
: « tout le monde a du talent (...), le tout est de trouver le
rôle dans lequel le talent peut être optimisé ».
Cette conception les amène à critiquer le management par les
compétences qui serait basé, selon eux, sur «
l'idée que n'importe qui peut réussir à faire
n'importe quoi avec une formation suffisante ». Pour eux, il faut
construire l'avenir de l'entreprise sur les points forts des salariés
(ce qui va à l'encontre de la guerre des talents qui consiste à
sélectionner les personnes les mieux adaptées aux exigences des
emplois). Il apparaît donc essentiel de faire grandir les talents par des
actions autour d'un projet commun entre l'entreprise et les salariés
mettant les réponses sur les attentes de développement des
compétences et d'employabilité au travail, les réflexions
sur comment sécuriser l'emploi des salariés et pour finir, donner
un travail qui a du sens à ces derniers (Crant, 2000 ; Baruch,
2001 ; Van der Heijden et Van der Heidjen, 2006 ; Nauta et al
(2009). Que renferment ces différentes notions dans la gestion des
ressources humaines ? Les lignes qui suivent apportent un
élément de réponse à cette question.
II.3.1.1.
Employabilité et possibilité d'évolution de
carrière
La notion d'employabilité des salariés en
elle-même n'est pas si simple à définir d'autant plus
qu'elle est associée dans la plupart des travaux examinant la relation
d'emploi à d'autres notions telles que l'adaptabilité du
salarié et l'évolution de carrière (Fugate, 2004 ;
Everaere, 2012), la flexibilité des salariés au travail (Van Der
Heijde et Van Der Heijde, 2005) et la flexicurité de salariés
dans leur relation d'emploi (Bovin et Vielle, 2009 ; Cromarias,
2011 ; Schmidt et Dufoix, 2012). La définition d'entrée de
jeu que nous pouvons donner à cette notion d'employabilité des
salariés est qu'elle est considérée comme la
capacité qu'à un individu à trouver facilement et à
conserver un emploi (Groot et Massen Van den Brink, 2000 ; Harvey,
2001 ; De Grip et al., 2004). Cette définition est
proposée au travers d'une revue de la littérature qu'il est
nécessaire de mettre en exergue pour éclaircir le cadre
théorique de la considération des attentes d'employabilité
et d'évolution de carrière dans la relation d'emploi.
Défini dès les travaux des premiers auteurs
comme « l'espérance objective ou la probabilité
plus ou moins élevée que peut avoir une personne à la
recherche d'un emploi d'en trouver un » (Ledrut, 1984) ;
comme l'ensemble des moyens de développement des compétences ou
d'adaptation selon lesquels les salariés au travail ont la
capacité d'acquérir des connaissances et compétences
favorable au séjour à long terme sur le marché de l'emploi
(Treasury, 1997) ou encore comme la capacité de se déplacer de
manière autonome sur le marché du travail afin de
démontrer son potentiel pour un emploi durable (Hillage et Pollard,
1998), la notion d'employabilité dans la relation d'emploi a suivi un
cheminement marqué par plusieurs transformations définitionnelles
et la dernière considération à notre connaissance est
celle de Poll et Stewell (2007) selon laquelle l'employabilité peut
être entendu comme la disposition par un individu d'un corps
« de compétences, de connaissances et de qualités
personnelles qui [le rendent] plus susceptible de se positionner sur une
profession et de réussir dans sa profession ». Cette
définition fait particulièrement appel à la notion
d'évolution de carrière dans la relation d'emploi à
l'entreprise. De ces définitions présentées dans la
littérature, trois approches sont intéressantes pour
évaluer l'employabilité des salariés dans
l'évolution des carrières. Il s'agit bien de l'approche de
l'employabilité individuelle, de l'approche de l'employabilité
basée sur les compétences des salariés et de l'approche de
l'employabilité interne et externe. Ces approches sont analysées
tour à tour dans les lignes qui suivent.
L'approche de l'employabilité
individuelle
Partant de la conception de l'employabilité des
salariés au travail selon une perspective organisationnelle relativement
aux activités qui sont effectuées dans l'organisation et
contribuant à l'amélioration des compétences des
salariés pour une conservation à long terme de son emploi, Van
Dam (2003) propose une nouvelle conception de l'employabilité, mais
cette fois-ci, basée essentiellement sur les caractéristiques
individuelles des salariés, leurs traits de personnalité mais
également sur les ressources individuelles dont ils disposent pour
l'accomplissement de leurs tâches. Cette approche de
l'employabilité définie au sens individuel renvoie aux ressources
que dispose le salarié. Ces ressources peuvent inclure entre autre et
selon Saint Germes (2008) son niveau de dotation personnelle initiale et
accumulée en capital (on fait allusion ici à la notion de
capital, qu'il soit humain, social culture et accumulé par la
carrière effectuée dans une autre entreprise, si l'on fait bien
sûre référence au modèle des carrières
nomades de Cadin (1997)), ses capacités professionnelles (en
référence à toutes les qualifications, les
expériences, les compétences qui sont à l'actif du
salarié), ses comportements psychosociologiques (aussi bien sa
personnalité que son identité professionnelle) ainsi que sa
prédisposition à s'intégrer dans les relations
interpersonnelles. Ainsi est née la conception de la notion
d'employabilité biographique développé dans les recherches
de Gazier (2003) le salarié doit prendre conscience de ses propres
compétences, qualités et connaissances. Cet auteur fait remarquer
dans la clôture de ses analyses et avec les conclusions de Fugate et
Ashford (2003) que pour que le salarié puisse espérer attendre de
l'entreprise une préoccupation pour l'employabilité et le
développement de carrière, il faut qu'il ait lui-même des
prédispositions en termes conservation de l'emploi valorisées par
les employeurs actuels et potentiels.
L'approche de l'employabilité basée
sur les compétences des salariés
L'approche de
l'employabilité basée sur les compétences des
salariés fait asseoir la compréhension de la notion
d'employabilité des salariés comme une sorte de compromis (bon
compromis bien sûre) entre les intérêts individuels des
salariés dans la relation d'emploi et le besoin de croissance de
l'entreprise (Van Der Heijde et Van Der Heijde, 2006 ; Nauta et
al., 2009 ; Mercier, 2011). Particulièrement, les travaux
de Nauta et al. (2009) que la volonté d'adaptation de
l'organisation à des environnements en perpétuels changements est
cumulée avec la mise en place d'une bonne culture d'employabilité
des salariés stimulant les orientations de l'entreprise du
côté des salariés et réduisant simultanément
les effets liés aux départs massifs de l'entreprise. De leur
côté, Van Der Heijde et Van Der Heijde (2002, 2005, 2006)
évaluent l'employabilité des salariés comme un processus
d'élargissement des ressources que dispose le salarié dans
l'exercice de ses fonctions. La théorie des ressources (en occurrence
celle relative aux ressources humaines de Guest (1987) et Storey (1992) prend
essentiellement la place dans cette considération de
l'employabilité des salariés en mettant en évidence
l'engagement au travail à un niveau élevé dans la relation
d'emploi. Ces études ont trait au fait que la continuité du
travail et les possibilités d'évolution de carrière dans
l'entreprise sont garanties par la démonstration de l'expertise
professionnelle dans la réalisation des tâches qu'incombent la
relation à l'entreprise. Il y a donc là un passage de la gestion
des ressources humaines basée essentiellement sur l'emploi à une
gestion des ressources humaines plus individualisée prenant en compte
les compétences des salariés. La prise en compte des
compétences devient alors pour l'entreprise une de ses ressources
essentielles qui lui permettent de se positionner sur le contexte concurrentiel
en maintenant sa compétitivité. Van Der Heijde et Van Der Heijde
(2005) définissent l'employabilité selon l'approche par la prise
en compte des compétences comme « l'accomplissement
continu, l'acquisition ou la création de travail grâce à
l'utilisation optimale de compétences ». Cette
définition met en évidence l'intérêt de laisser
libre cours aux salariés afin qu'ils proposent des suggestions pour
l'amélioration de sa carrière dans l'entreprise.
L'approche de l'employabilité interne et
externe
Mieux comprendre la notion d'employabilité interne et
externe des salariés revient à se référer à
la conception individuelle de cette notion énoncée
précédemment. En effet et selon cette conception, la perception
par le salarié de la capacité qu'il a dans la conservation de son
emploi actuel peut agir dans sa manière de comprendre son environnement
organisationnel (Rothwell et Arnold, 2007), de façon plus claire, dans
sa manière de voir son intégration sur le marché du
travail interne et externe. En prenant un point de vu gestionnaire dans
l'analyse des notions d'employabilité interne et externe en
complément de la conception économiste du marché du
travail interne et externe, les travaux de Thijssen (2000), appréhendent
la notion d'employabilité comme une sorte d'indicateur de
probabilité à entrer sur le marché du travail. Trois
significations sont donc associées à cette conception du
travail :
- Entrer en relation d'emploi dans le sens de l'emploi quand
on se place dans le secteur public ou il existe bien l'intervention du
gouvernement dans la proposition de l'emploi aux travailleurs. Dans ce sens
d'analyse, l'employabilité est représentée comme
« une chance de plein emploi dans le monde du
travail » (ZGoulli-Swalhi, 2014).
- Entrer en relation d'emploi dans le sens de salarié
quand on se place dans le secteur privé ou la démonstration de
compétences est déterminante dans la poursuite de la relation
d'emploi. Dans ce sens d'analyse, l'employabilité est
représentée comme un indicateur de « la
possibilité de faire correspondre l'offre et la demande de travail
» (ZGoulli-Swalhi, 2014).
- Entrer en relation d'emploi dans le sens d'emploi attractif
quand on se place du côté de l'individu dans la relation d'emploi.
Dans ce sens d'analyse, l'employabilité est représentée
par le salarié comme « une chance d'obtenir un emploi ou
une carrière » (ZGoulli-Swalhi, 2014). C'est cette
considération de la notion d'employabilité de cet auteur,
découlant de plusieurs autres travaux (Mallough et Kleiner, 2001 ;
Sanders et Grip (2004 ; Rothwell et Arnold, 2007 ; Thijssen, 2008)
que retenons dans le cadre de cette recherche puisque répond mieux aux
objectifs de notre investigation basée sur l'évaluation par le
salarié de la couverture des attentes d'employabilité de
l'entreprise et leur socialisation organisationnelle.
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