II.1.1.2.
Reconnaissance et participation aux décisions
Le premier élément défini dans les
attentes relationnelles du contrat psychologique fait référence
à la reconnaissance organisationnelle et aux efforts
développés par l'entreprise pour libéraliser les processus
de prise de décision. La reconnaissance organisationnelle telle que
définie dans la littérature est une notion à plusieurs
sens (Brun et Dugas, 2005 ; Ricoeur, 2004) rarement utilisée de
façon unique par tous les chercheurs (El Akrémi et al.,
2009 ; St-Onge, 2009 ; Weinstein et al., 2011 ; Boukar
et al., 2018). Très souvent confondue avec la notion
d'embellissement de la relation de travail (Lawler, 1986), le concept de
reconnaissance est assimilé dans les travaux pionniers de la relation
d'emploi à la considération personnelle que le salarié
peut avoir de la manière dont il est traité dans l'entreprise
(Maslow, 1954) et côtoie de temps à autre la notion de
réputation donnée à l'organisation (Miner, 1993). Elle
peut porter tantôt sur les accomplissements et la démonstration de
ses efforts au travail par le salarié, tantôt sur les
gratifications matérielles et/ou symboliques telles qu'un salaire
satisfaisant, une promotion interne, une autonomie au travail et des
encouragements par rapport à la contribution favorable au travail
(Siegrist et al., 1990 ; Stajkovic et Luthans, 2001 ; Brun et Dugas,
2005 ; St-Onge et al., 2005 ; St-Onge et Thériault, 2006).
La définition proposée par Stajkovic et Luthans (2001) selon
laquelle, la reconnaissance représente l'attention personnelle transmise
verbalement à travers des expressions particulières et
l'appréciation pour un travail bien fait ainsi que celle proposée
par Boukar et al. (2018) selon laquelle « la
reconnaissance organisationnelle des salariés est la valorisation du
salarié lui-même, de ses actions dans le travail et des
résultats de son travail par des primes et des gratifications
concurrençant le degré d'investissement de l'individu dans le
travail et les objectifs atteints », nous semblent assez
complètes dans l'éclaircissement des attentes relationnelles
liées à l'emploi.
En outre et compte tenu de son caractère multiforme,
l'analyse de la littérature a permis à certains auteurs de
proposer quatre formes de reconnaissance correspondant aux différentes
dimensions de la reconnaissance organisationnelle : une dimension
consacrée à la reconnaissance existentielle, une dimension
consacrée à la reconnaissance de la pratique de travail, une
dimension consacrée à la reconnaissance de l'investissement dans
le travail et une dimension correspondant à la reconnaissance des
résultats du travail (Brun et al., 2002 ; Brun et Dougas,
2002 ; Gavrancic et al., 2007 ; Paquet et al., 2011).
Les deux dimensions liées au travail (reconnaissance de la pratique de
travail et reconnaissance de l'investissement dans le travail) sont
analysées en termes reconnaissance du processus de travail. Une telle
distinction est d'autant plus intéressante qu'elle permettrait de
mesurer avec précision le concept de reconnaissance au travail dans son
ensemble. On peut représenter visuellement les quatre formes de
reconnaissance en les situant par rapport aux dimensions clefs que constituent
la personne, le processus de travail et le résultat du travail selon la
figue ci-après :
Figure 11:Formes de
reconnaissanceorganisationnelledes salariés
Personne
|
Processus detravail
|
Résultat
|
Reconnaissance existentielle
|
Reconnaissance de la pratique de travail
|
Reconnaissance de
L'investissementdansletravail
|
Reconnaissance des résultats
|
Source
:BrunJ.P.etDugasN.(2002),Lareconnaissanceautravail:Unepratiquerichedesens,Chaireen
gestionde la santéetde la
sécuritéautravaildanslesorganisations, UniversitéLaval.
La reconnaissance existentielledusalarié au
travail
Lareconnaissanceexistentielle dans les pratiques de
reconnaissances organisationnelle des dirigeants porte essentiellement
surl'employéentantqu'individudistinct,doté d'une
intelligence,desentimentsetd'uneexpertisepropre à lui qu'il est
nécessaire de prendre en compte pour faire naître dans l'esprit du
salarié, un sentiment d'être considéré comme
individu valorisé (Jacob,2001).Ils'agitd'une
reconnaissanceaccordéed'embléeàchacun,pourlasimpleraisonqu'ilestunêtrehumain
et a besoin d'être traité de manière raisonnable pour ce
qu'il est.Ellese manifeste
danslespetitsgestesposésquotidiennementaucoursdeséchanges
interpersonnels.Lareconnaissanceexistentielledevraitêtreàla
basedetoutes les autresformes dereconnaissance.Parcettedernière,
l'individu sevoitreconnaîtreledroitàlaparoleetà l'influence
surlesdécisions. Pour lui, cette reconnaissance se manifeste
particulièrement par le ressenti qu'a le
salarié:ilal'impressiond'existerauxyeuxdesautresetd'êtrerespectépour
cequ'ilest ;Ilalesentimentquesesbesoinssontprisenconsidération.La
reconnaissance existentiellepeut à cette
occasionprendredesformesplusofficielles,maiselleestavanttout informelle
etexpriméeen privé entre le salarié en question et
l'entreprise.
La reconnaissance des résultats dutravail
du salarié
Aveclareconnaissancedesrésultatsdutravailréalisé,c'estleproduitdutravaildel'employéetsacontributionauxobjectifsdel'entreprisequifontl'objetd'uneappréciation.Il
s'agitd'unjugementetd'untémoignagedegratitudesurl'efficacité,l'utilitéetlaqualitédu
travailaccompliparunindividuouungrouped'employés en relation avec les
objectifs qui leurs sont fixés (BrunetDugas,2002).Cetypede
reconnaissance,conditionnelleauxrésultats,s'exprimedoncunefoislatâcheaccomplie.Pour
l'employé,c'estsacontributionàl'entreprisequisetrouveainsivalorisée,d'oùunplusgrand
sentimentd'importancedansl'organisation.Bienquedeplusenplusprésentedanslesmilieux
detravail,lareconnaissancedesrésultatspeutaussiengendrerdeseffetspervers:
jalousie,
sentimentd'injustice,compétitionaccrueentrelesemployés,pertedecrédibilité
et bien d'autres.Enoutre, uneorientationexclusivesurlesrésultats
atteints par les salariés
risqued'occulterlaréalitéduprocessusdetravailqui sevitauquotidien
entermesd'efforts,d'investissementaffectif,deprisederisqueetde
résolution de problèmes. Cette forme de reconnaissance doit
doncêtreemployéeavec discernementetcomplétéepar
d'autres formes dereconnaissancemoins axées surles résultats.
Lesdeuxpremièresformesdereconnaissancequenousvenonsdedécrireconcernentsoit
lapersonne,soitlerésultatquecettedernièreproduit.Lesdeuxformesdereconnaissancequi
serontmaintenantdéfiniesfontlepontentrelapersonneetlerésultatdutravail.Cesontla
reconnaissancede la pratique detravaildel'employé dans le processus de
travailetla
reconnaissancedesoninvestissementdansletravail.Toutesdeuxpeuventaccompagnerle
processus detravailjusqu'àl'atteintedesrésultats.
La reconnaissance dela pratiquedetravail du
salarié
Lareconnaissancedelapratiquedetravailconcernelamanièredontl'employéeffectue
satâche,plutôtquesapersonneousesrésultats atteints au
travail (BrunetDugas,2002).Elleporteégalement surson
comportement,sesqualitésprofessionnellesetsescompétences.
Lesélémentssur lesquels porte cette reconnaissance incluent
notamment la créativité l'innovation,
l'améliorationcontinuedanslesméthodesdetravail,larelationaveclesclients,letravail
d'équipe.Danscesens,ilne
s'agitpasdevoirl'aspectaccomplissementdelatâche,mais
l'aspectprocessusd'accomplissementdelatâche.Selonlesauteurscitésprécédemment,cette
formedereconnaissanceest très importantepour comprendrecomment les
individusse développent dans leur travailet
parviennentàsonaccomplissement. Dans ce sens, le développement
des compétences et des savoir-faire est mis en perspective par ce type
de reconnaissance organisationnelle, ce qui permet à l'employé de
percevoir l'estime de soi et sa contribution à l'accomplissement au
travail.
La reconnaissancedel'investissement du
salarié dans le travail
Dans certaines situations,malgrétoutletravail
effectué etl'énergiedéployée dans le cadre des
recommandations
organisationnelles,lesrésultatsnesontpasàlahauteurdesefforts
fournis.Onnepeutdoncrécompenserl'atteintedesobjectifs(reconnaissancedes
résultats),maisl'investissementdansletravailpourrarecevoirunereconnaissanceappropriée
(BrunetDugas,2002).Onrelèveraalorslaqualitéetl'importancedeseffortsgrâceauxquels
l'employéacontribuéauprocessusdetravail.Lareconnaissancedel'investissementportesur
l'implicationdesemployés lors de la réalisation des
objectifs,lesrisquesqu'ilsprennentpourmeneràbienleurtâche,l'énergie
déployéedansdesconditionsquelquefoisdifficiles.Cetteappréciationpermetdesouligner
l'apportdesemployéspeuvisiblesoumoinsperformants,dontles actions n'ont
pas une plus grande répercussion sur les résultats de
l'entreprise,maisquiparticipent au fonctionnementdel'organisation. La
reconnaissance de l'investissement dans le travail permet aux salariés
d'être reconnus dans l'entreprise et ce, même si leurs travaux ont
atteint un résultat en marge des prescriptions organisationnelles ou
même des autres employés dans l'entreprise. Cetype de
reconnaissancepeutégalementinclureunetouchepédagogiquequifavoriseralaprogression
de l'employéetl'éclosion deson potentiel.
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