I.1.2. Les
théories de l'apprentissage organisationnel en entreprise
Les partisans de l'organisation de l'apprentissage
décrivent les exigences de l'apprentissage organisationnel (les
organigrammes à plat, l'autonomie locale, la confiance et la
coopération au-delà des fonctionnelles), mais explorent rarement
la signification de ces termes ou la nature même des processus de
changement auxquels ils font face, dans la mesure où ils partent
directement des réponses à ces questions. Ils se divisent entre
les tenants de l'apprentissage au regard
d'« occasion » d'apprentissage et les tenants de
l'apprentissage au regard des configurations
« apprenantes ». Ces travaux sont marqués
par la focalisation sur l'existence d'un système d'information formel
« ouvert et performant », la reconnaissance d'un
système d'information informel et l'implication de la direction
générale.
I.1.2.1. Le modèle
d'apprentissage de Chris Argyris et Donald Schön
Ces auteurs défendent une position humainement et
rationnellement argumentée : le
« chercheur-théoricien » ne doit pas sous-estimer
les compétences des praticiens, dépositaire d'un savoir pratique
sue l'organisation et les vecteurs de changement. Le type de rapports
souhaitables entre chercheur et praticien est basé sur une collaboration
entre types d'enquêteurs distincts, occupant des rôles
différents et s'appuyant sur des compétences et méthodes
différentes, bien que complémentaires. En effet, les
théoriciens enquêtent en formulant des propositions causales
générales sous formes de lois explicatives. Le chercheur qui,
dans cette esprit, embrasse un programme de recherche-action collaborative sur
l'apprentissage organisationnel devient un
« acteur-expérimentateur » au même
titre que les praticiens qu'il rejoint.de leurs côtés, les
praticiens pensent en terme de causalité intentionnelle,
c'est-à-dire de relation causale entre le dessein d'un acteur et
l'action qu'il entreprend pour réaliser celui-ci. Pour expliquer, ils
décrivent l'intention qui est à l'origine de l'action. Un de
leurs concepts de références est donc celui
de « boucle » pour lequel ils
distinguent :
La boucle simple qui relève
d'une modification mineure des règles existantes par
l'amélioration de l'existant sans remise en cause des
représentations de l'existant. Elle est liée, en même
temps, à tout ce qui tend à renforcer les représentations
en place. Les individus, pris au piège de pouvoir et de survie,
génèrent des processus défensifs d'une force
extraordinaire. Il s'agit ici d'une boucle d'inhibition primaire et est nourrit
par les théories d'usage des participants lors des confrontations
directes ;
La double boucle qui concerne les
modèles de représentations c'est cet apprentissage en double
boucle qui va caractériser l'organisation apprenante. Pour qu'un
apprentissage en double boucle ait lieu et perdure à tous les niveaux de
l'organisation, il faut parvenir à mettre fin aux processus
auto-entretenus. Pour que cette double boucle dans l'apprentissage se mette en
place, il faut que les théories d'usage individuelles soient
modifiées ;
L'apprentissage de l'apprentissage
ou deuteuro-learning (apprentissage au second degré) se
caractérise par le fait que l'organisation « se
penche » elle-même pour diagnostiquer les obstacles de
l'apprentissage. Ce qui conduit à réexaminer ses valeurs
fondamentales en tentant de dépasser les blocages habituels pour
redéfinir le sens donné à l'action (recadrage). Cette
notion, tirée des auteurs de l'école de Palo Alto (Watzlawick et
al., 1975), mais à laquelle est attribuée ici une
dimension organisationnelle, exprime l'idée de l'accroissement du
potentiel d'apprentissage organisationnel.
Cette distinction entre ces différents types de
« boucles » n'est pas forcement aisée car
elle est brouillée par la dimension et la complexité
organisationnelle. L'apprentissage en double boucle revêt une importance
plus ou moins grande pour l'organisation dans son ensemble, selon le
degré auquel les valeurs et les normes essentielles sont
touchées. Le type d'apprentissage organisationnel aura tendance à
varier en fonction du niveau d'agrégation (au regard des
différentes strates regroupant des groupes d'individus) auquel il se
produit et des liens plus ou moins étroits qui associent les
unités entre elles à un même niveau ou à des niveaux
différents. L'intérêt majeur de cette perspective est de
fonder une « vraie » théorie de
l'apprentissage organisationnel qui ne déconnecte pas la logique de
l'apprentissage organisationnel stricto sensu, c'est-à-dire
tout ce qui tourne autour d'information, de connaissances et des individus, de
la logique de l'organisation apprenante, c'est-à-dire des conditions
structurelles et procédurales qui favorisent l'apprentissage
organisationnel.
|