B- Le renforcement de la mission des organisations des
travailleurs
Dans le monde du travail togolais, deux institutions se
partagent la représentation des travailleurs247. Il s'agit
des délégués du personnel et des
délégués syndicaux.
Aux termes de l'Article 7 alinéa 1er du CTT
« Les syndicats professionnels248 ont pour objet
l'étude et la défense des droits, ainsi que des
intérêts matériels, sociaux et moraux d'ordre
professionnel, tant collectifs qu'individuels des salariés et des
professions visés par leurs statuts ». Les
délégués syndicaux ont donc pour fonction de
représenter et de défendre des
243 Article 209 alinéa 1 CTT «
Le dialogue social est le processus d'échange
d'informations et de communication par lequel les acteurs du monde du travail
s'entendent pour gérer au mieux leurs intérêts
».
244 Entre les organisations d'employeurs et de travailleurs
245 Article 209 alinéa 3 CTT, En collaboration avec le
gouvernement, les organisations d'employeurs et de travailleurs
246 Article 209 alinéa 2 CTT ; le CNDS est
créé en mai 2007
247 LAROCHE (P.), Les relations sociales en entreprise,
Paris, Dunod, 2009
248 Ex : STT, UNSIT, UGSL, CSTT, CGCT, GSA
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89
travailleurs syndiqués et l'ensemble du personnel.
Mais, il revient selon nous, à la loi de définir de façon
formelle les attributions des délégués syndicaux puisque
même si la loi reconnaît qu'ils peuvent assister les
délégués du personnel sur leur demande249il ne
s'agit que d'une simple faculté.
Il faut relever qu'au regard de l'article 212 alinéa
1er du CTT, « Les délégués du
personnel sont les représentants élus du personnel. Ils sont
chargés de la défense des intérêts des travailleurs
au sein de l'entreprise ». Ils sont investis de trois
attributions250 devant leur permettre de mener à bien leur
lutte contre les problèmes sociaux à titre illustratif de la
discrimination.
D'abord, l'article 216-1 du CTT reconnaît aux
délégués du personnel le droit de présenter des
réclamations aux employeurs « [---] concernant les conditions
de travail, la protection des travailleurs, l'application des conventions
collectives, des classifications professionnelles et des taux de salaires qui
n'auraient pas été directement satisfaits ». En effet,
en vertu de cette mission, les délégués du personnel ont
le droit de saisir les employeurs sur tout fait ou tout acte discriminatoire
porté à leur connaissance ou su d'eux même. Cette
prérogative leur permet bien évidemment de mettre en garde les
employeurs contre la discrimination afin de les amenés à
prévenir ou à mettre fin aux pratiques discriminatoires dont ils
ont connaissance dans leurs structures.
Ensuite, considérés comme les yeux et les
oreilles de l'inspection du travail à l'intérieur de leurs
entreprises251, les délégués du personnel ont
pour mission de saisir l'inspecteur du travail et des lois sociales tant au
sujet des plaintes que des réclamations sur les dispositions
légales, réglementaires et conventionnelles dont il est
chargé d'assurer le contrôle252 lorsque celles-ci
venaient à être violées pour causes discriminatoires. Ils
veillent à ce que la législation protège effectivement
contre la discrimination au travail. Cette mission fait d'eux des auxiliaires
de l'inspection du travail.
Enfin, aux termes de l'article 216-3 du CTT, les
délégués du personnel sont aptes à «
communiquer à l'employeur toutes suggestions utiles tendant à
l'amélioration de l'organisation et du rendement de l'entreprise
».
249 Article 219 CTT
250 Article 216 CTT
251 KIRSCH, (M.), le Droit du travail africain, TPOM, T, II.
252 Article 216-2 CTT
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90
Même si ces attributions existent en théorie, il
faut les rendre pratiques. Ces triples missions précitées doivent
être exécutées avec intégrité et
probité. De surcroit, celles-ci doivent être renforcées
afin de permettre aux organisations des travailleurs de bien les accomplir.
Pour accroître la représentativité des
personnes victimes de la discrimination dans le monde du travail, il faut
donner plus d'autonomie et de pouvoir aux organisations des travailleurs dans
l'accomplissement de la mission qui leur est dévolue. Il s'agit d'une
représentation effective des intérêts des travailleurs. Les
organisations syndicales se doivent d'agir en justice au profit des
travailleurs lésés pour cause de discrimination à la
demande de ceux-ci ou de leur propre chef lorsqu'ils estiment opportun de le
faire.
Toutefois, en cas de défaillance des organisations des
travailleurs dans l'accomplissement de leurs missions, leurs
responsabilités devraient être engagées dans le but de les
contraindre à s'exécuter loyalement.
Les organisations de travailleurs doivent intervenir utilement
à la collecte de preuves contre la discrimination dans le monde du
travail. Cette démarche facilitera sans doute la tâche à la
victime de la discrimination qui pourra espérer obtenir la sanction de
son auteur.
Les délégués doivent user de la
négociation collective pour obtenir de leurs employeurs la mise en place
de dispositif de lutte contre la discrimination dans leur secteur
d'activité et leur respect par ceux-ci. C'est dans ce sens qu'il faut
oeuvrer à la conception d'un guide pratique traitant de la question de
la discrimination et la promotion de l'égalité à l'actif
des travailleurs pour les informer utilement sur les dangers de cette pratique
morbide et les avantages de l'égalité. Aussi doivent-ils faire
preuve de persuasion et de conviction dans leur démarche.
Afin de jouer pleinement leur mission les représentants
des travailleurs doivent être formés et sensibilisés sur
les textes anti-discriminations. A leur tour, ils seront chargés de
transmettre aux personnes qu'ils représentent les instructions
reçues.
Les organisations des travailleurs peuvent aussi mener des
actions de plaidoyer auprès des décideurs pour l'aboutissement de
trois types d'actions. D'abord, la ratification de la convention n°156 de
l'OIT concernant l'égalité de chance et de traitement pour les
travailleurs des deux sexes253. La ratification de cette convention
consolidera les acquis des conventions n°111 et n°100de l'OIT
déjà ratifiées par le Togo. En conciliant les
responsabilités professionnelles et familiales, cette convention devra
permettre aux
253 Les travailleurs ayant des responsabilités familiales
(1981), Conventions et recommandations internationales du travail 1919-1981.
Entrée en vigueur le 11 août1983.
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travailleurs des deux sexes qui ont des responsabilités
familiales de s'investir et progresser professionnellement sans
discrimination254. Lorsque besoin se ferait sentir, ils peuvent
exiger l'instauration du télétravail dans leurs structures.
Ensuite, l'adoption de la politique de la petite enfance255.
Celle-ci devra consister à mettre au point des infrastructures d'accueil
de la petite enfance c'est-à-dire des services de garde d'enfants
accessibles et aura pour corollaire de permettre à beaucoup de
travailleurs de s'impliquer dans la vie professionnelle et de subvenir à
leurs besoins256. Enfin, la ratification de la convention n° 141 de
1975 sur les organisations de travailleurs ruraux257, qui combat la
discrimination dans certains secteurs ce qui va naturellement contribuer au
développement économique et social desdits secteurs.
De leur côté, les travailleurs doivent s'engager
ardemment en informant les délégués du personnel ou
syndicaux des discriminations dont ils sont victimes ou ils ont
connaissance.
La lutte contre la discrimination et la promotion de
l'égalité devient un impératif auquel ne peuvent se
soustraire les autres partenaires.
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