§ 2. LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE DANS LES
STRATÉGIES POLITIQUES DE L'OPPOSITION
Tout comme la mouvance présidentielle, l'opposition
togolaise est à la quête permanente de la meilleure
stratégie en vue d'en venir à bout du pouvoir qu'elle estime
aujourd'hui ?cinquantenaire ?. Il ne peut d'ailleurs pas en être
autrement vue que la mouvance présidentielle est restée la
même depuis 1967 où le Général Eyadéma a pris
le pouvoir à la suite d'un coup d'Etat. Seulement, l'observation fait
remarquer des stratégies somme toute non payantes puisque l'alternance
souhaitée de tous temps peine à se matérialiser
malgré les victoires en trompe-l'oeil et sectoriels que l'opposition
à remporter. S'agissant de la communauté internationale comme
enjeu du jeu politique 150 les stratégies de
l'opposition togolaise s'avèrent tout à la fois discontinues (A)
que désorientées (B).
148 J. W. HEILBRUNN, C. M.
TOULABOR, Op cit.
149 J. W. HEILBRUNN, C. M.
TOULABOR, Op cit.
150 La communauté internationale comme
enjeu du jeu politique togolais s'entend au regard du poids institutionnel qui
lui est reconnu surtout dans le soutien ou les désaveux du pouvoir comme
nous
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A. Une stratégie discontinue
Depuis l'entame du processus de la démocratisation au
Togo, la prise en compte de la communauté internationale dans la
définition des stratégies politiques apparait nécessaire
au regard du pouvoir d'influence de celle-ci dans le jeu politique. Ainsi,
dès les premières heures du réapprentissage de la
démocratie, l'opposition togolaise a trouvé en cette
communauté internationale un allié majeur dans son combat pour la
conquête du pouvoir surtout compte tenu du contexte international qui
promouvait çà et là les vertus démocratiques et
donc favorable aux alternances au sommet des Etats.
Ainsi pouvait-on remarquer déjà en 1991, la
pression du COD aboutir à la Conférence nationale avec la prise
en compte de la plupart de ses exigences 151 ; et cerise sur
le gâteau, les accords du 12 juin qui consacrait l'organisation de cette
conférence stipulaient clairement que « les orientations et
décisions de la conférence nationale ne seront pas remises en
cause par le chef de l'Etat »152. Mais
très rapidement on verra cette opposition conspuer la communauté
internationale, l'accusant de connivence avec la mouvance
présidentielle. La situation est beaucoup plus patente et plus visible
dans la crise politique 2017.
En effet, lorsque la communauté internationale s'est
saisie du dossier togolais, les voies se sont levées dans une
véritable cacophonie pour étiqueter cette communauté de
tous les noms. Ainsi a-t-elle fait l'objet soit de sollicitation aux fins
d'appui à ses actions pour l'alternance, ou de contestation au motif
d'apporter du soutien à l'adversaire. On pouvait ainsi entendre de la
part de cette opposition un discours réfractaire comme en
témoigne les déclarations de Brigitte Adjamagbo-Johnson,
coordonnatrice de la C14 au sujet de l'Organisation Internationale de la
Francophonie : « La coalition a décidé de ne pas
rencontrer la mission de l'OIF 153 »,
alors que cette mission venait simplement en rescousse à la
situation d'embrasement qui avait cours. De même, l'opposition
togolaise
l'avons souligné un peu plus haut à travers la
lecture de la situation à travers le spectre du courant réaliste
des relations internationales.
151 Un débat général sur
la vie politique, économique, sociale et culturelle du pays,
sanctionné par une déclaration de politique
générale ; la mise en place de nouvelles institutions ; la
constitution d'un gouvernement de transition dirigé par un Premier
ministre issu de la C N ; la mise en place dun organe
législatif de transition et des organes de contrôle des futures
élections et l'élaboration d'un calendrier électoral.
152 Cf. (Accord du 12 juin entre le
gouvernement et le COD I), La Nouvelle Marche, n° 3544, 18
juillet 1991, p. IV; sur les principaux points de ces accords, cité par
J. R. HEILBRUNN et C. M. TOULABOR, «
Une si petite démocratie pour le Togo... », Op
cit.
153 Cf. Le Changent N° 568 du
jeudi 12 Octobre 2017, Op cit.
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n'a pas ménagé la CEDEAO qui, de près
s'est proposée pour une issue à cette crise. Au même moment
on pouvait entendre une autre frange de cette opposition solliciter ouvertement
l'intervention de la communauté internationale, pensée quasiment
comme une panacée à la situation. Tikpi Atchadam, leader du PNP
dira sans détour au cours d'une conférence de presse que
« les togolais attendent un mot de la France. Elle a sa manière
d'apprécier les situations et le moment opportun, nous savons qu'elle va
réagir 154 ».
L'insuccès des stratégies de l'opposition togolaise peut donc
être tributaire de ces incohérences vis-à-vis du reste du
monde.
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