§2. L'INFLUENCE DU COMMUNAUTARISME
Il est de coutume de voir la communauté internationale
se mobiliser dans les Etats surtout en périodes de crises politiques.
Généralement ces interventions procèdent des organisations
internationales qui paraissent les plus à même d'intervenir dans
un Etat en vertu du principe de la souveraineté (internationale) des
Etats. Afin de mieux cerner la prérogative pour les organisations
internationales d'intervenir dans les Etats sous certaines conditions, il
importe de comprendre le cadre juridique qui fonde les actions de ces
organismes (A) avant d'étudier leurs actions dans le cas togolais
(B).
A. Le cadre normatif des organisations
internationales
Les organisations internationales sont des institutions
formées essentiellement par une union des Etats autour des objectifs
communs97. Elles sont à cet effet
fondées par un acte international qui peut prendre la forme d'une charte
ou d'un traité etc. Le model type d'organisation internationale
aujourd'hui reste indéniablement l'Organisation des Nations Unies
(ONU).
L'ONU regroupe la plupart des Etats du monde ; ce qui fait
d'elle la plus grande organisation internationale à ce jour. Elle a
été mise en place au lendemain de la seconde guerre mondiale en
substitution à la Société Des Nations qui s'est
montrée inefficace pour préserver la paix dans le monde. La
préservation et la consolidation de la paix sont donc les principales
missions de l'ONU, missions clairement définies aux termes de l'article
1er de sa Charte98. Cela sous-entend que les
organisations internationales, quelques soient les mobiles présidant
leur création, visent en dernier ressort à stabiliser les
relations entre Etats99. Ceci les amène
à oeuvrer en permanence en vue de maintenir la stabilité dans
leurs
97 « L'expression «organisation
internationale» s'entend d'une organisation intergouvernementale ».
Article 2, paragraphe i de la Convention de Vienne sur le droit des
traités.
98 « Les buts des Nations Unies sont
les suivants : 1. Maintenir la paix et la sécurité
internationales et à cette fin : prendre des mesures collectives
efficaces en vue de prévenir et d'écarter les menaces à la
paix et de réprimer tout acte d'agression ou autre rupture de la paix,
et réaliser, par des moyens pacifiques, conformément aux
principes de la justice et du droit international, l'ajustement ou le
règlement de différends ou de situations, de caractère
international, susceptibles de mener à une rupture de la paix
»
99 Considérée bien entendu dans
une perspective libérale des relations internationale qui promeuvent la
paix internationale par le droit au travers des organisations internationale.
Cette précision est opportune d'autant plus que chez les
réalistes, l'adhésion d'un Etat à une organisation
internationale se fonde sur l'utilité matérielle ou symbolique
qu'il peut tirer et l'influence qu'il pourra avoir sur les autres membres de
l'organisation. C'est là l'hypothèse émise par le
néoréaliste Joseph Grieco pour explication de l'évolution
communautaire européenne des années 1980. Voir à cet
effet, D. Battistella, Théories des relations
internationales, 5ème éd. Paris, Les Presse de
Sciences Po, 2015.
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zones de couverture à travers des mesures prenant la
forme de résolutions ou de textes additionnelles aux chartes les
constituant. Ainsi, au nom du principe de l'effet relatif des traités en
droit international, tout Etat étant partie à un traité,
se lie à celui-ci par son
adhésion100. Autrement dit il accepte de se
subordonner aux décisions prises par l'organisation dont il est membre
parce que celles-ci seraient l'émanation de la volonté
collective, dégagée dans le cadre de la communauté. Ainsi
l'article 27 de la Convention de Vienne sur le droit des traités dispose
: « Une partie - un Etat en l'espèce - ne peut invoquer les
dispositions de son droit interne comme justifiant la non-exécution d'un
traité ». C'est dire que le principe de la supra
constitutionnalité s'impose aux Etats membres de l'institution
délibérante. Apparait alors en filigrane une érosion de
l'absolue souveraineté des Etats à l'ère de la
communautarisation des relations internationales. L'Etat peut dès lors
voir -quelque fois impuissant, son espace souverain
pénétré par une organisation internationale (dont il est
membre) dans le but de lui apporter un appui en vue de faire face efficacement
à une situation qu'il traverse, lui rappeler ses engagements dans
l'organisation ou tout simplement pour lui faire respecter un certain nombre de
normes transcendantales de la personne humaine.
Le Togo depuis son indépendance est membre à
part entière101 de l'Organisation des
Nations Unies (ONU), et par la suite de l'Union Africaine et de la
Communauté Economique Des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et de
bien d'autres encore. Toutes ces institutions sont constituées sur la
base des textes qui peuvent se montrer quelque fois contraignants parce que
touchant quelques matières substantiellement constitutionnelles. Au sein
de l'ONU par exemple, en plus de la Charte qui renferme des dispositions de
régulation des relations internationales existe la Déclaration
Universelle des Droits de l'Homme dont l'esprit se révèle dans
nombre de constitutions des Etats membres. L'Union africaine quant à
elle dispose également d'instruments juridiques à l'instar de son
acte constitutif et la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples.
Le dispositif juridique est plus complet au sein de la CEDEAO où en plus
de son traité, des protocoles additionnels sont pris pour renforcer le
dispositif institutionnel de ses interventions. Il s'agit notamment du
protocole N° A/SP1/12/01 sur la démocratie et la bonne gouvernance,
additionnel au Protocole relatif au mécanisme de Prévention, de
Gestion, de Règlement des
100 Article 26 de la Convention de Vienne sur le
droit des traités.
101 Il faut rappeler que depuis la fin de la
première guerre mondiale, le Togo est passé successivement sous
mandat de la SDN et tutelle de l'ONU. Ce qui le confiait un statut
différent de celui des colonies au sein de l'ONU quoiqu'il ne soit pas
encore un Etat au sens juridique du terme.
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Conflits, de Maintien de la Paix et de la
Sécurité. Comment donc l'international à travers le
communautarisme s'incruste-t-il dans le jeu politique togolais ?
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