B. Le pouvoir : l'appel en légitimation
Il est de coutume que tout gouvernement pour agir pleinement
sur la scène internationale, ait nécessairement besoin de la
reconnaissance de ses pairs. Il s'agit d'un acte de confiance adressé
audit gouvernement lui reconnaissant l'habilité à agir pleinement
dans les relations interEtatiques. A contrario, un gouvernement non reconnu par
les pairs ne peut survivre longtemps. Les exemples sont légions,
illustrant la mésaventure des gouvernements victimes du désaveu
de leurs homologues surtout en situation de crise.
Les différents gouvernements togolais fort
heureusement, n'ont jamais souffert de cet Etat de fait embarrassant.
Toutefois, on a pu noter dans le discours politique du pouvoir depuis l'amorce
de la démocratisation, des appels à l'endroit de la
communauté internationale tout aux allures d'invocations aux fins de
légitimation. En effet, dans toutes les périodes de crises
politiques connues par le Togo, le pouvoir de Lomé use subtilement du
discours politique pour s'arroger du soutien de la communauté
internationale. Les meilleures illustrations sont à retrouver dans la
récente crise politique née depuis le mois d'août 2017. En
effet, lorsque la crise a pris des proportions inédites qu'il eut fallu
la juguler impérativement, la communauté internationale a
proposé dans un premier temps le dialogue entre protagonistes de la
crise qui sont d'un côté le pouvoir et de l'autre la coalition des
quatorze partis politiques de l'opposition (C1465).
Le gouvernement a accueilli très favorablement cette proposition comme
prémices de solution de sortie de crise. Et lorsque plus tard les
facilitateurs de ladite crise ont proposé la feuille de route
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65 Il s'agit d'une coalition de quatorze (14)
partis politiques de l'opposition en abrégé C14, former aux
lendemains de la grande manifestation du 19 Août 2017 visant à
collectiviser le combat pour l'alternance démocratique au Togo. Il se
compose des partis suivants : PNP, ANC, ADDI, CAR, CDPA, Togo autrement,
Santé du Peuple, MCD, FDR, le Parti des Togolais DSA, les
Démocrates PSR UDS Togo.
66 Il s'agit d'un plan de sortie de crise
adopté lors du 53ème sommet des Chefs d'Etats et de
gouvernement de la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de
l'Ouest (CEDEAO). Il recommande principalement, l'amélioration du cadre
électoral pour permettre des législatives le 20 décembre
2018, la recomposition de la cour constitutionnelle, la limitation à
deux du mandat présidentiel, le mode de
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devant permettre à terme, la mise en oeuvre des
réformes politiques et institutionnelles pour une sortie pacifique et
définitive de la crise, l'Etat togolais 67
s'est montré une fois encore en bon élève, observant
religieusement les recommandations faite par les facilitateurs. Ainsi a-t-on pu
entendre les hommes politiques de la majorité présidentielle
défendre ardemment la date du 20 décembre 2018 comme la
panacée proposée par la « légendaire »
communauté internationale et dont il fallait absolument se conformer.
En somme, l'on peut soutenir à bon droit que la
communauté internationale dans le discours officiel du Togo est
excipée toutes les fois que son immixtion peut donner à des
soutiens. Ainsi, que ce soit avec le sommet sur la sécurité
maritime 68 ou dans le cadre du Plan National de
Développement69 (PND), le Togo a
multiplié des opérations de charme partout dans le monde à
travers une diplomatie offensive en vue de faire venir les investisseurs
étrangers. En témoigne la tenue du sommet UE-Togo les. En clair,
que ce soit du côté de l'opposition togolaise ou de la mouvance
présidentielle, la communauté internationale est l'objet d'une
sorte d' « instrumentalisation » dans l'atteinte des objectifs
politiques des acteurs en jeu. « Il y a donc lutte permanente pour
imposer des qualifications des faits qui soient valorisante pour son propre
camp, et dévalorisante pour le camp adverse
»70. C'est dans cette logique
qu'il faut comprendre également les griefs portés contre la
communauté internationale.
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