PARAGRAPHE II : LE RôLE NON NEGLIGEABLE DU PRESIDENT
DE LA
REPUBLIQUE
Le Président de la République, élu de la
nation toute entière et incarnation de l'unité
nationale447, dans cette société camerounaise aussi
complexe que diversifiée, s'avère être un artisan majeur de
l'intégration politique. Ceci à travers un usage utile de son
pouvoir discrétionnaire de nomination (A), qu'il met au désormais
au service de l'équilibre de la représentation des grands
ensembles sociologiques au sein de l'Etat (B).
445 Il y a exception d'inconstitutionnalité lorsque la
question d'inconstitutionnalité est soulevée devant un juge
ordinaire à l'occasion d'un procès civil, administratif,
commercial ou autre et est tranchée par lui - même. La
décision rendue a un effet inter partes (ne vaut que pour les
parties). A ne pas confondre avec la question préjudicielle où le
juge saisit de la question d'inconstitutionnalité sursoit a statuer et
saisit le juge constitutionnel pour trancher avant la reprise du procès
ordinaire. Voir Philippe ARDANT, Institutions politiques
et droit constitutionnel, Paris, LGDJ, 2001, p. 13.
446 Par la décision n° 001/02 - 03 du 28
novembre 2002, la Cour Suprême statuant en tant que Conseil
constitutionnel a déclaré non conforme à la Constitution
les dispositions du règlement intérieur de l'Assemblée
Nationale (alinéas 2,3,4,5,6,7 de l'article 3 et les articles 5,6,7
nouveaux et 10 in fine de la loi n° 2002/5 du 22 novembre
2002).C'est la première et la seule fois que les dispositions d'une loi
sont déclarées inconstitutionnelles au Cameroun.
447 Voir al.2 de l'article 5 de la Constitution du 18
janvier 1996.
Le pluralisme au Cameroun
A - UN USAGE UTILE DU POUVOIR DISCRETIONNAIRE DE
NOMINATION
Dans la pratique, l'exercice du pouvoir discrétionnaire
de nomination du Président de la République au Cameroun se
caractérise par deux traits majeurs : un pouvoir affranchit de
l'arbitraire (1) et un pouvoir au service de l'intégration nationale
(2).
1 - Un pouvoir discrétionnaire affranchit de
l'arbitraire
Défini comme un pouvoir reconnu à une
autorité administrative lui conférant le droit de prendre des
décisions ou de s'opposer à la prise de certaines
décisions, en ayant une certaine liberté
d'appréciation448, le pouvoir discrétionnaire de
nomination, notamment celui du président de la République peut
être un « pouvoir d'entérinement
»449 ou un « pouvoir pur de nomination
»450. Il ne saurait en aucun cas devenir arbitraire,
surtout pas dans une société comme celle camerounaise où
la gestion politique des ressources humaines suppose une « approche
rationnelle, prudente, subtile, lucide et avisée
»451. Outre, c'est un pouvoir qui reste «
encadré par la légalité »452.
En nommant les membres du gouvernement sur proposition du
Premier Ministre453, le Président de la République au
Cameroun tient compte d'une part des critères technocratiques et
méritocratiques de compétences, de références
académiques et d'expérience et d'autre part de l'origine
géographique. Le but poursuivi est la promotion de l'intégration
régionale.
2 - Un pouvoir discrétionnaire au service de
l'intégration nationale
Au Cameroun, le pouvoir discrétionnaire de nomination
du président de la République est un puissant instrument au
service de l'intégration nationale454.C'est un outil efficace
contre la marginalisation et les exclusions455.Il l'utilise pour
faire en sorte que les
448 Jean GATSI, Dictionnaire juridique,
op.cit., p. 246.
449 Benoit MONTAY, Le pouvoir de
nomination de l'exécutif sous la Vème
République : de la compétence liée au pouvoir de
patronage, mémoire de droit public approfondi, Université
Panthéon-Assas Paris II, 2013,p. 49.
450 Ibid.
451 Narcisse MOUELLE KOMBI, La
démocratie dans la réalité camerounaise, op.cit.,
p.291.
452Benoit MONTAY, Le pouvoir de
nomination de l'exécutif sous la Vème
République : de la compétence liée
au pouvoir de patronage, op.cit.,p. 41.
453 Voir al.1 de l'article 10 de la Constitution du 18
janvier 1996.
454Pour Paul BIYA, l'intégration nationale est
l'étape suprême de l'unité nationale. Voir Narcisse
MOUELLE
KOMBI, La démocratie dans la
réalité camerounaise, op.cit., p. 278.
455 Ibid., p. 292.
Le pluralisme au Cameroun
principales composantes sociologiques se retrouvent au sein
des principales structures politiques, administratives et économiques de
la nation, car au Cameroun, chaque groupe ethnique, tribu, clan, village, et
parfois même grande famille aspire à une visibilité
sociopolitique ou à une représentation dans les hautes instances
politiques, gouvernementales et administratives de l'Etat456.
Ainsi, la présence au sein des organes du pouvoir de
l'Etat d'élus et d'élites reflétant le pluralisme ethnique
illustre ce souci de promouvoir l'équilibre de la représentation
des grands ensembles sociologiques.
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