n En principe, un employeur doit informer et consulter ses
travailleurs quand il compte introduire dans l'entreprise des nouvelles
technologies qui risquent d'avoir des conséquences sociales (perte
d'emploi). Afin de s'assurer qu'il le fasse, une protection contre le
licenciement a été mise en place.
Si l'employeur ne le fait pas, il ne pourra pas licencier les
travailleurs, sauf pour des motifs étrangers à l'introduction de
cette nouvelle technologie, conformément à l'article 6 de la CCT
n°39 du 13 décembre 1983 concernant l'information et la
concertation sur les conséquences sociales de l'introduction des
nouvelles technologies.83
En ce qui concerne la sanction en cas de licenciement
irrégulier, il sera en outre, redevable d'une indemnité de
protection spécifique égale à 3 mois de la
rémunération brute du travailleur.
n Le règlement de travail est, en principe,
élaboré au sein du conseil d'entreprise (CE). S'il n'y a pas de
CE, il est élaboré par le délégué syndical.
S'il n'y a pas de délégué syndical, l'employeur doit
l'élaborer en se basant sur les observations de ses travailleurs dans un
registre ad hoc conformément à l'article 12 de la loi du
8 avril 1965 instituant les règlements de travail.
81 Ibidem, p. 628.
82 Ibidem, p. 629.
83 CCT n°39 du 13 décembre 1983
concernant l'information et la concertation sur les conséquences
sociales de l'introduction des nouvelles technologies. Disponible sur :
http://www.cnt-nar.be/CCT-COORD/cct-039.pdf
30
Ainsi, l'employeur ne peut pas licencier le travailleur parce
qu'il aurait indiqué certaines observations dans ce registre ad
hoc, sauf pour des motifs étrangers à celles-ci, en vertu de
l'article 12quater de cette loi.
Dans la négative, l'employeur est redevable d'une
indemnité forfaitaire de protection spécifique égale
à 6 mois de la rémunération brute du travailleur. Par
cette protection, on veut s'assurer que les travailleurs osent faire valoir
leurs observations sur le règlement de travail.84
n En vertu de la CCT n° 24 du 2 octobre 1975 et de
l'arrêté royal du 24 mai 1976, l'employeur doit, en principe,
informer et consulter les représentants du personnel, ainsi que le
directeur du service subrégional de l'emploi du lieu où est
située l'entreprise, avant de procéder à un licenciement
collectif quand il occupe plus de 20 travailleurs au sein de cette
dernière.
Dès lors, une protection spécifique contre le
licenciement est prévue afin de contraindre l'employeur sur le plan
procédural, à procéder effectivement à
l'information et à la consultation des représentants du
personnel, conformément aux prescrits de loi Renault du 13
février 1998. Ainsi, lorsque l'employeur n'a pas procédé
à la consultation des travailleurs et décide de les licencier,
ceux-ci pourront s'y opposer et demander leur réintégration. Dans
ce cas, l'employeur peut soit accepter et reconnaître qu'il n'a pas
respecté la procédure d'information et de consultation des
travailleurs, et reprendre le processus ab initio.
A contrario, s'il n'accepte pas, il devra donc payer
l'indemnité de protection de spécifique en vertu de la CCT
n° 10 du 8 mai 1973 (modifiée plusieurs fois), sauf s'il prouve
qu'il a licencié les travailleurs concernés pour un motif autre
que celui lié à l'objet de la concertation (licenciement
collectif pour des raisons d'ordre économique ou
technique).85
Par ailleurs, dans le but de protéger certaines
catégories de travailleurs dans l'exercice de leurs mandats, le
législateur a institué certaines protections spécifiques
:
n La protection contre le licenciement des
délégués du personnel et des candidats
délégués au CE et au CPPT selon la loi du 19 mars 1991
portant un régime de licenciement particulier pour les
délégués du personnel au CE et au CPPT ainsi que pour les
candidats délégués du personnel.
L'article 4 prévoit que préalablement au
licenciement d'un délégué du personnel pour motif grave,
l'employeur doit informer le délégué du personnel, son
organisation syndicale représentative et solliciter l'autorisation du
tribunal de travail compétent.
L'article 3 quant à lui, précise que
préalablement à tout licenciement pour des raisons d'ordre
économique ou technique, l'employeur doit solliciter l'autorisation de
la commission paritaire compétente. La protection du
délégué du personnel contre le licenciement court pendant
toute la durée de son mandat (4 ans). Au sens des articles 14 et 15 de
cette loi, le délégué du personnel licencié peut
demander à l'employeur sa réintégration dans l'entreprise
dans un délai de 30 jours suivant la date de notification du
licenciement, ou s'abstenir de le faire.
Si le travailleur ne sollicite pas sa
réintégration, l'employeur doit lui payer, conformément
à l'article 16, une indemnité forfaitaire de protection
liée à son ancienneté :
- 2ans lorsque le travailleur compte moins de 10 ans de service
dans l'entreprise ; - 3 ans lorsqu'il compte de 10 à moins de 20 ans de
service dans l'entreprise ; - 4ans lorsqu'il compte 20 ans de service ou plus
dans l'entreprise.
A contrario, si le travailleur sollicite sa
réintégration mais que l'employeur refuse de le reprendre
à son service, le travailleur a droit non seulement à
l'indemnité forfaitaire liée à son ancienneté, mais
aussi à une indemnité égale à la
rémunération pour la période restant à courir
jusqu'à la fin du mandat en vertu de l'article 17 de cette loi.
84 STEVE GILSON, FRANCE LAMBINET, op.cit.,
p. 632.
85 JACQUES CLESSE, FABIENNE KEFER, op.cit.,
pp. 138 - 143.
31
Il faut par ailleurs souligner qu'au sens de l'article 17,
§ 1er de cette même loi, cette indemnité de
protection étant la plus lourde financièrement, n'est pas
cumulable avec l'indemnité de rupture (indemnité compensatoire de
préavis), ce qui constitue un cas exceptionnel et rare, puisqu'en
principe, il est admis que les deux indemnités sont parfaitement
cumulables.86
n La protection contre le licenciement des
délégués syndicaux conformément à l'article
8 de la C.C.T n°5 du 24 mai 1971 concernant le statut des
délégations syndicales du personnel des entreprises : l'employeur
ne peut pas licencier le délégué syndical pour des motifs
inhérents à l'exercice de son mandat syndical. En cas de
licenciement pour motif grave, la délégation syndicale doit
être immédiatement informée.
Dans les autres cas, la délégation syndicale et
l'organisation représentative des travailleurs qui a
présenté la candidature de ce dernier doivent être
informées. Si l'organisation syndicale refuse le licenciement, le bureau
de conciliation de la commission paritaire doit être saisi ; à
défaut de décision unanime de celui-ci dans les 30 jours, la
question doit être soumise au tribunal du travail. La protection court
durant toute la période du mandat (4 ans). En cas de licenciement
irrégulier, l'employeur est redevable d'une indemnité forfaitaire
de protection égale à un an de la rémunération
brute du délégué syndical.
Cette indemnité de protection spécifique est
cumulable avec l'indemnité de rupture prévue à l'article
39 de la loi du 3 juillet 1978. Toutefois, elle n'est pas due lorsque le
délégué syndical bénéficie d'une autre
indemnité de protection spécifique en vertu de la loi du 19 mars
1991.87
n La protection contre le licenciement des
représentants des travailleurs au comité d'entreprise
européen conformément à l'article 9 de la loi du 23 avril
1998 portant des mesures d'accompagnement en ce qui concerne l'institution d'un
comité d'entreprise européen : ceux-ci bénéficient
du régime de protection spécifique contre le licenciement des
délégués du personnel prévu par la loi du 19 mars
1991. En ce qui concerne la protection, celle-ci débute le 3ème
jour précédent leur désignation et se termine le jour
où leur mandat prend fin.88 C'est donc également une
indemnité de protection spécifique qui n'est pas cumulable avec
l'indemnité de rupture (indemnité compensatoire de
préavis).
Dans les trois cas susmentionnés, l'idée
défendue est que si les candidats ont peur du licenciement qui pourrait
être effectué par l'employeur, ils n'oseront pas se
présenter aux élections sociales, d'où la
nécessité de leur octroyer une protection spécifique
contre ce dernier.