8.1.9 La
théorie de l'attachement
La théorie de l'attachement nait des plumes de Bowlby
(1969), pour qui l'instinct qui conduit un bébé à
rechercher sa mère n'est pas celui de l'alimentation, dite pulsion orale
chez Freud, mais bien plutôt un instinct de protection satisfaisant un
besoin de sécurité à travers la relation à autrui,
et notamment sa figure d'attachement. Elle s'articule de la manière
suivante :
Ø Consistance de la théorie
Bowlby (1969) met en évidence les mécanismes de
formation et de développement des relations
d'attachement intégrant les apports de la psychanalyse.
Influencée et guidée par une longue littérature
basée sur le lien mère-enfant et aux conséquences des
séparations précoces, elle stipule que : le lien
mère-enfant revêt une importance capitale. Il a ainsi
appréhendé ce lien selon une perspective évolutionniste
qui, selon Darwin (1859), la survie constitue l'objectif principal d'une
espèce. Les caractéristiques de l'espèce permettant
l'adaptation à l'environnement participent à sa
préservation durant le temps.
À partir de l'observation des réactions des
enfants au retour de la mère, Ainsworth (2017), à la suite de
Bowlby (1969), a établi une classification de l'attachement des
bébés en trois catégories : l'attachement insécure
ambivalent/anxieux, l'attachement insécure évitant, l'attachement
sécure.La principale caractéristique qui différencie un
attachement sécure d'un attachement insécure est liée au
fait que, dans le premier cas, le parent répond adéquatement aux
signaux et aux besoins de l'enfant qui n'a pas d'effort particulier à
faire pour être entendu. Dans le second cas, la réponse est soit
inadaptée, soit incohérente, ce qui conduit l'enfant à
devoir mettre en place des stratégies particulières
d'adaptation.
Dans la première catégorie, les interactions
entre la mère et son bébé se passent sans heurts mais sans
véritable partage affectif non plus. La mère est jugée
intrusive dans le sens où elle impose beaucoup sans tenir compte des
envies de son enfant (de faire par lui-même, de décider de ses
propres jeux, voire d'être laissé tranquille). Cette
volonté de projet éducatif ne respecte pas nécessairement
les capacités de l'enfant et conduit celui-ci à ne se sentir
aimé qu'en cas de réussite. Il apparaît néanmoins
comme un enfant aimable et éveillé.
Dans la deuxième catégorie, l'enfant
maîtrise ses émotions et est très indépendant avec
peu d'interactions avec sa mère (surtout pas affectives). Il arrive
même qu'il se montre plus allègre avec un inconnu et sa
mère se montrant souvent davantage intéressée par les
visiteurs que par son enfant. Quand il exprime de la détresse ou de la
douleur, sa mère détourne son attention. Les parents
évitants découragent les tentatives de rapprochement de
leur enfant et les parents anxieux découragent les tentatives
d'exploration.
Dans la troisième catégorie, les
bébés peuvent se montrer très inquiets lors de la
situation étrange et pleurer beaucoup. Mais les chercheurs ont
remarqué que le niveau de l'hormone de stress (cortisol) augmente peu
pendant l'expérience, comme si les pleurs fonctionnaient seulement tel
un signal devant assurer le retour de leur mère, et non comme
l'expression d'un désespoir profond.
Une quatrième catégorie a été
ajouté par Main (cité parAinsworth, 2017): l'attachement
désorienté/ désorganisé. Mais l'attribution d'une
des trois premières catégories reste préservée, par
rapport à celle dont l'enfant se rapproche le plus quand il n'est pas
totalement désorganisé. Chez les enfants
désorganisés/désorientés, des ruptures et des
incohérences apparaissent dans les stratégies d'attachement : ils
sont susceptibles de s'immobiliser comme pétrifiés de peur au
moment de rejoindre leur mère, qu'ils tentent parfois d'approcher de
biais, ne parvenant pas à maintenir leur attention au point de
paraître absents, confus, désorientés.
Ø Synthèse de la
théorie
Bowlby (1969) décrit l'attachement comme étant
le produit des comportements qui ont pour objet la recherche et le maintien de
la proximité d'une personne spécifique. C'est un besoin social
primaire et inné d'entrer en relation avec autrui. En ce sens, il
s'éloigne de Freud pour qui, les seuls besoins primaires sont ceux du
corps, l'attachement de l'enfant n'étant qu'une pulsion secondaire qui
s'étaye sur le besoin primaire de nourriture.
La fonction de l'attachement est pour John Bowlby une fonction
adaptative à la fois de protection et d'exploration. La figure
d'attachement constitue une base de sécurité pour l'individu en
situation de précarité. Prenant l'exemple du nouveau-né
qui dispose d'un répertoire de comportements instinctifs, tels que
s'accrocher, sucer, pleurer, sourire, qui vont pouvoir être
utilisés au profit de l'attachement. Après un certain nombre de
temps, une relation d'attachement, franche et sélective, à une
personne privilégiée s'établit. Bowlby (1969) parle alors
de monotropisme, c'est-à-dire d'une seule et unique relation.
Ø Limites de la théorie
Bowlby (1969) s'appuie sur une étude faite sur des
délinquants pour présenter sa théorie de l'attachement de
l'enfant qui cherche le confort et la sécurité. Bien que le
bébé soit prédisposé dès la naissance
à déployer des comportements instinctifs pour attirer sa
mère, ceux-ci n'ont pas toujours les effets escomptés. Ainsi,
certains enfants n'obtiennent pas de leur figure d'attachement une
réponse satisfaisante à leurs appels. Pour dissiper le malaise
à l'origine de ceux-ci, ils doivent élaborer des
stratégies plus efficaces pour obtenir les soins dont ils ont besoin. Au
fil du temps, ils intériorisent les régularités dans les
échanges et ajustent leurs comportements aux réactions du parent.
Ils modifient donc le niveau d'activation de leur système d'attachement
en fonction de ce qui est le plus favorable pour eux. Ce faisant, ils
développent des « stratégies secondaires d'attachement
» (par opposition aux « stratégies primaires » qui
correspondent aux comportements innés : Main, 1990).
Pour Bowlby (1969), la figure d'attachement est la personne
vers qui l'enfant dirige ses comportements d'attachement. La mère est
en général la première personne pour tenir cette fonction.
Sauf que, toute personne qui s'engage dans une interaction sociale avec
l'enfant et qui sera capable de répondre à ses besoins sera
susceptible de devenir une figure d'attachement. De ce fait, le Conseiller
d'orientation qui suit l'enfant dans une dynamique d'adaptation pourra
nettement être une figure nouvelle d'attache pour lui ; sans pour
autant avoir été son parent biologique, voire sa mère.
Ainsi, le principe d'une seule figure d'attachement privilégiée
apparaît caduc dans l'étude réalisée par Schaffer et
Emerson (1964). Qu'à cela ne tienne, cette théorie a ses raisons
d'être dans cette étude.
Ø Plus-value de la théorie
La théorie de l'attachement a toutes ses raisons
d'être dans l'étude des interactions sociales. Elle permet
d'être attentif aux besoins d'un individu. De ce fait, prêter
attention à la situation d'un adolescent ne conduit pas forcément
à faire de lui « un enfant gâté ».En
plus, Bowlby (1969) a montré une véritable balance dynamique
entre les comportements d'attachement et les comportements d'exploration : ce
n'est que quand ses besoins de proximité sont satisfaits que le sujet
peut s'éloigner de sa figure d'attachement pour explorer le monde
extérieur. L'attachement va bel et bien servir l'autonomie et non la
dépendance.
En définitive, l'exploration des théories
explicatives du sujet ont véritablement aidé à expliquer
ce sujet, car en constituent les fondements. Elles permettent de saisir
aisément le contenu de cette étude. Mais préciser aussi
son cadre et la méthodologie est aussi important.
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