B- La mise en oeuvre de la responsabilité du
transporteur
La mise en oeuvre de l`action en responsabilité du
transporteur appartient aux personnes prévues par l'AUCTMR et est
soumise à des délais de prescription et de réclamation
(1). L'AUCTMR détermine la compétence
surrectionnelle en cas de dommages aux marchandises (2).
1- Les titulaires et les délais de prescription de
l'action en responsabilité du transporteur et de la
réclamation
Les titulaires de l'action en responsabilité du
transporteur peuvent être des parties au contrat de transport routier de
marchandises comme des tiers à ce contrat. Les titulaires ayant un lien
contractuel avec le transporteur sont les ayants droit à la cargaison.
Les ayants droit à la cargaison sont l'expéditeur ou donneur
d'ordre et le destinataire ou réceptionnaire28. Leurs noms et
adresses sont mentionnés dans la lettre de voiture29. Ceux-ci
peuvent engager la responsabilité contractuelle du transporteur
dès lors qu'ils sont atteints d'un dommage. Au titre des dommages, ils
ne peuvent invoquer des pertes, des avaries et le retard.
26 Article 17.3 de l'AUCTMR.
27 Article 17.5 de l'AUCTMR.
28 I. DIALLO, « Etude de l'Acte Uniforme relatif
au Transport de Marchandises par Route », Ohada D-05-08, p.
18.
29 Article 4.1 de l'AUCTMR.
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L'AUCTMR n'évoque pas la situation particulière
des héritiers et ayant cause. Mais ceux-ci ayant acquis la
qualité de partie30 seront donc titulaires de l'action en
responsabilité du transporteur.
Les tiers aussi peuvent engager une action en
responsabilité du transporteur. C'est le cas du commissionnaire de
transport et de l'assureur qui ont préalablement indemnisé leur
client. Ils agiront par subrogation dans les droits de leur
client31.
Quant à la prescription, l'action en
responsabilité du transporteur se prescrit par un an à compter de
la date de livraison ou à défaut de livraison, de la date
à laquelle la marchandise aurait dû être livrée. Ce
délai est de trois (3) ans en cas de dol ou de faute équivalente
au dol. L'AUCTMR n'évoque pas l'interruption du délai de
prescription à l'instar du code de commerce
français32. Mais le caractère novaire d'une
reconnaissance portant sur la responsabilité de dommage pourrait
interrompre le délai et faire courir un nouveau délai d'une
même durée33.
Quant au délai de réclamation écrite,
celui-ci est de soixante (60) jours à compter de la date de livraison de
la marchandise ou, à défaut de livraison, six (06) mois à
compter de la prise en charge de la marchandise. La réclamation
étant une condition à l'action en responsabilité du
transporteur, la reconnaissance de responsabilité ne justifierait pas le
défaut de réclamation écrite. Après avoir
exposé les titulaires et les délais de prescription de l'action
en responsabilité du transporteur, il convient de déterminer la
compétence juridictionnelle en la matière.
2- La compétence juridictionnelle en cas de
dommages aux marchandises L'AUCTMR prévoit la
possibilité pour les parties d'attribuer la compétence
territoriale à une juridiction d'un commun accord. Mais à
défaut d'attribution conventionnelle de la compétence
territoriale à une juridiction, le demandeur a le choix entre la
juridiction du pays sur le territoire duquel le défendeur a sa
résidence habituelle, son siège ou la succursale ou l'agence
intermédiaire à la conclusion du contrat et la juridiction du
pays sur le territoire duquel la prise en charge de la marchandise a eu lieu ou
celle du pays sur le territoire duquel la livraison est
prévue34.
Alors lorsque les parties n'ont pas déterminé de
juridiction compétente, le demandeur a le choix entre trois (3)
juridictions compétentes qui peuvent être situées sur trois
pays différents. On pourrait trouver une telle multiplicité sans
intérêt si le transport est effectué à
l'intérieur d'un même pays et le transporteur y a sa
résidence habituelle, son siège principal ou la succursale ou
l'agence intermédiaire à la conclusion du contrat. Mais lorsqu'il
s'agit d'un transport inter-Etats, l'offre de diverses possibilités par
l'AUCTMR permettrait au demandeur
30 F. TERRÉ, P. SIMLER, Y. LEQUETTE, Droit
civil : Les obligations, Paris, Dalloz, 5ème édition, 1993,
pp. 355-356.
31 V. BOKALLI, D. SOSSA, Droit des contrats de
transport de marchandises par route, Juriscope. Bruylant, 2006, p. 115.
32 Article L133-6 du code du commerce
français.
33 TRANSPORTS TERRESTRES DE MARCHANDISES. In Revue
Judiciaire de l'Ouest, 1977-2. p. 105.
34 Article 27.1 de l'AUCTMR.
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de saisir la juridiction soit qui est la plus proche, soit qui
est la plus apte à résoudre un tel litige35. Cela
montre la souplesse du droit du transport et son aptitude à s'adapter
aux paramètres pratiques du litige. Mais le nombre de tribunaux
territorialement compétents peut conduire à des conflits de
compétence. La compétentes territoriales étant reconnue
à des multiples juridictions, il est donc nécessaire voir
impératif de résoudre les conflits de compétence entre
elles.
Des conflits peuvent naitre en cas de saisines
simultanées de plusieurs juridictions. Ces saisines peuvent être
volontaires et être l'oeuvre d'un même demandeur voulant multiplier
les chances d'obtenir réparation, elles peuvent aussi être
l'oeuvre de diverses ayants droit. C'est le cas de l'expéditeur qui
saisit la juridiction du pays sur le territoire duquel la prise en charge de la
marchandise a eu lieu alors que le destinataire a saisi celle du pays sur le
territoire duquel la livraison est prévue.
L'AUCTMR, pour résoudre les conflits de juridiction,
pose une règle d'antériorité de l'action ou du
jugement36. Ainsi une action pendante devant une juridiction
compétente ou un jugement prononcé par une juridiction
compétente fait obstacle à toute nouvelle action pour la
même cause entre les mêmes parties. Une telle solution
fondée sur l'antériorité de l'action du jugement est
conditionnée non seulement par une similitude de cause et une similitude
de parties mais par l'effet exécutoire du jugement sur le territoire du
pays où la nouvelle action est intentée. Alors il est possible de
saisir plusieurs juridictions compétentes d'une même action en
responsabilité notamment lorsque les saisines sont faites par
différents demandeurs. Des difficultés pourraient apparaitre
quant à la comparution du transporteur défendeur si sa
responsabilité est actionnée simultanément par le
destinataire dans un pays et l'expéditeur dans un autre pays. En plus
des règles émises par l'OHADA, l'UEMOA a aussi émis des
règles en matière de transport routier de marchandises.
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