Paragraphe II : La règlementation insuffisante de la
mise en oeuvre de la réparation par le transporteur
La réglementation de la mise en oeuvre de la
réparation due par le transporteur se trouve être lacunaire en ce
sens qu'elle ne prévoit qu'un seul mode de réparation à
savoir la réparation pécuniaire (A). On peut
essayer de combler ce vide en envisageant une réparation en nature due
par le transporteur d'où la perspective de réparation en nature
en cas de dommages causés par le transporteur (B).
157 Article 20.1 de l'AUCTMR.
158 Article 20.2 de l'AUCTMR.
159 Sauf de faute inexcusable ou de faute dolosive.
160 Article 3 de l'AUCTMR : il ne prévoit que deux parties
à savoir le donneur d'ordre et le transporteur.
47
A- Une réparation purement pécuniaire
Seule la réparation pécuniaire, autrement dit
les dommages-intérêts, est prévue par l'AUCTMR en tant que
mode de réparation, l'AUCTMR a exclusivement consacré les
dommages-intérêt (1). Ce choix ne fait pas
l'objet d'objection par le juge OHADA qui le confirme (2).
1- La consécration exclusive des
dommages-intérêts par l'AUCTMR
Les dommages-intérêts consistent à «
l'octroi d'une indemnité en argent » « en vue de
réparer le dommage subi par le créancier »161. En
d'autres termes, elle va consister « une somme d'argent, une
indemnité » appelée « dommages-intérêts
»162 afin de réparer le préjudice
causé.
Les dommages-intérêts sont consacrés en
droit OHADA dans le cadre des contrats de transport routier de marchandises par
les articles 18 et 19 de l'AUCTMR qui emploient les termes « payer pour ce
préjudice une indemnité »163 et « paie le
montant de la dépréciation »164. Ces articles
renvoient au paiement d'une indemnité pécuniaire, les
dommages-intérêts, quoiqu'elle soit limitée. Le
transporteur, en cas de responsabilité, est tenu de payer une
indemnité, une somme d'argent destinée à compenser le
dommage subi par le demandeur.
L'AUCTMR opte pour une réparation pécuniaire du
dommage par le transporteur à l'exclusion de la réparation en
nature165. « La réparation en nature consiste dans la
remise des choses en l'état ; elle efface le dommage
»166. Appliquée en cas de responsabilité du
transporteur, la réparation en nature consisterait pour le transporteur
à remplacer la marchandise atteinte de pertes ou d'avaries. Un tel mode
de réparation semble être exclu par l'AUCTMR qui ne
l'évoque à aucune de ses dispositions. Cela tend à
restreindre, sinon faire obstacle à un éventuel choix des
parties, ou uniquement de l'ayant droit, quant au mode approprié ou
souhaitable de la réparation. La réparation pécuniaire,
consacrée par l'AUCTMR à l'exclusion des autres modes de
réparation, fait l'objet de confirmation par le juge OHADA.
2- La confirmation par le juge OHADA
La préférence du législateur pour les
dommages-intérêts en cas de responsabilité du transporteur
est confortée par un assentiment des juges en la matière. En
effet, les jugements et arrêts en matière de contrat de transport
routier de marchandises rendus en application de l'AUCTMR prononcent des
dommages-intérêts à l'exclusion des réparations en
nature.
161 F. TERRÉ, P. SIMLER, Y. LEQUETTE, Droit civil :
Les obligations, Paris, Dalloz, 5ème édition, 1993, p.
439.
162 H. MAZEAUD, L. MAZEAUD et J. MAZEAUD, Leçon de
droit civil, Paris, Editions Montcherstien, 1978, p. 704.
163 Article 18.1 de l'AUCTMR.
164 Article 19.2 de l'AUCTMR
165 L'AUCTMR n'a pas prévu la possibilité pour le
transporteur d'une réparation du dommage en nature.
166 H. MAZEAUD, L. MAZEAUD et J. MAZEAUD, op.cit. p.
704.
48
Dans l'arrêt n°24 du 27 Avril 2006 de la cour
d'appel de Zinder167, celle-ci a sanctionné la
responsabilité du transporteur pour perte de marchandises au paiement
d'une somme d'argent, en l'espèce dix-sept mille six cent huit (17.608)
francs par carton de produits pharmaceutiques. Cet arrêt montre aussi
l'exclusion de la réparation en nature en cas de responsabilité
du transporteur en ce sens que, le demandeur en première instance ait
donné pour objet de sa demande le « remboursement en nature ou
à défaut le paiement de leur valeur », les juges en
première instance comme en appel ont prononcé des
dommages-intérêts. La cour d'appel n'offre pas le choix entre ces
modes de réparation, elle impose des dommages-intérêts.
Une telle réaction du juge est la conséquence de
la limitation du rôle du juge à la seule application des lois et
celui-ci ne peut faire obstacle à cette application168. Le
juge OHADA est ainsi réduit à appliquer les dispositions des
différents actes uniformes notamment l'AUCTMR. Alors l'AUCTMR n'ayant
pas offert la possibilité ni aux parties ni aux juges d'opter pour ou de
prononcer une réparation en nature, celui ne peut que prononcer des
dommages-intérêts. Cette restriction de la réparation due
par le transporteur à un seul mode de réparation mérite
d'être levée afin que cette réparation puisse être
aussi faite en nature d'où la perspective d'une réparation en
nature en cas de dommages causés par le transporteur.
|