Paragraphe II : Le problème de la corruption dans
les opérations de transport routier de marchandises
La corruption est un problème générique
qui n'épargne pas les opérations de transport routier de
marchandises. En matière de transport routier de marchandises, elle est
causée par diverses raisons et prend diverses formes
(A). Elle produit des effets sur l'application du droit du
transport routier et il convient de trouver, du moins tenter de trouver des
solutions (B).
A- Les raisons et les formes de la corruption dans le
transport routier de
marchandises
Diverses raisons sont à l'origine de la corruption dans
le transport routier de marchandises (1) et elle revêt
diverses formes dont il convient de présenter quelques-unes
(2).
1- Les raisons de la corruption dans le transport
routier de marchandises Plusieurs facteurs contribuent à
entretenir la corruption et ceux-ci sont relatifs aux parties au contrôle
à savoir le transporteur et les agents de contrôle. Certains sont
relatifs aux usagers, les transporteurs qui non seulement ignorent les normes
en matière de droit de transport130, mais aussi sont
confrontés au nombre excessif de postes de
contrôles131. Cette ignorance du droit du transport occulte
l'existence de recours face à des contrôles irréguliers. A
cela s'ajoute la lenteur des procédures notamment
douanières132. Tous ces facteurs peuvent amener le
transporteur à avoir recours à la corruption133 dans
le souci de rapidité et de préservation des marchandises.
Encore cette corruption pourrait impliquer ou serait
provoquée par des agents de contrôle134. Sans vouloir
justifier ou réfuter cette opinion, une telle attitude des agents de
contrôle qui sont les forces nationales135, serait une
130 É. FOKOU, « L'effectivité de l'Acte
Uniforme relatif au contrat de transport de marchandises par route : entre
avant-gardisme et passéisme socio-professionnel »,
Réflexions critiques sur l'appropriation sociale de l'AUCTMR et son
application par les juges africains, Québec, 2015, p. 14.
131 Observatoire de Pratiques Anormales, 25ème rapport
de l'Observatoire des Pratiques Anormales (OPA) : rapport annuel de
l'année 2015, 2016, p. 4.
132 Voir Hassane Maman ABDO, Rôle des infrastructures de
transport dans la construction de l'espace ouest-africain, p. 14.
133 Laboratoire d'études et recherches sur les
dynamiques sociales et le développement local, La corruption dans les
transports et la douane au Bénin, au Niger et au Sénégal,
Etudes et Travaux n° 41, 2005, p. 9.
134 Laboratoire d'études et recherches sur les dynamiques
sociales et le développement local, op.cit. p. 9.
135 Article 4 de la directive
n°08/20005/CM/UEMOA relative à la réduction des
points de contrôle sur les axes routiers inter-états de l'Union
Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA).
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conséquence de l'absence du contrôle de
marchandises par des fonctionnaires communautaires et de l'absence de
contrôle communautaire de ces agents. L'UEMOA en confiant la
plénitude du contrôle routier aux forces nationales ne permet pas
aux transporteurs de contourner ou de déjouer de telles pratiques par
des voies communautaires. Après avoir analysé les raisons qui
entretiennent la corruption, il convient de relever quelques formes qu'elle
revêt.
2- Quelques formes possibles de corruption
Sans plonger dans des jugements de valeur, on peut
évoquer quelques formes de corruption relevées en Afrique de
l'Ouest136. Elle pourrait prendre la forme de commission. Elle
consiste pour l'usager à récompenser l'intervention d'un
fonctionnaire pour lui avoir donné accès à un
bénéfice, à une exemption ou à une remise illicite.
Transposée au transport routier de marchandises, la commission
consisterait pour le transporteur à payer des sommes afin de
bénéficier d'exemptions de limitations de poids, de charge ou de
dimensions de la part d'agent de contrôle.
La corruption pourrait pendre également la forme d'une
rétribution indue d'un service public. Ici pour effectuer un acte
relevant de sa fonction, le fonctionnaire fait payer l'usager qui
réclame l'acte. Cela suppose un service officiellement gratuit ou dont
le coût est officiellement fixé. Ainsi le contrôle routier
effectué par les forces nationales et régi par la décision
n°15/2005/CM/UEMOA portant modalités pratiques d'application du
plan régional de contrôle sur les axes routiers inter-états
de l'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine n'implique aucune
somme à la charge de l'usager137. Alors la rétribution
indue consisterait pour l'agent de contrôle à exiger le paiement
d'une somme afin d'effectuer son contrôle alors que le contrôle
routier relève de ses fonctions. Le transporteur est ainsi contraint
à payer l'agent alors qu'aucune disposition ne l'en contraint.
La corruption peut aussi prendre la forme d'un tribut. Elle
consiste pour l'autorité à extorquer une somme sans qu'aucun
service ne soit vraiment fourni. Cette situation renvoie aux perceptions
illicites relevées par l'Office des Pratiques Anormales de
l'UEMOA138. A la différence de la rétribution indue
d'un service public, le tribut suppose une absence de service ou
d'intermédiation en échange du paiement. La corruption en
matière de transport routier de marchandises dont les raisons et les
formes ont été sus-examinées, produit des effets sur
l'application du droit du transport routier et il convient d'en rechercher les
solutions.
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